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Introduction

Quand l’État condamne un individu pour un crime et le condamne à la prison, l’effet d’une telle sentence ne se limite pas à cet individu. Les familles et les proches du condamné sont aussi profondément touchés par leur interaction avec le système de justice. Des recherches ont montré que les familles sont affectées par le crime financièrement et émotionnellement et par une stigmatisation sociale et structurelle (Hannem, 2008, 2011 ; Hannem et Leonardi, 2015). Bien que les familles doivent faire face à une myriade de difficultés, elles sont généralement négligées par ceux qui mettent en place les politiques, par les chercheurs et par la population lorsqu’il est question de discuter du système de justice pénale et de ses effets. Toutefois, de plus en plus de recherches, principalement aux États-Unis et au Royaume-Uni, s’intéressent maintenant à l’impact du crime sur les familles des détenus (par ex. : Arditti, Lambert-Shute et Joest, 2003 ; Christian, 2005 ; Comfort, 2003, 2008 ; Condry, 2007 ; Fishman, 1990 ; Girshick, 1996 ; May, 2000). Plusieurs recherches portant sur les familles abordent précisément l’effet de l’incarcération de parents sur leurs enfants (par ex. : Gabel et Johnston, 1995 ; Hagan et Dinovitzer, 1999 ; Hairston, 2001). Toutefois, dans le vaste ensemble des recherches sur les prisons et des discussions sur les réformes des politiques sociales, les familles ne semblent qu’une inquiétude à part :

Aucun effort systématique d’offrir un soutien ou des ressources nécessaires aux familles de détenus n’a été déployé aux États-Unis ou au Canada, même si quelques organismes de bienfaisance et religieux ont tenté de mettre sur pied des programmes fragmentaires et des groupes de soutien. Au Canada, de tels groupes reçoivent parfois des subventions gouvernementales par des demandes de financement faites auprès du Conseil de prévention du crime du Canada. De telles demandes s’intéressent généralement au risque de la criminalité intergénérationnelle et envisagent la prévention du crime sous le prisme du développement social, obtenant ainsi le soutien nécessaire pour des programmes qui ciblent les enfants et les conjoints de détenus. Toutefois, même en le présentant sous l’angle de la protection de la collectivité, le financement reste cyclique, précaire et soumis aux aléas politiques et sociaux.

Hannem, 2008, p. 25, notre traduction

Au Canada, au cours des dix dernières années, le militantisme et l’intérêt croissant des chercheurs pour l’impact du crime sur les familles de détenus ont fait en sorte d’attirer l’attention des médias. Par exemple, la question des résultats faux positifs au test du scanneur à ions pour la détection de résidus de drogues à l’entrée des aires de visite en prison a reçu une attention particulière lorsque des familles se sont vu retirer leur droit de visite, et ce, tant dans les médias que dans des recherches universitaires[2] (Dickson, 2016 ; Harris, 2016 ; MacAlpine, 2016 ; MacKenzie, 2017 ; Vivar, 2014). En 2017, un groupe de soutien de la région d’Ottawa pour les mères de détenus a mené une pétition au Parlement en soutenant que le taux élevé de faux positifs du scanneur à ions avait des effets négatifs sur les familles et leur capacité à visiter leurs proches incarcérés. La pétition demandait à Service correctionnel Canada (SCC) de cesser l’utilisation du scanneur à ion (White, 2017). Cette pétition, et l’enquête qui en a résulté, menée par le Comité permanent de la sécurité publique et nationale, a ramené l’effet de l’incarcération sur les familles dans les médias populaires de manière jamais vue, et a attiré l’attention publique sur un groupe d’individus normalement invisible.

Compte tenu de l’augmentation du nombre de recherches sur le sujet, du militantisme et de l’attention médiatique portée aux répercussions du crime et de l’incarcération sur les familles, il peut être opportun d’entreprendre une réflexion critique sur la manière dont le discours universitaire et militant façonne la vision de la population et des personnes en position d’autorité en ce qui concerne la réponse aux besoins de ces familles. La présente étude se penche sur les conséquences involontaires éventuelles de ce discours dominant sur les familles touchées par la détention de leurs proches. Une attention particulière portée au cadre de ces recherches et de ce militantisme semble indiquer que les tentatives de renforcement du soutien public et gouvernemental aux familles affectées par le crime et l’incarcération puisent généralement dans des discours stigmatisants qui marginalisent parfois davantage les familles et les éloignent de la vie sociale. Je crois qu’un discours de l’inclusion est nécessaire pour déconstruire les préjugés stigmatisants et que les préoccupations des familles devraient être considérées au sein du discours critique ou abolitionniste existant sur les prisons et les maux de l’incarcération.

