Corps de l’article

1. Introduction et problématique

La gestion d’une école exige de sa direction de plus en plus de compétences (Hertting, 2008). Au Canada, selon Lessard, Kamanzi et Larochelle, (2008), dans la mouvance de la nouvelle gestion publique, la conception actuelle de l’établissement est celle d’une école démocratique, communautaire et imputable, qui accorde une place importante aux parents pour favoriser une plus grande réussite scolaire des élèves. Les résultats de l’enquête pancanadienne de Cattonar, Lessard, Blais, Larose, Riopel, Tardif et Bourque, (2007), menée auprès de 2 144 directions d’école primaire et secondaire de langues française et anglaise, montrent que les récentes évolutions scolaires ont des impacts sur leurs écoles, leurs fonctions et sur leur maîtrise de la situation. Les résultats indiquent que : 1) le mode de gouvernance axé sur les résultats et sur une politique d’imputabilité se vit davantage en Ontario, en Colombie-Britannique, en Atlantique ainsi qu’en Alberta ; 2) la diversification culturelle et linguistique des élèves et des familles est davantage ressentie par les directions de l’Alberta, de l’Ontario, de la Colombie-Britannique et des Territoires du Nord-Ouest ; 3) la venue de nouvelles approches éducatives est surtout perçue par les directions des Prairies, du Québec et de l’Atlantique ; 4) la participation accrue des parents est davantage observée par les directions de la Colombie-Britannique, des Prairies et de l’Atlantique. De plus, globalement, 45,2 % des directions estiment que, devant ces changements, leur maîtrise de la situation a baissé. Cette baisse est surtout perçue par les directions d’école primaire de la Colombie-Britannique et de l’Ontario.

Pour leur part, Derouet et Normand (2014) soulignent que les transformations du métier des directions d’école exigent qu’elles mobilisent de nouvelles compétences. En conséquence, sachant que nous assisterons à un renouvellement massif des directions d’école au Canada jusqu’en 2020 (Service Canada, 2012), il s’avère essentiel de mieux connaître les compétences que les nouvelles directions ont développées et celles qu’elles doivent développer afin qu’elles puissent mieux gérer leur école et mieux favoriser le développement du plein potentiel des élèves. Cependant, nous avons trouvé peu d’études qui abordent spécifiquement les compétences des nouvelles directions d’école au Canada. La prochaine section expose les quelques études reliées au sujet que nous avons pu recenser.

1.1 Pratiques et compétences des directions d’école de langue française au Canada

Dans cette section, nous présentons des résultats de recherches empiriques récentes et ayant un nombre considérable de participants à la direction d’une école de langue française au Canada. Il s’avère important d’exposer des études touchant spécifiquement le contexte de notre recherche : les écoles francophones au Canada. Au Québec, il s’agit d’un contexte majoritaire et, pour les autres provinces, d’un contexte minoritaire, c’est-à-dire un milieu de valorisation culturelle et linguistique-VCL. Comme nous le mentionnions précédemment, nous avons trouvé peu d’études abordant les compétences des nouvelles directions. Nous présentons néanmoins les résultats de cinq recherches portant sur la perception des pratiques ou des compétences des directions d’école, nouvelles ou expérimentées, pour mieux gérer leur école.

Une première étude pancanadienne d’IsaBelle (2013) a été menée auprès de 213 directions et directions adjointes d’écoles francophones de neuf provinces et des trois territoires canadiens en milieu de valorisation culturelle et linguistique. Le Québec ne faisait pas fait partie de l’étude. Le but de cette recherche était de vérifier le sentiment d’efficacité personnelle pour dix compétences liées à la promotion du français et à la construction identitaire, ainsi que pour 41 compétences réparties sur sept catégories auprès de deux groupes de direction : 1) nouvelles directions représentant les directions adjointes et celles qui possèdent cinq années et moins d’expérience ; 2) directions expérimentées représentant celles qui possèdent six années et plus d’expérience. Le Test U de Mann-Whitney n’indique aucune différence significative pour les dix compétences portant sur la promotion du français et sur la construction identitaire. En revanche, pour tous les participants, les moyennes obtenues sont toutes supérieures à quatre sur cinq sur l’échelle de Likert. Pour les 41 compétences évaluées, les résultats significatifs du Test U de Mann-Whitney montrent que le sentiment d’efficacité personnelle perçu par les nouvelles directions est plus élevé que celui des directions expérimentées pour deux compétences des catégories Changement et innovation et Sentiment d’appartenance. Pour les 41 compétences et pour toutes les directions, quatre compétences obtiennent des moyennes inférieures à quatre sur cinq des catégories Tâches administratives, Changement et innovation, Sentiment d’appartenance. Pour trois compétences de trois catégories (Changement et innovation, Sentiment d’appartenance et Pratiques et conduites), les nouvelles directions obtiennent une moyenne de moins de quatre sur cinq.

Dans le cadre de l’étude qualitative d’Héon, Lapointe et Langlois (2007), réalisée auprès de 18 nouvelles directions et 29 directions expérimentées d’école francophone en milieu de valorisation culturelle et linguistique de sept provinces, le guide des entretiens comportait des questions sur leurs représentations des pratiques du leadership (description du rôle, des tâches et d’incidents vécus en tant que leader en éducation), dans le contexte de l’école francophone en milieu de valorisation linguistique et culturelle-VLC. La méthode de la statistique textuelle à l’aide du logiciel Alceste a été utilisée pour faciliter les analyses. Les résultats significatifs indiquent que les directions ont une conscience critique à l’égard du contexte discriminatoire dans lequel l’école se trouve, et du défi d’aider les jeunes à développer une appartenance au milieu minoritaire. Ce discours est plus représentatif des directions ontariennes et néo-brunswickoises de sexe masculin. De plus, les directions exposent leur inquiétude pour les élèves fréquentant l’école francophone, mais vivant dans des environnements familiaux où le français n’est plus parlé. Ce discours est davantage représentatif des nouvelles directions de sexe féminin situées dans les Maritimes et en Colombie-Britannique.

En Ontario, 21 nouvelles directions, une direction expérimentée d’école primaire de langues française et anglaise, des enseignants, des élèves ainsi que des parents ont participé à une recherche d’Anderson, Rodway-Macri, Yashkina et Bramwell (2013). L’objectif de la recherche était d’identifier les pratiques des directions qui améliorent l’enseignement et l’apprentissage selon six catégories d’écoles : écoles performantes ou moins performantes; écoles de milieu socio-économique favorisé ou moins favorisé et écoles de langue française ou de langue anglaise. Peu de directions se qualifient de leader pédagogique, mais certaines directions exercent un leadership pédagogique grâce à leurs capacités administratives à établir des pratiques de progrès continu. Cette approche managériale reliée au leadership pédagogique est surtout présente dans les écoles francophones.

