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Introduction

Des enfants âgés de 14, et même 12 ans, sont couramment utilisés comme soldats dans plusieurs conflits armés à travers le monde. Ils sont non seulement victimes de violence extrême, mais ils sont aussi des acteurs de cette violence. En effet, souvent même en guise d’initiation, les enfants soldats sont contraints de piller des villages (parfois les leurs), de violer, de torturer et de tuer sous la menace de mort exercée par leurs supérieurs. Ces gestes, ils les répéteront ensuite volontairement de façon quotidienne.

On imagine facilement qu’un tel vécu provoque des réactions psychologiques et des modifications identitaires à court et à long terme. En effet, des entrevues effectuées auprès de 22 ex-enfants soldats en République démocratique du Congo ont mis en lumière une série de transformations identitaires importantes chez ces enfants (Daxhelet & Brunet, 2013). Cependant, après leur démobilisation, ces enfants ne présentent pas, en général, de manifestations d’un état de stress post-traumatique comme décrit dans le DSM-V. Comment cela est-il possible ? Un élément spécifique semble jouer un rôle protecteur considérable dans l’évitement d’un traumatisme chez ces enfants : l’utilisation de la pensée magique et des fétiches. C’est ce que le présent texte propose d’examiner.

La situation des enfants soldats

La définition de l’enfant soldat à laquelle nous nous référons est celle établie en 1997 dans les principes du Cap :

une personne, garçon ou fille, âgée de moins de dix-huit ans qui est membre, de manière volontaire ou forcée, d’une force armée (armée gouvernementale, forces armées nationales) ou d’un groupe armé (junte, armée de libération, faction armée d’un parti politique, milice). Au-delà de la fonction de combattant, un enfant soldat peut être cuisinier, porteur, coursier et toute autre personne accompagnant les groupes armés, à l’exception des familles des militaires. Il peut s’agir d’une personne de sexe masculin ou féminin utilisée à des fins sexuelles ou mariée de force. L’enfant soldat n’est donc pas uniquement celui qui porte ou a porté une arme, mais celui qui, de quelque manière, est associé à une entité armée.

Principes du Cap, 1997 : 11

En 2002, lors de l’entrée en vigueur du Statut de Rome de la Cour pénale internationale (1998), le recrutement d’enfants de moins de 15 ans devient un crime de guerre. Malgré ces lois, 57 groupes et forces armés, répartis dans 14 États à travers le monde, se retrouvent encore en 2010 sur la liste noire des parties recrutant et utilisant des enfants (Conseil de sécurité, 2010).

Bien que l’on retrouve des enfants impliqués dans des conflits armés dans certains pays asiatiques et dans certaines régions d’Amérique latine, d’Europe et du Moyen-Orient, le problème est particulièrement grave sur le continent africain. Notamment, la République démocratique du Congo (RDC) est régulièrement accusée par les défenseurs des droits de la personne d’envoyer des enfants sur les lignes de front. Selon la Coalition pour mettre fin à l’utilisation des enfants soldats (2008), toutes les parties impliquées dans des conflits armés en RDC, qu’elles soient gouvernementales ou non, recrutent et utilisent des enfants dans leurs unités de combat. Un rapport des Nations Unies (2011) fait état de plus de 10 groupes armés, sans compter l’armée gouvernementale et les éléments armés non identifiés, qui recruteraient des enfants dans ce pays.

La question des symptômes

Depuis trois ou quatre ans, nous observons une émergence de publications scientifiques consacrées à dépeindre le profil psychopathologique des ex-enfants soldats. D’après une étude menée auprès d’un échantillon de 330 ex-enfants soldats ougandais, 33 % d’entre eux répondent aux critères d’un état de stress post-traumatique et 36,4 % d’une dépression majeure (Klasen etal., 2010a). Les enfants plus âgés montreraient davantage de problèmes émotionnels et comportementaux que les plus jeunes : sentiment de devoir être parfait, maux de tête, cauchemars, inquiétudes, maux de ventre et idéations suicidaires sont les principaux problèmes ayant été rapportés par ces enfants (Klasen etal., 2010b). Klasen etal. (2010b) mettent cependant l’accent sur l’importance de considérer le concept de « developmental trauma disorder », proposé par le Complexe Trauma Task Force of the National Child Traumatic Stress Network, qui pourrait décrire plus justement les réactions traumatiques des enfants soldats. Les critères diagnostics de ce trouble seraient un dérèglement émotionnel et physiologique, un trouble d’attachement, des remises en actes et des modifications persistantes des attributions et des attentes.