Les familles et l’incarcération au Canada

La première étude canadienne sur les familles des détenus a été effectuée par le Regroupement canadien d’aide aux familles des détenus (RCAFD) en 2003 et financée par le SCC (Withers, 2003). Le personnel du RCAFD a organisé des groupes de discussion formés de membres de familles de détenus et a publié un texte comprenant 51 recommandations à SCC pour améliorer la situation de ces familles, mais la plupart n’ont jamais été mises en place. En 2004, la Maison de l’Espérance, un foyer de transition et centre de service tenu par la St Leonard’s Society, à Ottawa, en Ontario, a créé un programme de sensibilisation et une trousse de ressources relativement aux enfants affectés par l’incarcération. Ces outils ont été conçus dans le but d’informer et de sensibiliser les fonctionnaires aux effets de l’incarcération de parents. L’organisme a toutefois dû mettre fin à ses services de soutien des familles en 2007 en raison de compressions budgétaires qui ont affecté de nombreux services locaux aux familles. Par exemple, à Kingston, en Ontario, Bridgehouse offrait l’hébergement aux femmes et aux enfants visitant les prisons, ainsi qu’un soutien aux familles locales. Mais l’organisme a perdu son financement fédéral en 2007 et a dû fermer en 2010. Le RCAFD est le dernier organisme national de défense des intérêts et dépend d’un financement fédéral à l’année en plus de dons privés pour maintenir son offre de services.

La situation des familles affectées par l’incarcération a été tout aussi négligée par les chercheurs au Canada. Seules quelques études abordent directement les expériences des familles et des enfants touchés par l’incarcération (Bruynson, 2011 ; Hannem, 2008, 2011, 2012a ; Hannem et Leonardi, 2015 ; Knudson 2016 ; MacKenzie, 2017 ; Vaz 2015). Toutefois, un nombre croissant de panels, de conférences et d’étudiants des cycles supérieurs se sont intéressés au crime et à la famille ces dernières années. Il semblerait que le sujet gagne en popularité et éveille l’intérêt de criminologues critiques au Canada, comme en atteste ce numéro spécial. J’espère que cette attention rétrospective portée aux familles par la recherche et le militantisme pourra servir de repère et de base de réflexion aux jeunes chercheurs qui s’aventurent sur ce terrain.

À partir de mes notes prises sur le terrain et observations des échanges publics dans les médias au cours des dix dernières années sur les familles affectées par l’incarcération, j’ai utilisé une méthode « d’échantillonnage technique progressif » (Altheide et Schneider, 2013) et effectué une analyse ethnographique du contenu afin de relever les termes qui émergent dans les discours sur les difficultés que connaissent les familles de personnes criminalisées. Dans le cadre de mes recherches en cours et de mes intérêts sur les effets du crime et de la prison sur les familles, j’ai lu plus d’une centaine d’articles d’actualité canadienne, américaine et britannique, ainsi que les commentaires publics et leurs réponses. J’ai aussi visité les sites Internet des principaux organismes de défense des intérêts des familles affectées par l’incarcération que j’ai trouvés sur le sujet dans ces trois mêmes pays, soit 47 sites en tout[3]. Ce qui suit découle de ces observations et analyses.

Réforme sociale et stigmatisation

Les tentatives de discussion des besoins des familles de détenus par le public dans les médias ou sur des forums de sensibilisation sont souvent balayées de la main par des individus n’ayant aucune connexion personnelle au crime ou à l’incarcération. Ces membres de la population font preuve de « stigmatisation de courtoisie » envers les familles (Goffman, 1963 ; Hannem, 2008, 2012a) d’une manière qui minimise les difficultés qu’elles vivent. Selon Goffman (1963), la stigmatisation est une fonction d’une identité sociale gâchée qui réduit une personne ordinaire et entière à une personne entachée et diminuée à partir d’un attribut négativement stéréotypé (p. ex. : la criminalité). Mais le théoricien écrit aussi que « les problèmes des personnes stigmatisées se diffusent comme des ondes, d’intensité toujours moindre » (p. 43-44), ce qui finit par faire partager aux familles le discrédit de la personne stigmatisée. Comme argumenté plus tôt, les familles sont perçues, par association à un condamné ou à un détenu, comme étant à risque d’être impliquées elles-mêmes dans des crimes. Des suppositions stigmatisantes sont souvent faites sur leur classe, leur origine ethnique et « le genre de personne » qui entretiendrait une relation avec une personne incarcérée et qui façonnent la réponse de la population aux besoins d’assistance de ces familles. Lorsqu’on leur présente les difficultés vécues par les conjoints des détenus, les individus plus sceptiques proposent généralement comme solution de mettre fin à la relation avec le détenu plutôt que de chercher à résoudre les difficultés. Selon Goffman (1963), la stigmatisation par association ou la stigmatisation de courtoisie provoque souvent l’évitement ou la fin de la relation. Les commentaires de la population révèlent en fait une stigmatisation inhérente au discours et laissent entendre que les actions des familles des personnes incarcérées sont d’une certaine façon moralement questionnables (« quel genre de personne reste en relation avec quelqu’un qui a commis un crime terrible ? »), ce qui tend à justifier les difficultés que connaissent ces familles comme une conséquence logique de leur choix. C’est le genre de rhétorique qui ressemble à la culpabilisation faite aux victimes de relations abusives, surtout aux femmes : « pourquoi ces personnes ne mettent tout simplement pas fin à cette relation ? ».