Au Nouveau-Brunswick, Bouchamma (2006) a mené une étude par questionnaire sur le sentiment d’efficacité personnelle et professionnelle lié à la supervision des enseignants, auprès de 37 directions d’école de langue française. Ces dernières avaient entre une et quatorze années d’expérience à la direction d’une école. Les résultats montrent qu’elles perçoivent une plus grande efficacité professionnelle que personnelle face à la supervision. L’efficacité professionnelle est davantage perçue chez les hommes en développement professionnel et plus qualifiés, alors que le sentiment d’efficacité personnelle est surtout senti chez les femmes ayant une tâche d’enseignement, en développement professionnel et moins qualifiées. Aucun résultat n’est présenté selon le nombre d’années d’expérience à la direction.

Au Québec, Bouchamma, Basque et Marcotte (2014) ont mené une étude par questionnaire auprès de 49 directions adjointes et directions d’école primaire, secondaire et pour adultes. Elles avaient en moyenne 7,8 années d’expérience à la direction. L’étude visait à évaluer le sentiment d’efficacité des directions d’école quant aux compétences qui le sont exigées d’elles dans le référentiel de compétences du ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport du Québec (2008). À partir des dix compétences du Référentiel de compétences du ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport du Québec (2008), les participants ont exprimé leur accord avec une échelle à six niveaux. Les moyennes aux quatre domaines de gestion sont : services éducatifs de l’établissement (M = 5,60) ; environnement éducatif de l’établissement (M = 4,84) ; ressources humaines (M = 4,69) et administration (M = 4,55). Le nombre d’années d’expérience à la direction n’a pas été abordé.

En résumé, les résultats de l’étude pancanadienne d’IsaBelle (2013) et celle concernant spécifiquement le Québec de Bouchamma et al. (2014) semblent converger quant au sentiment d’efficacité personnelle limité des directions d’école pour les tâches administratives. L’étude ontarienne d’Anderson et al. (2013) et celle de Bouchamma et al. (2014) révèlent une habileté des directions à exercer un leadership pédagogique de type managérial ou pour gérer les services et les environnements éducatifs. De plus, les résultats d’IsaBelle (2013) et l’étude néo-brunswickoise de Bouchamma (2006) se rejoignent quant au sentiment d’efficacité personnelle limité des directions d’école pour la supervision pédagogique. L’étude d’Héon et al. (2007) montre qu’une prise de conscience critique et de la sollicitude envers les jeunes qui ne parlent pas le français à la maison serait plus représentative des nouvelles directions de sexe féminin. Ces résultats rejoignent en partie ceux d’IsaBelle (2013) qui démontrent que ce sont davantage les femmes du groupe des directions d’école ayant six ans et plus d’expérience qui possèdent un sentiment d’efficacité plus élevé pour la promotion du français et/ou de la construction identitaire. Finalement, des cinq études recensées, trois impliquent de nouvelles directions et deux ne précisent pas de résultats spécifiques à celles-ci. De ces études, uniquement deux touchent plusieurs provinces, une autre a été menée uniquement en Ontario, une autre uniquement au Nouveau-Brunswick et une autre uniquement au Québec. De plus, le manque d’arrimage conceptuel, la différence quant à la province et au nombre d’années d’expérience des participants entre les recherches compliquent leur comparaison. Par ailleurs, peu d’études abordent les compétences nécessaires des nouvelles directions pour bien gérer leur école (Petzko, 2008). A fortiori, peu d’études dans ce domaine ont été réalisées auprès des directions d’école de langue française au Canada, d’où l’importance d’identifier quelles compétences les nouvelles directions ont développées et lesquelles elles devraient développer pour mieux gérer leur école, selon les points de vue des nouvelles directions et d’autres acteurs de l’éducation.

2. Cadre conceptuel

Dans cette section, nous définissons le concept de compétence. Par la suite, nous examinons les éléments des référentiels de compétences de certaines provinces.

2.1 Concept de compétence

Si le concept de compétence est abondamment utilisé dans plusieurs champs de recherche, il demeure, comme le souligne Gilbert (2006), que l’usage répandu d’un même terme ne signifie pas qu’il ait une signification unique. Pour définir ce concept, nous nous référons aux auteurs issus principalement du domaine de l’éducation.

Roegiers et De Ketele (2000, p. 66) définissent la compétence comme la possibilité, pour un individu, de mobiliser de manière intériorisée un ensemble intégré de ressources en vue de résoudre une famille de situations-problèmes. La compétence s’inscrit comme un concept intégrateur, car les contenus, les activités à exercer et les situations dans lesquelles ces activités sont menées sont pris en considération. Par exemple, chez une direction d’école, la compétence se développe progressivement de manière à constituer un potentiel qui sera utilisé lorsque ce sera nécessaire (Roegiers et De Ketele, 2000, p. 68). L’expression de manière intériorisée renvoie au caractère  stabilisé  de la compétence qui évoque, chez une direction d’école, la nécessité d’exercer une compétence pour ne pas la perdre et pour devenir de plus en plus compétente. Pour Laurier (2005), une compétence se développe dans le temps et progressivement, ce qui rejoint Le Boterf (2002) qui avance qu’elle se développe tout au long de la vie.

Selon Tardif (2006, p. 22), une compétence est un savoir-agir complexe prenant appui sur la mobilisation et la combinaison efficaces d’une variété de ressources internes et externes à l’intérieur d’une famille de situations. Pour Laurier (2005), la compétence se compose de ressources internes (des habiletés, des connaissances et des attitudes) et de ressources externes (par exemple, des documents, des réseaux relationnels ou des réseaux professionnels). Une compétence renvoie donc à une double dimension indissociable : individuelle et collective (Le Boterf, 2002). Or, c’est toujours grâce à ses ressources internes que la personne peut mobiliser des ressources externes  (Roegiers et De Ketele, 2000, p. 66). Pour Le Boterf (2002), la compétence n’est pas la somme de ces trois composantes, mais plutôt une articulation entre celles-ci pour accomplir une tâche dans un contexte donné et mener à un savoir-agir en situation.

