Corps de l’article

1. Introduction

Dans cet article, nous examinons dans un premier temps des études sur la traduction économique, commerciale et financière afin d’établir un état de l’art récent qui nous aidera à connaître les recherches effectuées dans ce domaine. Notre objectif est de déterminer s’il est nécessaire et possible de poursuivre ces travaux. Le point de vue des entreprises a-t-il été pris en considération ? Savons-nous quels documents les entreprises font réellement traduire ? Nous présentons ainsi dans un deuxième temps une enquête effectuée auprès d’entreprises afin de comparer les résultats avec ceux des études précédentes et de les compléter. Nous croyons que cette étude peut nous aider, en tant que formateurs, à sélectionner de façon plus appropriée le matériel à utiliser en cours afin de faire découvrir la réalité du monde professionnel à nos étudiants.

2. État de l’art : travaux précédents

Dans cette section, nous examinons une série de travaux portant directement ou indirectement sur la traduction de genres économiques, commerciaux et financiers. Il s’agit non seulement d’ouvrages spécialisés qui analysent certains documents ou secteurs de l’économie, mais aussi d’enquêtes visant à connaître l’actualité du marché espagnol de la traduction ainsi que de la traduction de genres économiques.

2.1. Études et enquêtes : la traduction économique et professionnelle

Jusqu’à présent, peu d’experts se sont intéressés aux genres traduits dans le domaine économique. Il existe des travaux, comme celui publié en 2004 par l’ACT (Agrupación de Centros Especializados en Traducción – Regroupement de centres spécialisés en traduction), qui rendent compte de sondages menés auprès d’entreprises et de traducteurs professionnels. Bien qu’ils nous fournissent quelques données, celles-ci restent assez générales, leur but étant plutôt d’offrir une vision d’ensemble de la profession sans toutefois en analyser les coulisses. Grâce à l’étude du Regroupement de centres spécialisés en traduction, nous apprenons, entre autres, que les genres de documents le plus souvent confiés aux traducteurs installés en Espagne appartiennent principalement aux domaines juridique et technique, suivis des documents commerciaux et financiers (ACT 2004 : 108). L’enquête de Navas Romero et Palomares Perraut (2002) analyse également le marché espagnol, mais du point de vue des agences de traduction en ligne. Leurs résultats montrent que les documents les plus traduits sont de nature commerciale, technique et économique, mais Navas Romero et Palomares Perraut restent assez superficiels et ne précisent pas le genre de documents traduits. Álvarez García (2015) s’est quant à elle récemment intéressée à la traduction en Espagne dans le domaine du commerce extérieur. Les traducteurs travaillant comme techniciens du commerce international interrogés dans son enquête affirment traduire fréquemment des courriers électroniques, des catalogues, des études de marché, des contrats et des plans stratégiques (Álvarez García 2015 : 258). Elle n’indique toutefois pas les langues de travail de ces derniers.

Quant aux travaux spécialisés en traduction économique, commerciale et financière, dans la combinaison anglais-espagnol notamment, signalons le travail de Campos Pardillos (2007) portant sur le secteur immobilier. Suau Jiménez (2010) et Pizarro Sánchez (2011) analysent différents documents de l’économie et l’entreprise. Herrero Rodes et Román Mínguez (2015) proposent un classement intéressant de cinq genres de documents : économiques (rapports annuels, communiqués de presse, bulletins économiques, balance des paiements, etc.), financiers (opérations et instruments financiers, analyses des marchés, etc.), de société (statuts, contrats, plans d’affaires, codes de conduite, etc.), bancaires (conventions de crédit, relevés bancaires, contrats bancaires, etc.) et comptables (rapports de commissaires aux comptes, états financiers, rapports de gestion, etc.). Pour ce qui est de la combinaison français-espagnol, la monographie de Martín Más (2003) contient des informations concernant la comptabilité, les contrats, les assurances et la Bourse. Celle d’Heras Díez (2005) initie le lecteur à la traduction des genres journalistiques et d’entreprise. Dubroca (2005) s’intéresse à la correspondance commerciale. Le travail d’Espinosa Gadea (2010) porte sur les documents de sociétés. Le manuel de Fernández Rodríguez (2010) examine le monde des marchés boursiers. Gallego Hernández (2012) décrit la traduction d’états financiers et Carmona Sandoval (2013) compare des documents de constitution de sociétés anonymes (Espagne, France). Enfin, dans la combinaison allemand-espagnol, Blanco García (1995) s’intéresse à la traduction bancaire ; Barsanti Vigo (2000) au lexique du marketing, à la publicité et à la communication. Brumme (2003) étudie la correspondance commerciale et Medina Reguera (2007) s’intéresse aux documents ayant trait au commerce extérieur. Garrido Rodríguez (2015) mène quant à lui une recherche contrastive sur les statuts des sociétés.