Pour le public, il est aisé de blâmer les détenus pour les conséquences collatérales de leurs crimes et de leur incarcération. On peut le remarquer dans les commentaires sur les forums et dans les réponses aux articles d’actualité en ligne qui décrivent l’impact sur les familles : « Il aurait dû penser aux conséquences pour sa famille avant de commettre le crime. » Cette rhétorique néolibérale et individualiste puise dans un discours répandu du choix rationnel qui assume que tout individu criminel est responsable de son comportement, qu’il échoue à être dissuadé par une analyse rationnelle coût-bénéfice et à opter pour des solutions de rechange qui lui évitent les conséquences et les torts causés par la criminalisation (voir Hamann, 2009). En raisonnant ainsi, tous les dommages collatéraux causés aux familles par les décisions du système de justice pénale sont le juste retour d’un manque de contrôle de soi rationnel.

La convergence de ces deux discours sur la responsabilité instaure une tendance à la stigmatisation qui place les prisonniers et leurs familles en tant qu’Autres et décharge la société de toute responsabilité quant à leur bien-être. Une telle stigmatisation ébranle généralement les tentatives de mobilisation pour changer les choses et les pressions sur les gouvernements et les responsables des prisons pour qu’ils répondent aux besoins des familles (voir Hannem, 2011, 2012a). Empruntant au socioconstructivisme le jeu des problèmes sociaux de Loseke (2003), dans un monde où les ressources sont limitées, les familles affectées par l’incarcération ne font simplement pas des victimes convaincantes et sympathiques, lorsque comparées aux membres d’autres groupes perçus comme plus « méritants » par l’opinion publique.

Chercheurs et militants, ayant tenté ces dix dernières années de sensibiliser de plus en plus la population aux impacts du crime et de l’incarcération sur les familles, ont été la cible de façon tangible de tels discours stigmatisants. En repassant la littérature scientifique, les nouvelles et les médias sociaux ainsi que les sites web et la documentation des organismes de défense des intérêts sur la question, on constate que les militants et les chercheurs répondent souvent aux discours de l’individualisation et de la stigmatisation avec des contre-arguments très pragmatiques et instrumentaux. Ils tentent ainsi de déconstruire cette stigmatisation sociale et de légitimer le besoin de soutien pour les familles. J’ai moi-même utilisé certains de ces arguments dans mon propre travail. Les deux principales réfutations du discours sur le choix rationnel sont : 1) la plupart des membres des familles sont « innocents » de tout crime, n’ont enfreint aucune loi et ne sont pas responsables des crimes de leurs proches ; 2) soutenir les familles est une forme de prévention du crime, car, d’une part, les relations familiales réduisent le crime et le récidivisme en devenant un soutien à la réintégration après l’incarcération et, d’autre part, fournir un soutien aux familles réduit les crimes intergénérationnels puisque les enfants de prisonniers sont plus à risque de délinquance et donc de finir par être incarcérés eux-mêmes.

Ces stratégies rhétoriques servent aux groupes qui offrent des services et du soutien aux familles dans la promotion de leurs programmes et leurs demandes de financement, autant auprès de sources gouvernementales que de donateurs privés. Malheureusement, lorsque ces arguments sont soumis à un oeil critique, il devient manifeste qu’ils fonctionnent dans une logique néolibérale centrale à l’idée de « gestion du risque », qu’ils essaient de combattre. Ma propre réflexion et mon analyse prennent racine dans mon propre malaise devant les rhétoriques de réduction du risque et de contrôle du crime dans la défense d’enjeux qui seraient mieux compris en tant que question de droits de la personne. Ainsi, dans ce qui suit, je me penche sur les dangers et les écueils de ces légitimations en argumentant que les spécialistes et les activistes qui se préoccupent des problèmes que connaissent les familles de détenus doivent être attentifs aux conséquences potentielles et non intentionnelles de leurs discours sur le projet plus large de la réforme, la décriminalisation et l’abolition des prisons.

