Corps de l’article

La question des nouvelles frontières du management publique interpelle les managers et les chercheurs en sciences de gestion, sciences juridiques et sociales. Elle s’inscrit dans un courant ancien et fécond. Dès 1936, Gaus, White et Dimock notaient dans la préface de leur ouvrage « The Frontiers of Public Administration » que « l’étudiant en administration publique est désormais confronté à un torrent littéralement écrasant de nouveaux organismes administratifs et problèmes devant être assimilés et évalués ». Ce constat reste d’actualité. Les mutations sociétales, la redéfinition des missions de l’État, la reconfiguration des institutions territoriales … sont autant de phénomènes qui invitent à s’interroger sur « les nouveaux territoires du management public ».

Depuis la fin du XXe siècle, les pays du monde entier ont été les témoins de bouleversements sociaux, économiques, démographiques, politiques et techniques complexes qui ont nécessité des changements dans la gouvernance publique. Ces bouleversements ont conduit à l’avènement très largement répandu, selon des rythmes et modalités très variés des principes du New Public Management (NPM) dans la gestion publique. Après de longues années de réformes, plus ou moins inspirées des préceptes du New Public Management, il convient naturellement de s’interroger sur les nouvelles frontières de l’action et de la gestion publique, nouvelles frontières politiques, institutionnelles, technologiques mais aussi politiques et conceptuelles.

Les enjeux d’un bouleversement du cadre institutionnel territorial

La première question ayant trait à la façon de distribuer la puissance et le pouvoir entre le niveau national et infranational mais aussi entre acteurs, continue à occuper une position de premier plan dans l’agenda politique national de la plupart des pays. La décentralisation est un phénomène complexe avec la question de la répartition géographique du pouvoir et des compétences entre les entités au niveau international, national, sous-national et local de la gouvernance. Le débat sur la réforme territoriale et la question liée des effets de la décentralisation et de la déconcentration sur les politiques publiques soulèvent le problème du couple différenciation-intégration des politiques locales au sein d’une même nation. Les territoires et les politiques publiques sont-elles élaborées de la même façon ? Solange Hernandez et Camille Fiore montrent notamment dans leur étude présentée dans le numéro thématique comment et pourquoi les organisations publiques territoriales répondent différemment aux injonctions de développement durable.

Le changement de paysage institutionnel modifie profondément l’autonomie et la responsabilité des organisations publiques et de leurs acteurs. En France, les établissements publics de coopération intercommunale intégrés (métropoles, communautés urbaines, d’agglomération et de communes) constituent en effet une nouvelle échelle de référence pour bon nombre de sujets (Regourd et alii, 2012; Monjal, Aubelle, 2013). Ces changements posent la question de la mise en oeuvre de cette responsabilité.

La question de la gouvernance et de l’avènement du Post-NPM

La deuxième question porte sur l’après NPM suite à une sérieuse mise en cause des réformes néolibérales depuis les crises financières 2008 et 2011. Cette question comporte plusieurs interrogations. Notamment, elle interroge sur la place des acteurs sociaux dans la gouvernance publique et sur l’avènement de la société civile dans la politique publique dans une perspective dite de « New Public Governance » (Osborn, 2006), consacrée internationalement dans les prescriptions de l’agenda 21 mais aussi dans la gestion publique quotidienne par le renforcement des droits de l’usager. Elle pose la question non du partage du territoire entre organisations mais de la construction commune d’un territoire pour pouvoir agir de façon coordonnée (Chappoz, 2008).

L’article de Anne Berthinier-Poncet, Simona Grama et Sana Saidi sur la gouvernance d’un technopôle met au coeur de son analyse cette question de la gouvernance et de son efficacité.

Ainsi les réformes post-NPM (Klijn 2011) sont principalement orientées vers l’inter-organisationnel. Elles visent à améliorer la coordination horizontale des organisations publiques entre elles et avec les autres acteurs. Une notion communément admise est que la collaboration entre les frontières organisationnelles, politiques et administratives permettra une élaboration de politiques une mise en oeuvre et une prestation de services plus efficaces. Les politiciens sont censés être porteurs du compromis entre de multiples parties prenantes, tandis que les fonctionnaires sont des gestionnaires de réseaux et les dirigeants de partenariat. Ces évolutions impliquent un modèle mixte de services mélangeant prestations internes et services soumis aux lois du marché. Elles peuvent conduire à l’avènement d’un style de gestion holistique axé sur le client, avec un accent mis sur les procédures, l’impartialité, les normes éthiques et un contrôle fort centralisé (Lodge et Gill, 2010; Christensen, 2012; Im,2014). Cette thématique soulève notamment la question du rôle des différentes parties prenantes, du rôle assigné au contrôle de gestion, et de l’éthique et des valeurs de service public dans la conduite de l’action publique.