Une autre recherche, menée en Côte d’Ivoire cette fois, rapporte que sur 345 enfants rencontrés 53,38 % souffraient de l’état de stress post-traumatique et 20,29 % de dépression (Bissouma etal., 2010). Selon l’évaluation diagnostique effectuée dans le cadre de cette étude, 81,4 % des enfants souffraient d’une pathologie mentale (trouble du comportement, troubles du sommeil, angoisses, céphalées, troubles caractériels, tristesse, etc.). Kohrt etal. (2010) démontrent chez des ex-enfants soldats népalais que la dépression, l’état de stress post-traumatique et le déficit fonctionnel (« function impairment ») seraient significativement associés aux variables de l’enfant (âge, sexe, éducation, âge du recrutement, années dans l’armée, etc.), de sa famille (unie, nombre de membres, religion, etc.) et de sa communauté (mortalité liée au conflit, alphabétisation des femmes, proportion de la classe sociale élevée, etc.). Selon leurs résultats, être une fille, avoir été témoin de bombardements et n’être plus associé à un groupe armé sont des facteurs de risque à la dépression. C’est le fait d’avoir été exposé à la torture (l’auteur ne spécifie pas s’il s’agit ici d’avoir subi de la torture et/ou d’en avoir commis) qui serait le plus grand facteur de risque concernant l’état de stress post-traumatique (Kohrt, 2010). Les enfants ayant été exposés à la torture rapportent également avoir moins de soutien à la réintégration tel que l’accueil de la famille, le soutien à l’école et l’implication de la communauté. Au Népal, être témoin d’un évènement traumatique peut être interprété comme un signe de mauvais karma, lequel est une source de honte qui stigmatise l’individu (Kohrt, 2010). Il est donc clair ici que les symptômes que développeront les ex-enfants soldats ne seront pas seulement fonction de l’expérience objective de la guerre, mais seront aussi fortement influencés par le jugement social de leur communauté respective relativement à leur vécu.

En contradiction avec ces études décrivant plusieurs troubles mentaux chez les ex-enfants soldats, une étude française démontre qu’il n’existe pas de « troubles psychiques graves » chez les ex-enfants soldats burundais étudiés (Mubiri-Pondard, 2008). Bien que des cauchemars et des phénomènes de réminiscences aient été observés chez la plupart des six enfants interviewés, la recherche conclut que ces enfants ne semblent pas souffrir de problèmes de concentration, de troubles des relations sociales, de troubles de la personnalité, de troubles phobiques ni de troubles majeurs du comportement. Cette différence pourrait s’expliquer par le fait que ces enfants déclaraient avoir amélioré leurs conditions de vie en rejoignant les groupes armés. Pour comprendre l’état psychologique d’ex-enfants soldats, il est donc indispensable de prendre en considération les facteurs sociopolitiques de leur région d’origine, les conditions de vie antérieures à l’enrôlement, la raison du recrutement, la vision de l’armée par la société, les croyances sociales relativement à la guerre, etc. Il paraît ainsi difficile de comparer le profil psychologique des enfants soldats en général, à travers les régions, les guerres et les cultures.

Bien que l’objectif de notre recherche n’était pas d’inventorier des symptômes, mais plutôt de comprendre les processus psychiques qui les déclenchent, nous avons constaté rapidement lors des entretiens et de l’observation participante que nous ne retrouvions pas, chez la majorité des enfants rencontrés, les manifestations courantes de stress post-traumatique, de dépression ou d’anxiété telles que répertoriées dans le DSM-V. Il était possible d’observer chez certains enfants de l’agitation, des problèmes de concentration ou d’autres symptômes, mais ces enfants ne semblaient pas présenter les réactions typiques décrites dans les recherches citées plus haut. Il était légitime de nous demander pourquoi ces enfants ne réagissaient pas ainsi. Qu’avaient-ils de particulier ? Y avait-il quelque chose qui les protégeait d’une réaction traumatique ? Ainsi, lorsqu’on leur demandait de nous parler de leurs expériences les plus marquantes de leur vie de soldats, ces enfants évoquaient le manque de nourriture ou de sommeil plutôt que des souvenirs de violences, de morts et de viols. Bien que l’on pouvait percevoir une certaine souffrance chez ces enfants, pourquoi celle-ci ne se manifestait-elle pas par les symptômes habituellement décrits dans la littérature à la suite d’un important traumatisme ?

Ce texte tente de répondre à ces questions et plus spécifiquement de comprendre les mécanismes psychiques mis en place afin de leur éviter les réactions connues et habituelles à la suite d’un passé que nous pourrions qualifier de potentiellement traumatisant.

La recherche sur le terrain

Les participants ont été recrutés dans un centre de démobilisation en République démocratique du Congo[2]. Lors de son arrivée au centre, la chercheure principale s’est présentée et a expliqué aux enfants son objectif, soit de les connaître mieux à travers leur propre récit. Elle leur a ensuite proposé de se présenter à elle s’ils étaient intéressés à participer à la recherche. Les sujets ont donc participé sur une base totalement volontaire.

