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Cet ouvrage collectif dirigé par Carole Fleuret et Isabelle Montésinos-Gelet sur le rapport à l’écrit, dans toute sa diversité, et conçu en tant qu’habitus culturel est tout à fait en phase avec ce qui est annoncé dans son intitulé. On nous y présente un panorama de recherches sur différents rapports à l’écrit dans une variété de contextes éducatifs et de populations étudiantes. Il s’agit ici de l’aboutissement d’une réflexion collective sur le rapport à l’écrit en tant qu’habitus culturel ; autrement dit, sur le rapport que les individus entretiennent avec la langue écrite, fruit de leurs socialisations primaire et secondaire. Cet habitus culturel, en référence au concept développé par Bourdieu et point d’ancrage de l’ouvrage, conditionnerait l’apprentissage de la langue écrite. La réflexion s’articule également autour de l’école comme lieu de cohabitation pluriculturelle où l’apprentissage de l’écrit est inévitablement modulé par des marqueurs sociaux et culturels.

Dans notre contexte nord-américain dominé par le cognitivisme, cet ouvrage a le mérite de traiter de l’écrit et de son apprentissage dans une perspective anthropologique et socioculturelle, ce qui est malheureusement peu courant et peu valorisé dans nos sociétés de plus en plus hétérogènes. En effet, les premiers chapitres de l’ouvrage traitent de l’apprentissage de la lecture et de l’écriture au moyen de pratiques pédagogiques novatrices comme l’exploitation de la littérature jeunesse en lecture, ou des orthographes approchées en écriture et des environnements familiaux et sociaux, sortes de filtres, dans lesquels l’appropriation de l’écrit se réalise, chez les petits comme chez les plus grands. De plus, y sont rassemblées des études qui prennent en compte l’hétérogénéité des élèves ou des étudiants, tant par les groupes d’âge et les ordres d’enseignement auxquels ils appartiennent que par leurs origines culturelles. Enfin, cette publication a le mérite d’élargir la perspective du rapport à l’écrit en y intégrant des textes traitant de littératies multiples, notamment numériques et musicales, dont il est de plus en plus question, mais sur lesquelles il existe encore peu de travaux au Québec. Même si cet ouvrage a le mérite de traiter des dimensions socioculturelles du rapport à l’écrit et de l’hétérogénéité des populations en apprentissage, peut-être a-t-il un peu péché par excès, au sens où il peut être difficile pour le lecteur de suivre la trame qui doit réunir certains des textes. De plus, certains chapitres m’apparaissent quelque peu inégaux quant à la profondeur de la réflexion sur le rapport à l’écrit en tant qu’habitus culturel. La conclusion ramène cependant le lecteur à l’essentiel des propos.

Le rapport à l’écrit. Habitus culturel et diversité apporte une contribution nouvelle et différente au corpus des connaissances sur le rapport à l’écrit ainsi que sur l’enseignement et l’apprentissage de la langue écrite. Il m’apparaît d’un grand intérêt et fort utile pour tout intervenant du domaine de l’éducation : professeurs et étudiants des sciences de l’éducation, enseignants des différents ordres d’enseignement, du primaire au collégial, et pour quiconque s’intéresse aux différentes dimensions de l’acte de lire et d’écrire. Qui plus est, il prend réellement en compte la dimension humaine de l’apprentissage de l’écrit. Espérons que sa lecture pourra en inspirer plus d’un !