La question de la frontière public-privé

La troisième question induite par les réformes et évolutions engagées depuis le NPM est celle de la frontière entre publique et privé. Y-a-t-il encore des singularités dans le management dit « public », et un territoire propre pour la gestion publique ? Certains auteurs insistent sur les ressemblances entre organisations publiques et privés (Murray, 1975; Driscoll, Cowger, Egan, 1979; Parenteau, 1992; Allison, 1980) et mettent en évidence les composantes fondamentales, la similitude de l’activité de gérer quel que soit le milieu le rapprochement et même la fusion des deux secteurs public et privé. Cependant selon Bozeman (1987) deux formes d’autorité animent le corps social, l’autorité politique et l’autorité économique. Une organisation est dès lors publique dans la mesure où elle exerce ou est contrainte par l’autorité politique. La distinction en ces deux sphères est également liée aux traditions relatives à la conception du droit (Caillosse, 1996). Pour autant, la mise en oeuvre du Nouveau Management Public au sein de la sphère publique se traduit notamment par des déplacements de frontières entre les sphères publique et privée en termes de fourniture des services publics qu’il s’agisse d’externalisation de certaines fonctions dans les organisations publiques ou de la réalisation de partenariats public-privé (Hafsi, 2009), mais aussi en termes de porosité entres valeurs publiques et privées. Il convient notamment de se demander s’il existe encore une spécificité dans le domaine de la gestion des ressources humaines dans quelle mesure les éléments du NPM comme le recours au contrat, au marché, à la logique l’efficience sont bien ancrées dans la conduite des organisations mais aussi dans les valeurs publiques et sont source de motivation pour les agents. Les articles de Yves Emery et Armand Brice Kouadio d’une part et de Pierre Charles Pupion et alii d’autre part, se situent bien dans ce champ en apportant une logique internationale. La première étude de Emery et Kouadio permet de mieux cerner les éléments de ce contrat psychologique liant l’agent public à l’employeur public. L’étude de Pierre Charles Pupion et alii se situe bien dans ce champ en étudiant de façon internationalement comparée la place des valeurs publiques et de la motivation de service publique dans la conduite des agents publics. Elle permet aussi de voir dans quelle mesure les valeurs publiques sont intégrées dans les valeurs publiques de référence.

Les enjeux pour la gestion publique des nouveaux territoires numériques

L’émergence de nouveaux territoires numériques (e-gouvernement versus e-démocratie, e-administration versus e-organisation) bouleverse la géographie des institutions territoriales. Diverses e-stratégies ont été développées depuis les fin des années 90 en ce qui concerne le développement des technologies de l’information et de la communication (TIC) dans le fonctionnement des services publics et ceci à tous les niveaux, local, national et supranational (Gerbod, Paquet, 2001). Ces technologies visent notamment à améliorer le service au citoyen (mise à disposition de formulaires et déclarations en ligne) à faciliter la communication entre services et entre administrations et à alléger la gestion des services (archivage des documents électroniques, etc.).

Les stratégies de mise en place de ces nouveaux territoires numériques sont complexes et soulèvent des questions juridiques de sécurité et de protection des données, de respect de la vie privée et de la valeur de l’authentification. Elles posent le problème de la compatibilité entre des objectifs managériaux d’interopérabilité et d’intégration des bases de données et ceux du respect des normes publiques et démocratiques d’équilibre des pouvoirs entre entités et entre entités et citoyens. Faut-il gouverner de plus en plus à l’aide de données agrégées de profils d’usagers ? Quelle place faut-il donner à ce nouveau territoire ? Quels rôles peuvent-ils être alloués aux différentes parties prenantes (dont les usagers …) dans l’élaboration et l’évaluation de ces politiques publiques numériques ?

Sans prétendre couvrir de façon exhaustive l’ensemble de ces thèmes, quatre contributions précitées apportent des éclairages originaux à ces questions.