Le leurre de l’innocence

La plupart des proches de détenus sont « innocents ». Ils n’ont commis aucun crime. Ceci est un concept particulièrement touchant dans un contexte où on évoque les enfants innocents de parents incarcérés. Le discours de l’innocence est mobilisé tout particulièrement par des organismes de bienfaisance qui cherchent des donateurs pour leur cause et dans les arguments des organismes publics et des universitaires qui cherchent à convaincre des individus de s’inquiéter de la punition collatérale infligée aux familles en faisant en sorte qu’on s’identifie à elles. En d’autres termes, le discours sur l’innocence est un raccourci pris pour que le lecteur voie que ces familles ne sont pas Autres, qu’elles sont comme toutes les autres. Par exemple, l’organisme britannique Families Outside insiste, sur son site web : « La famille n’est pas coupable ; n’importe qui peut voir un membre de sa famille aller en prison[4]. » Le discours de l’innocence vient plus précisément à l’encontre de la pensée néolibérale du choix rationnel en plaçant les familles comme des victimes sans choix ni capacité d’agir dans la situation. Le discours de l’innocence séduit en effet les membres plus libéraux du public qui ne sont pas personnellement touchés par le crime, puisqu’ils peuvent comprendre l’injustice apparente d’une telle punition et les difficultés que connaissent ceux qui n’ont aucun contrôle sur leurs propres circonstances. Ces victimes innocentes sont présentées comme étant « dignes » d’être aidées et qu’on s’en préoccupe, ce que l’on ne ferait pas pour des gens en plein contrôle de leur destin.

Plusieurs personnes dont la vie est affectée par l’incarcération d’un proche ne sont donc pas impliquées elles-mêmes dans des activités criminelles. Mais cette manière conservatrice de penser doit toutefois admettre que les proches de détenus ne sont pas tous innocents, soit que ce ne sont pas tous les membres de famille de détenus qui n’ont jamais enfreint de loi ou été eux-mêmes incarcérés. Devant les recherches en criminologie sur le caractère intergénérationnel de certains comportements illégaux et sur la prévalence de la délinquance dans les communautés marginalisées et ethnicisées, adopter le discours de l’innocence revient à affirmer que puisque certains proches sont « dignes » de respect et méritent de l’aide, ces droits devraient s’étendre à toutes les familles de détenus. Cet argument repose sur l’idée que la dignité, les droits et l’aide se méritent par la conformité aux attentes sociales et que, par le même raisonnement, on peut les refuser légitimement aux individus qui ont enfreint la loi. Ceci aurait des implications négatives pour les familles qui ont eu des démêlés antérieurs avec le système de justice pénale.

Dans le cadre des politiques de visite du SCC, on marque déjà une distinction entre les membres de la famille qui ont un casier judiciaire et les autres. Tous les visiteurs de pénitenciers canadiens doivent se soumettre à une vérification de leurs antécédents. Avoir un casier judiciaire est souvent un motif d’interdiction de visiter un proche en prison, même si les antécédents ne posent aucun risque concret à la sécurité de l’institution. En ce sens, le privilège d’une visite est accordé aux membres « innocents » des familles et refusé à ceux qui ont un passé criminel. Cette discrimination se justifie par la logique de gestion du risque et par l’argument du choix rationnel qui veut que ces individus soient responsables de leur sort. Toutefois, le discours de l’innocence a aussi des implications plus vastes dans les discussions sur les droits des prisonniers eux-mêmes.

Si nous sommes convaincus par l’idée que la dignité, le droit d’être traité avec respect, l’aide et les ressources dépendent de l’« innocence » légale, alors il n’y a aucune raison logique de défendre ces droits pour les prisonniers. Le discours de l’innocence pour légitimer l’aide et les droits affaiblit ainsi les arguments des abolitionnistes et réformistes du milieu carcéral qui avancent que les difficultés provoquées par l’emprisonnement sont profondément inhumaines et non éthiques. Les prisonniers n’auraient ainsi pas droit au statut d’innocence légale qui leur garantirait leurs droits et un traitement éthique (excepté ceux emprisonnés à tort). L’« innocence » des membres de la famille est et devrait rester sans importance lorsqu’il est question de l’accès des familles aux visites et du droit d’être traité avec dignité et respect, ainsi que de l’assistance financière et d’autres structures de soutien. Poussé à l’extrême, le contraire suggérerait une stratification (Goffman, 1963 ; voir aussi Hannem et Bruckert, 2012) des familles affectées par le crime et l’incarcération, entre ceux qui sont innocents et ceux qui ne le sont pas. C’est ce genre de raisonnement et la capacité de trier socialement les citoyens innocents et coupables qui influencent, par exemple, le refus de soutien social et économique aux gens ayant des casiers judiciaires dans certains États des États-Unis, et la privation de leurs droits. De manière générale, l’argument d’« innocence » comme justification de la dignité nuit à la conversation générale sur le caractère inhérent des droits de la personne dans le système de justice pénale. Cette rhétorique s’ajoute ensuite à l’idée que les proches « innocents » sont, concrètement, des outils précieux dans la prévention du récidivisme et de futures offenses.

