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Né le 10 novembre 1921, Conrad Laforte nous a quittés le 4 septembre 2008, peu de temps après avoir été admis à l’Hôpital général de Québec. Laforte, qui est l’un des grands folkloristes du XXe siècle au Québec, s’est surtout intéressé au patrimoine immatériel, c’est-à-dire à la chanson de tradition orale et au conte. Formé à l’Université Laval en lettres (Civilisation canadienne, 1968), puis en études canadiennes, il obtient un D.E.S. en 1970, puis un doctorat ès lettres en 1977. Il était déjà titulaire d’un diplôme en bibliothéconomie et bibliographie de l’Université de Montréal depuis 1949. À l’époque, cette spécialisation était très nouvelle et l’on peut sans hésitation affirmer qu’elle a orienté toute la carrière ultérieure de Laforte, notamment son passage remarqué comme bibliothécaire-archiviste aux Archives de folklore de l’Université Laval entre 1951 et 1975, période au cours de laquelle il s’attela notamment à la production d’un catalogue de la chanson de tradition orale, avec un corpus très abondant de chansons traditionnelles d’expression française. Laforte a par ailleurs signé des articles dans le Dictionnaire des oeuvres littéraires du Québec et dans l’Encyclopédie de lamusique au Canada. Il est l’auteur de plus d’une quinzaine de livres et a également dirigé quelques ouvrages collectifs. Parmi ses plus importantes contributions, mentionnons l’ouvrage Survivances médiévales dans la chansonfolklorique (1981), qui fut acclamé par la critique, ou encore La chansonde tradition orale. Une découverte des écrivains du XIXe siècle en France etau Québec (1973, 1995), qui n’est pas sans rappeler les travaux de Paul Bénichou en France.

Conrad Laforte a également enseigné à l’Université Laval de 1965 à 1988. Dès le début des années 1950, inspiré par ses maîtres Marius Barbeau, Félix-Antoine Savard et Luc Lacourcière, il a effectué des enquêtes ethnographiques et réalisé 1132 enregistrements sonores sur 67 rubans magnétiques. Dès 1964 et 1965, il a effectué de nombreux séjours de recherches en France, principalement à la Bibliothèque nationale puis à la Bibliothèque de l’Arsenal. Profitant de chacun de ces séjours pour se familiariser un peu plus avec les recueils de chansons françaises, Conrad Laforte s’intéressa surtout aux différentes variantes des chansons traditionnelles qui allaient par la suite figurer dans son catalogue. Après la publication de ce dernier, Laforte s’est exclusivement consacré à la rédaction d’essais théoriques sur la chanson et à des recueils de contes, en collaboration avec plusieurs chercheurs, parmi lesquels on compte Carmen Roberge, Monique Jutras, ou encore Benoît Lacroix. Membre fondateur de l’Association canadienne d’ethnologie et de folklore, et récipiendaire de la médaille Marius Barbeau en 1999, il fut également nommé Folkloriste canadien distingué en 1984. Conrad Laforte a, de plus, été membre de plusieurs associations scientifiques, dont la Société internationale d’ethnologie et de folklore, l’American Folklore Society et la Société royale du Canada. Laforte a contribué plus que quiconque à faire connaître le patrimoine de la chanson traditionnelle québécoise. Son catalogue, qui restera sa plus importante contribution, n’a rien perdu de son côté novateur. On pourrait comparer cet ouvrage, par son importance, à celui de la classification des contes conçue par Antii Aarne et Stith Tompson. Le catalogue de Patrice Coirault, paru en France après la mort du folkloriste, fait régulièrement référence au catalogue de Laforte. Je dirige actuellement la préparation d’un ouvrage en son honneur, qui regroupera des collaborations de chercheurs canadiens, français et belges.

Laforte avait épousé Hélène Gauthier, cantatrice à ses heures, et nièce du docteur Gauthier parfois mentionné dans les collectes de chansons. Leur fille Esther est archéologue et anthropologue.