Corps de l’article

Introduction

Les blessures et les décès associés aux accidents de la route chez les jeunes conducteurs représentent un important problème de santé publique dans de nombreux pays (Elvik, 2010). Alors qu’ils ne représentaient que 11 % des titulaires de permis de conduire, 27 % des conducteurs décédés sur les routes du Québec entre 2010 et 2011 avaient moins de 25 ans (Société de l’assurance automobile du Québec, 2015).

Puisque l’inexpérience, les comportements à risque et l’immaturité contribuent significativement au risque accru de décès chez les jeunes conducteurs (Hedlund, Shults et Compton, 2003), plusieurs juridictions ont ainsi implanté des programmes d’accès graduel à la conduite (PAGC) (Shope, 2007). Les PAGC s’attaquent à ces facteurs de risque en imposant une période de supervision pour la conduite tout en retardant l’accès à un permis régulier jusqu’à ce qu’une certaine expérience soit acquise. Tous les PAGC incluent des sanctions pour les nouveaux conducteurs qui ne respectent pas les restrictions de conduite (Ferguson, 2003). Bien que l’efficacité des PAGC repose en grande partie sur la doctrine dissuasive, peu d’études se sont penchées sur les mécanismes de contrôle formels et informels qui font en sorte que les jeunes respectent les règles pendant et après leur période de probation (Simpson, 2003 ; Williams, 2007). Il s’agit d’une question primordiale puisque le risque d’être impliqué dans un accident augmente dans la période qui suit l’obtention du permis régulier (Curry, Pfeiffer, Durbin et Elliott, 2015).

Le but de la présente étude est d’élargir les connaissances sur les mécanismes sous-jacents à l’efficacité des PAGC. Pour ce faire, cet article s’inspire des travaux sur la dissuasion conditionnelle (Geerken et Gove, 1975 ; Piquero, Paternoster, Pogarsky et Loughran, 2011 ; Zimring, Hawkins et Vorenberg, 1973). En raison des conditions qui accompagnent un permis restreint (p. ex. : nombre limité de points d’inaptitude et tolérance zéro pour l’alcool), les coûts rattachés aux comportements proscrits par les règles de la route sont plus élevés que pour un permis régulier. Certains mécanismes de contrôle risquent donc d’être plus efficaces auprès des jeunes conducteurs exposés à des restrictions (Allen, Murphy et Bates, 2015 ; Bates, Darvell et Watson, 2015). Cet article poursuit les objectifs spécifiques suivants : 1) évaluer l’effet du type de permis sur les intentions délictuelles et 2) évaluer l’effet des contrôles sociaux formels et informels en fonction du type de permis.

L’article s’organise de la façon suivante. Une première section présente les PAGC ainsi que les résultats des évaluations qui en ont mesuré les effets. Une deuxième section offre un bilan des études qui ont abordé la question des mécanismes liés au respect des règlements routiers chez les jeunes conducteurs et une troisième section se penche sur les contrôles sociaux formels et informels susceptibles d’expliquer le conformisme des jeunes conducteurs en fonction du type de permis. Les quatrième et cinquième sections présentent respectivement la méthodologie et les résultats alors qu’une sixième interprète les principaux résultats. Une conclusion termine l’article.

Les programmes d’accès graduel à la conduite

Le PAGC vise à rendre l’environnement routier plus sécuritaire pour le nouveau conducteur en assurant une période minimale d’apprentissage et en imposant une série de restrictions liées à la conduite (Vanlaar et al., 2009). La majorité des PAGC sont composés de trois phases. Durant la première phase, le nouveau conducteur est autorisé à conduire accompagné d’une personne détenant un permis régulier. Durant la deuxième phase, le détenteur du permis peut conduire un véhicule seul. Toutefois, il est soumis à certaines restrictions telles qu’une tolérance zéro pour l’alcool au volant et un nombre limité de points d’inaptitude. Selon les étapes, certaines juridictions ont mis en place des restrictions supplémentaires interdisant aux nouveaux conducteurs de conduire sur les voies rapides, d’être accompagnés de plus d’un passager et de conduire la nuit. La troisième phase correspond à l’obtention du permis régulier.

De nombreuses synthèses montrent que les PAGC sont efficaces pour prévenir les accidents chez les nouveaux conducteurs (Russell, Vandermeer et Hartling, 2011 ; Shope, 2007 ; Williams et Shults, 2010). Une synthèse des connaissances a permis d’examiner 27 évaluations publiées depuis 2002 et a conclu que les PAGC réduisent le risque d’accident de 20 à 40 % (Shope, 2007). D’autres études ont comparé les effets des PAGC entre les juridictions en vue de cibler les composantes des programmes les plus efficaces. Les restrictions suivantes permettent d’améliorer l’efficacité des PAGC : 1) l’encadrement de la conduite de nuit (p. ex. : interdiction de conduire entre minuit et 5 h du matin) ; 2) l’interdiction de jeunes passagers ; 3) l’obligation d’une période minimale d’apprentissage de six mois 4) un âge minimal avant d’obtenir le permis régulier (p. ex. : 17 ans) ; et 5) l’obligation de suivre des cours lors de la période d’apprentissage (Dee, Grabowski et Morrisey, 2005 ; Masten, Foss et Marshall, 2011 ; Vanlaar et al., 2009 ; Williams, 2007 ; Williams et Shults, 2010).