Pour Roegiers et De Ketele (2000, p. 50), aptitude  et  habileté  sont des termes proches de celui de capacité qu’ils définissent comme une activité que l’on exerce. Ces auteurs proposent des catégories de capacités : les savoir-redire (redire un message) et les savoir-refaire (reproduction de gestes), les savoir-faire cognitifs (identifier, comparer, combiner, analyser, synthétiser, etc.), les savoir-faire gestuels (manoeuvrer, manier, etc.), les savoir-faire socioaffectifs ou relationnels (écouter, communiquer, s’excuser, etc.) et les savoir-devenir (élaborer, planifier, évaluer, ajuster, etc.). Les connaissances renvoient aux faits, informations, notions, principes qu’on acquiert grâce à l’étude, à l’observation ou à l’expérience (Legendre, 2005, p. 271). Cette composante renvoie aux différents savoirs que la direction d’école de langue française devrait connaître. Pour Roegiers et De Ketele (2000), les savoir-être ou attitudes consistent en des manières d’agir et de réagir d’une personne. Celle-ci exprime sa façon d’appréhender sa propre personne (concept de soi), les autres ainsi que les situations et la vie. Les savoir-être d’une personne sont liés à un système de valeurs qui se manifestent à trois niveaux : la sélection des stimuli, ses représentations (opinions, perceptions, croyances, etc.) et son agir empreint de ses valeurs (par exemple, une direction d’école rencontre des enseignants avec respect).

Dans le cadre de notre étude, les trois composantes renvoient aux connaissances que la nouvelle direction devrait s’être appropriées, aux habiletés et aux attitudes qu’elle déploie selon les situations ou les demandes. Une direction d’école est compétente lorsqu’elle peut faire face à toutes situations issues de la famille scolaire.

2.2 Référentiels de compétences

Depuis plusieurs années, des référentiels de compétences sont élaborés pour mieux circonscrire les compétences exigées ou évaluées chez les directions d’école. Le tableau 1 expose de façon succincte le référentiel de compétences de trois provinces où nous retrouvons une forte concentration d’écoles de langue française.

Tableau 1

Présentation des domaines de compétences des référentiels de compétences du Nouveau-Brunswick, du Québec et de l’Ontario

Présentation des domaines de compétences des référentiels de compétences du Nouveau-Brunswick, du Québec et de l’Ontario

-> Voir la liste des tableaux

Bien que les domaines de compétences ou de pratiques divergent entre les référentiels recensés, il n’en demeure pas moins que ceux-ci renvoient principalement à quatre grands domaines que nous tentons de résumer :

1) l’établissement d’une orientation par l’élaboration d’une mission, d’une vision et de valeurs, ainsi que la gestion des apprentissages, des services aux élèves et de l’environnement éducatifs en assurant, par exemple, le soutien aux besoins des élèves et la mise en oeuvre d’un plan de réussite, axé sur la réussite des élèves ; 2) la gestion des ressources humaines (personnel enseignant et professionnel) et des relations interpersonnelles (parents), par exemple, par la gestion du personnel, la gestion des conflits, l’établissement de relations de confiance avec et entre le personnel, les élèves et les parents ; 3) la gestion administrative et organisationnelle par la gestion des lois, des règlements, du budget et le quotidien ; 4) le travail dans un cadre d’imputabilité en assurant de développer un sens d’imputabilité chez le personnel enseignant et de répondre aux exigences d’imputabilité externe.

La prochaine partie expose la méthodologie.

3. Méthodologie

L’étude présenté ici fait partie d’un projet de recherche comportant plusieurs objectifs : Contextes formel, non formel et informel d’acquisition de compétences chez les jeunes directions d’école francophone au Canada (IsaBelle, Lapointe, Bouchamma, Clarke, Langlois et Leurebourg, 2008). Par conséquent, le cadre méthodologique a été publié dans d’autres articles (IsaBelle, 2013; IsaBelle, Gélinas Proulx et Meunier, 2015). Les objectifs du présent article consistent à laisser des directions d’école de langue française et d’autres acteurs de l’éducation nommer : 1) les compétences développées et 2) les compétences à développer chez les nouvelles directions pour mieux gérer leur école selon leur province de travail. Selon Van der Maren (1996), la triangulation des sources constitue une technique de fiabilité des résultats. Ces objectifs s’inscrivent dans un cadre qualitatif et interprétatif, car ils permettent de mieux comprendre le sens que les participants donnent à leurs réponses, et ce, à partir du vécu des chercheurs (Savoie-Zajc, 2011). Également, notre étude a des visées pragmatiques (Savoie-Zajc, 2011), parce qu’elle propose des contenus de formation qui répondent aux besoins exprimés par tous les participants quant aux compétences à développer chez les nouvelles directions, et ce, en fonction de leur province de rattachement.

3.1 Participants

À partir d’un échantillon intentionnel (Savoie-Zajc, 2011), 101 acteurs francophones de l’éducation des dix provinces ont participé à l’étude : 30 directions et directions adjointes d’école possédant cinq ans et moins d’expérience-DÉ5, 28 directions d’école possédant six ans et plus d’expérience-DÉ6+, 20 directions générales ou adjointes de l’éducation au niveau des districts scolaires-DG+DGA, cinq présidents d’associations de directions d’école-PrAss et 18 professeurs d’université en administration scolaire-ProfU (tableau 2). Les nouvelles directions d’école représentent celles qui comptent cinq ans et moins de pratique, car selon Seashore Louis, Leithwood, Wahlstrom et Anderson (2010), une direction peut prendre jusqu’à cinq ans avant de pouvoir instaurer des mesures efficaces. Six regroupements ont été formés afin d’atteindre un nombre respectable dans chacun des regroupements et d’obtenir des données comparables à l’étude d’IsaBelle et al. (2008) : 1) les trois provinces de l’Ouest (Colombie-Britannique, Alberta et Saskatchewan), 2) le Nouveau-Brunswick, 3) le Manitoba, 4) l’Ontario, 5) le Québec et 6) les trois provinces de l’Est (Île-du-Prince-Édouard, Nouvelle-Écosse et Terre-Neuve-et-Labrador).

