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1. Introduction et problématique

En France, la carrière d’enseignant-chercheur constitue le projet initial de nombre de docteurs (De Lassalle et Maillard, 1999 ; Erlich, 2000) et elle reste l’un de leurs principaux débouchés professionnels (Giret, 2005). À ce jour, les critères de recrutement restent centrés sur les activités de recherche, et intègrent peu l’autre aspect du métier, l’enseignement ; ce dernier est également peu pris en compte dans la carrière. Pourtant, et sans aucune formation initiale à l’enseignement, nombre de doctorants conduisent des travaux dirigés ou des travaux pratiques, et parfois même, donnent des cours magistraux lors de leurs dernières années de thèse. Leur formation pédagogique s’effectue alors sur le tas, par imitation d’enseignants plus expérimentés, ou au contraire par rejet de certains modèles subis durant les années d’études ; mais dans tous les cas, par tâtonnements. Durant une période que Kugel (1993) qualifie de survie, et qu’il estime pouvoir durer entre trois et cinq ans, ces enseignants débutants vont devoir affronter, seuls le plus souvent, les interrogations et les difficultés inhérentes au métier d’enseignant universitaire ; expérimenter et se constituer, toujours seuls, leurs compétences d’enseignant et leurs habiletés de pédagogue. Cependant, depuis quelques années, les choses évoluent en France : la reconnaissance du métier d’enseignant des enseignants-chercheurs fait l’objet de discussions, voire de propositions. Ainsi, quelques universités françaises ont créé des Structures universitaires de pédagogie (SUP) pour accompagner le développement professionnel des enseignants-chercheurs : elles proposent des formations à la pédagogie à ces jeunes doctorants à qui l’on a attribué des charges d’enseignement.

Nombre de travaux insistent sur l’importance de la prise en compte des conceptions dans les activités de formation et d’accompagnement pédagogique (Frenay, Noël, Parmentier et Romainville, 1998 ; Giordan, 1998 ; Loiola et Tardif, 2001 ; Marton et Säljö, 1984). Frenay (2006) considère qu’elles en sont un levier. D’autres, au contraire, avancent l’hypothèse qu’elles seraient en mesure de minimiser l’impact formatif (Grandtner, 2007 ; Vermetten, Vermunt et Lodewijks, 2002), voire d’être un obstacle dans le développement professionnel (Loiola, 2001). Notre objectif de recherche s’inscrit dans cette perspective en examinant les conceptions de l’acte d’enseigner et de l’acte d’apprendre, avant une formation à l’enseignement et à l’issue de celle-ci, pour en tirer parti dans le développement de nos activités d’accompagnement pédagogique. Cette recherche tente ainsi de dépasser le cadre habituel d’évaluation d’une formation généralement réalisée à partir de critères de satisfaction. En effet, d’une part, nous cherchons à connaître les effets ressentis immédiatement à l’issue d’une formation pédagogique par des jeunes enseignants universitaires qui ont choisi de se former à la pédagogie universitaire en France ; d’autre part, les effets ressentis touchent leurs conceptions de l’enseignement et de l’apprentissage.

Cet article est structuré en quatre parties. Dans un premier temps, nous présentons des éléments de la documentation scientifique dans le but de mieux appréhender les conceptions des enseignants universitaires. Après un exposé sur la formation offerte par l’Université de Bourgogne et utilisée dans notre étude, la deuxième partie est consacrée à la présentation de nos données et de nos choix méthodologiques pour étudier les effets subjectifs de cette formation à la pédagogie universitaire à propos des conceptions de notre public cible. Celui-ci est assez spécifique dans la mesure où il s’agit d’étudiants en cours de doctorat qui peuvent donner des cours, encadrer des travaux dirigés ou des travaux pratiques. Ils composent le corps des chargés de travaux pratiques et travaux dirigés (TP / TD). Dans la suite de cet article, nous pourrons également les nommer assistants pour aider un lectorat peu familier du contexte universitaire français. Nous présentons ensuite leurs conceptions types à l’entrée en formation et leur évolution au terme de la formation dans une troisième partie. Les résultats sont discutés dans la quatrième partie. Enfin, notre conclusion suggère des pistes d’orientation pour notre modèle de développement pédagogique.

2. Contexte théorique

À propos de l’apprentissage et de l’enseignement, prenant appui sur le travail réalisé sous la direction de Langevin (2007), nous avons retenu le sens de conception comme une attitude mentale qui permet à l’individu d’appréhender et d’interpréter la réalité. Les écrits scientifiques sur le sujet étant encore peu fixés, ce concept est utilisé ici dans une acception très large et renvoie aux modèles, implicites ou explicites, qu’utilise l’étudiant pour appréhender une situation. Inconscientes le plus souvent, ces conceptions se rapportent à la fois aux savoirs, aux aptitudes et aux représentations. Elles agissent comme des cadres de référence dans nos actions, donc également dans la construction des apprentissages. Ces conceptions de l’enseignement et de l’apprentissage ont fait l’objet de nombreuses recherches. Cependant, le plus souvent, celles qui concernent l’apprentissage ont été étudiées du point de vue des étudiants (Marton, Dall’alba et Beaty, 1993 ; Ramsden, 1992 ; Säljö, 1979), tandis que celles qui touchent à l’enseignement ont été examinées principalement auprès des enseignants (Fox, 1983 ; Gow et Kember, 1993 ; Prosser, Trigwell et Taylor, 1994 ; Ramsden, 1992 ; Samuelowicz et Bain, 1992).

2.1 À propos de l’apprentissage

La documentation scientifique sur les conceptions de l’apprentissage repose principalement sur des enquêtes qualitatives par entretiens. C’est sur la base de leurs résultats que plusieurs auteurs (Marton et collab., 1993 ; Ramsden, 1992 ; Säljö, 1979) proposent de catégoriser en six rubriques les types de conceptions qu’ils relèvent. Développées à partir des cinq catégories initiales de Säljö (1979), ces rubriques sont déterminées selon une hiérarchie allant de la simple accumulation de connaissances à la transformation personnelle de l’individu :

  1. apprendre, c’est augmenter ses connaissances (processus d’accumulation d’informations le plus souvent factuelles sans articulation les unes avec les autres et sans réflexion quant à leur utilisation) ;

  2. apprendre, c’est mémoriser et restituer (des faits et des informations dans un but précis, tel que passer un examen). À la différence de la première catégorie, il est fait mention ici de l’utilisation des connaissances ;

  3. apprendre, c’est appliquer des éléments d’information qui ont préalablement été stockés, en fonction de ses besoins actuels ou futurs ;

  4. apprendre, c’est comprendre la signification des concepts afin de percevoir mieux la réalité ;

  5. apprendre, c’est interpréter les connaissances de façon nouvelle, voir les choses de manière différente, restructurer sa pensée, élaborer des points de vue ;

  6. apprendre c’est évoluer : un processus au cours duquel l’apprenant se transforme, voit le monde différemment, et se perçoit bien comme ayant évolué.