Outre les évaluations de programme sur le risque d’accident, très peu d’études ont cherché à relever les mécanismes responsables de l’efficacité des PAGC. Cette constatation est d’autant plus importante que certaines études rapportent une hausse du risque d’être impliqué dans un accident dans les mois qui suivent l’obtention du permis régulier (Curry et al., 2015 ; Gregersen, Nyberg et Berg, 2003) ou lorsque la supervision diminue (Lewis-Evans, 2010). En se basant sur les dossiers de 410 230 conducteurs ayant obtenu leur permis intermédiaire entre 17 et 20 ans, Curry et al. (2015) rapportent que « (…) independent of age and experience, teen drivers’ crash risk increased substantially at the point of transition to a full license, while drivers of a similar age who remained in the intermediate phase continued to experience a decline in crash rates » (p. 243).

Bien que les habiletés des conducteurs s’améliorent lors du programme, les bénéfices à long terme demeurent incertains (Curry et al., 2015 ; Groeger et Banks, 2007). Les habiletés de base acquises lors de la période d’apprentissage ne sont pas nécessairement transférables aux situations plus à risque. Une étude montre d’ailleurs que les PAGC réduisent le risque d’accident, non pas en améliorant les aptitudes des nouveaux conducteurs, mais plutôt en limitant leur conduite (leur exposition au risque) (Karaca-Mandic et Ridgeway, 2010). L’augmentation subite de l’exposition à des conditions de conduite hasardeuses et l’adoption accrue de conduite à risque représentent des pistes à investiguer afin de mieux comprendre cette hausse soudaine du risque d’accident (Curry et al., 2015).

Mécanismes associés au respect des règlements routiers

Afin de mieux connaître les facteurs associés au respect des règlements routiers chez les jeunes conducteurs, certains chercheurs se sont intéressés aux mécanismes de contrôle social formel et informel (Allen et al., 2015 ; Bates et al., 2015). Ces recherches mettent l’accent sur la période probatoire au cours de laquelle le conducteur est soumis à des règles strictes. Ces dernières renvoient directement à la théorie de la dissuasion qui est peu abordée dans les études présentées précédemment. Pourtant, Simpson (2003) souligne que « (t)he probationary scheme is anchored in the concept of deterrence. It is assumed that safe driving habits, at least when the initial risks of collision is much higher, will be encouraged by the threat of punishment and its application » (p. 26).

Bates et al. (2015) ont fait passer un questionnaire en ligne à 236 conducteurs âgés de 17 à 24 ans qui détenaient un permis provisoire (P1 ou P2) du Queensland, en Australie[2]. Les auteurs ont collecté de l’information sur les expériences dissuasives formelles (p. ex. : le policier m’a puni pour avoir « texté ») et informelles (p. ex. : probabilité d’être puni par les parents pour avoir enfreint les règlements de la route). Leurs résultats établissent que les détenteurs d’un permis P1 commettent moins d’infractions relatives aux restrictions liées au permis que les détenteurs d’un permis P2. Ces mêmes détenteurs d’un P1 ont une perception plus élevée du risque d’être puni par leurs parents advenant qu’ils commettent une infraction comparativement aux P2. Les résultats montrent que le contrôle informel influe négativement sur la fréquence des infractions. Ces résultats sont similaires à ceux d’une autre étude, menée auprès de 151 jeunes conducteurs australiens, qui montre que la dissuasion informelle affecte positivement le respect des règles. La dissuasion informelle générerait des sentiments de honte qui mèneraient au respect des règles (Allen et al., 2015).

La présente étude : permis restreint et dissuasion conditionnelle

Bien que les études précédentes renseignent sur l’importance des contrôles informels lors de la supervision des jeunes conducteurs (Allen et al., 2015 ; Bates et al., 2015), ces dernières ne permettent pas d’émettre des hypothèses susceptibles d’expliquer le risque accru d’accidents dans les mois qui suivent l’obtention du permis régulier. Leurs échantillons sont composés uniquement de conducteurs ayant un permis restreint. Ces études ne permettent pas non plus d’aborder deux questions centrales concernant l’efficacité des permis restreints : 1) est-ce que le type de permis influe sur les intentions délictuelles ? ; et 2) est-ce que le type de permis conditionne l’efficacité de certains mécanismes de contrôle social formel et informel ?

Une façon d’aborder ces questions consiste à s’inspirer de la théorie de la dissuasion conditionnelle (Piquero et al., 2011). À la différence de la dissuasion classique, la théorie de la dissuasion conditionnelle soutient que l’effet de la menace et de l’imposition de sanctions varie en fonction des types d’infraction, des contextes et des caractéristiques des individus (Andenaes, 1974 ; Geerken et Gove, 1975 ; Piquero et al., 2011). Dans leur recension des écrits, Piquero et al. (2011) soulignent que l’effet de la peine varie en fonction de l’enracinement social, des valeurs morales, du contrôle de soi, de l’excitation émotionnelle ou de l’utilisation de psychotropes, du positionnement dans un réseau social et de la capacité décisionnelle d’un individu[3].