L’importance du domaine qui nous intéresse est claire mais ces travaux ne nous aident pas, pour autant, à savoir concrètement quels sont les genres les plus traduits dans les champs générant le plus de commandes. Nous trouvons en revanche des travaux faisant état des genres que les traducteurs économiques traitent (typologie et genre textuel), ainsi que la quantité traduite (volume et fréquence de travail pour chaque document). Il s’agit de trois études dont nous synthétisons et comparons les résultats ci-après.

2.2. Résultats des enquêtes adressées aux traducteurs professionnels

Les travaux de Tolosa Igualada (2014), portant sur l’anglais et l’espagnol, de Gallego Hernández (2016), sur le français et l’espagnol, et de Masseau (2016), sur l’allemand et l’espagnol, sont le résultat d’une enquête réalisée en 2013 et distribuée à 278 traducteurs dont l’expérience professionnelle s’étend de façon homogène sur 5, 10, 15 ans et plus 15 ans, et dont 64 % ont dit travailler à leur compte. Plus précisément, selon Tolosa Igualada :

Nous aimerions savoir, toujours dans le contexte de la traduction économique et des affaires, quels sont les domaines d’action les plus habituels chez les traducteurs enquêtés, ainsi que les genres qu’ils sont amenés à traduire le plus souvent. Nous pensons que le fait d’avoir accès à ces données peut nous aider, au moins, à deux choses : a) en tant que formateurs, cela peut nous aider à choisir d’une manière plus précise et pertinente le matériel à travailler pendant les cours de traduction, dans le but de rapprocher le plus possible le monde professionnel du contexte formatif universitaire ; […] b) en tant que chercheurs, savoir quels sont les textes le plus souvent traduits par les traducteurs professionnels peut nous aider à mener à bien une alimentation plus pertinente de la plate-forme virtuelle, d’autant plus que nous y introduirions des matériels bien plus significatifs car plus habituels.

Tolosa Igualada 2014 : 25

Masseau (2016) et Gallego Hernández (2016), sur cette même voie, sollicitent aussi des informations au sujet du profil des traducteurs et des documents économiques qu’ils traduisent, ainsi que la fréquence avec laquelle ils traduisent chacun de ces documents en fonction de leurs langues de travail.

Le secteur d’activité qui ressort parmi les traducteurs interrogés ayant moins de 5 ans d’expérience est celui des activités professionnelles scientifique et technique. Les traducteurs de l’espagnol vers l’allemand ont répondu travailler souvent dans ce secteur. Dans les autres combinaisons linguistiques, aucun secteur ne ressort. Les traducteurs ayant entre 5 et 10 ans d’expérience ont dit avoir généralement travaillé dans des secteurs divers en fonction de la combinaison des langues. Ainsi, les traducteurs ayant répondu qu’ils travaillent principalement de l’allemand vers l’espagnol ont dit traduire souvent dans les secteurs des activités de services administratifs et de soutien, d’une part, et, d’autre part, dans le secteur des activités économiques à proprement parler. Les traducteurs travaillant fréquemment vers l’allemand ont souvent traduit dans les secteurs suivants : activités financières et d’assurance, activités immobilières, activités de santé humaine et action sociale, banque, activités financières et comptables ainsi que, très souvent, dans le secteur des activités économiques, de l’éducation et des services de conseil juridique. Les traducteurs travaillant surtout vers le français ont dit prêter souvent leurs services au secteur de la construction et très souvent aux secteurs en lien avec les activités de conseil juridique. Enfin, les traducteurs travaillant surtout dans la combinaison espagnol-français ont répondu traduire souvent dans les secteurs liés au conseil juridique. Les résultats se référant aux autres combinaisons n’apportent pas de donnée significative par rapport à la fréquence de traduction en fonction du secteur. Parmi les traducteurs ayant entre 10 et 15 ans d’expérience, ceux traduisant de l’allemand vers l’espagnol ont répondu traduire souvent dans le secteur des activités économiques et dans le secteur des activités de conseil juridique. Ceux traduisant vers l’allemand ont dit le faire souvent dans le secteur de l’enseignement ainsi que dans le secteur des activités de conseil juridique. Ceux traduisant de l’anglais vers l’espagnol ont répondu le faire souvent dans les secteurs liés aux activités économiques, aux activités financières et d’assurance et à la banque. Le reste des combinaisons n’a apporté aucune donnée significative sur la fréquence de traductions et les secteurs. Enfin, les traducteurs ayant plus de 15 ans d’expérience et traduisant surtout du français vers l’espagnol ont affirmé traduire souvent dans les secteurs des activités économiques et des activités financières et d’assurance. Ces résultats ont été identiques chez les traducteurs travaillant vers le français. Les traducteurs travaillant principalement de l’anglais vers l’espagnol ont affirmé traduire souvent dans les secteurs des activités économiques, des activités financières et d’assurance et des activités de conseil juridique. Ceux traduisant surtout vers l’anglais ont dit travailler régulièrement dans les secteurs des activités économiques, des activités financières et d’assurance et des activités de conseil juridique. Les combinaisons allemand-espagnol et espagnol-allemand n’ont apporté aucune donnée significative sur la fréquence de traduction en fonction du secteur.