Les niveaux 1 à 3 définissent l’apprentissage comme essentiellement quantitatif, orienté vers l’acquisition et la reproduction. Ils renvoient plutôt aux modèles transmissifs de l’apprentissage, où la complexité du processus n’est pas prise en compte. Dans ces modèles, les étudiants se concentreraient, par exemple, sur la reproduction d’un savoir, sa restitution et son application, et développeraient alors un apprentissage dit en surface (Kember, 1997). À l’opposé, les niveaux 4 et 5 déterminent l’apprentissage comme la construction de sens, permettant à l’apprenant d’intégrer de nouvelles informations au sein de son propre cadre conceptuel. Le postulat est que les savoirs ne se transmettent pas, mais qu’ils se construisent par l’activité de l’apprenant. Il est communément admis qu’une approche de l’apprentissage de ce type, dit en profondeur, est plus susceptible d’être liée à la qualité des résultats d’apprentissage qu’une approche en surface.

Finalement, selon ses conceptions de l’apprentissage, un enseignant peut choisir d’adopter une méthode d’enseignement avec l’intention de transmettre l’information aux étudiants ou, à l’inverse, une méthode d’enseignement qui les aide à mieux percevoir leur réalité, à changer leur vision du monde ou des phénomènes qu’ils étudient.

2.2 À propos de l’enseignement

Au-delà d’une définition primaire – à savoir qu’il s’agit d’une activité intentionnelle, qui se déroule en contexte et qui vise une transformation de l’apprenant – il existe des intentions divergentes quant aux buts poursuivis par l’enseignement. Des études ont visé à inventorier puis catégoriser ces conceptions de l’enseignement (Fox, 1983 ; Gow et Kember, 1993 ; Kember et Kwan, 2000 ; Prosser et collab., 1994 ; Ramsden, 1992 ; Samuelowicz et Bain, 1992). Malgré la diversité des typologies exposées, il est possible de les rassembler en un large éventail qui irait des enseignants qui conçoivent la situation d’enseignement-apprentissage comme un processus de transmission d’un savoir (enseignement transmissif), à ceux qui la conçoivent comme une aide pour que les étudiants apprennent (enseignement facilitateur) (Kember et Kwan 2000 ; Loiola et Tardif, 2001). Kember (1997) adopte l’idée d’un continuum qui va d’une approche centrée sur le professeur et orientée vers le contenu (Teacher-centered / content-oriented) à une approche centrée sur l’étudiant et orientée vers ses apprentissages (Student-centered / learning-oriented).

Dans le premier cas, approche centrée sur le professeur et orientée vers le contenu (Kember, 1997), la situation d’enseignement-apprentissage est vue comme une transmission (de savoirs, méthodes, outils), et les étudiants, plutôt considérés comme des récepteurs passifs dont on attend qu’ils reproduisent correctement les informations livrées par l’enseignant. Ici, les apprentissages des étudiants sont directement liés à leurs capacités intrinsèques, à leur travail ou encore à leur motivation. Les enseignants qui conçoivent l’enseignement comme une transmission des connaissances sont plus susceptibles d’adopter une approche centrée sur l’enseignement (Kember, 1997 ; Kember et Kwan, 2000 ; Prosser et collab., 1994 ; Samuelowicz et Bain, 1992). Dans le second cas, à l’autre extrême du continuum, avec l’approche centrée sur l’étudiant et orientée vers ses apprentissages (Kember, 1997), les étudiants sont considérés comme actifs, responsables de leurs apprentissages, et la situation d’enseignement-apprentissage est vue comme un accompagnement pour faciliter le développement intellectuel et l’autonomie de l’étudiant. Les enseignants qui conçoivent l’enseignement de cette manière sont plus susceptibles d’adopter une approche centrée sur l’étudiant (Kember, 1997 ; Kember et Kwan, 2000 ; Prosser et collab., 1994 ; Samuelowicz et Bain, 1992).

Il pourrait s’avérer réducteur de résumer les diverses conceptions de l’enseignement supérieur à ces deux extrêmes : l’un davantage magistro-centré et l’autre, pédo-centré (Frenay, 2006). D’autant qu’un enseignant peut choisir de varier ses méthodes et stratégies pédagogiques d’une situation d’enseignement-apprentissage à une autre (Samuelowicz et Bain, 1992 ; Trigwell et Prosser, 1996). Pourtant, lors d’une étude qualitative par entretiens avec 17 enseignants de disciplines variées, Kember et Kwan (2000) ont montré que les conceptions des étudiants restent stables, même lorsque les méthodes d’enseignement changent, et qu’une approche centrée sur l’enseignant et le contenu prédomine chez les enseignants universitaires. Ce que les auteurs expliquent par : 1) une absence de formation pédagogique, 2) leur expérience d’étudiant et 3) les fortes influences des contextes disciplinaires et institutionnels.

Kember et Kwan (2000) concluent qu’il est peu probable que se produisent d’importantes modifications de la qualité de l’enseignement et de l’apprentissage sans modifications de la conception des enseignants. Selon Gibbs et Coffey (2004), les formations pédagogiques proposées aux enseignants universitaires amènent ou renforcent une approche plus centrée sur l’étudiant. Toutefois, il semble qu’il y ait encore peu de preuves que les formations pédagogiques modifient les conceptions des enseignants universitaires expérimentés (Norton, Richardson, Hartley, Newstead et Mayes, 2005 ; Postareff, Lindblom-Ylanne et Nevgi, 2007). Notre recherche s’inscrit dans cette perspective, mais en se focalisant sur les assistants. Il s’agit en effet d’un groupe particulier : à la fois étudiants avancés et jeunes enseignants universitaires, très peu, voire pas du tout expérimentés, dont une grande majorité se destine à la carrière d’enseignant-chercheur, ils ont été peu étudiés (Buelens, Clement et Clarebout, 2002). En nous intéressant à ce public, nous cherchons à savoir si une formation pédagogique en début de carrière peut avoir un impact : Les conceptions de l’acte d’apprendre et de l’acte d’enseigner peuvent-elles être modifiées à l’issue d’une formation pédagogique ? Dans ce but, nous nous appuyons sur des données recueillies dans le cadre d’une formation de l’Université de Bourgogne.

3. Méthodologie

Depuis 2005, le Centre d’innovation pédagogique et d’évaluation (CIPE) de l’Université de Bourgogne propose une formation au métier d’enseignant à tous les assistants qui le désirent. La formation Initiation au métier d’enseignant dans l’enseignement supérieur (IMEDES) a été conçue après : 1) une recension des écrits ; 2) une observation des propositions offertes aux assistants par les centres de pédagogie québécois, belges et suisses ; et enfin 3) d’après le référentiel de compétences de l’enseignant universitaire, établi en 1999 par l’Association internationale de pédagogie universitaire. Cette formation dure quatre jours et elle se décline en deux périodes distinctes, afin que les assistants puissent transposer dans leur réalité professionnelle les principes vus en formation (Knight, 2002). Les groupes sont interdisciplinaires afin de favoriser les échanges et de partager des expériences d’enseignement variées. Les objectifs d’apprentissage visent à ce qu’à l’issue de la formation, chaque participant soit en mesure de planifier, de réaliser et d’évaluer ses activités d’enseignement en adéquation avec les besoins des étudiants. La formation vise à développer des connaissances et compétences en pédagogie, ces dernières étant perçues comme des aides pour mieux enseigner, c’est-à-dire pour améliorer la réussite des étudiants et les conditions de travail de l’enseignant. L’idée en filigrane est d’améliorer les pratiques d’enseignement, en aidant ces jeunes enseignants universitaires à se constituer un référentiel de pratiques, mais aussi en les informant sur les effets de leur pratique. Il importe qu’ils puissent analyser leurs actions avec l’éclairage de savoirs issus de la recherche, et prendre leur propre action comme objet de réflexion selon la démarche de la pratique réflexive définie par Schön (1994).