Tableau 2

Répartition des participants selon le regroupement de provinces et leur fonction professionnelle

Répartition des participants selon le regroupement de provinces et leur fonction professionnelle

-> Voir la liste des tableaux

3.2 Instrumentation

Pour répondre aux besoins de cette recherche, deux grilles d’entrevue ont été créées par IsaBelle et al. (2008). La première, conçue pour les 30 directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience et la deuxième, pour les autres participants décrits en 3.1. Ces grilles comprennent chacune six sections. Nous rapportons les résultats de trois sections : 1) identification des participants ; 2) forces et compétences que possèdent les 30 directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience; 3) tâches pour lesquelles elles ont besoin d’aide et compétences à consolider. Dans un premier temps, nous leur avons demandé : Quelles sont leurs forces ou leurs compétences actuelles pour bien gérer leur école ? Dans un deuxième temps, nous avons posé la question : Dans quels aspects de leurs tâches ont-ils le plus besoin d’aide ou quelles compétences devraient-elles consolider ? Pour chacune des questions, les répondants pouvaient donner jusqu’à cinq réponses.

3.3 Déroulement

De l’automne 2008 au printemps 2009, des entretiens semi-dirigés ont été réalisés avec tous les participants, in situ, dans leur milieu de travail. Nous avons rejoint de nouvelles directions et des acteurs de toutes les provinces. Cependant, pour des raisons de logistique, de manque de temps et de financement pour les déplacements, aucun acteur des trois territoires fédéraux (Territoires du Nord-Ouest, Nunavut et Yukon) n’a participé à l’étude. Toutes les entrevues ont été enregistrées et retranscrites.

3.4 Considérations éthiques

Le projet a obtenu l’approbation éthique de l’université et le consentement de tous les participants. Les données ainsi que les codes d’identification des participants sont conservés dans un disque externe appartenant à la chercheuse principale, afin de conserver leur anonymat. En 2020, toutes les données seront détruites.

3.5 Analyse des données

À partir de notre cadre conceptuel, nous avons bâti une grille de catégories de compétences selon les trois composantes (habiletés, attitudes et connaissances) en l’ajustant avec les catégories émergentes de l’analyse des données, ce qui correspond à une thématisation mixte (Van der Maren, 1996). Le logiciel NVivo 10 a facilité la gestion des données. Le traitement des données s’est fait en huit temps et par trois chercheuses. Afin d’obtenir un accord inter juges satisfaisant, les trois chercheuses ont classifié individuellement 257 codes explicités plus loin. Le classement de sept codes seulement divergeait entre les trois chercheuses, et 24 codes différaient chez deux des trois chercheuses. Certaines unités de sens ont été codées dans deux ou trois catégories. Enfin, une analyse quantitative des données qualitatives catégorisées a été effectuée (Creswell, 2009).

4. Résultats

Le tableau 3 présente une grille de catégories de compétences selon les trois composantes ; sept sont reliées aux habiletés, sept sont liées aux attitudes et six aux connaissances. Pour faciliter la présentation des résultats, nous exposons simultanément les réponses aux deux questions de recherche par catégorie de compétences.

Tableau 3

Grille des catégories de compétences selon les trois composantes habiletés, connaissances et attitudes issues du cadre théorique et de l’analyse des données

Grille des catégories de compétences selon les trois composantes habiletés, connaissances et attitudes issues du cadre théorique et de l’analyse des données

-> Voir la liste des tableaux

4.1 Composante Habiletés

Pour cette composante, sept catégories ont émergé, quatre liées aux grands domaines étudiés dans le cadre conceptuel et trois nouvelles qui respectent le contexte à l’étude : Mobiliser le personnel, les parents, la communauté autour de la vision de l’école ; Gérer le changement et les innovations pédagogiques ou autres et Gérer la diversité et la francophonie en contexte de valorisation linguistique et culturelle-VLC. À la première et à la deuxième question respectivement, 831 et 609 unités de sens ont été codées.

Pour la première catégorie, Articuler une vision et assumer un leadership pédagogique pour la réussite des élèves, à la première question, Quelles sont les forces ou les compétences des directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience?, nous avons codé 159 unités de sens chez 18 directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience et 44 autres acteurs. Les deux sous-catégories les plus citées sont : Elles possèdent un leadership pédagogique et Elles sont des pédagogues : Son leadership au niveau pédagogique, car elle maîtrise la pédagogie (directions générales, Ontario, 5a2.3) ; Elles veulent accompagner les enseignants, les aider (directions générales de l’éducation, Québec, 6a1.1) ; [Elles peuvent amener] l’équipe vers cette vision en lien avec le district (directions générales de l’éducation, province de l’Ouest, 3a2.1).

Pour la deuxième question, Dans quels aspects de leurs tâches les directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience ont le plus besoin d’aide ou quelles compétences devraient-elles consolider?, 67 unités de sens ont été codées auprès de 9 directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience et 24 autres acteurs. Les participants mentionnent que les directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience ont besoin d’aide en leadership pédagogique, en intervention auprès des élèves en difficulté et pour la proposition et le déploiement d’une vision pédagogique : On a besoin de comprendre la pédagogie si on veut être capable nous-mêmes de devenir des leaders (directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience, Ontario, 5f1.4) ; Les besoins spéciaux, c’est ma lacune (directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience, province de l’Est, 2f2.2) ; La planification pour s’aligner avec la mission, la vision, les valeurs, le plan du district, les résultats [] (directions générales de l’éducation, Ontario, 5a2.3). Des participants citent la difficulté des directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience dans : Comment bien les [enseignants] accompagner (directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience, Québec, 6f2.2) ; [La mise en place] des communautés d’apprentissage professionnelles là ! (professeurs d’université en administration scolaire, Manitoba, 4d2.1). La figure 1 expose les résultats selon les provinces.

Figure 1

Proportion des nouvelles directions et des autres acteurs de l’éducation quant à leurs perceptions des habiletés développées (actuelles) et celles à développer (souhaitées) chez les directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience selon la première catégorie de la composante habiletés

-> Voir la liste des figures

Dans la deuxième catégorie, Gérer les ressources humaines et les relations interpersonnelles, pour la première question touchant les forces et les compétences des directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience, 339 unités de sens ont été recensées auprès de 22 directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience et 56 autres acteurs. Relations interpersonnelles entre la direction et les élèves, le personnel enseignant, les parents et la communauté ; Écoute des besoins des élèves, du personnel enseignant et des parents et Gestion participative représentent les trois sous-catégories les plus nommées : On est capable d’écouter les gens (directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience, Québec, 6f1.3) ; [Les directions et directions adjointes d’école possédant cinq ans et moins d’expérience ont] cet esprit de collaboration (professeurs d’université en administration scolaire, Manitoba, 4d2.1).