Un aspect négligé susceptible d’affecter le respect des règles est le statut d’une personne par rapport aux règlements. Ce statut module par le fait même le niveau de sanction auquel elle s’expose en cas d’infraction. Un exemple extrême est l’introduction des lois de type three strikes dans certains États américains où les peines d’emprisonnement sont automatiquement plus longues pour les récidivistes (Zimring, Hawkins et Kamin, 2001).

En matière de sécurité routière, ce statut s’inscrit dans le système de points d’inaptitude qui vise à ce que les récidivistes d’infraction routière ou les conducteurs à risque s’exposent éventuellement à une suspension du permis de conduire (Castillo-Manzano et Castro-Nuño, 2012). L’inscription de points d’inaptitude au dossier du conducteur rappelle qu’il s’expose éventuellement à une suspension du permis de conduire s’il continue à enfreindre les règles (Basili et Nicita, 2005). Bien qu’elle ne cible pas directement les conducteurs ayant un permis restreint, une évaluation de l’introduction du système de points d’inaptitude en Espagne montre que les jeunes conducteurs ont par la suite diminué leurs comportements à risque et employé davantage les dispositifs de sécurité (p. ex. : port de la ceinture et du casque à moto) (Gras, Font-Mayolas, Planes et Sullman, 2014)[4].

La tolérance zéro face à l’alcool au volant et le nombre limité de points d’inaptitude (quatre points au Québec) font en sorte que pour une même infraction, les conséquences sont beaucoup plus importantes pour un conducteur ayant un permis restreint que pour un titulaire de permis régulier (Simpson, 2003). Le permis restreint peut ainsi être considéré comme étant une condition nécessaire à l’activation de mécanismes de contrôle susceptibles d’expliquer le conformisme des conducteurs. À la lumière des connaissances sur les contrôles sociaux formels et informels, les restrictions sur le permis sont susceptibles d’exercer un contrôle sur le comportement des titulaires de trois façons.

Premièrement, et conformément à la théorie de la dissuasion, les restrictions associées au permis peuvent avoir un effet à la hausse sur les perceptions du risque d’arrestation et de la sévérité des sanctions (Homel, 1988 ; Zimring et al., 1973). D’autres auteurs relèvent que les menaces de sanction préviennent les conduites délinquantes en sensibilisant l’individu aux problématiques de sécurité routière et au risque accru d’accident, voire en entraînant une internalisation de la norme sociale par rapport à une conduite (Blais et Ouimet, 2005 ; Kennedy, 2009).

Deuxièmement, la honte et la culpabilité peuvent agir comme des agents dissuasifs informels (Bates et al., 2015 ; Grasmick et Bursik, 1990 ; Grasmick, Bursik et Arneklev, 1993). L’entourage de l’apprenti conducteur peut exercer un certain contrôle en lui rappelant les restrictions auxquelles il est exposé. Rappeler ces conditions lorsque les règles sont enfreintes génère souvent de la honte chez le jeune conducteur (Allen et al., 2015). De plus, la réprobation parentale peut entraîner des conséquences négatives pour les jeunes conducteurs telles que l’accès limité au véhicule et l’interdiction de l’utiliser (Bates et al., 2015).

Troisièmement, la présence de restrictions sur le permis permet au conducteur de résister à la pression des pairs. Comme le souligne Homel (1988) dans son étude sur les contrôles aléatoires contre l’alcool au volant en Nouvelle-Galles du Sud (Australie), « the legal actions reduce peer pressure to drive after drinking by providing an exculpatory or legitimate excuse for actions taken to avoid the offense » (p. 26). Plusieurs études montrent d’ailleurs que la présence de pairs est associée à l’adoption de comportements routiers à risque et à un risque accru d’accident (Chen, Baker, Braver et Li, 2000 ; Doherty, Andrey et MacGregor, 1998 ; Simons-Morton, Lerner et Singer, 2005).

Le but de cette étude est donc d’estimer l’effet du type de permis de conduire sur les intentions délictuelles d’un échantillon de jeunes conducteurs québécois. Plus précisément, l’étude vise deux objectifs spécifiques : 1) évaluer l’effet du type de permis sur les intentions délictuelles et 2) évaluer l’effet des contrôles sociaux formels et informels en fonction du type de permis.