Au cours de la première journée, les théories de l’éducation sont expliquées et les différentes approches possibles de l’enseignement et de l’apprentissage sont mises en lumière (Parmentier, 1999b). Chaque participant est ainsi en mesure de confronter son approche de l’enseignement et de l’apprentissage aux théories existantes. Le modèle de développement de la formation qui est présenté s’inspire de l’alignement constructiviste (Biggs, 1996), qui invite à la cohérence entre méthodes, outils et évaluation. Ce modèle permet d’annoncer et d’expliquer les étapes suivantes.

La seconde journée est consacrée à la préparation du cours. Des références à la psychologie cognitive permettent d’expliquer l’apprentissage, ses trois domaines et ses différents niveaux. Les travaux scientifiques sur la motivation à apprendre et l’engagement dans l’apprentissage sont également présentés. L’importance de la planification est soulignée et, au cours de sessions individuelles, les participants travaillent à définir leurs objectifs d’apprentissage pour l’un de leurs enseignements, et ils réfléchissent en groupe à la constitution d’un plan de cours.

Consacrée à l’animation du cours, la troisième journée de formation aborde successivement les différentes méthodes pédagogiques, leurs avantages et leurs limites. L’accent est mis sur la grande variété existante et sur les critères de choix. Cette journée est aussi l’occasion d’aborder les habiletés communicationnelles.

Enfin, la dernière partie est consacrée à l’évaluation des apprentissages des étudiants. Les formateurs invitent les participants à s’interroger sur les questions que pose l’évaluation des apprentissages : Quelles preuves d’apprentissages attendons-nous ?Quels outils nous permettraient d’obtenir les preuves de ces apprentissages ? et Comment pouvons-nous interpréter ces preuves ? Des éléments de docimologie illustrent les questions et les biais posés par l’évaluation des productions des étudiants.

Globalement, la formation est axée sur la participation active par une alternance d’échanges d’expériences et de pratiques, d’éclairages théoriques et d’activités en petits groupes. Elle est déployée à partir des situations de travail effectives des participants et elle privilégie l’ajustement aux problématiques individuelles, conformément aux principes issus de l’andragogie. La formation, non obligatoire, est gratuite, ne donne pas lieu à une décharge d’heures d’enseignement et n’est pas créditée en European Credits Transfer System (ECTS) pour l’obtention du doctorat. Selon le processus de Bologne mis en oeuvre en Europe, les crédits ECTS représentent, sous la forme d’une valeur numérique affectée à chaque unité de cours, le volume de travail que l’étudiant est censé fournir pour chacune d’entre elles (cours magistraux, travaux pratiques, séminaires, travail personnel, examens ou autres modes d’évaluation).

3.1 Sujets

Dans notre étude, ont été pris en compte 55 assistants ayant suivi l’intégralité de la formation et rempli les trois formulaires (sur les 60 personnes ayant suivi la formation, soit 92 %). En effet, nous souhaitions appréhender les éventuels changements de conceptions en nous appuyant sur une mesure initiale, c’est-à-dire avant l’entrée en formation, et sur une mesure finale, c’est-à-dire à l’issue de la formation. On compte 25 hommes et 30 femmes ayant obtenu leur baccalauréat (diplôme de fin d’études secondaires) entre 1989 et 2001 : tous sont doctorants ou docteurs, à l’exception de deux personnes inscrites en Master. On compte 10 assistants issus des sciences et techniques (18 %) ; 21, des secteurs des sciences de la vie et de la terre, et de la santé (médecine et pharmacie) (38 %) ; et 24, des secteurs de sciences humaines, langues et droit (44 %).

Aucun des participants déclare ne pas vouloir devenir enseignant-chercheur. Parmi ces 55 jeunes enseignants universitaires, 76 % ont le projet de devenir enseignants-chercheurs (42 personnes), 18 % ne savent pas encore si tel est leur projet (10 assistants) et trois n’ont pas répondu à cette question. Parmi les premiers, l’intérêt pour l’enseignement est notable. En effet, 15 personnes affirment être plus intéressées par l’enseignement ; 13, par l’enseignement et la recherche, contre seulement 11 qui se disent uniquement intéressés par la recherche (trois personnes n’ont pas explicité leurs motivations).

Tous les participants donnent des cours l’année de la formation ou en ont donné l’année précédente (14 ont déjà exercé de telles fonctions avant la formation, soit 25 %). Au final, seuls 10 n’ont jamais eu une expérience d’enseignement quelle qu’elle soit (tutorat à l’université, soutien scolaire, etc.). Alors que leur statut ne le prévoit pas, 20 personnes assument pourtant des cours magistraux (36 %). Vingt-huit participants donnent au moins un cours qu’ils ont suivi comme étudiants (50 %). Par ailleurs, seulement 20 participants (36 %) assurent des cours organisés et préparés par d’autres (professeur responsable du cours, précédents chargés de cours). Enfin, sur 55 personnes, 42 participants (76 %) déclarent avoir déjà rencontré l’équipe pédagogique pour discuter de leurs enseignements.

3.2 Instrumentation

Pour cette formation, un recueil d’informations est systématiquement organisé. Il faut remplir un formulaire d’inscription, qui comporte des indications sur le parcours de formation des participants et sur la nature de leurs enseignements à l’université (nombre d’heures, matières, niveaux d’étude). Le parcours d’enseignement est détaillé : expérience, mode de recrutement, relation avec l’équipe pédagogique, etc. Dès le début de la première journée de formation, les personnes sont invitées à remplir un questionnaire en format papier où les renseignements suivants sont demandés sous forme de questions ouvertes : 1) Quelle définition donnez-vous d’apprendre ? ; 2) Quelle définition donnez-vous d’enseigner ? ; 3)  Selon vous, qu’est-ce qui aide les étudiants à apprendre ? En outre, les participants doivent cocher cinq qualités associées à un bon enseignant parmi 15 choix possibles. Enfin, au moyen d’un questionnaire papier distribué et collecté en fin de formation, les participants sont notamment interrogés sur le fait de savoir s’ils considèrent avoir une conception différente de ce que signifie apprendre, de ce que signifie enseigner, de ce qui aide les étudiants à apprendre et de ce que sont, selon eux, les cinq qualités d’un bon enseignant. Lorsqu’ils estiment avoir une conception différente, ils sont invités à se montrer plus explicites en donnant leurs nouvelles définitions ou en cochant de nouveau les items qui caractérisent un bon enseignant. À ce titre, cette recherche se distingue des travaux réalisés préalablement sur ce sujet qui recourent à des entretiens qualitatifs permettant sans doute de récolter un matériel plus riche, mais comportant un nombre plus restreint de participants.

3.3 Déroulement

Entre 2005 et 2007, nous avons organisé six sessions de formation : 79 personnes en ont bénéficié ; 19 personnes (24 %) n’ont pas pu suivre l’intégralité de la formation, notamment pour des raisons organisationnelles. Les informations ont été collectées auprès des participants lors de chaque session de formation par les services administratifs de l’Université et par les formateurs selon le processus décrit ci-dessus, c’est-à-dire avant et à l’issue de la formation. Nous avons ensuite transmis toutes ces informations au Centre d’innovation pédagogique et d’évaluation, chargé de la saisie des données et de la production des rapports internes synthétiques concernant les formations pédagogiques à destination des enseignants universitaires de l’établissement.