Pour la deuxième question, 195 unités provenant de près de 13 directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience et 54 autres acteurs ont été calculées. Trois principales sous-catégories ont émergé : Communication avec les parents et les membres de la communauté et leur écoute ; Gestion des gens difficiles et les conflits et Supervision et évaluation du personnel enseignant : Le conseil d’établissement qui a des rôles et des pouvoirs [] ce n’est pas nécessairement facile (directions générales, Québec, 6a2.2) ; [] la relation interpersonnelle et communicationnelle avec les parents, ça crée des explosions (directions générales adjointes, Manitoba, 4b2.1) ; [] l’évaluation de mon personnel [] Je n’étais pas trop certain quoi faire (directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience, province de l’Ouest, 3f2.1) ; Les situations où il y a des conflits entre les membres du personnel (directions générales, Québec, 6a1.1). Les résultats selon les provinces sont présentés à la figure 2.

Figure 2

Proportion des nouvelles directions et des autres acteurs de l’éducation quant à leurs perceptions des habiletés développées (actuelles) et celles à développer (souhaitées) chez les directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience selon la catégorie 2 de la composante habiletés

-> Voir la liste des figures

À la troisième catégorie, Assurer la gestion administrative et organisationnelle, pour la première question, 161 unités de sens auprès de 24 directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience et 40 autres acteurs ont été codées. Les trois principales sous-catégories sont : Assumer le pouvoir en prenant les décisions, Gérer le quotidien et Gérer la discipline : Gérer toutes les crises [] de façon quotidienne (directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience, Ontario, 5f1.1) ; La gestion du comportement des élèves (directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience, province de l’Est, 9f1.1) ; Ce sont des gens qui sont capables de résoudre des problèmes (directions générales, province de l’Ouest, 1a2.1).

Pour la deuxième question, 257 unités ont été calculées auprès de 18 directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience et 59 autres acteurs. Trois sous-catégories ont été abondamment citées : Savoir prioriser les dossiers en fonction du temps, Gérer en fonction des aspects légaux et Gérer le quotidien : Tout l’aspect légal, [] comprendre tout le domaine de l’enfance en difficulté, la sécurité dans les écoles (directions générales, Ontario, 5a2.1) ; [] comment organiser leurs priorités (présidents d’associations de directions d’école, Québec, 6c1.1). Plusieurs évoquent que les directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience ont besoin : [] de bons modèles de prise de décision (professeurs d’université en administration scolaire, Québec, 6d2.4) ; [] des habiletés politiques, comment arriver à influencer ? (directions générales adjointes, Québec, 6b1.2) ; [D’aide dans] la planification à long terme (directions générales, province de l’Ouest, 8a2.1). La figure 3 expose les résultats.

Figure 3

Proportion des nouvelles directions et des autres acteurs de l’éducation quant à leurs perceptions des habiletés développées (actuelles) et celles à développer (souhaitées) chez les directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience selon la catégorie 3 de la composante habiletés

-> Voir la liste des figures

La quatrième catégorie touche l’habileté à Mobiliser le personnel, les parents, la communauté autour de la vision de l’école. Pour la première question, nous avons codé 71 unités venant de 12 directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience et de 26 autres acteurs. Trente-trois personnes affirment que les directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience possèdent un leadership pour mobiliser : Ce sont des gens qui sont [...] capables de mobiliser (directions générales, Québec, 6a2.2). D’autres abordent comment… : Faire des partenariats avec la communauté (directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience, province de l’Est, 9f1.1).

Pour la deuxième question, 23 unités ont été codées auprès de 2 DÉ5- et de 15 autres acteurs. La sous-catégorie, Assumer un leadership qui mobilise, a été citée par 12 participants : Comment fait-on pour engager ton personnel, tes parents, tes élèves [?] (directions d’école possédant six ans et plus d’expérience province de l’Est, 9e1.1) ; L’école fait partie d’un ensemble et il y a d’autres secteurs qui doivent travailler avec toi [la direction] (directions générales, Ontario, 5a2.1). La figure 4 présente les résultats.

Figure 4

Proportion des nouvelles directions et des autres acteurs de l’éducation quant à leurs perceptions des habiletés développées (actuelles) et celles à développer (souhaitées) chez les directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience selon la catégorie 4 de la composante habiletés

-> Voir la liste des figures

La cinquième catégorie, Gérer le changement et les innovations pédagogiques ou autres, a fait émerger, pour la première question, 59 unités auprès de 9 directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience et 25 autres acteurs. Les trois sous-catégories les plus citées sont : Gérer le changement, Savoir manipuler les technologies de l’information et de la communication et Proposer et soutenir les nouveautés pédagogiques : Elles sont ouvertes à des suggestions, à des nouvelles façons d’approcher les choses (directions générales, province de l’Est, 2a2.1).

Pour la deuxième question, 36 unités ont été codées auprès de 3 directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience et 19 autres acteurs. Plusieurs s’interrogent sur les habiletés des directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience : Comprendre toutes les étapesà suivre pour amener un changement (directions et directions adjointes de six ans et plus d’expérience province de l’Est, 3e1.1) ; [] la partie technologie (directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience, province de l’Ouest, 3f1.2) ; Les études sortent et il faut que tu sois au courant (directions et directions adjointes de six ans et plus d’expérience province de l’Est, 9e1.1). Les résultats selon les provinces sont présentés à la figure 5.

Figure 5

Proportion des nouvelles directions et des autres acteurs de l’éducation quant à leurs perceptions des habiletés développées (actuelles) et celles à développer (souhaitées chez les directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience selon la catégorie 5 de la composante habiletés

-> Voir la liste des figures

À la sixième catégorie, Gérer à partir du cadre de reddition de comptes et de conduites éthiques pour tous les acteurs scolaires, pour la première question, 16 unités ont été codées auprès de 2 directions et directions adjointes directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience cinq ans et moins d’expérience et 11 autres acteurs. Onze participants mentionnent que les directions et directions adjointes directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience cinq ans et moins d’expérience gèrent en priorité la réussite de l’élève : Elles ont à coeur la réussite des enfants (directions et directions adjointes de six ans et plus d’expérience province de l’Est, 10e1.2) ; Je crois beaucoup aux jeunes (directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience, Québec, 6f1.5). Deux répondants du Québec mentionnent l’importance de gérer avec transparence […], parce qu’elles sont imputables (professeurs d’université en administration scolaire, 6d1.8).