Vingt-deux enfants de sexe masculin d’âge moyen de 16 ans (il faut noter que par l’absence de papiers légaux, l’âge des enfants et la durée dans l’armée sont approximatifs) ont été interviewés. Ces enfants ont tous été enrôlés dans une force armée ou un groupe armé avant l’âge de 18 ans (moyenne de l’âge lors du recrutement : 11,77 ans, moyenne du nombre d’années dans l’armée : 5,32 ans, 18 ont été recrutés de façon volontaire et 4 y ont été forcés). Ils ont également tous porté les armes lors de leur expérience de guerre et ont été directement impliqués dans les conflits armés. Les sujets étaient démobilisés depuis moins de deux mois lors des entrevues, ce qui a permis un meilleur accès aux représentations subjectives liées à leur vécu militaire. Le choix de ne recruter que des garçons s’explique par une volonté d’homogénéité de l’échantillon ; les filles soldats ont souvent une expérience militaire différente. Pour 18 des 22 enfants, nous avons dû faire appel aux intervenants locaux lors des entrevues afin de nous servir d’interprètes swahili-français. Lors des entrevues, les enfants ne devaient pas être sous l’effet de substances psychotropes.

En plus des entrevues réalisées, la chercheure a participé durant trois mois à la vie quotidienne d’une centaine d’enfants présents au centre (repas, activités ménagères, récréatives et créatives, scolarisation, etc.) et a ainsi observé des comportements qui ne pouvaient être perçus lors des entrevues. Le recours à plusieurs techniques de collecte de données a donc permis la triangulation des données et ainsi d’obtenir une compréhension plus complète de la situation étudiée et de donner davantage de force aux observations du chercheur par la concordance des différentes informations (Mayer etal., 2000).

En fonction des questions de recherches portant sur des organisations intrapsychiques et de la volonté de comprendre le vécu subjectif des sujets observés, la technique d’entrevue s’inspire du modèle associatif-séquentiel de Brunet (1998). Cette méthode permet le surgissement de matériaux et de manifestations préconscients, de faire des inférences à partir du vécu subjectif et donc de mettre en lumière des contenus et des organisations dynamiques préconscients (Brunet, 1998). Lorsque tous les thèmes préalablement établis avaient été abordés et que l’enfant n’avait plus rien à ajouter, nous mettions fin aux entrevues avec ce dernier. Dans ce sens, nous voulions assurer une certaine saturation des données. Un enfant seulement a voulu arrêter les entrevues et un autre a quitté le centre avant de répondre à tous les thèmes. Ainsi, 78 entrevues ont été réalisées auprès de 22 sujets.

Des analyses rigoureuses sur le modèle du consensus ont été effectuées par les deux auteurs sur l’ensemble du matériel, tant issu de l’observation participante que des 78 entrevues. Si le principe d’accord interjuge est un mode de validation reconnu dans les recherches d’inspiration positiviste, la recherche qualitative ouverte ne peut l’utiliser puisque les matériaux observés, les inférences effectuées et les formations conceptuelles créées ne constituent pas un univers conceptuel « fini ». En conséquence, le modèle d’analyse par consensus est privilégié dans cette recherche à des fins de validation. Ainsi l’analyse et les inférences faites sur chaque regroupement signifiant (phrase ou groupe de phrases) doivent faire l’objet d’un consensus entre au moins deux chercheurs pour être retenues dans la grille d’analyse. (Brunet, 2009). Chacune des séquences signifiantes a fait l’objet d’une première reformulation pour en dégager le sens subjectif et communicatif. Puis un deuxième niveau d’analyse est dégagé à partir des inférences sur le sens, et sur les valeurs dynamique, économique et structurelle de l’énoncé. Cette analyse constitue à la fois une analyse de contenu, de séquence ainsi que du rapport intersubjectif (Brunet, 1998) en cause. À la suite de ces analyses, les différentes inférences sont regroupées par cohérence dynamique pour former des organisations explicatives sur les plans dynamique, économique et structurel. Bien entendu, lors de cette organisation conceptuelle finale, les chercheurs ont tenu compte de la saturation, de la cohérence et de la convergence des contenus inférés ainsi que du principe de parcimonie dans la théorisation qui en découle (Brunet, 2009). Il est à noter que les analyses de contenus et de séquence étaient constamment mises à l’épreuve par le retour sur l’expérience subjective de la chercheure, qui a vécu trois mois avec ces enfants, afin de valider, infirmer ou enrichir les analyses. Le travail de synthèse théorisante a été effectué pour chaque sujet et a par la suite été mis en lien avec la synthèse des autres sujets. Ainsi, il a été possible de créer des modèles qui ont permis la mise en place de théories telles que celle présentée dans ce texte au sujet des fonctions antitraumatiques des fétiches et de la pensée magique. Cet article propose donc le modèle explicatif issu de la recherche et illustre ce modèle par des extraits significatifs, dont la valeur tient entre autres du fait que plusieurs sujets avaient des verbalisations analogues. Les citations rapportées sont donc représentatives du discours de la majorité des enfants rencontrés.