Le soutien familial comme outil de prévention du crime

Des chercheurs socioconstructivistes ont pu déterminer que des stratégies efficaces de revendication pour attirer l’attention sur des problèmes sociaux perçus consisteraient en une série de déclarations qui donne au public des raisons suffisantes de s’inquiéter de la question (Best, 1987 ; Loseke, 2003). Autrement dit, on nous dirait pourquoi on devrait se préoccuper des problèmes qu’ils signalent. Lesdites déclarations peuvent puiser dans des valeurs sociales profondément ancrées comme elles peuvent être plus instrumentalisées et indiquer les avantages pour les citoyens et la collectivité dans son ensemble de résoudre les problèmes présents. Dans le cas des familles affectées par le crime, les déclarations les plus souvent utilisées pour obtenir le soutien de la collectivité sont plus concrètes et présentent les services aux familles de détenus comme un instrument de prévention du crime. Cette rhétorique procure une solide raison pour justifier d’accorder de l’argent public et privé aux familles de contrevenants et elle sous-entend un bénéfice légitime pour les communautés par l’amélioration de la sécurité publique. Par exemple, la déclaration du RCAFD[5], seul organisme national de défense des intérêts des familles affectées par l’incarcération, dit : « Construisons des communautés plus fortes et plus sécuritaires en soutenant les familles affectées par les comportements criminels, l’incarcération et la réintégration communautaire » (notre traduction ; nous soulignons). Le site du RCAFD poursuit :

Des études ont montré qu’en restant soudées, les familles parviennent mieux à la réinsertion d’une personne. Celle-ci récidive alors moins et a plus de chance de mener une meilleure vie. La mission du RCAFD est de préserver l’unité des familles en leur offrant les ressources, le soutien, les programmes et toute l’aide possible puisqu’elles sont un atout dans la réinsertion et pour la sécurité publique de toute la communauté.

notre traduction ; nous soulignons

Si le RCAFD propose maintes ressources importantes et utiles et s’implique beaucoup dans la sensibilisation des besoins des familles, la structure de l’organisme s’inspire de toute évidence d’une rhétorique qui utilise les familles comme clé de promotion du désistement et donc de la prévention du crime. Cette attitude est fréquente chez ces organismes, surtout en Amérique du Nord, et repose sur deux arguments principaux. D’abord, soutenir les familles et leur proposer des services leur permet de soutenir à leur tour leurs proches et d’offrir une aide au moment de la libération de prison. Ils réduisent ainsi les risques de récidive et améliorent les chances de réinsertion. Ensuite, cela permet de réduire le crime intergénérationnel en offrant aux enfants un soutien et une amélioration de leur qualité de vie. S’il existe des preuves de ces arguments pour les services aux familles, cette rhétorique risque de renforcer la stigmatisation et les préjugés à l’égard des familles des détenus. Je me pencherai à présent sur chacun de ces arguments afin de comprendre leur logique et leurs implications.

Soutien aux familles et réintégration

Malgré les preuves empiriques de l’importance des relations familiales dans la réduction du récidivisme et dans le soutien à la réinsertion sociale, se servir de cet argument pour encourager les visites de proches peut être une lame à double tranchant. D’abord et avant tout, pour revenir à mon argument sur l’innocence, on pourrait aussi dire qu’encourager ces visites pour les membres ayant eu des démêlés antérieurs avec le système de justice pénale pourrait par exemple, si l’on s’inspire des travaux de Sutherland sur l’association différentielle, nuire à leurs relations sur le plan de la prévention du crime. Donc, garder contact avec un proche incarcéré ou libéré conditionnellement ne devrait pas être encouragé. En fait, les politiques de SCC exigeant que les visiteurs potentiels se soumettent à des fouilles et des vérifications de leurs antécédents tiennent déjà pour acquis les risques de laisser des proches qui ont un casier judiciaire visiter des détenus en prison. De plus, le processus que suit le SCC pour évaluer le soutien aux familles et offrir un hébergement aux prisonniers admissibles à la libération conditionnelle – l’évaluation communautaire –, sous-entend que ce ne sont pas toutes les familles qui seraient adéquates pour agir en tant que structure de soutien ou tuteur légal.

Dans le cadre d’entretiens menés et décrits dans une recherche précédente, les membres de familles ayant participé à des évaluations communautaires ont dit s’être sentis jugés par SCC et ont expliqué que les agents de libération conditionnelle attendent des familles qu’elles supervisent et contrôlent leur proche une fois libéré de prison. Les familles trouvaient ce processus d’entrevue anxiogène et s’inquiétaient d’y donner les « bonnes » réponses aux questions : « des réponses honnêtes qui ne semblent pas fausses ou trop collaboratrices et qui les peindraient comme des influences stables et solidaires » pour leur proche (Hannem, 2008, p. 255-256, notre traduction). La notion de soutien ou de relation « adéquate » a longtemps été soulevée dans la structure de contrôle de notre système judiciaire. Par exemple, une condition très fréquente de libération conditionnelle veut que le contrevenant libéré n’ait aucun contact avec d’autres « criminels connus ». En soutenant que les visites de la famille sont importantes dans la réduction du récidivisme et l’amélioration de la réinsertion sociale, les partisans des familles risquent ainsi de créer un système à deux vitesses dans la réponse à leurs besoins en fonction de l’innocence légale et la perception de leur caractère adéquat comme modèle ou influence (pour encourager un comportement social plutôt qu’illégal). Les membres de familles ayant des antécédents criminels seraient alors vus comme des relations inappropriées qui ne méritent ni les privilèges des visites ni aucun soutien puisqu’ils ne participent pas à accroître la sécurité publique.