Pour la deuxième question, nous avons sept unités auprès de six autres acteurs : Toute décision et toute pratique devraient être centrées sur ce qui est le mieux pour l’élève (directions et directions adjointes de six ans et plus d’expérience, province de l’Est, 10e2.1) ; La nouvelle exigence de reddition de comptes (directions générales, province de l’Ouest, 2a2.3). La figure 6 présente les résultats par regroupement de provinces.

Figure 6

Proportion des nouvelles directions et des autres acteurs de l’éducation quant à leurs perceptions des habiletés développées (actuelles) et celles à développer (souhaitées) chez les directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience selon la catégorie 6 de la composante habiletés

-> Voir la liste des figures

Pour la septième catégorie, Gérer la diversité et la francophonie en contexte de valorisation linguistique et culturelle, 26 unités de sens ont été codées auprès de 5 directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience et de 8 autres acteurs pour la première question. Certains répondants suggèrent que les directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience [] sont plus sensibilisées aux Commissions des droits de la personne et aux initiatives au niveau de la lutte contre la discrimination (professeurs d’université en administration scolaire, Manitoba, 4d2.1) ; [possèdent] la compétence axée sur la diversité (professeurs d’université en administration scolaire, Québec, 6d1.8) ; [ont] un deuxième mandat qui est la construction identitaire (directions générales adjointes, Nouveau-Brunswick, 7b2.1).

Pour la deuxième question, nous retrouvons 24 unités codées auprès de 2 directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience et 11 autres acteurs. Ces unités renvoient aux habiletés limitées des directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience à [] respecter les différences (professeurs d’université en administration scolaire, Manitoba, 4d2.1) ; Accueillir les nouveaux immigrants (directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience, provinces de l’Ouest, 3f1.2) ; Être agent de marketing, faire du recrutement, de la rétention (directions et directions adjointes de six ans et plus d’expérience, l’Ontario, 5e1.3) ; Équilibrer les deux [tâches d’administration et d’enseignement] sans trop s’épuiser (directions générales, province de l’Est, 10a2.1). Les résultats sont présentés à la figure 7.

Figure 7

Proportion des nouvelles directions et des autres acteurs de l’éducation quant à leurs perceptions des habiletés développées (actuelles) et celles à développer (souhaitées) chez les directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience selon la catégorie 7 de la composante habiletés

-> Voir la liste des figures

4.2 Composante Attitudes

La deuxième composante a fait émerger 301 unités venant de 23 directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience et de 62 autres acteurs pour la première question de recherche. Les trois catégories les plus citées sont : 5) s’engager et agir, 4) faire preuve de rigueur et de professionnalisme dans son travail et 2) faire preuve d’humanisme et d’intelligence émotionnelle : Plus ta passion est forte, plus tu vas avoir de l’énergie pour passer au travers de ça (professeurs d’université en administration scolaire, Québec, 6d1.9) ; Mon organisation, essentielle à la survie (directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience, Ontario, 5f1.1) ; Une capacité d’adaptation parce que les dossiers [] sont divers et ils arrivent dans un désordre incroyable (présidents d’associations de directions d’école, Québec, 6c1.3). D’autres soulignent les catégories 1 et 3 : Être flexible à tasser les choses et régler le plus urgent (directions de six ans et plus d’expérience, province de l’Ouest, 2e2.3) ; Savoir séparer la vie professionnelle de la vie privée (directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience, province de l’Est, 10f2.1). Finalement, des répondants croient que les directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience sont des gens qui recherchent le développement professionnel (catégorie 6) (directions générales, province de l’Ouest, 1a2.1) et exposent un savoir-être relié au milieu valorisation linguistique et culturelle (catégorie 7) : [] avoir la tête c’est bien, mais d’avoir le coeur devient prioritaire directions et directions adjointes de six ans et plus d’expérience, province de l’Est, 8e2.2).

À la deuxième question, nous avons codé 50 unités auprès de 2 directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience et 32 autres acteurs. Les deux catégories les plus souvent mentionnées sont 2) et 3) : L’intelligence émotionnelle, quant à gérer les situations avec les parents (directions générales, Ontario, 5a1.2) ; Gérer le stress, dans le sens de pouvoir faire ce que les supérieurs attendent, à temps toujours (directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience, Ontario, 5f1.2).

Figure 8

Proportion des nouvelles directions et des autres acteurs de l’éducation quant à leurs perceptions des attitudes développées (actuelles) et celles à développer (souhaitées) chez les directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience selon toutes les catégories de la composante attitudes

-> Voir la liste des figures

4.3 Composante Connaissances

Pour la troisième composante, six catégories ont émergé. Pour la première question de recherche, 90 unités ont été émises par 10 directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience et 29 autres acteurs. Les catégories les plus citées sont les connaissances des milieux 3) de valorisation linguistique et culturelle : Ce ne sont pas seulement des enfants à éduquer, c’est [aussi] une clientèle d’adultes à rééduquer ! Chez qui on doit raviver une flamme de la francophonie (directions et directions adjointes de six ans et plus d’expérience, province de l’Est, 8e2.2) ; 2) éducationnel, et surtout des programmes d’études et finalement 5) multiculturel : Je connais les programmes d’études (directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience, province de l’Est, 9f1.3) ; C’est un défi aujourd’hui que de gérer une école en contexte de diversité (professeurs d’université en administration scolaire, Québec, 6d2.13).

À la deuxième question, nous avons codé 76 unités venant de neuf directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience et de 27 autres acteurs. Les trois catégories les plus mentionnées sont aussi les connaissances 3), 5) et 2) : Dans nos milieux minoritaires, je trouverais ça essentiel que les futures directions scolaires aient [] vécu dans le milieu (directions et directions adjointes de six ans et plus d’expérience, Province de l’Est, 8e2.2) ; les nouveaux arrivants [] l’inclusion dans la communauté scolaire tout en reconnaissant que parfois on doit faire des accommodements (professeurs d’université en administration scolaire, Manitoba, 4d2.1 ; Être très à jour au niveau pédagogique (directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience, Québec, 6f1.3).

Figure 9

Proportion des nouvelles directions et des autres acteurs de l’éducation quant à leurs perceptions des connaissances développées (actuelles) et celles à développer (souhaitées) chez les directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience selon toutes les catégories de la composante connaissances

-> Voir la liste des figures

5. Discussion des résultats

L’étude visait à répondre à deux questions : 1) Quelles sont les forces ou les compétences actuelles des directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience pour bien gérer leur école ? et 2) Quelles compétences les directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience devraient-elles consolider ?