Les traducteurs travaillant principalement avec l’allemand et l’espagnol indiquent traduire le plus fréquemment, dans le sens allemand-espagnol, des documents de correspondance et, dans le sens espagnol-allemand, des contrats de vente, des documents de correspondance, des actes de vente, de procuration et des statuts de société. Dans le sens français-espagnol, aucun document régulier ne se détache particulièrement. Dans les traductions vers le français, les actes de vente et de procuration sont fréquents. Enfin, le document que les traducteurs ont dit souvent traduire dans le sens anglais-espagnol est le contrat de vente. Cependant, aucun document ne se singularise par sa fréquence de traduction de l’espagnol vers l’anglais.

Si l’on croise le genre de document avec les années d’expérience et la combinaison linguistique, les résultats sont les suivants : les traducteurs traduisant principalement dans le sens allemand-espagnol et ayant moins de 5 ans d’expérience ont dit traduire souvent des documents de correspondance. C’est également le cas des traducteurs ayant moins de 5 ans d’expérience mais dont la combinaison principale de travail est espagnol-allemand. Chez les traducteurs de moins de 5 ans d’expérience et travaillant avec le français et l’anglais, aucun document n’est traduit régulièrement.

Les données sont assez différentes pour les traducteurs ayant entre 5 et 10 ans d’expérience. Dans le cas de ceux ayant la combinaison allemand-espagnol, les documents souvent traduits sont : des audits de comptes, des documents de correspondance, des dépliants publicitaires, des prospectus commerciaux et des modes d’emploi. Pour les traducteurs travaillant avec la combinaison espagnol-allemand, les documents souvent traduits sont : des procès-verbaux d’assemblées générales des actionnaires, des extraits de registre de la propriété, des audits de comptes, des conditions générales de travail, des contrats de vente, la correspondance, des dépliants publicitaires et des prospectus commerciaux. Ces mêmes professionnels ont dit traduire très souvent : des comptes annuels et des états financiers, des actes de vente et de procuration, des actes constitutifs de sociétés et des statuts de sociétés. Dans le cas des traducteurs travaillant en français-espagnol, les documents souvent traduits sont : la correspondance et des actes constitutifs de sociétés. Ils ont dit traduire très souvent des actes de vente et de procuration. Dans le cas des traducteurs traduisant de l’espagnol au français, les documents souvent traduits sont : des audits de comptes, des contrats de vente et la correspondance. Ce même groupe a dit traduire très souvent : des certificats du registre du commerce, des actes de vente et de procuration, des actes constitutifs de sociétés et des statuts de sociétés. Pour les traducteurs travaillant avec la combinaison anglais-espagnol, les documents souvent traduits sont : des contrats de vente. Les traducteurs ayant entre 5 et 10 ans d’expérience et travaillant vers l’anglais n’ont signalé aucun document souvent traduit.

Dans le cas des traducteurs ayant la combinaison allemand-espagnol, avec une expérience professionnelle de 10 à 15 ans, les documents souvent traduits sont : des certificats du registre du commerce, des documents de correspondance, des actes de vente et de procuration, des actes constitutifs de sociétés et des statuts de sociétés. Ils ont dit traduire très souvent des contrats de vente. Pour les traducteurs travaillant vers l’allemand, les documents souvent traduits sont : des procès-verbaux d’assemblées générales des actionnaires, des pactes d’actionnaires, des conditions générales de travail, des statuts de sociétés et des rapports. Ces mêmes professionnels ont affirmé traduire très souvent : des contrats de vente, des documents de correspondance, des actes de vente et de procuration. Dans le cas des traducteurs travaillant avec la combinaison français-espagnol, les documents souvent traduits sont : des contrats de vente et des actes de vente et de procuration. Dans le cas des traducteurs traduisant vers le français, les documents qu’ils ont dit traduire souvent sont : des contrats de ventre, la correspondance, des actes de vente et de procuration. Pour les traducteurs travaillant avec la combinaison anglais-espagnol, les documents souvent traduits sont : des contrats de vente, des contrats de licence, des contrats de service, la correspondance, des comptes annuels, des états financiers, des actes de vente et de procuration, des actes constitutifs de sociétés et des statuts de sociétés. Enfin, les traducteurs ayant entre 10 et 15 ans d’expérience et traduisant essentiellement vers l’anglais ont dit traduire souvent de la correspondance.