Méthodologie

Source des données

Les données de l’étude ont été collectées à l’aide d’un questionnaire sur les habitudes de conduite et les perceptions de jeunes conducteurs québécois (Beaudoin, 2012)[5]. Le questionnaire a été rempli à l’aide d’une version papier ou électronique, selon les cas. Il comporte 12 sections traitant de divers sujets, dont les infractions routières (p. ex. : excès de vitesse, défaut de s’immobiliser à un feu rouge) et leurs conséquences (p. ex. : être arrêté et recevoir un constat d’infraction, avoir mauvaise conscience et subir la réprobation de l’entourage), la perception des risques associés aux comportements routiers (p. ex. : perception du risque d’arrestation ou d’accident), les expériences reliées à la conduite (p. ex. : exposition aux activités policières), les expériences personnelles et vicariantes d’accident, et l’entourage du répondant (p. ex. : expériences de sanction, d’infraction, d’évitement de sanction chez les pairs). La présente étude porte uniquement sur les répondants âgés de 18 à 25 ans inclusivement afin d’isoler plus facilement l’effet du type de permis sur les variables dépendantes (n = 392). Cette stratégie permet de s’intéresser à des conducteurs qui ont une expérience de conduite relativement limitée.

Variables à l’étude

Variable indépendante d’intérêt

Permis. Le type de permis de conduire est la variable indépendante d’intérêt de l’étude. En raison du nombre limité de répondants détenteurs d’un permis d’apprenti conducteur ou probatoire, les deux catégories ont été regroupées (0 = permis régulier et 1 = permis d’apprenti ou probatoire). Au moment où le questionnaire a été passé, un apprenti conducteur pouvait prendre le volant à condition d’être accompagné d’un moniteur ou d’une personne ayant un permis valide depuis au moins deux ans. Le permis probatoire permet de conduire seul. Dans les deux cas, les conducteurs doivent avoir moins de quatre points d’inaptitude à leur dossier et respecter la règle du zéro alcool afin de conserver leur privilège de conduire[6]. Environ 25 % des participants ont un permis d’apprenti ou probatoire (Tableau 1).

Variables sur les perceptions des contrôles sociaux

Ces variables sont au nombre de cinq. Certaines font référence aux mécanismes susceptibles d’affecter les intentions délictuelles des conducteurs et se classent dans les contrôles sociaux informels (réprobation de l’entourage) et d’autres aux contrôles sociaux formels (risque perçu d’arrestation, sévérité perçue des sanctions) (Bates et al., 2015). Enfin, deux autres variables sont prises en considération, soit la sévérité perçue des problématiques de sécurité routière qui renvoie à l’internalisation de la norme (voir Grasmick et Green [1981] pour une échelle similaire) et le risque perçu d’accident qui représente un coût associé aux conduites routières proscrites (Homel, 1988). Le Tableau 1 présente la distribution de ces variables et leur consistance interne.

Risque perçu d’arrestation. Cette variable mesure le risque perçu d’être arrêté et de recevoir un constat d’infraction si le répondant continue à adopter les mêmes comportements routiers (p. ex. : brûler un feu rouge, excéder la limite de vitesse de 20km/h sur l’autoroute, ne pas s’immobiliser à un arrêt). Elle est composée de sept indicateurs de type Likert dont les modalités varient de 1 à 6 (1 = moins d’une chance sur 10 000 ; 2 = 1/10 000 ; 3 = 1/1000 ; 4 = 1/100 ; 5 = 1/10 ; et 6 = 100 %).

Sévérité perçue des sanctions. Cette échelle est composée de six indicateurs de type Likert (1 = pas du tout sévère à 3 = très sévère) et elle capte la sévérité perçue des sanctions associées aux infractions routières. Les participants indiquaient le degré de sévérité associé à une sanction (p. ex. : 3 points d’inaptitude et une amende variant de 100 $ à 200 $ pour défaut de s’immobiliser à un feu rouge).

Réprobation de l’entourage. Cette échelle est constituée de sept indicateurs de type Likert (1 = ils ne changeraient absolument pas leur opinion à 4 = ils auraient assurément une moins bonne opinion) demandant aux participants d’indiquer l’opinion de leur entourage en apprenant qu’ils avaient commis une infraction routière.

Risque perçu d’accident. À l’aide de sept indicateurs de type Likert (1 = moins d’une chance sur 10 000 ; 2 = 1/10 000 ; 3 = 1/1000 ; 4 = 1/100 ; 5 = 1/10 ; et 6 = 100 %), cette échelle mesure le risque perçu d’être impliqué dans un accident par le répondant en fonction des comportements adoptés au cours des 12 derniers mois. Il s’agit des mêmes comportements que pour l’échelle sur le risque perçu d’arrestation.

Sévérité perçue des problèmes de sécurité routière. La sévérité perçue des problèmes de sécurité routière est mesurée à l’aide de sept indicateurs et elle précise jusqu’à quel point les participants considèrent une série infractions comme un problème sur la route (p. ex. : brûler un feu rouge, ne pas s’immobiliser à un arrêt, dépasser les limites de vitesse de plus de 20km/h en ville). Les modalités des indicateurs varient de 1 à 5 (1 = pas du tout un problème ; 2 = pas vraiment un problème ; 3 = moyennement un problème ; 4 = un problème sérieux ; et 5 = un problème très sérieux).