L’effet protecteur de la pensée magique

Les fétiches

Cette étude a permis de mettre en lumière des stratégies d’adaptation qui ont profondément changé l’identité de ces enfants (Daxhelet & Brunet, 2013). Cette adaptation s’accompagne du recours, chez pratiquement tous les enfants, à une forme de pensée magique qui a semblé permettre de réduire considérablement l’angoisse. L’effet protecteur de cette pensée magique s’incarne dans ce que presque tous les ex-enfants soldats ont appelé des « fétiches » lors des entrevues. À la suite de l’analyse des entretiens, il est devenu évident que ces fétiches avaient une fonction psychologique de protection contre l’angoisse.

Les caractéristiques des fétiches

Les fétiches sont des objets (colliers, bracelets ou bagues fabriqués en billes de plastique de couleurs), des potions, des tatouages ou des scarifications offerts par le chef de guerre aux soldats en guise de protection. Les enfants les décrivent de différentes façons ; parfois comme des médicaments ou des « produits » qu’ils buvaient ou qu’on leur injectait dans la peau, ou parfois comme un « esprit » en eux. Ce qui est de première importance dans la compréhension dynamique du phénomène est le fait que ces fétiches participent à un système de croyances cohérent et partagé par tous les membres du groupe armé. Ce système de croyances prétend que ces fétiches, peu importe leur forme, permettent aux soldats qui les portent d’obtenir des pouvoirs surnaturels, tels que disparaître, être impénétrable aux balles et aux couteaux, se téléporter et même devenir immortels. En plus de ces pouvoirs surnaturels, les fétiches permettent aux soldats de ne pas ressentir la peur ou la pitié lors des combats. Pour bénéficier du pouvoir des fétiches, il existe toutefois des conditions à respecter, dictées par les chefs de guerre. Ces conditions, en nombre incalculable et parfois impossibles à réaliser, telles que de ne jamais enjamber une arme ou un cadavre, doivent absolument être respectées afin que le pouvoir agisse. Si les enfants respectent ces nombreuses conditions imposées, les fétiches sont censés leur donner une force suprême et l’immortalité lors des combats.

Les fonctions psychologiques des fétiches

Au fil des entrevues, les enfants nous ont donc expliqué qu’ils ne pouvaient tout simplement pas mourir lors des affrontements, car ils étaient protégés par les fétiches. Ils nous disaient même n’avoir jamais eu peur lors des combats. Voici ce que certains jeunes nous ont rapporté à ce sujet : « Ces produits-là, ça permet qu’on soit protégés lorsqu’on est dans les fronts, parce que même si on te tire une balle dessus, ça ne peut pas t’atteindre, même une bombe, ça ne peut pas t’atteindre, même un couteau, ça ne peut pas pénétrer dans ton corps. C’est à cause de ça qu’on le faisait » (Joshua[3], 17 ans, recruté à 10 ans involontairement) ; « Je me sentais même capable d’attraper l’ennemi avec les mains sans aucune inquiétude » (Noé, 16 ans, recruté à 15 ans volontairement) ; « Quand tu vas aux fronts avec les fétiches, les cartouches ne peuvent pas te blesser, elles tombent à côté de toi, même les balles de roquettes ne nous pénétraient pas » (Tom, 17 ans, recruté à 10 ans volontairement) ; « Oui, ça me protégeait car j’avais vécu un cas, on m’avait jeté une bombe et la bombe m’a jeté comme au niveau de la toilette là-bas et je me suis remis debout et je suis parti et je n’avais pas de problème » (Rocky, 17 ans, recruté à 11 ans volontairement). Bien entendu, les fétiches ne rendaient pas véritablement invulnérables, mais par le soutien d’une croyance groupale (nous le verrons plus loin), ils permettaient l’illusion de l’invulnérabilité. Ces objets, produits ou scarifications ont bien davantage comme fonction de permettre l’illusion de la toute-puissance et d’ainsi éliminer la peur lors des combats que de procurer objectivement cette puissance. On comprend dès lors comment les enfants soldats, tout autant que leurs chefs, désirent croire au pouvoir des fétiches malgré la réalité des morts qui les entourent. En partageant cette croyance aux fétiches, les soldats peuvent conjurer l’angoisse, éviter la terreur psychique face à la mort et ainsi, par régulation des affects, se protéger d’un traumatisme psychique par un phénomène de contre-investissement. Le fétiche acquiert ainsi une fonction économique antitraumatique en réduisant la quantité d’angoisse qui pourrait sidérer le fonctionnement psychique habituel.