Enfin, les traducteurs ayant la combinaison allemand-espagnol et une expérience professionnelle de plus de 15 ans ont déclaré souvent traduire : des certificats du registre du commerce, des contrats de vente, des documents de correspondance, des actes de vente et de procuration, des actes constitutifs de sociétés et des statuts de sociétés. Pour les traducteurs travaillant vers l’allemand, les documents souvent traduits sont : des extraits du registre de la propriété, des certificats du registre du commerce, des contrats de vente, des documents de correspondance, des comptes annuels, des états financiers, des actes de vente et de procuration, des statuts de sociétés et des formulaires. Ils ont dit traduire très souvent des actes constitutifs de sociétés. Dans le cas des traducteurs avec la combinaison français-espagnol, les documents souvent traduits sont : des conditions générales de travail, des contrats de vente, des documents de correspondance, des actes de vente et de procuration, statuts de sociétés et rapports. Dans le cas des traducteurs traduisant vers le français, les documents souvent traduits sont : des conditions générales de travail, des contrats de vente, des contrats de travail, des documents de correspondance, des actes de vente et de procuration, des actes constitutifs de sociétés, des statuts de sociétés et des rapports. Pour les traducteurs travaillant avec la combinaison anglais-espagnol, les documents souvent traduits sont : des contrats de vente, des actes de vente et de procuration, des actes constitutifs de sociétés et des statuts sociaux. Enfin, les traducteurs de plus de 15 ans d’expérience et traduisant principalement vers l’anglais ont dit traduire souvent des pactes d’actionnaires, des bordereaux, des actes de vente et de procuration et des actes constitutifs de sociétés.

L’intérêt pédagogique de ces données est indéniable, car il s’agit de trois études qui abordent la préparation des cours à partir de la réalité professionnelle. Or, nous considérons qu’il serait également intéressant de connaître le point de vue direct des entreprises ayant besoin de services de traduction.

3. Étude de cas : enquête auprès des entreprises

Nous venons de voir que les études précédentes basées sur des enquêtes peuvent nous aider à savoir avec quels genres et quelles combinaisons linguistiques les traducteurs dans le domaine de l’économie et des affaires travaillent. Cependant, nous pensons que ces résultats ne sont pas définitifs et croyons qu’il faut aussi interroger les entreprises ayant besoin des services de traduction dans le but non seulement de comparer les résultats mais aussi de les compléter. Nous présentons dans cette section une enquête interrogeant des entreprises exportatrices afin de comparer les résultats avec ceux des études précédentes.

3.1. Méthodologie. Instruments pour la récolte de données : l’enquête

Depuis plusieurs décennies, la traductologie utilise l’enquête comme méthode de recherche. Selon Kuznik et al. (2010 : 18) : « survey-based studies in Translation Studies allow contact to be made between the academic and professional worlds, since they are both interested in the current state of the professional practice of translation in its many different shapes and forms ».

Dans ce contexte (Tolosa Igualada 2014, Gallego Hernández 2016 et Masseau 2016 se basent sur des enquêtes), nous avons choisi la même méthode pour aller plus loin. Nous avons réalisé une enquête auprès de consommateurs potentiels de traductions, les entreprises travaillant à l’export inscrites sur le sol espagnol.

Avant d’expliquer en détail les parties qui composent nos questionnaires, il convient de signaler que, du point de vue de la conception de cet instrument de collecte de données et si l’on se base sur Visauta Vinacua (1989), notre enquête est de nature descriptive et vise à savoir si ces entreprises ont besoin de services de traduction. En cas de réponse affirmative, nous souhaitons savoir qui réalise ces traductions ; quelles sont les langues de travail habituelles, les thèmes récurrents dans le domaine de l’économie et des affaires et, enfin, quels documents les entreprises sondées ont l’habitude de faire traduire.

L’enquête concerne des faits (le rapport entre l’offre et la demande de services de traduction économique en Espagne), elle est élaborée sur le mode de l’auto-remplissage (distribuée à travers un questionnaire sur un site internet) et synchrone (ouverte pendant deux mois, février/mars 2014).

Notre enquête, distribuée aux entreprises susceptibles d’avoir besoin de services de traduction, est divisée en trois blocs :

  • Profil de l’entreprise (nombre de salariés, secteur dans lequel opère l’entreprise, expérience à l’export, langue de travail, rôle de la traduction au sein de l’entreprise en fonction des exportations).