Variable dépendante : les intentions délictuelles

Intentions délictuelles. L’échelle d’intentions délictuelles est constituée de sept indicateurs de type Likert (1 = aucune ; 2 = faible ; 3 = moyenne ; 4 = forte ; et 5 = certaine) qui mesurent la probabilité que les participants commettent une série d’infractions (p. ex. : excès de vitesse, défaut de s’immobiliser à un feu rouge ou un arrêt). Les participants obtiennent un score moyen de 2,12 (écart-type = 0,70), indiquant une faible probabilité de commettre les infractions (Tableau 1).

Variables contrôles

Outre les perceptions et le type de permis, d’autres facteurs sont susceptibles d’influer sur l’adoption de comportements routiers proscrits (Tableau 1). Premièrement, la variable « sexe » (0 = homme, 1 = femme) tient compte du fait que les hommes adoptent davantage de comportements illégaux sur la route que les femmes (Harré, Field et Kirkwood, 1996 ; McKnight et McKnight, 2000).

Deuxièmement, la « faible maîtrise de soi » est couramment associée aux comportements criminels et déviants (Gottfredson et Hirschi, 1990 ; Pratt et Cullen, 2000). Cette variable est mesurée à l’aide de l’échelle de Grasmick, Tittle, Bursik et Arneklev (1993). Celle-ci est composée de 24 indicateurs de type Likert et varie de 0 à 6. Un résultat élevé indique une très faible maîtrise de soi.

Troisièmement, « l’implication dans un accident » est mesurée de façon dichotomique (oui ou non sur une période de 12 mois) et représente une conséquence qui pourrait avoir un effet de dissuasion spécifique (Homel, 1988).

Quatrièmement, l’« exposition aux activités policières » est conçue comme une forme de transmission de la menace de sanction (Blais et Dupont, 2004, 2005). Cette échelle est mesurée à l’aide de cinq indicateurs dichotomiques (0 = non, 1 = oui) où les répondants devaient indiquer s’ils avaient été témoins de certaines activités policières au cours des derniers mois (p. ex. : barrages routiers contre l’alcool au volant, opérations radars). Plus la valeur se rapproche de 1, plus l’individu a été exposé aux activités policières.

Cinquièmement, les « pairs délinquants » exercent souvent une influence sur le jeune conducteur, soit en l’incitant à adopter des comportements téméraires (Roy, 2014) ou bien en lui servant de modèle (Piquero et Pogarsky, 2002). Dans cette étude, les pairs délinquants réfèrent à la proportion de pairs dans l’entourage du participant qui enfreignent les règlements de la route. L’échelle a été créée en calculant une moyenne à partir de sept indicateurs de type Likert (1 = jamais à 6 = toujours) mesurant l’implication des pairs dans les infractions routières utilisées pour créer les autres échelles.

Sixièmement, « l’expérience de conduite » est souvent associée à l’adoption de comportements plus sécuritaires (Hedlund et al., 2003). Dans cette étude, l’expérience a été calculée en soustrayant la date de passation du questionnaire à la date d’obtention du permis de conduire.

Septièmement, « l’âge » des conducteurs est intégré aux modèles. Cette variable est particulièrement importante puisqu’elle permet de distinguer les effets de l’âge et de l’expérience (Laberge-Nadeau, Maag et Bourbeau, 1992). Les conducteurs avaient en moyenne 21,98 ans. L’âge est toutefois fortement corrélé à l’expérience de conduite (r = 0,67 ; p < 0,001).

Huitièmement, « posséder une voiture » augmente les possibilités de déplacement et, par conséquent, de commettre des infractions routières. Les répondants ont donc indiqué s’ils possédaient une voiture (1) ou non (0).

Finalement, la « fréquence de conduite » est prise en compte. Certains avancent que les permis avec des restrictions préviennent les accidents principalement en limitant l’accès à la conduite plutôt que par l’acquisition d’expérience chez les nouveaux conducteurs (Karaca-Mandic et Ridgeway, 2010). Cette variable a été dichotomisée puisque 44,2 % des participants conduisent moins de deux à quatre fois par semaine et les autres, presque tous les jours. Ainsi, la variable distingue la conduite occasionnelle (0) et la conduite fréquente (1).

Stratégie analytique

Afin d’atteindre les objectifs, des analyses de régression multiple ont été réalisées en deux temps. Tout d’abord, des analyses évaluent l’effet des variables perceptuelles et du type de permis sur les intentions délictuelles pour l’ensemble des participants. Par la suite, l’effet des variables perceptuelles sur les intentions délictuelles est estimé en fonction du type de permis. Pour y arriver, les variables sur les contrôles formels et informels ont été manipulées de deux façons. D’une part, des termes d’interaction ont été créés entre les variables perceptuelles et le type de permis (Aiken, West et Reno, 1991). Les variables ont été centrées à partir de leur moyenne et multipliées par le type de permis. Centrer une variable permet de réduire les problèmes de multicolinéarité lorsque des variables ont des composantes similaires (Tabachnick et Fidell, 2013). D’autre part, des termes quadratiques des variables perceptuelles ont été créés afin de tenir compte du possible effet de seuil. Selon certaines études, l’effet dissuasif de la sanction se manifeste uniquement à partir d’un certain niveau (Brown, 1978 ; Kane, 2006 ; Yu et Liska, 1993). Toutes les analyses ont été faites à l’aide de la version 21 du logiciel SPSS.

