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Cet ouvrage est issu d’un séminaire européen sur la recherche-action qui a eu lieu à l’Université de Lausanne en 2004. Réunir les textes de chercheurs provenant de disciplines aussi variées que la géographie, la psychologie, la philosophie, la pédagogie et la linguistique pour composer un ouvrage cohérent est le défi relevé par les auteurs.

Ce recueil est constitué de trois parties. La première contient des réflexions théoriques et épistémologiques sur la recherche-action. Grâce à cette présentation, le lecteur pour qui cette méthode d’investigation est nouvelle peut s’en faire une idée précise. Les spécificités de cette méthode, telles que la capacité de permettre un changement social ou de proposer des solutions à un problème, sont illustrées par des études de cas dans les deux parties suivantes.

Parmi les recherches-actions présentées dans la deuxième partie, nous retenons celle de De Koninck qui a pour but de cerner les inégalités de santé à partir des territoires de vie des personnes, et celle de Marengo, qui étudie les trajectoires migratoires d’une communauté italienne en Suisse. Dans le premier cas, les actions de l’équipe interdisciplinaire engagée consiste à trouver des solutions au problème étudié. Dans le deuxième cas, au contraire, les actions se révèlent indépendantes de la recherche, puisque les collaborations bénévoles de la chercheuse se traduisent par l’organisation d’activités telles que des fêtes.

Les études présentées dans la dernière partie ont été commandées par des organismes publics ou des partenaires économiques qui ont demandé qu’elles soient orientées vers la recherche de solutions. Relevons par exemple la recherche de Roulet Schwab. Elle a pour objectif d’identifier pourquoi le personnel soignant d’un établissement était aux prises à des situations de maltraitance envers les personnes âgées afin d’améliorer cette situation. Dans ce type de collaboration, le chercheur agit en tant que consultant.

Parmi les observations récurrentes, les auteurs soulignent que la recherche-action se distingue des autres méthodes de recherche par le rapport entre le chercheur et les acteurs du milieu étudié. Il ne s’agit plus d’un rapport de pouvoir et de savoir asymétrique, mais d’un partenariat. Par cette collaboration, comme l’écrit Mondada, la recherche-action traduit « des thèmes d’intérêt local en enjeux scientifiques et vice-versa ». Aussi, appliquer cette méthode implique une ouverture d’esprit du chercheur. En effet, Marengo précise que la recherche-action fait évoluer ce dernier, que son « savoir être chercheur » et « savoir faire la recherche » peuvent prendre des allures non envisagées en début de recherche. De cette façon, comme le signalent Caprani et Racine, elle permet un renouvellement de la géographie.

On peut regretter que le thème de l’enseignement de la recherche-action soit si peu développé, alors qu’il est présenté comme l’un des trois principaux thèmes du séminaire et que les auteurs insistent sur la difficulté d’appliquer cette méthode pour le néophyte.

Les auteurs de cet ouvrage n’éludent pas les critiques énoncées habituellement à l’égard de la recherche-action. Au contraire, ils cherchent à y répondre. Une des principales critiques est la remise en cause de l’objectivité du chercheur, en raison de son engagement dans une cause. Afin de préserver la qualité scientifique de la recherche, les auteurs proposent une mise à distance qui peut s’effectuer par une solide réflexion théorique et épistémologique préalable. Bref, cet ouvrage pose des questions fondamentales liées à la pratique de la recherche-action.