  • Secteurs d’activité dans lesquels pourraient s’inscrire les documents qu’elles ont eu à traduire ainsi que les langues dans lesquelles et à partir desquelles elles ont souvent ou très souvent eu à traduire dans ces domaines. Dans ce bloc, les entreprises devaient cocher les cases des thèmes sur lesquels portaient les documents qu’elles ont dû traduire en 2013. Ces sujets étaient les suivants : assurances, banque, Bourse, commerce extérieur, comptabilité, contrats, droit économique et financier, études de marché et statistique, finances, fiscalité, logistique, marketing, négociation, protocole.

  • Documents économiques, commerciaux et financiers qu’elles ont dû traduire en 2013. Dans ce bloc, les entreprises pouvaient cocher les documents suivants : actes constitutifs de sociétés, actes de vente, de procuration, appels d’offres, articles d’opinion, articles de presse, attestation de travail, audits de comptes, avals et garanties, bordereaux, catalogues, certificats du registre du commerce, communication interne, comptes annuels, états financiers, conditions de crédits documentaires, conditions générales de travail, contrats d’ouvrage, contrats de franchise, contrats de licence, contrats de service, contrats de travail, contrats de vente, correspondance, lettres, dépliants publicitaires et prospectus commerciaux, descriptifs de produits, devis, directrices, documents bancaires, documents d’analyse de marché, documents de paiement, documents économiques ou financiers dans le domaine de l’ONU, documents économiques ou financiers dans le domaine de l’UE, documents macroéconomiques, documents portant sur le commerce extérieur, dossiers, essais, état patrimonial, extraits de registre de la propriété, factures, fascicules de brevet, fiches de paies, fiches techniques, fonds d’investissement, formulaires, guides, impôts, modes d’emploi, offres, opérations d’acquisition et de fusion d’entreprises, ordres du jour du conseil d’administration et de l’assemblée d’actionnaires, pactes d’actionnaires, plans de stock-options, plans d’entreprises, plans stratégiques, polices d’assurance, procès-verbaux d’assemblées générales des actionnaires, procès-verbaux de conseils d’administration, rapports annuels, rapports d’entreprise, rapports d’audit, rapports de bureaux de conseil juridique (thème économique-financier), rapports de conseillers financiers, rapports de gouvernement d’entreprise, rapports sociaux, rapports sur des thèmes fiscaux, réglementation commerciale, relevés de carrière, statuts de sociétés.

La liste de documents précédente (bloc concernant les documents de notre enquête) se base sur les travaux de Tolosa Igualada (2014), Gallego Hernández (2016) et Masseau (2016) et nous y avons ajouté d’autres documents. En outre, la question posée aux entreprises est différente de celle posée aux traducteurs : tandis que les traducteurs devaient indiquer non seulement s’ils avaient déjà traduit l’un des documents proposés mais aussi préciser la fréquence avec laquelle ils avaient traduit chaque document dans la combinaison linguistique correspondante, les entreprises devaient seulement indiquer si elles avaient eu besoin de traduire l’un des documents proposés dans la combinaison linguistique correspondante (DE-ES, ES-DE, EN-ES, ES-EN, ES-FR et FR-ES) en 2013. L’enquête a été envoyée à plus de 2000 entreprises figurant dans l’annuaire de la chambre de commerce espagnole. Parmi elles, 117 ont répondu à nos questions.

3.2. Résultats

Souhaiter enquêter auprès d’entreprises installées en Espagne est lié au fait de vouloir découvrir le rôle que la traduction joue dans leur fonctionnement commercial avec l’étranger ainsi que de recenser les documents le plus fréquemment traduits. Pour ce faire, nous avons divisé notre questionnaire en plusieurs sections (voir sous-partie précédente). Pour ce qui est du premier bloc, nous savons que la plupart des entreprises sont des petites et moyennes entreprises de moins de 250 salariés : 14 % d’entre elles comptent moins de 10 salariés ; 56 % comptent entre 10 et 50 salariés et 22 %, entre 50 et 250 salariés. Seules 8 % des entreprises sondées ont un effectif de plus de 250 salariés.

Parmi les entreprises sondées, 20 % appartiennent au secteur agroalimentaire, 6 % au secteur relatif aux biens de consommation, 56 % au domaine des matières premières, des produits industriels et des biens d’équipement. Enfin, 18 % appartiennent au secteur tertiaire.

Figure 1

Nombre de salariés des entreprises interrogées

Nombre de salariés des entreprises interrogées

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Figure 2

Secteur dans lequel les entreprises opèrent

Secteur dans lequel les entreprises opèrent

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Nous trouvons une distribution assez homogène en ce qui concerne le nombre d’années de présence de ces entreprises dans le secteur de l’exportation : 21 % avec moins de 10 ans dans le secteur ; 27 % entre 10 et 20 ans ; 21 % entre 20 et 30 ans ; 17 % entre 30 et 40 ans ; et 15 % avec plus de 40 ans.