Solange Hernandez et Camille Fiore dans leur article intitulé « Le développement durable pour tous, tous pour le développement durable ! Quelle traduction par les organisations publiques territoriales ? » cherchent à comprendre comment les organisations publiques territoriales répondent aux injonctions de développement durable. L’étude de onze territoires en France, permet aux auteures d’ observer qu’en l’absence de cadre précis pour l’action, les collectivités étudiées proposent des actions de développement durables d’une grande hétérogénéité qui restent souvent au stade de l’intention mais qui permet toutefois de donner le change face aux injonctions externes. Les opérations réalisées prennent le plus souvent la forme d’actions techniques et économiques au caractère innovant limité. Autrement dit, les territoires n’en sont qu’aux balbutiements en matière de développement durable.

Anne Berthinier-Poncet, Simona Grama et Sana Saidi dans leur contribution intitulée « Convergences ou divergences de vues ? L’effet des différences de perception entre gouvernance et entreprises d’un technopôle sur l’innovation » examinent les différences de perception entre gouvernance et entreprises au regard des pratiques institutionnelles d’innovation du technopôle et discutent de l’impact de ces différences sur la performance d’innovation des entreprises technopolitaines. En plus des apports théoriques sur la gouvernance des clusters et les pratiques de soutien à l’innovation collaborative, leur article éclaire l’action des pouvoirs publics car il constitue une base pour élaborer un outil de pilotage stratégique des clusters d’innovation.

Yves Emery et Armand Brice Kouadio dans leur article intitulé « Marque employeur et stratégies RH pour les employeurs publics. Le cas du bassin d’emploi Franco-Valdo-Genevois » comparent les politiques de ressources humaines des employeurs publics suisse-romands et français; l’enjeu étant d’attirer et conserver les meilleurs talents sur un marché de l’emploi concurrentiel. Les concepts de « marque employeur » et de « contrat psychologique » permettent d’expliciter la stratégie d’attraction et de fidélisation des employeurs publics.

Pierre-Charles Pupion, Hae-Ok Pyun, Kwang-Jai Yun, Philippe Dorbaire, David Huron, Jungho Park et Yugang Guo dans leur contribution intitulée « De la motivation à l’engagement pour le service public : Etude comparative entre la France, la Chine et la Corée du Sud » vise à modéliser le processus de motivation-engagement à l’égard du secteur public. Le concept de « MSP », est-il universel ou doit-il s’appliquer et s’interpréter différemment selon les cultures nationales ? Leur recherche comparative menée en Chine, en Corée du Sud et en France montre la spécificité de la motivation de service public par pays et son influence sur l’engagement organisationnel.


The question of the new frontiers of Public Management draws the attention of managers and researchers in Business, Legal and Social Sciences. It is part of an old and fruitful movement. Since 1936, Gaus, White and Dimock mentioned in the preface to their book “The Frontiers of Public Administration” that “the student in Public Administration is now faced with a positively overwhelming barrage of new administrative bodies and issues that need to be absorbed and assessed”. This observation remains relevant. Societal changes, redefinition of State’s missions, territorial institutions re-engineering… are among the phenomena that raise questions about the “new frontiers of Public Management “.

Since the end of the 20th century, countries worldwide have experienced complex social, economic, demographic, political and technical upheavals which required changes in public governance. These upheavals led to the very widespread advent, at very different rates and using different methods, of the principles of New Public Management (NPM) in Public Management. After many years of reforms more or less inspired by the precepts of New Public Management, it is naturally worth considering the new frontiers of public action and management, the new political, institutional, technological but also political and conceptual frontiers.

Challenges related to the upheaval of the territorial institutional framework

The first question related to the way powers and authority are distributed between the national and sub-national levels but also among actors continues to be high on the national political agenda of many countries. Decentralization is a complex phenomenon as is the question of geographic distribution of power and competences to governance international, national, sub-national and local bodies. The debate on territorial reform and the question of the effects of decentralization and devolution on public policies raises the issue of differentiation-integration of local policies within a single nation. Are territories and public policies developed in the same way? Solange Hernandez and Camille Fiore, in particular in their study presented in the Thematic issue, show how and why public territorial policies meet sustainable development demands differently.

The change in the institutional landscape fundamentally alters the autonomy and responsibility of public organizations and their actors. In France, public institutions of integrated intercommunal cooperation (cities, urban communities, municipal and neighbourhood associations) are indeed a new reference scale for many issues (Regourd et alii, 2012; Monjal, Aubelle, 2013). These changes raise the question of how to implement this responsibility.

