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Les quatre auteures rappellent qu’elles ont été formées, les unes, par l’université française et les autres, par l’université allemande, mais aussi que chacune d’entre elles a eu l’occasion d’enseigner dans l’autre pays que celui de sa formation. Elles dépeignent leur ouvrage comme un guide pratique caractérisé par une approche et une présentation interculturelles visant à faire comprendre comment s’est constituée la logique de ces différentes cultures académiques (p. 16-17).

L’ouvrage comporte un sommaire qui regroupe, sous divers chapitres, des thèmes comme l’évolution ancienne et récente des structures de l’enseignement supérieur, l’organisation des études, la typologie des enseignements, les différentes sortes d’exercices usuels, les procédures d’évaluation et les multiples catégories de personnel enseignant. Le tout est présenté sous la forme d’un exposé comparatif, alternant les contextes allemand et français. L’ouvrage est complété par une bibliographie brève, mais utilement indicative. Enfin, s’ajoute un index qui, quoique succinct, permet de repérer rapidement des passages significatifs. Cependant, il convient de préciser que, outre son caractère de guide pratique, les auteures de cet ouvrage développent certaines réflexions de portée intellectuelle plus vaste, ce qui confère à celui-ci un intérêt de premier ordre.

L’ouvrage s’ouvre sur un aperçu historique, depuis l’apparition des universités en Europe au xiiie siècle jusqu’aux grandes réformes des universités au xixe siècle en Allemagne et en France. Il montre avec justesse que le projet de la refondation de l’université allemande exprime l’idéal d’une vision globale des savoirs mettant en relation les différentes disciplines, ce qui explique d’ailleurs le rôle central de la philosophie dans cette conception de l’université. Par contraste, la refondation de l’université française procède d’une orientation différente, imprégnée d’une idéologie de la méthodologie scientifique traduisant sa conception du lien entre toutes les disciplines, qui lui vient du positivisme.

Dans les deux pays, le processus de Bologne introduit maintenant une nomenclature uniformisée de nouveaux diplômes européens en trois niveaux (Bachelor  / Master / Doctorat), dont la séquence est d’une durée unifiée de huit ans au total. De telles modifications bouleversent davantage l’enseignement supérieur allemand que l’enseignement supérieur français, pour la raison que le premier est, en règle générale, plus approfondi et plus long que le second, et que les cursus traditionnels allemands ignorent une limitation stricte de la durée moyenne des études. L’on pourrait dire qu’en Allemagne une grande importance est donnée au développement de la recherche individuelle et à la confrontation avec les exigences d’un travail intellectuel rigoureux, alors qu’en France, la formation universitaire se situe dans le prolongement de l’accumulation du savoir et de l’entraînement rhétorique. Toute culture universitaire comporte implicitement des règles non écrites (p. 90).

L’ouvrage témoigne du fait que les traditions universitaires nationales sont en train de se modifier sous l’effet d’une politique visant à la création d’un espace universitaire européen, dont on ne mesure pas encore toutes les conséquences.