3.4 Méthode d’analyse des données

Afin de connaître les conceptions initiales, nous utilisons les quatre questions posées lors de l’entrée en formation. Celles-ci ont fait l’objet d’un codage précis pour permettre un traitement statistique appréhendant la diversité des réponses. Chaque question a ainsi donné lieu à la création de variables. Pour chaque individu, chaque variable créée prend la valeur 0 si la réponse donnée ne permet pas de repérer le thème correspondant ; elle prend la valeur 1 si la réponse donnée permet de repérer une fois le thème correspondant ; la valeur 2 si ce thème est donné deux fois dans la réponse, etc. La valeur de la variable est associée au nombre de fois où le thème est repéré dans la question. Tous les questionnaires ont été codés par deux personnes différentes : un étudiant de Master (5e année d’études à l’université) et la responsable de la formation. Cette dernière a codé les questionnaires deux fois : au moment où elle dispensait les formations pédagogiques et durant une autre phase de son activité professionnelle. Nous n’avons pas observé de différences notables en termes de codage.

La première question, sur la définition de l’apprentissage, est une question ouverte. Les réponses ont été analysées et codées à partir des catégories de Marton et de son équipe (1993), selon une hiérarchie allant de la simple accumulation de connaissances à la transformation personnelle. Ce qui nous a permis de créer les six premières variables : 1) augmenter ses connaissances ; 2) mémoriser ; 3) reproduire / appliquer ; 4) comprendre ; 5) interpréter les connaissances de façon nouvelle ; et 6) changer en tant que personne. Deux autres variables ont été produites à la suite de la lecture des réponses : une variable relative aux expressions d’émotions (apprendre c’est : difficile, un plaisir, une obligation, etc.), et une variable relative à tout ce qui ne pouvait être attribué dans les catégories précédentes.

La deuxième question, qui concerne la définition d’enseigner, est également une question ouverte. Nous avons vu que les nombreux travaux sur le sujet (Fox, 1983 ; Gow et Kember, 1993 ; Prosser et collab., 1994 ; Ramsden, 1998 ; Samuelowicz et Bain, 1992) permettaient d’établir un continuum de multiples conceptions entre une approche centrée sur le professeur et orientée vers le contenu et une approche centrée sur l’étudiant et orientée vers ses apprentissages (Kember, 1997). Nous avons choisi de nous référer seulement à ces deux extrêmes : 1) modèle centré sur l’enseignant (transmettre des connaissances) et 2) modèle centré sur l’apprenant (guider, accompagner / créer des conditions favorables pour l’apprenant). Chaque modèle a donné lieu à la création d’une variable.

La troisième question porte sur les qualités que les étudiants associent à un bon enseignant. Des travaux (Des Lierres, Castonguay LeBlanc, Couturier LeBlanc, et Blondin, 1988) ont proposé de classer les réponses des étudiants selon deux catégories : l’une liée aux valeurs et à la personnalité de l’enseignant, identifiée dans notre étude sous le type qualités personnelles ; l’autre, liée aux compétences pédagogiques et identifiée dans notre étude sous le type stratégies et moyens pédagogiques utilisés. À ces deux catégories, nous en avons intégré une troisième dénommée rapport avec les étudiants. Ainsi, les participants ont 15 possibilités :

  • cinq items pour qualités personnelles : est clair, synthétique / est passionné, enthousiaste / fait preuve de patience / intéresse, stimule les étudiants / se montre dynamique et créatif ;

  • cinq items pour stratégies et moyens pédagogiques utilisés : adapte son enseignement aux connaissances préalables des étudiants / informe des objectifs du cours (les connaissances à acquérir) / informe des conditions d’évaluation / met en place des activités diverses / relie le cours à la pratique professionnelle (exemples concrets) ;

  • et cinq items pour rapport avec les étudiants : accepte de ne pas tout connaître / est intéressé par les étudiants / instaure le dialogue / partage ses connaissances avec les étudiants / respecte les étudiants.

Ainsi, nous avons dégagé quatre variables à partir de la troisième question du questionnaire : 1) qualités personnelles ; 2) rapport avec les étudiants ; 3) stratégies et moyens pédagogiques utilisés ; et 4) autres. Cette variable autres a été retenue pour intégrer les remarques des participants : elle peut prendre la valeur 0, si aucune remarque n’a été faite ; ou 1 si, par exemple, les participants ont écrit un ensemble de tout cela.

À la dernière question, qui porte sur ce qui aide les étudiants à apprendre, les réponses des participants ont été réparties dans quatre variables : 1) responsabilité centrée sur l’enseignant, 2) responsabilité centrée sur l’étudiant, 3) conditions de travail et 4) autres thèmes.

À la fin de la formation, nous avons repris les différentes questions posées lors de l’entrée en formation. Pour chacune d’elles, les participants ont été invités à répondre oui ou non, en cochant la case correspondante. S’ils considéraient que leurs conceptions avaient changé, alors ils devaient donner une nouvelle définition dans le cadre d’une question ouverte portant sur les trois premiers aspects, en cochant cinq items associés à un bon enseignant. Pour le travail d’analyse des réponses, nous avons suivi les principes adoptés pour les questions posées lors de l’entrée en formation. Une des limites de cette mesure pourrait venir du fait qu’il n’est pas impossible que certains participants à la formation soient tentés de répondre non ou encore de ne pas expliciter leurs nouvelles conceptions pour éviter un nouvel effort de réflexion.

Le but de cet article est de présenter une analyse de l’évolution des conceptions des jeunes enseignants universitaires à l’issue d’une formation de pédagogie universitaire. Celle-ci s’appuie sur une étude empirique menée en plusieurs étapes. Tout d’abord, cette analyse ne peut être faite sans que nous ayons auparavant clarifié quelques questions : Quelles sont les conceptions initiales des participants à la formation ? Comment s’articulent-elles en ce qui concerne l’enseignement, les enseignants et l’apprentissage ? Compte tenu du caractère multidimensionnel de ces questions, il est utile de recourir à l’analyse factorielle pour synthétiser les différents aspects et en dégager des profils types. Pour ce faire, nous procédons à une analyse factorielle des correspondances multiples (ACM). L’étude de ces profils types est ensuite affinée en tenant compte des profils des enseignants (parcours de formation et expériences d’enseignants). Ces informations sur les profils sont introduites en variables supplémentaires dans l’analyse. Elles sont représentées sur les axes sans avoir contribué à la formation de ces axes (Cazes, 1982). Nous avons fait ce choix pour que la construction des axes de l’analyse factorielle reste centrée sur les conceptions des jeunes enseignants universitaires, et non sur leurs caractéristiques, comme sujets de formation ou comme enseignants. Après cette étude, nous avons également utilisé l’analyse factorielle pour examiner l’évolution des conceptions des jeunes enseignants universitaires. Plus précisément, en introduisant les points de vue de chaque personne à l’issue de la formation en éléments supplémentaires dans l’analyse des correspondances multiples, il possible de repérer des changements éventuels.

3.5 Considérations éthiques

L’objectif de notre recherche était d’interroger de jeunes enseignants sur leurs conceptions à l’entrée puis à l’issue d’une formation en pédagogie. Pour ce faire, nous les questionnons par formulaire papier sur leurs définitions d’apprendre et d’enseigner, sur ce qui aide les étudiants à apprendre et sur les qualités qui caractérisent un bon enseignant.