Figure 3

Années dans le secteur de l’exportation des entreprises interrogées

Années dans le secteur de l’exportation des entreprises interrogées

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D’autre part, nous nous sommes interrogés sur la manière dont les entreprises font traduire les documents dont elles ont besoin. Ainsi, la Figure 4 montre que certains de leurs salariés parlant des langues étrangères les traduisent, ou alors qu’elles ont un service d’exportation ou un service semblable qui s’en charge. Notons aussi que 42 entreprises contactent également des services de traduction professionnelle (33 d’entre elles combinent les deux méthodes de traduction : services de traduction professionnelle et traduction faite par les salariés ou un service spécifique).

Figure 4

Processus de traduction

Processus de traduction

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Pour ce qui est des langues de travail, 4 sont utilisées fréquemment : l’anglais, le français, l’allemand et l’espagnol. Ce sont 74 % des entreprises qui ont affirmé utiliser beaucoup l’anglais, 22 % assez, 14 % peu et 6 % pas du tout. Pour ce qui est du français, 39 % des entreprises ont dit l’utiliser beaucoup, 26 % assez, 33 % peu et 18 % pas du tout. L’utilisation de l’allemand se répartit de la façon suivante : 13 % des entreprises ont dit l’utiliser beaucoup, 14 % assez, 42 % peu et 48 % pas du tout. Enfin, 67 % des entreprises ont dit utiliser beaucoup l’espagnol, 17 % assez, 10 % peu et 23 % pas du tout.

Figure 5

Langues de travail utilisées par les entreprises interrogées

Langues de travail utilisées par les entreprises interrogées

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Quant aux domaines auxquels appartiennent les documents le plus souvent traduits en 2013, le Tableau 1 montre les résultats que nous avons obtenus. De manière générale, dans toutes les combinaisons linguistiques, les domaines les plus traduits ont été (ordonnés des plus traduits aux moins traduits) : banque, commerce extérieur, marketing, négociation, comptabilité, contrats, logistique.

Tableau 1

Domaines auxquels appartiennent les documents le plus souvent commandés par les entreprises interrogées[1]

Domaines auxquels appartiennent les documents le plus souvent commandés par les entreprises interrogées1

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Enfin, en ce qui concerne les documents les plus traduits, sans tenir compte de la combinaison linguistique, les résultats sont les suivants (les 10 documents que nous présentons sont ordonnés des plus traduits aux moins traduits) : 1º catalogues, 2º descriptifs de produits, 3º offres, 4º fiches techniques, 5º factures, 6º documents ayant trait au commerce extérieur, 7º correspondance, lettres, 8º contrats de vente, 9º bordereaux, 10º dépliants publicitaires ou prospectus commerciaux et devis. Le Tableau 2 montre les documents le plus souvent commandés par les entreprises interrogées. Si nous tenons compte des différentes combinaisons linguistiques, les résultats sont les suivants :

  • Catalogues : 6 % des entreprises ont dit traduire des catalogues de l’allemand vers l’espagnol, 12 % dans le sens espagnol-allemand, 13 % du français vers l’espagnol, 32 % dans le sens espagnol-français, 23 % anglais-espagnol et 50 % espagnol-anglais.

  • Descriptifs de produits : 5 % des entreprises ont affirmé traduire des descriptifs de produits de l’allemand vers l’espagnol, 8 % dans le sens espagnol-allemand, 15 % du français vers l’espagnol, 22 % dans le sens espagnol-français, 17 % anglais-espagnol et 34 % espagnol-anglais.

  • Offres : 4 % des entreprises ont répondu traduire des offres de l’allemand vers l’espagnol, 7 % dans le sens espagnol-allemand, 13 % du français vers l’espagnol, 25 % dans le sens espagnol-français, 16 % anglais-espagnol et 32 % espagnol-anglais.

  • Fiches techniques : 6 % des entreprises ont dit traduire des fiches techniques de l’allemand vers l’espagnol, 7 % dans le sens espagnol-allemand, 11 % du français vers l’espagnol, 21 % espagnol-français, 18 % anglais-espagnol et 27 % espagnol-anglais.

  • Factures : 3 % ont affirmé traduire des factures de l’allemand vers l’espagnol, 4 % dans le sens espagnol-allemand, 11 % du français vers l’espagnol, 20 % espagnol-français, 16 % anglais-espagnol et 30 % espagnol-anglais.

  • Documents ayant trait au commerce extérieur : 4 % des entreprises ont dit traduire des documents ayant trait au commerce extérieur de l’allemand vers l’espagnol, 5 % dans le sens espagnol-allemand, 14 % du français vers l’espagnol, 15 % espagnol-français, 18 % anglais-espagnol et 21 % espagnol-anglais.