5.1 Composante habiletés

Pour la première catégorie, Articuler une vision et assumer un leadership pédagogique pour la réussite des élèves, pour toutes les provinces, sauf les provinces de l’Est, les participants des deux groupes sont plus nombreux à considérer que les directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience ont développé cette habileté qu’à croire que les directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience devraient la développer. Toutes les directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience en Ontario reconnaissent avoir développé cette habileté. Nos résultats vont à l’encontre de ceux d’Anderson et al. (2013) qui rapportent que peu de directions se qualifient de leaders pédagogiques. Des participants des deux groupes de certaines provinces soulignent le besoin des directions et directions adjointes d’école qui ont cinq ans et moins d’expérience-DÉ5- de développer leur habileté à mettre en oeuvre un fonctionnement en communauté d’apprentissage professionnelle-CAP. Cette nouvelle structure est très présente en Ontario et au Nouveau-Brunswick (IsaBelle, 2017). Par ailleurs, aucun participant du Québec n’a abordé ce fonctionnement, et ce, tant pour l’habileté actuelle que celle souhaitée chez les directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience. Maatouk (2014) indique qu’au Québec peu d’écoles travaillent en communauté d’apprentissage professionnelle. Ce sont surtout les autres acteurs de toutes les provinces qui soulignent le besoin, chez les directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience, de consolider leurs habiletés à proposer et mettre en place une vision pédagogique et stratégique. Des formations offertes aux futures directions gagneraient à approfondir les éléments d’un leadership pédagogique.

Pour la deuxième catégorie, Gérer les ressources humaines et les relations interpersonnelles, plus de directions et directions adjointes d’école possédant cinq ans et moins d’expérience des provinces de l’Ouest, de l’Est et du Québec considèrent avoir développé la Gérer les ressources humaines et les relations interpersonnelles que celles qui ne souhaitent pas la consolider. Les autres acteurs des provinces de l’Ouest, du Manitoba et du Québec sont un peu plus nombreux à considérer que les directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience ont développé cette habileté que ceux qui croient qu’elles ont besoin d’aide dans ce domaine. À l’opposé, un nombre à peu près égal de participants des deux groupes de l’Ontario et du Nouveau-Brunswick suggèrent que les directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience ont besoin de consolider cette habileté et observent qu’elles l’ont développée. Ces résultats nous permettent de formuler trois observations. Premièrement, force est de constater que ce n’est pas parce que la collaboration entre l’école et la famille est souhaitée et souhaitable que les directions ont développé des habiletés pour établir de saines relations avec les parents. Davantage de formations axées sur cette collaboration s’avèrent donc nécessaires (Deslandes, 2005). Deuxièmement, selon Collerette, Pelletier et Turcotte (2013), la gestion des conflits entre les enseignants constitue une pratique favorable pour une meilleure réussite des élèves, mais combien difficile pour une direction ou direction adjointe de cinq ans et moins d’expérience (IsaBelle, 2013). Troisièmement, au milieu des années 2000, les ministères de l’Éducation ontarien (2007) et néo-brunswickois (Labelle, 2015) ont fortement encouragé les directions à mettre en place des communautés d’apprentissage professionnelle. Cette initiative a provoqué de profonds changements dans la façon de travailler des directions et des enseignants (Leclerc et Labelle, 2013). De plus, les participants sont nombreux à révéler que les directions et directions adjointes d’école de cinq ans et moins d’expérience-DÉ5- ont besoin d’aide pour évaluer et superviser le personnel enseignant. Au Québec, seulement deux professeurs d’université en administration scolaire et une direction générale ont cité cette habileté à développer chez les directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience. Rappelons qu’il n’existe ni ordre professionnel ni programme formel d’évaluation pour les enseignants permanents au Québec, contrairement à la majorité des autres provinces.

Pour la troisième catégorie, Assurer la gestion administrative et organisationnelle, nous observons qu’un peu plus de directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience considèrent avoir développé cette habileté que devoir la consolider, et ce, pour toutes les provinces, à l’exception du Manitoba. À l’opposé, plus de répondants du groupe des autres acteurs des provinces de l’Ouest et de l’Est, de l’Ontario et du Québec croient que les directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience doivent consolider cette habileté plutôt qu’elles l’ont développée. Nos résultats rejoignent ceux d’IsaBelle (2013) qui montrent que les directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience obtiennent une moyenne inférieure à quatre sur cinq dans la catégorie Tâches administratives et ceux de Bouchamma et al. (2014) qui suggèrent que les directions ont un sentiment d’efficacité personnelle moins élevé pour la gestion administrative. Archambault, Garon et Harnois (2014) ont mené une étude auprès de 12 directions d’école primaire ; parmi l’ensemble des tâches effectuées par les directions, 65 % sont de nature administrative. Ainsi, les directions passent-elles plus de temps à effectuer des tâches administratives parce qu’elles n’ont pas encore développé l’habileté à les effectuer plus rapidement? Au Nouveau-Brunswick, plus de participants des deux groupes de répondants considèrent que les directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience ont développé cette habileté qu’elles ne doivent la consolider. Toutefois, ces directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience reçoivent-elles un soutien particulier de la part de leur district scolaire ?

Pour la quatrième catégorie, Mobiliser le personnel, les parents, la communauté autour de la vision de l’école, la figure 4 révèle qu’un plus grand nombre de directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience de toutes les provinces, sauf le Manitoba, estiment posséder cette compétence que celles qui croient devoir la développer. IsaBelle (2013) souligne que les directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience obtiennent une moyenne inférieure à quatre sur cinq pour la compétence Encourager la participation de la communauté à la vie de l’école. Comment expliquer pourquoi plusieurs autres acteurs de l’Ontario souhaitent que les directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience développent cette habileté ?

Pour un tiers des répondants abordant la cinquième catégorie, Gérer le changement et les innovations pédagogiques ou autres, la figure 5 révèle que, pour toutes les provinces, plus de directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience et d’autres acteurs considèrent que les directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience ont développé cette habileté que ceux qui croient qu’elles doivent la consolider. Les technologies de l’information et des communications, les formations offertes à distance aux élèves, constituent quelques changements auxquels les directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience sont confrontés.