The question of governance and the advent of Post-NPM

The second question relates to the after NPM, following a serious questioning of neo-liberal reforms since the 2008 and 2011 financial crises. This question involves several elements. In particular, it questions the place of social actors in public governance and the emergence of civil society in public policy in a so-called “New Public Governance” perspective (Osborn, 2006), internationally recognized and embedded in Agenda 21 requirements but also in daily public management through the enhancement of users’ rights. It does not raise the question of sharing the territory between organizations but of building together a territory in order to be able to act in a coordinated manner (Chappoz, 2008).

The article by Anne Berthinier-Poncet, Simona Grama and Sana Saidi on the governance of a technology park puts this question of governance and its efficiency at the center of its analysis.

Thus, post-NPM reforms (Klijn 2011) are mainly oriented toward the inter-organizational dimension. They aim to improve the horizontal coordination of public organizations between them and with other actors. A commonly agreed notion is that collaboration along organizational, political and administrative frontiers will allow to develop policies, implement and deliver services more efficiently. Politicians supposedly support a compromise between multiple stakeholders whereas civil servants are network and partnership managers. These developments involve a mixed model of services combining internal services and services subject to market forces. They may lead to the advent of a holistic management style focused on the customer with an emphasis on procedures, impartiality, ethical standards and rather centralized control (Lodge et Gill, 2010; Christensen, 2012; Im,2014). This thematic raises also the question of the role of the various stakeholders, the role attributed to management control, the ethics and values of public service in the conduct of public action.

The question of the dividing line between public and private sector

The third question induced by reforms and developments undertaken since NPM is the dividing line between public and private sector. Are there still singularities in the so-called “public” management and a proper frontier of public management? Some authors dwell upon the similarity between public and private organizations (Murray, 1975; Driscoll, Cowger, Egan, 1979; Parenteau, 1992; Allison, 1980) and point out the fundamental components, the similarity of management activity irrespective of the environment, the integration or even merger of both public and private sectors. However, according to Bozeman (1987), two forms of authority apply to the social structure, political and economic authority. An organization is therefore public in so far as it exercises or is constrained by the political authority. This division into two spheres is also related to traditions in terms of concept of Law (Caillosse, 1996). Furthermore, the implementation of New Public Management within the public sphere is reflected in movements in frontiers between the public and the private spheres in terms of public service provision whether through outsourcing of some functions in public organizations or public–private partnerships (Hafsi, 2009), but also in terms of porosity between public and private values. In this regard, we should ask ourselves whether there still is a specificity of Human Resource Management, to which extent NMP elements such as the use of contracting, market, the logics of efficiency are well grounded in corporate operation but also in public values and are incentives for agents. Articles by Yves Emery and Armand Brice Kouadio on the one hand, Pierre Charles Pupion and alii on the other hand relate directly to this specific issue and add an international dimension. The first study by Emery and Kouadio helps better identify the elements of the psychological contract which binds the public agent to the public employer. The study by Pierre Charles Pupion and alii really addresses this very problem by comparing internationally the place of public values and public service motivation in public agents’ behaviour. It also helps ascertain to what extent public values are integrated into reference public values.

Challenges of new digital frontiers for public management

The emergence of new digital frontiers (e-government versus e-democracy, e-administration versus e-organization) transforms the geography of territorial institutions. Various e-strategies have been developed since the end of the nineties in terms of development of Information and Communication Technology (TIC) in the operation of public services at all levels, local, national and supranational (Gerbod, Paquet, 2001). These technologies aim in particular to improve the service to citizens (online forms and declarations) to facilitate communication between services and between administrations and to simplify service management (archiving electronic documents, etc.).

The strategies for implementing these new digital frontiers are complex and raise legal questions in terms of data security and protection, privacy and authentification value. They raise the problem of compatibility between managerial objectives of database interoperability and integration and of respect of public and democratic standards in terms of balance of power between institutions and between institutions and citizens. Should we govern more and more with the help of users’ profiles aggregated data? What place should be devoted to this new frontier? What roles may be attributed to the various stakeholders (including users..) in the development and assessment of these public digital policies?

Without intending to cover exhaustively all these themes, four above-mentioned contributions provide original insights into these questions.

Solange Hernandez and Camille Fiore in their article entitled “Sustainable development for all, all for sustainable development! How does it translate for territorial public organizations? look into how territorial public organizations meet sustainable development demands. The study of eleven regions in France allow the authors to point out that without a clear framework for action, the studied regional authorities suggest very heterogeneous sustainable development actions which represent no more than good intentions even though they sometimes allow to put up a front in the face of external injunctions. The operations carried out often take the form of technical and economic actions with very limited innovation.