L’arme

La symbolique de l’arme

Nous avons constaté dans le récit des enfants soldats que les fétiches ne sont pas les seuls objets concrets impliqués dans cette pensée illusoire de toute-puissance les protégeant d’un traumatisme éventuel. Bien entendu, une arme à feu possède une puissance réelle, puisqu’elle peut donner la mort. Cependant les verbalisations de ces enfants soldats montrent que l’arme est également décrite comme un objet détenant un pouvoir illimité et magique semblable à celui des fétiches. Voici ce qu’un enfant a dit lorsqu’on lui a demandé comment il se sentait avec son arme : « J’étais soldat, c’est comme si un lion entre là où il y a d’autres animaux, ils doivent automatiquement fuir » (Alain, 15 ans, recruté à 12 ans volontairement). D’autres extraits de récit démontrent bien cette idée fantasmatique de toute-puissance attribuée à l’arme : « Lorsqu’on a son arme, on est le plus fort, l’arme nous protège contre tous les dangers, c’est avec ça qu’on se sentait élevés et supérieurs » (Henri, 17 ans, recruté à 13 ans involontairement) ; « J’étais très heureux parce qu’on m’a alors donné l’assurance qu’avec une arme j’étais maintenant capable de protéger tout un pays et que personne ne peut m’approcher pour me tuer ou pour me causer préjudice quand j’ai cette arme, alors j’ai senti que c’était une grande protection » (Tom) ; « Selon moi, c’est seulement l’arme qui pouvait nous sauver dans le quartier puisqu’on nous maltraitait beaucoup » (Mike, 16 ans, recruté à 13 ans volontairement). Plusieurs de ces verbalisations ressemblent au sentiment d’invulnérabilité que certains criminels entretiennent en raison de leur arme. Contrairement à un collier fétiche, l’arme en elle-même possède un pouvoir destructeur, mais l’ensemble des verbalisations des enfants soldats montrent qu’elle acquiert une symbolique supplémentaire, un surinvestissement, participant à l’illusion d’invulnérabilité ; participant donc à une fonction antitraumatique.

La fonction identitaire de l’arme

Certes, l’arme a une fonction protectrice parce qu’elle est dotée ici d’un pouvoir réel auquel s’ajoute un pouvoir symbolique. Mais l’arme semble également jouer un rôle identitaire chez ces enfants soldats. Les jeunes relatent clairement une modification dans la perception d’eux-mêmes au moment où ils reçoivent leur arme : « J’ai trouvé que je suis devenu autre » (Adam, 16 ans, recruté à 10 ans volontairement) ; « L’avoir voulait dire que j’étais un vrai militaire, c’était le coup d’envol » (Jean, 17 ans, recruté à 12 ans volontairement) ; « Je devenais plus grand et plus fort que les autres jeunes, même que les adultes de la population civile » (Jim, 20 ans, recruté à 15 ans volontairement). Visiblement les enfants soldats font état d’une identification à l’arme : « je suis devenu un autre », « je devenais plus grand et plus fort ». L’effet psychologique de l’arme dépasse donc sa fonction réelle meurtrière, mais s’amalgame à la fonction du fétiche pour créer une illusion de puissance, de grandiosité et d’invulnérabilité à travers un processus introjectif. Dans ce sens, la protection accordée par l’arme n’est pas seulement physique, mais aussi psychique. Dans le cas de l’arme, il semble exister une identification à celle-ci, le soldat acquiert les caractéristiques de l’arme, il devient l’arme, plus grand, plus fort, changeant sa démarche. Cette identification permet donc à l’enfant de modifier son identité sur la base de l’illusion de toute-puissance, d’invulnérabilité et de commettre les actes qui s’y relient. L’extrait suivant démontre bien ce propos : « Quand je l’ai eue (l’arme), j’ai vu que moi aussi je commence à faire des choses qui ne sont pas bonnes, j’ai vu que moi aussi je commence à torturer des gens et je pensais toujours à mon village et à comment les milices torturaient les gens au village et que moi aussi j’avais maintenant cette idée » (Jules, 17 ans, recruté à 12 ans volontairement).

De plus, l’extrait précédent montre comment l’identification à l’arme, avec sa composante inconsciente de toute-puissance, peut facilement amener un enfant à commettre des gestes comme la torture. Zimbardo (2004) avait déjà montré comment l’identification à la fonction (de gardien de prison) et l’effet groupal (identifications latérales) pouvaient mener à commettre des actes sadiques ou cruels. Les verbalisations de ces enfants nous montrent comment l’identification à un objet (arme ou fétiche) peut faire de même. Par la relation identificatoire à l’arme, en devenant l’arme, l’enfant devient un homme, le civil devient militaire, mais surtout il acquiert une nouvelle identité dont le fondement secret est l’illusion d’invulnérabilité. Cette illusion d’invulnérabilité nourrie de toutes parts (fétiches, arme, effet groupal que nous verrons plus loin) permet aux enfants soldats de se protéger de l’angoisse de mort et de ce fait du risque d’un traumatisme désorganisant.

Influence du collectif et du leader

Deux facteurs pourraient expliquer comment la pensée magique incarnée par les fétiches et l’arme devient si importante dans l’économie psychique des jeunes soldats : l’influence du groupe, incluant le chef militaire, et le gain narcissique.