Aucun de ces formulaires n’est anonyme, dans la mesure où les participants y ont inscrit leur nom afin qu’il nous soit possible de regrouper l’ensemble des informations des formulaires d’inscription, d’entrée et de fin de formation, pour chaque personne concernée. L’anonymat a ensuite été assuré par la création d’un numéro pour chaque personne dans les fichiers informatiques. Rares sont les participants qui ont refusé d’inscrire leur nom dans les différents formulaires, car ils savaient que ces derniers ne seraient pas diffusés de manière individuelle en dehors du Centre d’innovation pédagogique et d’évaluation. Nous avons averti les participants que les informations données par l’intermédiaire des différents formulaires seraient utilisées à des fins de recherche par le service responsable des formations. Ces données individuelles ont été utilisées avec l’accord des participants aux formations.

Les résultats de cette étude n’ont pas encore été communiqués aux participants dans la mesure où nous souhaitions avoir une validation externe de ce travail par une publication scientifique. Une fois cette étape franchie, en nous appuyant sur cette publication, nous produirons alors, pour la revue de notre Université, un texte consacré à nos travaux de recherche, qui sera diffusé à l’ensemble des personnels. Nous nous engageons à envoyer ce texte aux participants à notre recherche. Les premiers résultats sur les effets de la formation ont toutefois déjà fait l’objet d’une présentation aux instances de notre établissement, et sont disponibles sur l’intranet.

4. Résultats

4.1 Les conceptions des jeunes enseignants universitaires à l’entrée en formation

La première étape de notre analyse permet de souligner le caractère multidimensionnel des conceptions initiales des assistants. Ainsi, ils utilisent en moyenne deux dimensions pour qualifier l’acte d’apprendre (certains en considèrent une seule et d’autres vont jusqu’à en utiliser cinq). Pour 63 % des assistants de cette étude, le fait d’apprendre est associé à une augmentation des connaissances (35 personnes). Vient ensuite le fait de comprendre (22 personnes, soit 40 %), puis le fait de changer en tant que personne (19 individus, soit 34 %). Les assistants conçoivent plus rarement l’acte d’apprendre comme un exercice de reproduction et d’application, d’interprétation des connaissances sous une forme nouvelle, ou encore de mémorisation (Figure 1). Enfin, ne négligeons pas le fait que 22 assistants, soit 40 %, proposent des éléments variés non pris en compte par notre catégorisation de l’acte d’apprendre ; par exemple, c’est satisfaire sa curiosité ou mener sa pensée de manière autonome vers une maturité, ou encore apprendre, c’est un mécanisme individuel.

Figure 1

Les définitions relatives à apprendre données par les jeunes enseignants universitaires

Les définitions relatives à apprendre données par les jeunes enseignants universitaires

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Pour définir l’acte d’enseigner, 21 personnes (38 %) se réfèrent exclusivement au modèle centré sur l’enseignant (faire passer des connaissances), contre seulement cinq personnes (9 %) qui évoquent exclusivement le modèle centré sur l’étudiant (guider, accompagner / créer des conditions favorables) (Figure 2). En fait, la plus grande partie des assistants, 26 d’entre eux (47 %), donne une définition de l’acte d’enseigner qui associe les deux types de modèles, se situant donc quelque part sur le continuum décrit par Kember (1997). Signalons que trois personnes (6 % des assistants) n’ont pas donné de définition de l’acte d’enseigner.

Figure 2

Les définitions du terme enseigner données par les jeunes enseignants universitaires

Les définitions du terme enseigner données par les jeunes enseignants universitaires

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Tous les assistants participant à cette formation considèrent les qualités d’un bon enseignant sous plusieurs angles. En fait, 40 parmi les assistants participant à cette formation (73 %) mêlent les trois aspects énoncés dans cette recherche (qualités personnelles, stratégies et moyens pédagogiques, et rapports avec les étudiants) ; et 11 personnes (19 %) associent deux dimensions ; deux personnes n’ont pas donné de réponse ; et deux (4 % des assistants) mettent en avant d’autres aspects (Figure 3).

Figure 3

Les cinq qualités d’un bon enseignant selon les jeunes enseignants universitaires

Les cinq qualités d’un bon enseignant selon les jeunes enseignants universitaires

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Enfin, pour ce qui aide les étudiants à apprendre, 49 sur 55 participants (89 % de nos assistants) considèrent que, d’une manière plus ou moins importante, les apprentissages des étudiants sont de la responsabilité de l’enseignant. Et même, 28 personnes jugent que les apprentissages des étudiants sont liés uniquement à l’enseignant (51 %). Seulement 25 assistants (45 %) estiment que l’étudiant a une part de responsabilité plus ou moins forte dans ses propres apprentissages. Ils sont plus rares à penser que les apprentissages des étudiants sont uniquement du fait des étudiants (4 seulement, c’est-à-dire 7 %). Il est important de souligner que 21 personnes (38 %) estiment que la responsabilité de l’apprentissage est partagée entre enseignant et étudiants (Figure 4).

Figure 4

Ce qui aide les étudiants à apprendre, selon les jeunes enseignants universitaires

Ce qui aide les étudiants à apprendre, selon les jeunes enseignants universitaires

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Pour aller au-delà de ces constats, et obtenir une synthèse des conceptions, nous avons réalisé une nouvelle analyse des données à partir de l’analyse des correspondances multiples (concrètement, il s’agit d’effectuer une analyse factorielle des correspondances à partir du tableau disjonctif complet). Dans cette perspective, pour pallier les problèmes liés à des catégories regroupant de trop petits effectifs, nous avons recodé les données en variables binaires. Les résultats de cette analyse sont présentés dans la figure 5.

Figure 5

Les conceptions des jeunes enseignants universitaires à l’entrée en formation

Les conceptions des jeunes enseignants universitaires à l’entrée en formation

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Le premier axe de l’analyse spécifie différents types de conceptions de l’enseignement (acte d’enseigner, qualités d’un bon enseignant) en les associant à ce qui aide les étudiants à apprendre. Il permet de déterminer deux profils à l’entrée en formation :

  1. Des enseignants qui ont une vision de l’enseignement plutôt centrée sur l’étudiant et qui considèrent que ce ne sont pas leurs stratégies pédagogiques ou leurs qualités personnelles qui font un bon enseignant, mais plutôt les rapports qu’ils entretiennent avec leurs étudiants. Pourtant, ils estiment que ce qui aide les étudiants à apprendre n’est pas de la responsabilité de l’étudiant. Ils pensent également qu’apprendre, ce n’est pas simplement augmenter ses connaissances.

  2. Des enseignants qui ont une vision de l’enseignement plutôt centrée sur l’enseignant où l’étudiant est totalement absent et qui considèrent que les stratégies pédagogiques utilisées sont des qualités importantes pour un bon enseignant. Avant tout, l’apprentissage est perçu comme une augmentation des connaissances. Pour eux, les facteurs qui aident les étudiants dans leurs apprentissages ne relèvent pas de la responsabilité de l’enseignant, mais de celle de l’étudiant.

Le second axe de l’analyse renvoie aux différentes conceptions initiales de l’acte d’apprendre en les associant aux qualités d’un bon enseignant.