In other words, sustainable development is still in its infancy in territories.

Anne Berthinier-Poncet, Simona Grama and Sana Saidi in their contribution entitled “Convergence or divergence of views? The effect of differences in perception between governance and companies of an innovation technology park” examine the differences in perception between governance and companies with regard to institutional practices in the innovation technology park and discuss the impact of these differences on the innovation performance of the technology park companies. In addition to theoretical input on cluster governance and practices of collaborative innovation support, their article sheds light on the action of public authorities as it provides a basis for developing a strategic steering tool for innovation clusters.

Yves Emery and Armand Brice Kouadio in their article entitled “Employer brand and HR strategies for public employers. The case of the France-Vaud-Geneva employment area” compare human resources policies of Swiss-Roman and French public employers; the goal is to attract and keep the best talents in a competitive labour market. The “employer brand” and “psychological contract” concepts help clarify the strategy to attract and retain public employers.

Pierre-Charles Pupion, Hae-Ok Pyun, Kwang-Jai Yun, Philippe Dorbaire, David Huron, Jungho Park and Yugang Guo in their contribution entitled “From motivation to commitment in public service: A comparative study between France, China and South Korea” aim to model the motivation-commitment process with regard to the public sector. Is the concept of “MSP”, universal or should it apply and be differently interpreted according to national cultures? Their comparative research carried out in China, South Korea and France shows the specificity of public service motivation per country and its influence on organizational commitment.


La cuestión de las nuevas fronteras de la gestión pública suscita el interés de directivos e investigadores en ciencias de la gestión, jurídicas y sociales. Es parte de una corriente antigua y fecunda. Ya en 1936, Gaus, White y Dimock señalaban en el prefacio de su libro The Frontiers of Public Administration que “el estudiante de administración pública se enfrenta ahora a un torrente literalmente abrumador de nuevos organismos administrativos y problemas a asimilar y evaluar”. Esta observación sigue siendo de actualidad. Las mutaciones sociales, la redefinición de las funciones del estado, la reconfiguración de las instituciones territoriales... son todos fenómenos que nos invitan a interrogarnos acerca de “los nuevos territorios de la gestión pública”.

Desde finales del siglo XX, los países del mundo entero han sido testigos de trastornos, sociales, económicos, demográficos, políticos y técnicos complejos que han requerido cambios en la gobernanza pública. Estos cambios condujeron a la aparición generalizada, aunque con ritmos y modalidades variados, de los principios de la Nueva Gestión Pública o NGP (New Public Management o NPM) en la gestión pública. Después de largos años de reformas más o menos inspiradas en los preceptos de la nueva gestión pública, conviene naturalmente interrogarse sobre las nuevas fronteras de la acción y de la gestión pública, las nuevas fronteras institucionales, tecnológicas, y también políticas y conceptuales.

Las cuestiones de una transformación del marco institucional territorial

La primera cuestión relacionada con la manera de distribuir el poder entre el nivel nacional e infranacional, y también entre los actores, continúa ocupando una posición prominente en la agenda política nacional de la mayoría de los países. La descentralización es un fenómeno complejo junto con la cuestión de la distribución geográfica del poder y de las responsabilidades entre las entidades a nivel internacional, nacional, infranacional y local de la gobernanza. El debate sobre la reforma territorial y la cuestión conexa de los efectos de la descentralización y la desconcentración en las políticas públicas plantea el problema del par diferenciación-integración de las políticas locales dentro de una misma nación. ¿Los territorios y las políticas públicas se elaboran de la misma manera? Solange Hernández y Camille Fiore muestran en su estudio, publicado en esta edición temática, cómo y por qué las organizaciones públicas territoriales responden de diferente manera a los preceptos del desarrollo sostenible.

El cambio de paisaje institucional modifica profundamente la autonomía y la responsabilidad de las organizaciones públicas y de sus actores. En Francia, los establecimientos públicos de cooperación intermunicipal integrados (áreas metropolitanas, comunidades urbanas, de asentamiento y de comunes) son de hecho una nueva escala de referencia para muchos temas (Regourd et alii, 2012; Monjal, Aubelle, 2013). Estos cambios plantean la cuestión de la puesta en práctica de dicha responsabilidad.