On connaît depuis longtemps l’apport de la dynamique groupale aux croyances et aux attitudes des individus (Freud, 1921 ; Zimbardo, 2004 ; Brunet, 2007). Cette influence peut s’exercer de deux façons principales ; d’une part par les rapports idéalisants et identificatoires au leader du groupe (Casoni & Brunet, 2005) et d’autre part par le partage de croyances communes et de fonctions psychiques groupales (Kaes, 1993 ; Brunet, 2007). Comme il se produit dans les sectes religieuses violentes ou même dans les mouvements de violence de masse (Casoni & Brunet, 2007b), les groupes armés dont font partie ces enfants soldats partagent des croyances collectives dont l’effet se répercute sur l’identité des membres et les désinhibe, leur permettant ainsi de commettre des actes d’une grande violence. À ces croyances partagées, on peut y voir l’effet de l’influence d’un chef gourou auquel les enfants sont assujettis. L’enfant serait donc inconsciemment soumis à des croyances implantées en lui par les autorités militaires afin, comme dans tous les groupes coercitifs, d’assurer la survie du groupe. Cependant, un autre modèle de cette pression collective prétend plutôt que la relation aux croyances collectives est beaucoup plus complexe et comprend à la fois le besoin du leader d’assujettir, le besoin du groupe de partager ces croyances et le besoin du sujet même de s’identifier au leader et à la croyance idéalisée (Casoni & Brunet, 2005).

Il semble que chez les enfants soldats que nous avons vus, un processus complexe se mette en place pour contrer l’angoisse et le sentiment d’impuissance, à travers les représentations magiques et idéalisées que sont les fétiches et les armes. L’enfant, à son arrivée dans l’armée, et probablement pour se protéger de l’angoisse et de l’impuissance, est tout à fait désireux de se servir des mythes et croyances que le groupe et le leader mettent à sa disposition. Plutôt que de simplement tenter de contenir sa propre impuissance, l’enfant investira les fétiches et les armes de caractéristiques grandioses, comme le groupe lui propose. Il partagera activement les croyances défensives, et partagera leur effet calmant. Finalement, il introjectera et peut-être même s’identifiera à ces objets puissants, et deviendra subjectivement lui-même puissant, sinon invulnérable. Cette puissance, d’abord projetée collectivement sur les fétiches et les armes par le groupe, est donc réintroduite individuellement dans la psyché de chacun, permettant un réinvestissement narcissique pouvant faire contrepoids à l’impuissance. Il s’agit donc à la fois d’un mouvement collectif de projection et de mouvements individuels d’introjection visant à conjurer l’angoisse.

L’enfant qui adhère à ces croyances de toute-puissance s’approprie ainsi cette « grandiosité » ; il devient lui-même immortel et intouchable. Quelques exemples tirés des propos des jeunes ex-soldats démontrent cette appropriation : « Avec ces fétiches, on devenait puissants » (Adam) ; « J’avais peur au début, mais après avoir eu tout cela (fétiches), je me sentais très très fort et puissant pour aller me battre » (Joshua). Un enfant parle du désarmement presque comme de l’amputation d’un membre qui prolongerait son corps : « Vous, vous avez vos cheveux ici, vous les gardez, vous ne voulez pas qu’on puisse les couper. Si on vient et on coupe ces cheveux, quand le froid passe, vous sentez qu’il y a vraiment quelque chose qui vous manque. Le froid vous atteint alors que quand vous aviez vos cheveux, c’était difficile que le froid vous atteigne. Quand j’ai remis mon arme, j’ai senti que quelque chose se diminuait de moi » (Henri). En utilisant l’analogie des cheveux, l’enfant montre à quel point l’arme fait partie de lui d’une façon quasi corporelle. En fait, l’enfant décrit une forme d’identification à l’arme lui permettant d’acquérir ses qualités de puissance et que la perte de son arme est l’équivalent de la perte d’une partie de soi.

Conséquence de l’utilisation de la pensée magique : la désubjectivation

L’être humain n’arrive pas au monde avec la capacité de différencier clairement ce qui se situe en lui et ce qui se situe hors de lui. Le processus par lequel il y arrive créera non seulement la différenciation dehors-dedans mais amènera celui-ci à connaître et comprendre son propre monde intérieur composé d’émois et de désirs. Le processus par lequel l’individu s’approprie et devient le « sujet » de ce monde intérieur a été nommé « subjectivation » (Cahn, 2006 ; Roussillon, 2006). L’enfant soldat de notre étude, par l’utilisation de la pensée magique, semble effectuer un cheminement inverse. En déléguant à une entité suprême, autre que lui-même, la capacité et la responsabilité de le protéger, il semble jusqu’à un certain point abandonner la possibilité de prendre en charge ses émois, ses angoisses et sa propre capacité psychique de les aménager. Cette « désappropriation subjective » semble aussi mettre « hors sujet » d’autres composantes de la personnalité de ces enfants soldats, tout particulièrement le contrôle des pulsions et de la violence. L’emploi de la pensée magique aurait donc comme conséquence une forme de désappropriation subjective chez ces enfants.