  • Correspondance, lettres : 4 % des entreprises ont répondu traduire de la correspondance et des lettres de l’allemand vers l’espagnol, 5 % dans le sens espagnol-allemand, 21 % du français vers l’espagnol, 18 % espagnol-français, 22 % anglais-espagnol et 20 % espagnol-anglais.

  • Contrats de vente : 2 % des entreprises ont affirmé traduire des contrats de vente de l’allemand vers l’espagnol, 1 % dans le sens espagnol-allemand, 15 % du français vers l’espagnol, 9 % espagnol-français, 18 % anglais-espagnol et 18 % espagnol-anglais.

  • Bordereaux : 1 % des entreprises ont dit traduire des bordereaux de l’allemand vers l’espagnol, 5 % dans le sens espagnol-allemand, 5 % du français vers l’espagnol, 15 % espagnol-français, 10 % anglais-espagnol et 22 % espagnol-anglais.

  • Dépliants publicitaires ou prospectus commerciaux : 3 % des entreprises ont répondu traduire des dépliants publicitaires ou prospectus commerciaux de l’allemand vers l’espagnol, 3 % dans le sens espagnol-allemand, 6 % du français vers l’espagnol, 14 % espagnol-français, 9 % anglais-espagnol et 22 % espagnol-anglais.

  • Devis : 1 % des entreprises ont affirmé traduire des devis de l’allemand vers l’espagnol, 3 % dans le sens espagnol-allemand, 6 % du français vers l’espagnol, 13 % espagnol-français, 11 % anglais-espagnol et 22 % espagnol-anglais.

Tableau 2

Documents le plus souvent commandés par les entreprises interrogées

Documents le plus souvent commandés par les entreprises interrogées

Tableau 2 (suite)

Documents le plus souvent commandés par les entreprises interrogées

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4. Comparaison et analyse des résultats

Nous avons obtenu des données portant sur les documents économiques qui sont le plus fréquemment traduits dans diverses combinaisons linguistiques. Ces résultats nous fournissent des données servant à définir le profil des traducteurs économiques, ce qui peut nous aider à orienter professionnellement les traducteurs en formation et à préparer des cours de traduction économique.

Sur ce point, nous avons pu apprécier les similitudes et les différences entre les secteurs et les documents le plus fréquemment traduits par les traducteurs professionnels dans plusieurs combinaisons, ainsi que les secteurs et les documents à traduire le plus fréquemment demandés par les entreprises exportatrices espagnoles. Comparons ces résultats et synthétisons-les ci-après (Tableaux 3 et 4) :

Tableau 3

Comparaison des secteurs générant le plus de travail de traduction par ordre décroissant

Comparaison des secteurs générant le plus de travail de traduction par ordre décroissant

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Tableau 4

Comparaison des documents le plus fréquemment traduits par ordre décroissant

Comparaison des documents le plus fréquemment traduits par ordre décroissant

Tableau 4 (suite)

Comparaison des documents le plus fréquemment traduits par ordre décroissant

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Au vu de ces données, il convient de signaler que tous les secteurs générant le plus de travail pour les traducteurs ne coïncident pas avec ceux dans lesquels les entreprises opèrent le plus fréquemment. De la même manière, les documents le plus fréquemment traduits par les traducteurs professionnels ne coïncident pas avec ceux qui sont le plus fréquemment sollicités par les entreprises. Les raisons qui expliqueraient ce phénomène sont peut-être à chercher dans le fait que le profil des traducteurs interrogés demeure très spécialisé et que les entreprises auraient seulement recours à ces traducteurs lorsque leurs salariés, faisant office de traducteurs, ne se chargent pas de la traduction des documents le plus fréquemment produits par l’entreprise en question. Nous pourrions peut-être également justifier ce décalage en tenant compte du profil des entreprises interrogées. En effet, il est fort probable que vu le profil des clients, les produits exportés, les pays importateurs, etc., les documents proposés dans notre enquête en tant que réponse à nos informateurs ne recoupent pas les documents le plus fréquemment sollicités par les entreprises. Ainsi, l’enquête présentée dans ce travail doit être considérée comme une enquête pilote qui nous invite à poursuivre nos recherches. Dans ce sens, le fait que les salariés traduisent eux-mêmes les documents mentionnés pourrait être lié à la technicité des documents en question. Par conséquent, tout en considérant les paramètres de la fréquence de traduction et la technicité des documents, nous pouvons formuler les hypothèses suivantes :

  • Plus le degré de technicité du document à traduire sera important, et moins fréquemment il sera traduit par les salariés faisant office de traducteurs au sein de l’entreprise. Ainsi, moins le degré de technicité du document à traduire sera important, et plus fréquemment il sera traduit par des traducteurs professionnels.