  1. Pour les uns, l’apprentissage est perçu comme le fait de savoir reproduire ou appliquer et même interpréter, mais pas comme une augmentation de connaissances. À ce type de définition de l’apprentissage correspond le fait qu’un bon enseignant est doté de différentes qualités personnelles et dispose de stratégies et méthodes pédagogiques particulières. L’enseignement est conçu en se référant à un modèle à la fois centré sur l’étudiant et sur l’enseignant, et ce qui aide les étudiants à apprendre relève d’une responsabilité partagée entre les étudiants et l’enseignant.

  2. À l’opposé, d’aucuns considèrent l’apprentissage comme une augmentation des connaissances. Ici, l’enseignement est magistro-centré. La responsabilité des apprentissages des étudiants est le fait de l’enseignant. Les qualités d’un bon enseignant ne sont pas liées aux stratégies et méthodes pédagogiques utilisées mais aux rapports entretenus avec les étudiants.

Plusieurs questions se posent au regard de ces résultats : Est-ce qu’il existe des points de vue de filière ? Par ailleurs, les conceptions de ces enseignants débutants sont-elles différentes en fonction de leur expérience d’enseignement ? Ou selon leur projet professionnel ? Ou encore selon le type d’enseignement qu’ils assurent ? Ou selon qu’ils sont autonomes dans la préparation de leurs cours ? L’un des résultats notable est l’absence de relations entre les conditions d’enseignement des assistants et les conceptions types mises à jour dans notre analyse. En revanche, ceux qui ont eu une expérience d’enseignement comme attachés temporaires d’enseignement et de recherche (ATER), développent des conceptions de l’enseignement qui accordent une place plus importante à l’apprenant ; ils estiment également que la responsabilité des apprentissages est partagée entre les étudiants et l’enseignant ; ils conçoivent que les qualités d’un bon enseignant sont liées aux stratégies et aux méthodes pédagogiques qu’il emploie ; le plus souvent, ils perçoivent l’apprentissage comme le fait de savoir reproduire ou appliquer et même interpréter. Les effets sectoriels existent sur le deuxième axe de l’analyse. Ainsi, les jeunes enseignants universitaires de sciences et techniques se distinguent par leur vision de l’enseignement magistro-centrée et une perception de l’apprentissage considéré comme une simple augmentation des connaissances. Au-delà, il existe également un lien entre le projet professionnel et les conceptions : ceux qui envisagent une carrière professionnelle combinant enseignement et recherche ont des points de vue plus centrés sur l’étudiant que ceux qui envisagent exclusivement la recherche.

4.3 Constats sur l’évolution des conceptions

Les conceptions des assistants ayant suivi la formation ont-elles été modifiées ? Au regard des réponses, nous pouvons dire que la formation a un impact sur les conceptions des jeunes enseignants (Figure 6) : 87 % déclarent avoir changé de définition au sujet de ce qui aide les étudiants à apprendre (48 personnes) ; 60 %,  pour les qualités d’un bon enseignant (33 individus) ; 51 %, pour ce qui est d’enseigner (28 assistants) et 45 %, à propos de la signification d’apprendre (25 personnes).

Figure 6

Changements éventuels de définition à l’issue de la formation

Changements éventuels de définition à l’issue de la formation

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Au final, 53 personnes sur 55 déclarent avoir changé de définition sur un des quatre aspects étudiés, et deux assistants n’ont pas répondu à toutes les questions qui concernaient leur point de vue sur l’impact de la formation. Précisons que 15 personnes considèrent avoir des définitions différentes sur tous les aspects considérés, soit 27 % des participants.

Pour apprécier les déclarations de changements au regard des conceptions initiales des jeunes enseignants universitaires, les réponses aux différentes questions posées en fin de formation ont été introduites en variables supplémentaires dans l’analyse des correspondances multiples. Dans cette perspective, nous avons choisi de considérer trois types de réponses : Oui, Non et Non-réponse, en sachant que les petits effectifs ne peuvent perturber l’analyse, compte tenu de la technique utilisée. Ceux qui ne changent pas de conceptions sont les jeunes enseignants universitaires plutôt centrés sur l’enseignant, alors que ceux qui ont des visions plus nuancées et plus centrées d’emblée sur l’étudiant sont davantage influencés par la formation. Il faut toutefois nuancer ce propos, car ce constat peut seulement être émis pour deux aspects : ce qui aide les étudiants à apprendre et les cinq qualités d’un bon enseignant (Figure 7).

Figure 7

Changements éventuels de conceptions à l’issue de la formation

Changements éventuels de conceptions à l’issue de la formation

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Pour étudier la nature des changements, nous mettons en regard les conceptions à l’entrée en formation avec celles déclarées le dernier jour de la formation. Les participants ayant choisi de ne pas répondre à propos de leurs changements de conceptions sont considérés comme une catégorie à part entière et leurs conceptions finales restent inconnues à nos yeux. C’est pourquoi elles ont été codées comme inconnues. Enfin, le traitement des conceptions des assistants déclarant avoir changé de conception a été réalisé de deux manières : 1) pour les personnes n’en ayant pas explicité de nouvelles, ces conceptions finales sont codées comme inconnues ; 2) nous recourons aux explicitations des nouvelles conceptions des jeunes enseignants pour en déduire leurs conceptions finales selon les catégories d’analyses précédentes.

À l’issue de la formation, les définitions données par les assistants ont en partie changé. Pour la définition de l’acte d’apprendre, on constate que le nombre de personnes se référant aux différents types de catégories utilisées dans cette recherche est en diminution, quelle que soit la catégorie considérée, à l’exception de reproduire / appliquer (+ 1 personne). Cela reflète le fait que le caractère multidimensionnel donné à l’acte d’apprendre par les assistants est moins présent : les définitions données sont désormais concentrées sur un nombre plus restreint de catégories. En outre, deux changements significatifs sont intervenus : l’acte d’apprendre est moins souvent défini en référence à une augmentation des connaissances (47 % des assistants contre 63 % à l’entrée en formation) ou par le fait de comprendre (22 % des assistants contre 40 % à l’entrée en formation).

Pour ce qui est de la définition de l’enseignement à la fin de la formation, la proportion d’assistants ayant une définition qui s’appuie exclusivement ou en partie sur le modèle magistro-centré est en diminution : 71 % des assistants contre 85 % à l’entrée en formation (- 8 personnes). L’un des autres changements notables est la croissance du nombre de jeunes enseignants universitaires se référant seulement à un modèle centré sur l’apprenant (16 % des assistants contre 9 % à l’entrée en formation), ainsi que l’augmentation d’une vision mixte équilibrée de l’acte d’enseigner (27 % des assistants à l’issue de la formation, contre 20 % au départ).

En ce qui concerne les qualités d’un bon enseignant avancées à la fin de la formation par nos assistants, on note la diminution de la proportion mettant en avant des qualités personnelles de l’enseignant (75 % des assistants contre 91 % à l’entrée en formation, soit - 8 personnes), ainsi qu’une réduction de la proportion soulignant l’importance du rapport avec les étudiants (55 % contre 80 %, soit - 15 personnes). En revanche, les stratégies et moyens pédagogiques tendent à apparaître encore comme importants aux yeux des assistants : 87 % les mettent en évidence à l’issue de la formation (85 %, lors du premier jour de formation, soit + 2 personnes). Mais surtout, nos assistants sont plus nombreux à souligner que le fait de donner seulement cinq qualités est insuffisant pour qualifier un bon enseignant ou que ses qualités sont autres que celles proposées (+ 14 personnes) : on passe ainsi de 2 % lors de l’arrivée en formation à 25 % des jeunes enseignants universitaires ayant participé à cette initiation à la pédagogie universitaire de l’Université de Bourgogne.