Dans la sixième catégorie, Gérer à partir du cadre de reddition de comptes et de conduites éthiques, sachant que les systèmes d’éducation s’inscrivent dans la nouvelle gestion publique avec l’obligation de reddition de comptes, nous pouvons nous demander pourquoi peu de participants abordent cette habileté, particulièrement en Ontario, en Colombie-Britannique, en Atlantique ainsi qu’en Alberta, provinces où la gestion axée sur les résultats existe depuis plusieurs années (Cattonar et al., 2007). Est-ce parce que cette gestion est ancrée dans la pratique ou, au contraire, parce qu’elle demeure méconnue ? Au Québec, cette exigence est récente (Brassard, Lusignan et Pelletier, 2013), ce qui explique peut-être pourquoi peu de participants en parlent. Pourtant, de toutes les évolutions scolaires, ce sont les nouvelles politiques d’imputabilité qui affectent le plus la fonction de direction (Cattonar et al., 2007, p. 223). Le nombre limité de réponses ne permet pas d’établir de liens avec le leadership éthique d’Héon et al. (2007).

Pour la septième catégorie, Gérer la diversité et la francophonie en contexte de valorisation linguistique et culturelle, la figure 7 indique que quelques directions et directions adjointes d’école possédant cinq ans et moins d’expérience-DÉ5- de l’Ontario, des provinces de l’Ouest et de l’Est croient avoir développé cette habileté. Certains autres acteurs des provinces de l’Est et de l’Ouest et de l’Ontario considèrent que les directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience doivent consolider cette habileté. L’étude de Cattonar et al. (2007) indique que les directions de toutes les régions, sauf du Québec, assument la promotion de l’école dans la communauté et que plusieurs directions en contexte de valorisation linguistique et culturelle assurent des tâches d’enseignement et de gestion. Selon l'Organisation de coopération et de développement économiques-OCDE (2012), 20 % de la population canadienne est née à l’étranger. Comment expliquer que peu de participants ait mentionné cette habileté? Les formations devront davantage sensibiliser les directions à ces enjeux actuels.

5.2 Composante attitudes

Plus de participants des deux groupes de toutes les provinces considèrent que les directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience ont développé des attitudes favorables quant à la gestion d’une école que ceux qui croient que les directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience ont besoin d’aide pour développer des attitudes. Seuls les autres acteurs du Manitoba font exception. Plusieurs participants de presque toutes les provinces ont signalé le besoin, pour les directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience, de mieux gérer leur stress et leur intelligence émotionnelle. Poirel et Yvon (2014) soulignent que les principales sources de stress recensées auprès de directions du Québec touchaient les contraintes administratives, les relations interpersonnelles et le renouveau pédagogique, soit les catégories 3, 2 et 5 de la composante habileté. Des formations doivent être dispensées sur ces deux thèmes.

5.3 Composante connaissances

À la figure 9, aucune direction ni direction adjointe de cinq ans et moins d’expérience du Manitoba et du Nouveau-Brunswick ne fait mention des connaissances actuelles ou souhaitées pour gérer une école. Des participants des deux groupes des provinces de l’Ouest, de l’Est et de l’Ontario affirment que des directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience possèdent des connaissances liées au milieu de valorisation linguistique et culturelle, mais doivent aussi en acquérir d’autres. Quant aux connaissances du milieu multiculturel, une direction ou direction adjointe de cinq ans et moins d’expérience des provinces de l’Est (9f1.1) affirme qu’elle doit acquérir des connaissances dans ce domaine. En 2009, seulement 2,6 % des immigrants reçus au Canada ont choisi les provinces de l’Atlantique pour y vivre (Statistique Canada, 2009). Selon Ouellet (2010), la formation devrait être offerte autant aux acteurs de l’éducation où la diversité ethnique et religieuse est présente qu’en milieu homogène. Les directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience de toutes les provinces devraient se sentir concernées (Gélinas Proulx, IsaBelle et Meunier (2014).

6. Conclusion

L’étude visait à identifier les compétences que les directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience ont développées et celles qu’elles doivent développer, selon divers points de vue, pour mieux gérer leur école. Nos résultats montrent qu’un plus grand nombre de directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience de presque toutes les provinces mentionnent avoir développé des habiletés dans toutes les catégories, comparativement aux directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience qui considèrent devoir consolider ces habiletés pour mieux gérer leur école. Ces résultats corroborent ceux d’IsaBelle (2013) qui révèlent un sentiment d’efficacité personnelle très élevé chez les directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience. Même si les directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience se sentent confiantes pour assumer un leadership pédagogique, aux dires des autres acteurs, elles gagneraient à consolider certains aspects de cette habileté. Pour la catégorie 2, plus de participants des deux groupes affirment que les directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience ont développé la gestion desressources humaines et les relations interpersonnelles. Or, nombreux sont ceux qui soutiennent qu’elles doivent aussi la consolider. Le même phénomène s’observe pour la catégorie 4. À la catégorie 3, plusieurs autres acteurs suggèrent que les directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience doivent consolider cette habileté. Pour les catégories 6 et 7, le nombre limité de participants ayant cité la gestion éthique, la reddition de comptes, la gestion de la diversité et en milieu de valorisation linguistique et culturelle mérite réflexion. Quant aux attitudes, le besoin, pour les directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience, de mieux gérer leur stress et leur intelligence émotionnelle est cité par plusieurs participants de presque toutes les provinces. Pour la composante connaissances, les trois catégories 3) de valorisation linguistique et culturelle, 2) éducationnel et surtout des programmes d’études et 5) multiculturel sont les plus citées, par plusieurs participants, autant comme compétences développées qu’à développer.

Finalement, notre étude comporte des limites : le codage selon trois composantes d’une compétence s’est avéré complexe. De plus, certaines directions expérimentées avaient tendance à répondre comme si elles étaient une nouvelle direction. Même si nous avons un nombre considérable de répondants, il demeure que le codage varie selon les catégories d’acteurs et les regroupements de provinces, influençant par le fait même l’interprétation des résultats. D’autres études doivent donc être entreprises pour poursuivre l’investigation dans ce domaine. Par exemple, il serait pertinent d’assurer, dans chacune des provinces et chacun des trois territoires, la participation d’un nombre pertinent de tous les acteurs (directions d’école, enseignants, directions générales, professeurs d’université, directions d’associations). Néanmoins, notre étude dresse un portrait global des compétences acquises et à consolider chez les directions et directions adjointes de cinq ans et moins d’expérience selon elles et d’autres acteurs en éducation, et ce, par province. Enfin, nos résultats permettent de dégager des thèmes de formation pour consolider les compétences de nouvelles directions.