Ensuite, attribuer une réinsertion sociale réussie au soutien de la famille risque de créer des responsabilités et des obligations de surveillance et d’évaluation du comportement du proche. Les coupes dans les programmes et les services de soutien aux prisonniers libérés créent un poids supplémentaire pour les familles, qui deviennent donc celles qui répondent à leurs besoins, cherchant des services d’un côté et de l’autre pour soutenir leurs proches en l’absence du type de soutien holistique et généralisé qui est le plus efficace dans la prévention des récidives et la réintégration. Mais imposer cette responsabilité aux familles est une source notable de stress et soulève la question de la responsabilité lorsqu’un proche récidive. Les familles sont déjà, dans les discours médiatisés, responsables des comportements illégaux de leurs proches. Lorsqu’un enfant enfreint la loi, les parents sont considérés comme incompétents et nombre de conjoints (conjointes surtout) de criminels sont considérés comme complices ou volontairement aveugles aux crimes de leur partenaire. En outre, dans une optique néolibérale, on observe de plus en plus la responsabilisation des prisonniers lorsqu’il est question de leur propre réhabilitation et réinsertion sociale (voir, par exemple, O’Malley, 1999 ; Shantz, Kilty et Frigon, 2009 ; Turnbull et Hannah-Moffatt, 2009). Au moment de la libération du parent, les familles deviennent impliquées en tant que facteur d’atténuation des risques instrumentalisé. Elles sont ainsi généralement considérées comme étant responsables de s’assurer du respect des conditions de libération de leurs proches, par exemple lorsqu’elles sont chargées de la supervision de ces derniers lors de sentences conditionnelles et de détentions à domicile (voir Roberts, 2004, 2006).

Une source de stress supplémentaire s’impose donc aux familles chargées de soutenir un proche lors de sa libération conditionnelle, ce qui est une raison suffisante de s’inquiéter de l’implication des familles dans la démarche correctionnelle. Une inquiétude plus générale découle toutefois de mon premier argument. Le danger est que les familles considérées comme des influences plus ou moins positives sur leurs proches risquent encore de se voir exclues et de ne recevoir aucun soutien dans le maintien d’une relation avec ces derniers. Si le soutien aux familles et les privilèges de visite n’étaient accordés qu’aux familles considérées comme « adéquates », le droit à une relation de famille aimante serait restreint. Le SCC effectue en fait des évaluations du soutien et du domicile familial et a déjà le pouvoir de juger une famille comme étant adéquate ou non et même de refuser à des contrevenants le retour au domicile au moment de la libération conditionnelle. Dans l’intérêt d’une réinsertion sociale sécuritaire, on pourrait s’accorder pour dire que la restriction des choix de résidence à ce moment du processus appartient à l’État. Mais, par principe, le droit d’entretenir une relation familiale et d’être en communication avec des proches ne devrait pas dépendre de l’approbation gouvernementale. Les relations familiales devraient plutôt être soutenues et reconnues pour leur valeur humaine intrinsèque, pas juste comme un outil dans la réduction des risques et la réinsertion sociale.

Un autre argument présentant le soutien familial comme un facteur de réduction du crime avance que fournir un soutien aux familles réduit les crimes intergénérationnels en limitant le risque que des enfants de prisonniers tombent dans la délinquance et soient incarcérés à leur tour. Des organismes publics et des groupes de défense citent régulièrement les statistiques voulant que les enfants de prisonniers soient cinq à six fois plus enclins à être incarcérés que ceux qui n’ont pas de parents en prison (voir, par exemple, Children of Incarcerated Parents Project, 2002 ; Petersilia, 2001). Les travaux sur la question semblent bien moins catégoriques (Hagan et Dinovitzer, 1999 ; Travis, Western et Redburn, 2014). Ces statistiques sont fondées sur des sondages de personnes incarcérées, comme la recherche américaine menée par Beck et al. (1993), où 37 % des prisonniers ont dit avoir un proche incarcéré. Toutefois, seulement 7 % d’entre eux ont dit avoir un parent incarcéré, et 31 % avaient un frère qui était allé en prison. Il est difficile de comparer ces données au nombre d’Américains ayant eu un parent incarcéré puisqu’il n’existe aucune statistique sur la question, seulement des estimations (Johnston, 1995).