Enfin, au terme de la formation, pour la définition de ce qui aide les étudiants à apprendre, la part des assistants plus ou moins centrés sur une responsabilité de l’enseignant est en diminution (on passe de 89 % à 73 % des participants, soit - 10 personnes), comme la proportion d’assistants évoquant plus ou moins la responsabilité de l’étudiant (de 40 % contre 45 % au début de la formation). Le fait que les apprentissages des étudiants puissent être de la responsabilité des enseignants comme des étudiants est également un aspect moins présent chez nos assistants, puisqu’ils ne sont plus que 25 % à déclarer une telle conception contre 38 % des participants entrant en formation. Alors que les conditions de travail étaient évoquées par huit personnes au début de la formation, seul un assistant garde l’idée qu’elles peuvent avoir une influence sur ce qui aide les étudiants à apprendre. En revanche, les jeunes enseignants universitaires qui se réfèrent à d’autres aspects sont plus nombreux (+ 6 personnes, soit 27 % des assistants contre 16 % à l’entrée en formation). Parmi ces autres aspects, ils citent par exemple : remise en cause de l’enseignant ou laisser de la contrôlabilité aux étudiants.

Afin d’apprécier les conceptions initiales les plus sujettes à être modifiées par les jeunes enseignants universitaires à l’issue de la formation, les conceptions de fin de formation sont injectées dans l’analyse des correspondances multiples comme éléments supplémentaires. Il ressort que les variables qui concernent les conceptions données en fin de formation sont moins dispersées sur le premier axe (les coordonnées des variables se rapprochent de zéro) (Figure 8). Ce résultat peut être interprété comme le fait que la diversité des conceptions est moins étendue que lors de l’entrée en formation : celles-ci sont encore variées mais tendent à s’homogénéiser.

Nous pouvons formuler plusieurs constats (Figure 8) :

  1. Les jeunes enseignants universitaires, qui concevaient l’enseignement comme plutôt centré sur l’apprenant, prennent conscience du fait qu’il peut aussi être centré sur l’enseignant. Dans ce cadre, on observe également une diminution de l’importance accordée aux qualités personnelles comme critère de définition d’un bon enseignant.

  2. Les jeunes enseignants qui, initialement, valorisaient l’enseignement fortement magistro-centré et pour lesquels la responsabilité des apprentissages était avant tout celle de l’étudiant, accordent désormais de l’importance aux qualités personnelles de l’enseignant comme un des critères d’un bon enseignant, ce qu’ils ne faisaient pas précédemment.

  3. Certains aspects ignorés initialement sont désormais mis en relief et, à l’inverse, d’autres cités au début sont dorénavant passés sous silence. C’est le cas précisément des aspects liés aux qualités d’un bon enseignant (rapport avec les étudiants, de même que stratégies et méthodes pédagogiques) et à la manière de définir l’acte d’apprendre. Ainsi, ceux qui définissaient l’acte d’apprendre comme centré sur l’apprenant prennent désormais en compte l’enseignant.

  4. On voit apparaître de nouveaux aspects :

    • des définitions plus élaborées, chez ceux qui percevaient déjà l’apprentissage comme autre chose que l’augmentation des connaissances ;

    • la responsabilité de l’enseignant dans les apprentissages des étudiants est désormais prise en compte par les jeunes enseignants universitaires magistro-centrés ; en outre, ces derniers intègrent aussi les conditions de travail comme l’un des facteurs qui influencent les apprentissages des étudiants.

En ce qui concerne le 2e axe,

  1. aux caractéristiques initialement déterminées (type 1 de l’axe 2) s’ajoutent désormais, dans la liste des qualités d’un bon enseignant, le rapport avec les étudiants. L’idée de ce qui peut aider à l’apprentissage se complexifie (observée par une apparition des réponses autres) ;

  2. la perception d’un bon enseignant est désormais également liée aux stratégies et méthodes pédagogiques qu’il met en oeuvre, et pas seulement aux rapports qu’il peut entretenir avec les étudiants. Et ce qui aide les étudiants à apprendre peut également être lié aux conditions de travail.

Figure 8

Changements dans les conceptions des jeunes enseignants universitaires à l’issue de la formation

Changements dans les conceptions des jeunes enseignants universitaires à l’issue de la formation

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La figure 9 présente les changements les plus importants à propos des conceptions des 55 assistants de cette étude, comme il est possible de les mettre en évidence à partir de leurs déclarations.

Figure 9

Synthèse de quelques changements

Synthèse de quelques changements

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5. Discussion des résultats

Dans cette recherche, nous avons traité de l’évolution des conceptions au sujet de l’enseignement et de l’apprentissage chez des assistants ayant suivi une formation à la pédagogie universitaire à l’Université de Bourgogne. Dans la discussion qui suit, nous tentons d’expliquer nos résultats à la lumière du cadre théorique et de préciser les limites de ce travail.

Cette recherche met en évidence la pluralité des définitions associées à l’apprentissage et à l’enseignement à l’entrée en formation. Cependant, notre analyse a également permis de dégager deux profils à propos de l’enseignement. Si l’un des deux n’est pas une surprise et dégage un profil que la recherche qualifie d’approche centrée sur le professeur et orientée vers le contenu (Kember, 1997), l’autre profil pose question. Des assistants considérés comme privilégiant une approche centrée sur l’étudiant et orientée vers ses apprentissages nous surprennent en estimant que la responsabilité de l’étudiant n’est pas engagée dans l’apprentissage. Ils considèrent les facteurs d’apprentissage comme extérieurs à l’apprenant et ne perçoivent pas la nécessité de son engagement. Et cela, contrairement aux modèles centrés sur l’apprenant proposés par la documentation scientifique (Kember, 1997 ; Kember et Kwan, 2000 ; Prosser et collab., 1994 ; Samuelowicz et Bain, 1992), selon lesquels les savoirs se construisent par une participation active et une responsabilisation forte de la personne engagée dans les apprentissages. Pour tenter d’expliquer ce résultat surprenant, nous pourrions avancer plusieurs hypothèses. De prime abord, on pourrait penser à la période de survie décrite par Kugel (1993) et y voir la volonté de vouloir bien faire à tout prix, en surestimant le rôle de l’enseignant, omniprésent et responsable du choix de méthodes d’enseignement générales idéales, efficaces en tout temps pour que les étudiants apprennent. On pourrait également s’intéresser à leur parcours d’étudiants, encore tout récent, et postuler que ces assistants ont pu être marqués par les modèles d’enseignements magistraux et transmissifs. Ils peuvent alors se retrouver confrontés au dilemme de reproduire ce modèle ou de s’en abstraire. De fait, tout en étant conscients des besoins des apprenants (participation active et responsabilisation forte), les assistants hésitent à leur déléguer la responsabilité d’organiser leurs apprentissages. L’analyse des pratiques pédagogiques universitaires réellement mises en oeuvre par ce type de jeunes enseignants universitaires pourrait s’avérer particulièrement éclairante. Ainsi, de telles recherches pourraient permettre de voir dans quelle mesure les pratiques sont en adéquation avec les conceptions pour tenter d’expliquer nos résultats.