La cuestión de la gobernanza y el advenimiento del post-NGP

La segunda cuestión se refiere al post-NGP luego del profundo cuestionamiento de las reformas neoliberales que sucedió a las crisis financieras de 2008 y 2011. Este asunto conlleva varios interrogantes. En particular, un interrogante acerca del lugar de los actores sociales en la gobernanza pública y acerca de la llegada de la sociedad civil a la política pública desde la perspectiva del Nueva Gobernanza Pública (New Public Governance; Osborn, 2006), consagrada internacionalmente en las prescripciones de la Agenda 21, pero también en la gestión pública cotidiana mediante el fortalecimiento de los derechos del usuario. La cuestión no plantea la pregunta de la distribución del territorio entre las organizaciones, sino de la construcción conjunta de un territorio para poder actuar de forma coordinada (Chappoz, 2008).

El artículo de Anne Berthinier-Poncet, Simona Grama y Sana Saidi sobre la gobernanza de un parque tecnológico pone este tema de la gobernabilidad y de su eficacia en el centro de su análisis.

Así, las reformas post-NGP (Klijn 2011) están dirigidas principalmente hacia lo interorganizacional. Ellas apuntan a mejorar la coordinación horizontal de las organizaciones públicas entre sí y con los demás actores. Una noción comúnmente aceptada es que la colaboración entre las fronteras organizacionales, políticas y administrativas permitirá una elaboración de políticas, una aplicación y una prestación de servicios más eficaces. Se supone que los políticos son portadores del compromiso entre múltiples partes interesadas, mientras que los funcionarios son los administradores de esas redes y los gestores de esa asociación. Estas evoluciones implican un modelo mixto de servicios en el que se mezclan servicios internos y servicios sujetos a las leyes del mercado. Dichas evoluciones pueden conducir a la aparición de un estilo de gestión integral orientado al cliente o usuario, con énfasis en los procedimientos, la imparcialidad, la norma ética y un control fuerte centralizado (Lodge y Gill, 2010; Christensen, 2012; Im, 2014). Esta temática plantea la cuestión del papel de las distintas partes interesadas, el papel asignado al control de gestión, y de la ética y de los valores de servicio público en el ejercicio de la acción pública.

La cuestión de la frontera público privado

La tercera cuestión inducida por las reformas y desarrollos producidos después de la NGP es la cuestión de la frontera entre lo público y lo privado. ¿Existen todavía singularidades propias de la gestión “pública” y un territorio propio para la gestión pública? Algunos autores enfatizan las similitudes entre organismos públicos y privados (Murray, 1975; Driscoll, Cowger, Egan, 1979; Parenteau, 1992; Allison, 1980) y destacan los componentes fundamentales, la similitud de la actividad de administrar cualquiera sea el medio, la cercanía, e incluso la fusión, de los sectores público y privado. Sin embargo, según Bozeman (1987), dos formas de autoridad animan el cuerpo social, la autoridad política y la autoridad económica. Una organización es pública en la medida en que ejerce la autoridad política o está obligada por ella. La distinción entre estas dos esferas también se vincula con las tradiciones relacionadas con la concepción del derecho (Caillosse, 1996). Sin embargo, la aplicación de la Nueva Gestión Pública en la esfera pública se refleja particularmente en los desplazamientos de las fronteras entre lo público y lo privado en materia de prestación de servicios públicos, ya sea por la externalización de determinadas funciones en organismos públicos o por la realización de asociaciones público privadas (Hafsi, 2009), y también en términos de porosidad entre los valores públicos y privados. Convendría preguntarse, por ejemplo, si existe una especificidad en el campo de la gestión de recursos humanos y hasta qué punto los elementos de la Nueva Gestión Pública como, por ejemplo, el uso del contrato, el mercado, la lógica de eficiencia, están bien anclados en la conducta de las organizaciones y también en valores públicos y son fuente de motivación para los funcionarios. Los artículos de Yves Emery y Armand Brice Kouadio, por un lado, y de Pierre Charles Pupion y alii, por el otro, se sitúan en ese campo aportando una lógica internacional. El primer estudio, el de Emery y Kouadio, permite identificar mejor los elementos del contrato psicológico que vincula al funcionario público con el empleador público. El estudio de Pierre Charles Pupion y alii, también en ese campo, estudia de manera comparativa internacional el lugar que tienen los valores públicos y la motivación del servicio público en la conducta de los agentes públicos. También permite ver en qué medida los valores públicos se integran en los valores públicos de referencia.