Lorsque nous avons rencontré ces enfants, nous avons observé systématiquement qu’ils pouvaient perdre totalement le contrôle de leur agressivité ou de leurs émotions. Cependant, leur façon de ressentir ou de comprendre cette perte de contrôle était en relation étroite avec leurs croyances partagées. Ainsi, ils pouvaient casser des objets, se battre avec les autres enfants du centre, mais ne semblaient pas percevoir cette violence comme leur appartenant. Au contraire, ils accusaient les fétiches de leur imposer ces actes. Plusieurs enfants parlaient même de « l’esprit » du fétiche qui était en eux et qui les contrôlait : « Ma tête n’était pas là vraiment, je n’étais pas présent » (Mike) ; « Ces produits, lorsqu’ils sont dans le corps, ça permet à quelqu’un de ne pas se maîtriser lorsqu’il y a un problème avec quelqu’un qui veut t’intimider par exemple, ce produit ne permet pas qu’on reste calme, on va réagir » (Papy, 16 ans, recruté à 11 ans involontairement) ; « parfois, je sens l’esprit qui vient et m’oblige d’aller chercher mon couteau ou ma lame de rasoir » (Alain).

Comme le soulignent les expressions « subjectivation » ou « appropriation subjective », on peut voir ici à travers ces verbalisations, que les enfants ne se sentent pas les « sujets » de leurs actes et de leur violence mais plutôt les « objets » d’entités qui les contrôleraient. Les fétiches permettent à ces enfants de croire en une entité ayant le pouvoir d’entrer en eux et de les contrôler. Cette croyance fait donc en sorte que leur volonté ne leur semble plus en jeu et qu’ils ne peuvent donc s’approprier leur propre violence. Le fait de se sentir contrôlé de l’intérieur, mais pas par soi-même, renvoie aussi aux descriptions que des auteurs comme Klein ou Bion font de l’introjection d’objets puissants et dangereux. Dans ce cas-ci, la motivation à une telle introjection pourrait sûrement s’expliquer par le grand sentiment d’impuissance initial des enfants soldats. En introjectant un objet (fétiche) puissant, l’enfant soldat espère acquérir cette puissance qui le protégera des risques de mort inhérents à la guerre. Un peu à la manière de l’identification à l’agresseur dans le cas du développement psychique du criminel d’habitude (Casoni & Brunet, 2007a), l’introjection du fétiche remplit une fonction défensive permettant de mieux faire face à ce qui est craint en mettant à l’intérieur du psychisme une imago puissante. Le prix à payer pour cette introjection est cependant une forme de déresponsabilisation et de désubjectivation puisque cette entité introjectée prend maintenant la place de la volonté et du libre arbitre du sujet.

Un individu qui n’est pas « sujet » de ses pulsions et de ses passions ne peut se sentir responsable de ses gestes. Il est remarquable de constater à quel point ces enfants soldats ne peuvent s’approprier ni la violence qu’ils ont subie ni celle qu’ils ont commise. Lors de l’expérience militaire, ce processus de désubjectivation peut sembler fort utile puisqu’il permet de réduire énormément l’angoisse relativement aux combats. Ses conséquences négatives ne semblent pas importantes à ce moment. Mais c’est lors de la démobilisation que l’introjection des fétiches fait voir sa face négative. D’une solution réductrice d’angoisse, ce processus défensif rend alors des enfants soldats prisonniers de ces fétiches et de leur toute-puissance tout en leur faisant perdre le sentiment de pouvoir contrôler leur propre destinée. Lors de la démobilisation, la dépendance aux fétiches devient un fardeau pour ces enfants qui doivent maintenant faire des choix concernant leur futur et vivre sans violence pour être acceptés dans leur communauté.

Lors de leur entrée au centre de démobilisation, les enfants soldats sont dans l’obligation de remettre tout objet militaire, les armes, la tenue et les fétiches. Bien que la plupart des jeunes du centre disent vouloir se débarrasser des fétiches et de leurs effets devenus mauvais (les rendant agressifs alors qu’ils doivent réapprendre à vivre en société), plusieurs enfants tentent malgré tout de dissimuler leurs objets fétiches afin de pouvoir les conserver avec eux. Même si leur fonction protectrice n’a plus sa raison d’être dans le centre de démobilisation, l’abandon de ces fétiches semble difficile. On observe une ambivalence entre la volonté de retirer l’esprit du fétiche qui est en eux et l’attachement encore perceptible à leurs colliers, leurs bagues, etc. On peut imaginer que de renoncer à cette force exigerait d’eux d’être capables de faire face à leur propre violence et de s’approprier la pulsionnalité et la responsabilité qui avaient été mises hors circuit par l’utilisation de fétiches. Il faut se rappeler que l’utilisation des fétiches leur a permis d’éviter la culpabilité des morts qu’ils ont faits. Dans ces conditions, il est facile de comprendre que l’abandon des fétiches ou une réappropriation subjective des atrocités commises pourraient faire surgir une culpabilité écrasante.