Dans un calcul du nombre de mineurs dont le père était en prison au cours des vingt années, de 1980 à 2000, Western et Wildeman (2009) ont conclu que ce nombre est passé d’environ 350 000 à 2,1 millions, soit environ 3 % des enfants américains en 2000.

Travis et al., 2014, p. 260, notre traduction

Selon Nell Berstein (2005), un enfant américain sur dix connaîtra l’incarcération d’un parent à un point de sa vie. Si ces chiffres sont exacts, les enfants de prisonniers ne sont donc pas surreprésentés dans la population des prisons américaines. Mais Beck, Kline et Greenfeld (1998) stipulent, quant à eux, que 25 % des jeunes incarcérés ont leur père qui l’est ou qui l’a été. Impossible de savoir, toutefois, si cette surreprésentation continue à l’âge adulte.

Les données limitées dont on dispose semblent donc indiquer qu’avoir un parent incarcéré augmente les risques d’agression et d’implication criminelle chez les jeunes, mais peu d’études ont pu contrôler les facteurs aggravants et la comorbidité avec, notamment, le statut socioéconomique, l’origine ethnique, les pairs, la supervision (ou son absence) et les autres facteurs de déséquilibre familial. Reste que les groupes de défense demandant le soutien du gouvernement et de la population pour les services réservés aux besoins des enfants dont un parent est incarcéré utilisent souvent l’idée que ces jeunes sont à risque de tomber dans des comportements criminels. Ils argumentent que le soutien et l’intervention précoces réduisent les risques et aident ces enfants à vivre une vie prosociale, faisant ainsi épargner aux contribuables et aux collectivités le coût de futures interventions en justice criminelle. Par exemple, le groupe Fostering, Empowering, Advocating, Together (FEAT) for Children of Incarcerated Parents du sud de l’Ontario présente ainsi son programme de mentorat :

Les enfants et les jeunes touchés par la criminalité familiale et l’emprisonnement connaissent une forme traumatisante d’abandon par des modèles importants, ce qui amène souvent un manque d’estime de soi, de la turbulence en milieu scolaire, une baisse des résultats scolaires et l’adoption de comportements antisociaux et délinquants qui augmentent les risques de participation dans des crimes juvéniles. Notre projet est axé sur le développement de compétences et cherche à fournir des modèles positifs qui découragent les attitudes et comportements antisociaux pour aider à autonomiser les enfants à risque des quartiers de Toronto et combattre le cycle du crime intergénérationnel. (2016 ; nous soulignons)

Il est indéniable que cet organisme offre un soutien et des ressources précieuses aux enfants et aux familles touchées par l’incarcération – leur importance n’est pas remise en question. Le problème que je voudrais relever ici est le fait de présenter la nécessité de ce soutien par les images et stéréotypes évoqués dans les esprits des citoyens inquiets ou des divers agents de l’État. Les enfants ayant subi la perte d’un parent deviennent inutilement porteurs d’une stigmatisation liée à la criminalité potentielle (et probable ?) pour attirer la sympathie du public. Ce discours est à double tranchant dans la mesure où on lie le besoin de soutenir ces enfants de détenus au risque d’offense criminelle, créant ainsi une stigmatisation structurelle (Hannem, 2012b) pour ces enfants qui seraient à risque et dépendants de l’intervention, et les marquant comme étant différents et plus à problème que d’autres enfants. Au-delà de la simple association à la criminalité, ce discours laisse entendre que ces enfants sont eux-mêmes à risque, ce qui rend légitime l’intervention de l’État et des groupes de services sociaux dans la réduction d’éventuels problèmes. Paradoxalement, c’est précisément ce stigmate de la criminalité, du risque ou du danger et des familles « coupables » qui fait de ces familles de détenus des personnes « moins dignes » de soutien dans l’esprit des gens. Toute possibilité de soutien devient alors liée au risque, à la gestion du risque et à la prévention du crime en vue de réduire les coûts futurs pour le système de justice pénale. Le concept de droits fondamentaux ou d’une simple volonté altruiste d’aider des enfants qui ont souffert un traumatisme terrible, la perte d’un parent, est simplement évacué dans la rhétorique coûts-bénéfices de la réduction du crime.