Las cuestiones de la gestión pública de los nuevos territorios digitales

La aparición de nuevos territorios digitales (e-gobierno frente a e-democracia, e-administración frente a e-organización) transforma la geografía de las instituciones territoriales. Varias e-estrategias se han desarrollado desde finales de la década del 90 en relación con el desarrollo de las tecnologías de la información y de la comunicación (TIC) en el funcionamiento de los servicios públicos y esto en todos los niveles: local, nacional y supranacional (Gerbod, Paquet, 2001). Estas tecnologías apuntan a mejorar el servicio al ciudadano (disponibilidad de formularios y declaraciones en línea) para facilitar la comunicación entre servicios y entre administraciones y para facilitar la gestión de los servicios (archivo de documentos electrónicos, etcétera). Las estrategias de aplicación de estos nuevos territorios digitales son complejas y plantean cuestiones jurídicas de seguridad y protección de datos, de respeto de la privacidad y del valor de la autenticación. Plantean también el problema de la compatibilidad entre los objetivos de gestión de interoperabilidad y de integración de las bases de datos y los del respeto de las normas públicas y democráticas de equilibrio de los poderes entre entidades, y entre entidades y ciudadanos. ¿Se debe gobernar cada vez más utilizando los datos de los perfiles de los usuarios? ¿Qué lugar se le debe dar a este nuevo territorio? ¿Qué papeles se les puede asignar a las diferentes partes interesadas (incluyendo a los usuarios...) en la elaboración y la evaluación de estas políticas públicas digitales?

Sin pretender cubrir exhaustivamente todos estos temas, los cuatro trabajos antes mencionados aportan ideas originales sobre estos asuntos.

Solange Hernández y Camille Fiore, en su artículo titulado “¡Desarrollo sostenible para todos, todos para el desarrollo sostenible! ¿Qué traducción para las organizaciones públicas territoriales?, intentan comprender cómo las organizaciones públicas locales cumplen con los preceptos del desarrollo sostenible. El estudio de once territorios en Francia permite a las autoras observar que, en ausencia de un marco preciso para la acción, las colectividades estudiadas proponen acciones de desarrollo sostenible de una gran heterogeneidad, las cuales, a menudo, se quedan en la etapa de intención, pero salvan las apariencias frente a los preceptos externos. Las acciones realizadas, con frecuencia, toman la forma de actividades técnicas y económicas con carácter innovador limitado. En otras palabras, los territorios están en la infancia en términos de sostenibilidad.

Anne Berthinier-Poncet, Simona Grama et Sana Saidi, en su trabajo titulado “¿Convergencias o divergencias de visiones? El efecto de las diferencias de percepción de la innovación entre gobernanza y empresas de un parque tecnológico”, estudian las diferencias de percepción entre la gobernanza y las empresas en relación con las prácticas institucionales de innovación en un parque tecnológico y discuten el impacto de estas diferencias en el rendimiento de innovación de las empresas del parque. Además de las contribuciones teóricas en materia de gobernanza de los clusters y de prácticas de apoyo a la innovación colaborativa, este artículo también aclara la acción de los poderes públicos, constituyendo una base para desarrollar una herramienta de gestión estratégica de los clusters de innovación.

Yves Emery y Armand Brice Kouadio, en su artículo titulado “Marca de empleador y estrategias de recursos humanos para los empleadores públicos. El caso de la zona de empleo franco valdo ginebresa”, comparan las políticas de recursos humanos de los empleadores públicos suizos y franceses; el reto es atraer y retener los mejores talentos en un mercado de empleo competitivo. Los conceptos de “marca de empleador” y “contrato psicológico” permiten explicar la estrategia de atracción y retención de los empleadores públicos.

Pierre-Charles Pupion, Hae-Ok Pyun, Kwang-Jai Yun, Philippe Dorbaire, David Huron, Jungho Park y Yugang Guo en su contribución titulada “De la motivación al compromiso para el servicio público: estudio comparativo entre Francia, China y Corea del Sur”, tienen como objetivo elaborar el modelo del proceso de motivación-compromiso para el servicio público. ¿El concepto de “MSP” es universal, o debe aplicarse e interpretarse diferentemente según las culturas nacionales? Esta investigación comparativa realizada en China, Corea del sur y Francia demuestra la especificidad de la motivación para el servicio público por país y su influencia en el compromiso organizacional.