Tout comme pour les fétiches, la pensée magique qui s’incarne dans l’arme a aussi ses conséquences psychologiques négatives. « Quand j’ai pris l’arme pour la première fois, j’ai senti que c’était une assurance et une protection de ma vie, mais ce n’est que plus tard quand j’ai vu les effets de l’arme, comment elle tuait les autres, je me disais : ‘‘mais elle risque aussi de me tuer’’, et j’ai commencé à la détester » (Sam, 16 ans, recruté à 10 ans volontairement) : il est intéressant de noter dans cet extrait que l’arme pousse l’enfant, tout comme les fétiches, à une relative désubjectivation de la violence et qu’en retour l’arme devient presque un être vivant autonome : « comment elle tuait », « elle risque de me tuer ». D’une façon semblable aux fétiches, l’arme permet de désubjectiver une partie de la violence du jeune soldat. En ressentant que l’arme est un être vivant, autonome et dangereux, plutôt qu’un instrument soumis à la volonté de celui qui le tient, c’est une délégation de sa propre responsabilité qu’effectue ainsi le jeune soldat, permettant une économie de la conflictualité et évitant sûrement les tabous, interdits et culpabilité reliés habituellement au fait de tuer. C’est l’arme qui tue et non pas lui. L’arme domine ainsi celui qu’elle protège comme un prix à payer. Tout comme avec les fétiches, les effets de cette domination se prolongent au-delà de la période où l’arme protège l’enfant, même lorsque ce dernier ne la possède plus. Ce faisant, la face négative de la désubjectivation est que l’enfant perd le contrôle subjectif de sa violence et de sa pulsionnalité, puisqu’il ne s’en sent plus responsable.

Conclusion

Des entrevues avec 22 ex-enfants soldats congolais ont fait ressortir l’importance dynamique et économique de l’utilisation de la pensée magique incarnée par les fétiches et l’arme. Sur un plan économique, les croyances impliquées semblent avoir permis d’éviter un surcroît d’angoisse et par là d’éviter l’organisation d’une réaction traumatique chez les enfants étudiés. Sur le plan dynamique, l’utilisation de fétiches a eu comme conséquence une introjection d’imagos puissantes qui a eu comme second effet de provoquer une désubjectivation chez ces enfants. On sait que les réactions traumatiques sont des réaménagements dynamiques visant à contrer une quantité d’angoisse débordant la capacité de liaison de l’appareil psychique (Bokanowski, 2002 ; Roussillon, 2002). L’effet de réduction d’angoisse que procurent les fétiches et leur introjection semble donc avoir réussi à éviter une réaction traumatique chez la plupart de ces enfants.

Cependant, la relation aux fétiches et celle à l’arme semblent se différencier légèrement sur le plan structurel, car l’une semble davantage introjective et l’autre identificatoire. Alors que le soldat semble acquérir les qualités de l’arme et « devenir » l’arme, la relation aux fétiches est légèrement différente : l’enfant soldat se sent « pénétré » et « habité » par un esprit qui le contrôle ; d’où la désubjectivation.

Sur un plan intersubjectif, le fait d’investir de toute-puissance certains objets, comme les fétiches ou l’arme, semble une stratégie groupale fort efficace implantée par les chefs militaires pour envoyer des enfants au front sans qu’ils se désorganisent psychiquement. Mais encore ici, il faut éviter de simplifier et de croire que tout repose sur la manipulation mentale des enfants par les chefs. La réalité est plus complexe, car l’adhésion aux croyances et à la toute-puissance des fétiches est une « solution » fort utile pour des enfants qui sont ainsi confrontés à des situations extrêmes, à la mort et à la torture.

Comme l’ont déjà démontré Redl (1945) et ensuite Mailloux (1971) par la thérapie de milieu chez de jeunes délinquants, l’utilisation du groupe comme levier thérapeutique est très efficace. En considérant l’importance de l’influence du groupe observée chez les enfants soldats de notre étude, il serait tout à fait approprié de se servir de cette force dans un éventuel travail thérapeutique. Le groupe, cette fois constitué d’un leader visant des valeurs prosociales, pourrait permettre un désinvestissement des croyances liées aux fétiches et à l’arme au profit de leur identité passée et ainsi assurer un accompagnement vers une resubjectivation collective et ensuite individuelle. L’utilisation du groupe au coeur d’un processus thérapeutique de réappropriation subjective pourrait faire l’objet d’une étude future fort utile afin de pouvoir offrir un travail clinique adéquat à ces enfants.