TABLEAU 1

Statistiques descriptives des variables

Statistiques descriptives des variables

-> Voir la liste des tableaux

Résultats

Le Tableau 2 présente une première série d’analyses de régression qui estime l’effet des perceptions sans contrôle pour les facteurs concomitants (modèle 1) et ensuite avec ceux-ci (modèle 2)[7]. Selon le modèle 1, le risque perçu d’arrestation est positivement lié aux intentions délictuelles (b = 0,18 ; p ≤ 0,01). Par la suite, le risque perçu d’accident (b = -0,14 ; p ≤0,05), la réprobation de l’entourage (b = -0,10 ; p ≤ 0,05) et la sévérité perçue des problèmes de sécurité routière (b = -0,32 ; p ≤ 0,001) sont tous négativement associés aux intentions délictuelles. Une fois les variables contrôles et le type de permis intégrés aux analyses (modèle 2), seules la réprobation de l’entourage (b = -0,09 ; p ≤ 0,05) et la sévérité perçue des problématiques de sécurité routière (b = -0,25 ; p ≤ 0,001) influent toujours à la baisse sur les intentions délictuelles. Enfin, les détenteurs d’un permis restreint ont des intentions délictuelles moins prononcées que ceux avec un permis régulier (b = -0,16 ; p ≤ 0,01).

Outre le permis et les perceptions, trois autres variables du modèle 2 affectent les intentions délictuelles. La proportion de pairs délinquants est positivement associée aux intentions délictuelles (b = 0,29 ; p ≤ 0,001). Les jeunes exercent parfois des pressions sur le conducteur afin qu’il adopte des conduites téméraires (Møller et Haustein, 2014 ; Roy, 2014 ; Simons-Morton et al., 2012). Comme plusieurs études l’ont montré (Arneklev, Grasmick, Tittle et Bursik Jr, 1993 ; Grasmick, Tittle, Bursik et Arneklev, 1993), la faible maîtrise de soi est positivement liée aux intentions délictuelles (b = 0,21 ; p ≤ 0,001). Enfin, la fréquence de conduite influence à la hausse les intentions délictuelles (b = 0,13 ; p ≤ 0,01). Selon plusieurs études, il s’agit de la raison pour laquelle les conducteurs ayant un permis restreint sont moins impliqués dans les accidents (Curry et al., 2015 ; Karaca-Mandic et Ridgeway, 2010).

Les modèles 3 à 8 permettent deux précisions par rapport au modèle 2. D’une part, les analyses vérifient si les effets des variables perceptuelles sur les intentions délictuelles sont mieux représentés par une relation quadratique. D’autre part, les analyses intègrent des effets d’interaction afin de comparer les effets des variables perceptuelles en fonction du type de permis de conduire. En raison de la taille modeste de l’échantillon, chaque modèle approfondit la relation entre une seule variable perceptuelle et les intentions délictuelles.

TABLEAU 2

Effets du permis et des autres contrôles sociaux sur les intentions délictuelles

Effets du permis et des autres contrôles sociaux sur les intentions délictuelles

* p ≤ 0,05 ; ** p ≤ 0,01 ; *** p ≤ 0,001.

-> Voir la liste des tableaux

Les résultats des modèles 3 et 4 montrent que les relations entre le risque perçu d’arrestation, le risque perçu d’accident et les intentions délictuelles s’expriment mieux à l’aide d’une fonction quadratique (Tableau 3). Le risque perçu d’arrestation (b = -0,28 ; p ≤ 0,001) et le risque perçu d’accident (b = -0,12 ; p < 0,05) influent à la baisse sur les intentions délictuelles, mais seulement à partir d’un certain seuil. Seul leur terme quadratique entretient une relation significative avec les intentions délictuelles. La sévérité perçue des problèmes de sécurité routière demeure toujours négativement liée aux intentions délictuelles. Enfin, les effets d’interaction ne sont pas significatifs, ce qui laisse supposer que le risque perçu d’arrestation et le risque perçu d’accident produisent le même effet au sein des deux groupes.

TABLEAU 3

Effets du risque perçu d’arrestation et d’accident sur les intentions délictuelles en fonction du type de permis

Effets du risque perçu d’arrestation et d’accident sur les intentions délictuelles en fonction du type de permis

* p ≤ 0,05 ; ** p ≤ 0,01 ; *** p ≤ 0,001.

-> Voir la liste des tableaux

TABLEAU 4

Effets de la sévérité perçue des sanctions et de la réprobation de l’entourage sur les intentions délictuelles en fonction du type de permis

Effets de la sévérité perçue des sanctions et de la réprobation de l’entourage sur les intentions délictuelles en fonction du type de permis

* p ≤ 0,05 ; ** p ≤ 0,01 ; *** p ≤ 0,001.