  • Plus le degré de technicité du document à traduire sera important, et plus fréquemment il sera traduit par les salariés faisant office de traducteurs au sein de l’entreprise. Ainsi, moins le degré de technicité du document à traduire sera important, et moins fréquemment il sera traduit par des traducteurs professionnels.

5. Conclusion

Dans ce travail nous avons essayé d’apporter notre petite pierre à l’édifice de la traductologie dans le domaine de l’économie et des affaires. Pour ce faire, nous avons cherché à poursuivre des études menées à bien dans le passé, au sujet des traducteurs professionnels (Tolosa Igualada 2014 ; Masseau 2016 ; Gallego Hernández 2016), avec une nouvelle enquête destinée, cette fois-ci, à des entreprises ayant besoin de services de traduction, et ce, dans le but de connaître les genres et les domaines économiques qui sont le plus fréquemment traduits.

Afin de répondre à la problématique présentée au début de notre travail, et tout en prenant en considération de façon générale les résultats obtenus, dans le futur il semblerait que certains documents soient à privilégier dans la formation des traducteurs : les actes constitutifs de sociétés, les actes de vente, de procuration, les attestations de travail, les bordereaux, les budgets et devis, les catalogues, les certificats du registre du commerce, les contrats de service, les contrats de vente, les documents de correspondance, les dépliants publicitaires et les prospectus commerciaux, les descriptifs de produits, documents portant sur le commerce extérieur, factures, fiches techniques, offres, procès-verbaux d’AGA, procès-verbaux de conseils d’administration, statuts de sociétés. De même, pour ce qui est des secteurs d’activité, il faudrait privilégier principalement les domaines des activités administratives, financières et d’assurances, la banque et ses activités financières, les services ou les activités de conseil juridique, le commerce extérieur, le marketing, les négociations et les contrats.

Or, ces résultats doivent être pris en compte de façon provisoire, car ils ont montré des similitudes et des différences entre notre enquête et celles dont nous avons détaillé les résultats. Il convient de ne pas oublier que les données décrites ne représentent pas 100 % des collectifs examinés, s’agissant seulement d’un échantillon partiel d’un groupe d’entreprises exportatrices réunissant des caractéristiques très concrètes.

Le fait d’établir les hypothèses ci-dessus nous permet d’entamer une nouvelle recherche que nous pourrions inscrire dans le cadre théorique de la recherche-action. Or pour pouvoir mettre à l’épreuve ces hypothèses, il conviendrait d’établir la méthode de recherche la plus pertinente possible. À cet égard, nous considérons qu’une nouvelle enquête pourrait être menée à bien. Dans ce cas-ci, l’enquête serait conçue à l’intention des : a) traducteurs professionnels autonomes ; b) employés faisant office de traducteurs au sein des entreprises. Cependant, cette enquête comporterait deux parties nettement distinctes. Dans la première partie, les participants devraient par exemple évaluer le degré de technicité des trois documents le plus fréquemment traduits dans le cadre de la présente étude à partir d’une échelle conçue et validée au préalable. À cet égard, le travail d’Amigo Extremera (2014) dans le cadre du projet CODIGO (Caracterización Objetiva de la Dificultad General de los Originales) pourrait nous servir d’inspiration. Même si ce projet de recherche a pour but d’établir des paramètres objectifs pour la détermination de la difficulté des genres à traduire, une partie de leurs postulats (tout ce qui a trait à la technicité) pourrait aider à l’établissement d’une échelle faisant état du degré de technicité des textes. Dans la deuxième partie de l’enquête, les traducteurs interrogés devraient confirmer ou invalider de la manière la plus objective possible les hypothèses énoncées.

En tout état de cause, la confirmation des hypothèses formulées auparavant devrait nous aider à mettre au jour ou peut-être à modifier la liste de documents à privilégier dans nos cours de traduction économique, commerciale et financière.

Une dernière voie de recherche à explorer serait celle de l’interprétation et de la formation d’interprètes. Le fait d’avoir pu établir, ne serait-ce que de manière provisoire, une liste des documents le plus fréquemment traduits dans le domaine de l’économie et du commerce revêt une importance tout à fait particulière. En effet, dans le domaine de l’interprétation professionnelle, de conférence ou de liaison, ces textes, une fois oralisés, pourraient être utilisés en tant que matériel fondamental pour la formation des futurs interprètes qui seront peut-être un jour amenés à exercer leur métier lors de conférences internationales ou au sein de réunions d’entreprises dans le cadre desquelles l’interprétation de liaison sera privilégiée.