Au-delà du parti pris d’adopter une posture où les phénomènes qualitatifs sont abordés d’un point de vue quantitatif et statistique, cette multiplicité et cette complexité des définitions données par les participants à la formation nous ont amenées à adopter des méthodes d’analyse peu usitées dans le domaine de la pédagogie universitaire. Notre idée était de lier les conceptions qu’ont les assistants au sujet de l’apprentissage et de l’enseignement avec les effets qui résulteraient de la formation, à l’exemple de Kember et Kwan (2000). Examiner l’effet de formations pédagogiques sur les conceptions des enseignants universitaires permet de mettre en lumière des résultats divers. Si Norton et ses collaborateurs (2005 ; Postareff et collab., 2007) n’observent aucun changement conceptuel entre ceux qui ont participé à une formation pédagogique et ceux qui ne l’ont pas fait, Gibbs et Coffey (2004) ont souligné des effets positifs, bien que lents (Postareff et collab., 2007). Notre étude va dans ce sens et montre qu’à la suite de la formation, 55 assistants disent que leurs conceptions ont évolué. Bien qu’encore variées, celles-ci tendent à s’homogénéiser : leur diversité apparaît moins étendue qu’à l’entrée en formation. Globalement, quelles que soient leurs conceptions initiales, les assistants prennent en compte de nouvelles dimensions. Pour aller plus loin, il serait intéressant d’étudier si ces évolutions s’inscrivent dans 1) une simple addition, 2) une faible restructuration ou 3) une restructuration importante des conceptions (Deaudelin, Richer et Dussault, 2005). En effet, si une simple addition amenait les participants à étoffer leurs perceptions actuelles, la restructuration (plus ou moins forte) pourrait conduire à un changement de paradigme (Tyson, Venville, Harrison et Treagust, 1997).

Les limites d’une telle étude tiennent évidemment au nombre relativement restreint de sujets et au fait que cette étude ne concerne que des jeunes enseignants universitaires d’une seule université française. En outre, nous n’avons que des déclarations à la sortie de formation, alors qu’une évaluation différée des effets de la formation serait utile pour appréhender ses effets plus durables. Prévue initialement dans cette recherche, cette évaluation n’a pu être intégrée, compte tenu de la très faible mobilisation des participants après les formations. Cela peut s’expliquer par la lassitude des personnes à répondre à un nouveau questionnaire, mais plus encore par le contexte français de cette recherche, où la pédagogie universitaire reste très marginale. Enfin, il ne faut pas négliger non plus le fait qu’il s’agit de personnes ayant un intérêt présumé pour l’enseignement et une forte motivation, puisqu’elles ont suivi entièrement une formation de quatre jours à la pédagogie universitaire. Le fait qu’une partie de ces participants ait quitté la formation n’est pas sans poser question : il n’est peut-être pas irréaliste de penser que ceux qui ont abandonné la formation en cours peuvent l’avoir fait en raison de postures pédagogiques en opposition à celles proposées par la formation. En effet, bien que la formation expose les différentes approches possibles de l’enseignement et de l’apprentissage sans jugement quant à la valeur des unes ou des autres, elle vise à amener les jeunes enseignants universitaires à adopter une approche plus centrée sur l’apprenant.

Dans cette recherche, nous avons analysé les conceptions de jeunes assistants au sujet de l’enseignement et l’apprentissage à l’entrée et à l’issue de la formation. À partir des déclarations des participants, nous avons tenté d’apporter un éclairage nouveau sur les effets immédiats ressentis à l’issue d’une formation à la pédagogie. Cet article se fonde sur une mesure subjective de tels effets à très court terme. Bien entendu, nous sommes conscientes qu’il ne s’agit pas d’une mesure objective des effets de cette formation sur les conceptions de ces jeunes assistants. Par ailleurs, le fait que les conceptions des jeunes assistants sont en partie liées à leur expérience d’enseignement pourrait être un argument pour avancer que ce n’est pas la formation qui est facteur de changement de conceptions, mais plutôt l’expérience d’enseignement qu’ils ont acquise entre les deux périodes de formation.

D’un point de vue méthodologique, cette recherche aurait gagné à s’appuyer sur la constitution d’un groupe témoin d’assistants – non participants à la formation – dont les conceptions auraient été analysées à un mois d’intervalle. Toutefois, on pourrait nous opposer l’argument selon lequel nous n’observons pas les effets ressentis de la formation, mais seulement l’expérience acquise par les participants entre les deux périodes de formation. De notre point de vue, cet argument peut être rejeté pour deux raisons : 1) le temps écoulé entre les deux périodes de la formation (un mois) nous paraît trop court pour constituer une expérience d’enseignement signifiante permettant une évolution des conceptions ; 2) les assistants qui ont le plus d’expérience (en termes de volume horaire) se distinguent en matière de conceptions, les autres types d’expériences d’enseignement n’ayant pas de réalité significative. Réaliser une étude sur les modifications des conceptions de l’enseignement et l’apprentissage de jeunes enseignants universitaires n’ayant pas suivi la formation resterait bien sûr le moyen de confirmer ou d’infirmer notre observation.

6. Conclusion

Notre objectif était d’analyser l’évolution des conceptions chez de jeunes enseignants à l’issue d’une formation en pédagogie universitaire, en nous appuyant sur une étude empirique réalisée à partir de données recueillies auprès de 55 assistants de l’Université de Bourgogne. Leurs déclarations à l’issue de la formation nous indiquent que leurs conceptions se sont modifiées : même si on observe encore une certaine variété, la diversité de ces déclarations apparaît moins étendue qu’à l’entrée en formation. En outre, apparaissent de nouvelles dimensions, plutôt centrées sur l’apprenant. Nous pourrions nous interroger sur les effets d’une telle formation sur leurs enseignements, et émettre l’hypothèse que cette formation aura un impact sur leurs pratiques pédagogiques tout en restant conscientes : 1) que le transfert entre la formation et la pratique n’est pas toujours garanti et ne s’effectue pas de manière aisée, 2) que, à cause de leur statut, les assistants en France n’ont pas la liberté d’introduire des modifications importantes dans les cours qu’ils donnent. Il convient donc de se montrer prudent quant aux délais de mise en oeuvre. Pour autant, à plus long terme, les influences de cette modification des perceptions restent à confirmer et à mettre en regard avec les pratiques réelles d’enseignement, le discours des assistants pouvant ne pas correspondre à leur pratique d’enseignement.

En termes de retombées pour le modèle de développement pédagogique proposé par le Centre d’innovation pédagogique et d’évaluation à l’Université de Bourgogne, les résultats de notre étude nous permettent de confirmer l’utilité de la formation Initiation au métier d’enseignant dans l’enseignement supérieur (IMEDES), car nous constatons une évolution des conceptions et la prise en compte de nouvelles dimensions plutôt centrées sur l’apprenant. Cette étude nous a également permis de caractériser les différentes conceptions de l’enseignement et de l’apprentissage d’un des publics de notre centre (les assistants). Nous savons désormais que nos jeunes enseignants universitaires peuvent avoir des conceptions en partie différentes de ce que propose la documentation scientifique. C’est un des aspects à prendre en compte à l’avenir pour la formation de ce type d’enseignants.