-> Voir la liste des tableaux

TABLEAU 5

Effets de la sévérité perçue des problèmes de sécurité routière et des pairs délinquants sur les intentions délictuelles en fonction du type de permis

Effets de la sévérité perçue des problèmes de sécurité routière et des pairs délinquants sur les intentions délictuelles en fonction du type de permis

* p ≤ 0,05 ; ** p ≤ 0,01 ; *** p ≤ 0,001.

-> Voir la liste des tableaux

Les résultats du modèle 5 (Tableau 4) montrent que la sévérité perçue des sanctions n’influe pas sur les intentions délictuelles, même lorsqu’un terme quadratique et des effets d’interaction sont intégrés au modèle. Les résultats du modèle 6 semblent indiquer que la relation entre la réprobation de l’entourage et les intentions délictuelles s’expriment mieux à l’aide d’une fonction quadratique (b = -0,12 ; p ≤ 0,05). L’effet est semblable pour les deux groupes de conducteurs puisque le terme d’interaction entre le permis et la réprobation de l’entourage n’est pas significatif.

Le Tableau 5 rapporte les résultats pour les modèles 7 et 8. Le modèle 7 indique que la relation entre la sévérité perçue des problèmes de sécurité routière et les intentions délictuelles s’exprime selon une fonction linéaire (b = -0,32 ; p ≤ 0,001). Le terme quadratique n’est pas significatif. De même, l’effet est le même indépendamment du type de permis. Finalement, le modèle 8 met l’accent sur la relation entre les pairs délinquants et les intentions délictuelles. Les résultats laissent supposer que les pairs délinquants affectent à la hausse les intentions délictuelles et que cette relation est de nature linéaire (b = 0,31 ; p ≤ 0,001). Le terme quadratique n’est pas significatif. L’influence des pairs est toutefois moins marquée chez les détenteurs d’un permis restreint comme en témoigne le coefficient (b = -0,21 ; p ≤ 0,001) pour le terme d’interaction « permis*(pairs délinquants2) ».

Interprétation

Cette recherche visait deux objectifs spécifiques : 1) évaluer l’effet du type de permis sur les intentions délictuelles et 2) évaluer l’effet sur les intentions délictuelles des contrôles sociaux formels et informels selon le type de permis de conduire.

Dans un premier temps, les analyses montrent que les détenteurs d’un permis ayant des restrictions manifestent des intentions délictuelles moins prononcées que les détenteurs d’un permis régulier. Conformément aux attentes exprimées précédemment, le type de permis représente une condition qui prévient les intentions délictuelles. Bien que les PAGC soient mis en place afin que les nouveaux conducteurs gagnent de la maturité, de l’expérience et les habiletés nécessaires à la conduite (Hedlund et al., 2003), il n’en demeure pas moins que, dans notre étude, l’obtention des pleins privilèges est associée à une augmentation des intentions délictuelles.

Dans un deuxième temps, les analyses de régression ont permis de cerner les facteurs associés aux intentions délictuelles de façon générale, et par la suite, en fonction du type de permis. Bien qu’il ne soit pas possible de faire de parallèle direct entre les expériences punitives et la sévérité perçue des problèmes de sécurité routière, nos résultats rappellent que l’internalisation de la norme (soit que certains comportements routiers sont incompatibles avec le respect de l’intégrité individuelle) est fortement associée au respect des règles (Andenaes, 1978 ; Blais et Ouimet, 2005 ; Grasmick et Green, 1981).

Nos résultats indiquent également que les contrôles formels et informels préviennent les intentions délictuelles, mais de façon modeste, comparativement à la sévérité perçue des problèmes de sécurité routière. Ces effets sont d’autant plus modestes qu’ils se manifestent ou s’accentuent uniquement à partir d’un certain seuil. À l’instar de deux études australiennes (Allen et al., 2015 ; Bates et al., 2015), nos résultats montrent que la réprobation de l’entourage atténue les intentions délictuelles et que cet effet est plus marqué chez ceux qui ont obtenu des scores élevés à l’échelle de réprobation.

Alors que d’autres études remettent en question le potentiel des contrôles plus formels à dissuader les jeunes conducteurs d’enfreindre les règlements (Allen et al., 2015 ; Bates et al., 2015), nos résultats semblent indiquer que le risque perçu d’arrestation et le risque perçu d’accident sont associés à une baisse des intentions délictuelles, mais uniquement à partir d’un certain seuil. De façon générale, nos constatations soulignent par le fait même l’importance d’employer différentes modélisations pour estimer l’effet des contrôles formels et informels sur les intentions et comportements délinquants. Qu’il s’agisse d’infractions routières ou de crimes plus traditionnels, des études établissent que l’effet dissuasif survient lorsqu’un niveau minimal de renforcement des lois est atteint (Brown, 1978 ; de Waard et Rooijers, 1994 ; Yu et Liska, 1993).