Discussion et conclusion

La convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant (CNURDE) aborde spécifiquement les droits des enfants de parents incarcérés dans l’article 9, qui veut que les enfants aient le droit d’être avec leurs parents et de maintenir leur relation avec eux, sauf si un parti légal juge que ce sera néfaste pour l’enfant (par exemple dans le cas d’abus). En 2001, lors d’une journée de discussion générale à l’ONU, les droits des enfants de parents incarcérés ont été abordés et des recommandations ont été formulées pour nuancer et préciser les intentions de l’article 9. Les recommandations du Comité sur les droits d’accès et de visite des enfants offrent un point intéressant :

Le Comité recommande que les États parties respectent le droit de l’enfant de visiter régulièrement le ou les parents incarcérés. Il recommande aussi que, chaque fois que possible, les États parties permettent de telles visites dans un environnement approprié pour un enfant (…) et pour une durée permettant de construire et de maintenir des liens forts. (…)

Les États parties devraient s’assurer autant que possible de placer le parent incarcéré dans un établissement rapproché de son enfant afin de respecter le droit de visite et de contact de l’enfant. Lorsque l’établissement carcéral se trouve à une distance significative ou demande un temps de déplacement et un coût substantiels, les États parties doivent faciliter ou financer le voyagement et tout autre coût lié à la visite.

Comité des droits de l’enfant, 2011, p. 7, notre traduction ; nous soulignons

D’ailleurs, les recommandations du Comité quant aux visites des parents incarcérés ne sont aucunement fondées sur le risque d’une criminalité future de ces enfants ni sur le soutien aux familles qui serait essentiel à la réinsertion sociale et à l’absence de récidive criminelle. Le Comité reconnaît plutôt indubitablement le droit de tous les enfants à une relation avec leurs parents sans que ce droit soit dépendant du droit de l’État à punir. De manière plus générale, le CNURDE s’inscrit dans une logique de l’innocence de l’enfant, mais l’accent mis sur les droits de ce dernier n’empiète aucunement sur cette innocence ni ne crée une hiérarchie entre des enfants « à risque » et « innocents ». Le discours du CNURDE évite toute stigmatisation structurelle qui contribuerait à approfondir la marginalisation des enfants et des familles affectées par l’incarcération.

Malheureusement, le CNURDE ne compte aucun mécanisme de mise en application et ne fournit que de simples directives à ses États membres (dont le Canada). Toutefois, les militants et les chercheurs qui s’inquiètent des implications de l’incarcération pour les enfants et les familles devraient peut-être s’inspirer de l’approche du CNURDE. Ce comité et ses recommandations établissent de bonnes bases pour un discours sur l’inclusion et sur les droits qui implique l’État, et pas seulement les organismes de bienfaisance, dans la prévention des dommages collatéraux de l’incarcération pour les familles et surtout pour les enfants. En attribuant à l’État la responsabilité de s’assurer du respect et de l’application de ces droits, les organismes de soutien aux familles n’auraient plus à travailler à changer la perception des citoyens et des agents de l’État imprégnée du discours de la gestion du risque et de la rhétorique coûts-bénéfices. Un financement stable de l’État est nécessaire pour assurer le respect des droits des familles affectées par l’incarcération. Une telle approche demanderait aussi que le budget du gouvernement reflète de manière plus précise les coûts collatéraux de l’incarcération, qui sont pour l’instant payés par les familles et les communautés.

Entretemps, en attendant des politiques et des idéologies qui permettraient de réduire les torts causés par le système carcéral, les chercheurs et les militants devraient s’inspirer de la convention de l’ONU pour construire un discours du soutien des familles qui soit fondé sur l’expression des droits de la personne et la dignité. Contrairement au discours de l’instrumentalisation des familles comme outil de prévention du crime et à la rhétorique de l’innocence pour attirer la sympathie du public, il serait plus efficace d’affirmer que les êtres humains ont droit à des relations familiales qui ne sont pas soumises à l’approbation de l’État ni menacées par une sentence d’incarcération. Changer ces discours alignerait les inquiétudes des familles affectées par l’incarcération sur le projet plus vaste et critique de l’abolition du système carcéral et assurerait que la réponse aux besoins des familles ne devienne pas conditionnelle à leur « innocence légale », leur responsabilisation ou même dépende de leur conformité à une conception gouvernementale de la famille « adéquate ». Un discours des droits inaliénables empêche en outre que les familles soient considérées comme responsables de leurs difficultés à cause de leurs « choix criticables » ou d’un manque de conformité aux exigences de la société.

Comme je l’ai déjà mentionné, la stigmatisation de courtoisie dont sont affligées les familles affectées par l’incarcération semble les rendre moins « dignes » de l’empathie et du soutien du public, à cause de leur association à la criminalité et d’une impression qu’elles sont en quelque sorte, au même titre que l’individu criminel, « responsables » de leur propre sort. Comme les abolitionnistes pénaux ont longtemps défendu que les dommages créés par le système carcéral sont injustes, les militants pour les droits des familles qui en sont affectées devraient tenir un discours du droit de la personne et de la justice qui ne repose pas sur l’innocence ou sur une rhétorique de prévention du crime. Les droits et le soutien accordé aux familles touchées par le crime et l’incarcération devraient être vus comme une question de droit de la personne et les torts causés aux familles par le système de justice pénale devraient être compris comme fondamentalement injustes et être combattus de manière holistique et systématique afin de déconstruire le stigmate social et culturel.