Enfin, les résultats montrent que le type de permis de conduire modère la relation entre les pairs délinquants et les intentions délictuelles. Ainsi, le permis apparaît comme une condition nécessaire à l’activation de mécanismes préventifs. Le statut d’une personne dans le système de points d’inaptitude peut influer sur ses perceptions et ses intentions. Nos résultats révèlent que les restrictions sur le permis de conduire donnent plus de poids à un effet préventif, lequel est probablement lié au contrôle formel et informel. L’influence des pairs délinquants sur les intentions délictuelles est beaucoup moins prononcée chez les détenteurs d’un permis restreint que chez les titulaires d’un permis régulier. Comme le laisse entendre Homel (1988), les restrictions peuvent alors être utilisées pour résister à la pression des pairs en évoquant une excuse liée aux conséquences légales associées à l’infraction. Sur la base d’autres études (Allen et al., 2015 ; Bates et al., 2015), il est également probable que le jeune conducteur est motivé par les conséquences liées aux contrôles informels pour résister à la pression des pairs (p. ex. : mes parents m’interdiront d’utiliser la voiture).

Nos résultats révèlent également que l’influence marquée des pairs chez les jeunes conducteurs se poursuit bien après l’obtention du permis régulier. Il pourrait s’agir de l’un des mécanismes associés au risque accru d’accident dans les mois qui suivent l’obtention du permis régulier. Il est d’ailleurs démontré que la surreprésentation des jeunes conducteurs dans les statistiques d’accident se maintient jusqu’à l’âge de 29 ans (Braver et Trempel, 2004).

Conclusion

Cette étude visait à élargir les connaissances quant à l’effet du type de permis sur les intentions délictuelles au sein d’un échantillon de jeunes conducteurs. Les résultats indiquent que le permis restreint est associé à une diminution des intentions délictuelles. Ce plus grand respect des règles chez les détenteurs d’un permis restreint passerait par une plus grande capacité à résister à la pression des pairs (Homel, 1988). Une fois le permis régulier obtenu, l’effet des pairs délinquants sur les intentions délictuelles s’accentue. Bien que d’autres recherches soient nécessaires, il est possible d’émettre l’hypothèse que la hausse du risque d’accident dans les mois qui suivent l’obtention du permis de conduire régulier est liée à une moins grande capacité à résister à la pression des pairs. Alors que plusieurs études montrent l’efficacité de limiter le nombre de jeunes passagers pour prévenir les accidents chez les nouveaux conducteurs (Vanlaar et al., 2009 ; Williams, 2007), peu d’études émettent des réserves quant à la levée immédiate de cette interdiction après la période de probation.

Bien que nos résultats soulignent l’importance d’examiner la relation entre le type de permis et l’influence des pairs, il faut toutefois les apprécier au regard de certaines limites. Premièrement, le nombre limité de conducteurs ayant des permis d’apprenti et probatoire nous a obligés à les regrouper en une seule catégorie. Il n’a donc pas été possible de distinguer les effets respectifs associés aux permis d’apprenti et probatoire, bien que des études laissent voir des différences (Allen et al., 2015 ; Bates et al., 2015). Deuxièmement, les conducteurs ayant des permis réguliers étaient en moyenne plus âgés (21,3 vs 20,0 ans) et avaient plus d’expérience de conduite (48,4 vs 18,0 mois) que les détenteurs d’un permis restreint. Bien que ces facteurs aient été contrôlés lors des régressions, il ne faut pas oublier que les deux groupes de détenteurs de permis ne sont pas tout à fait équivalents. Il est donc impossible d’avancer qu’il existe une relation de cause à effet entre le type de permis et les intentions délictuelles (voir Appel et Sweeten [2010] sur la question de l’équivalence des groupes et de l’inférence causale). Troisièmement, des modifications ont été apportées au Code de la sécurité routière depuis la passation de notre questionnaire. Depuis janvier 2010, la réussite d’un cours de conduite (théorique et pratique) est obligatoire à l’obtention du permis probatoire. La tolérance zéro pour l’alcool au volant reste en vigueur pour tous les détenteurs d’un permis restreint. Depuis juin 2011, le régime de points d’inaptitude est aussi déterminé selon l’âge du conducteur (pour les moins de 25 ans). Depuis avril 2012, la tolérance zéro s’applique à tous les conducteurs de 21 ans et moins (peu importe le type de permis). Toutefois, aucune restriction n’encadre la présence des pairs ou l’âge de l’accompagnateur pour les titulaires d’un permis d’apprenti. D’autres études permettraient néanmoins d’apprécier l’effet des modifications sur les intentions et les comportements des jeunes conducteurs. Quatrièmement, les présents résultats ne peuvent pas être généralisés à l’ensemble des conducteurs de 18 à 25 ans puisque l’étude est basée sur un échantillon de convenance. Finalement, le sondage a été passé à des conducteurs québécois et il est difficile de généraliser les résultats aux conducteurs d’autres juridictions qui sont exposés à des restrictions différentes. D’autres études devraient examiner les facteurs permettant d’expliquer le risque accru d’accident dans les mois qui suivent l’obtention du permis régulier. La capacité du permis restreint à activer certains mécanismes de contrôle social formel et informel doit être étudiée davantage.