Corps de l’article

1. Introduction

Depuis quelques décennies, on a assisté à une diversification remarquable des techniques d’irrigation utilisables par l’homme pour remédier à ce redoutable fléau que constitue la sécheresse, notamment en Afrique du Nord et au Moyen-Orient.

Dans ce contexte, la gestion de l’eau est devenue un domaine où la recherche se trouve confrontée à des enjeux multiples et pressants. La croissance démographique impose des pressions importantes sur la ressource en eau et l’agriculture irriguée se classe comme le premier consommateur sur la planète. Ces contraintes ont servi de révélateurs à une prise de conscience collective vis-à-vis des dangers qui guettent l’eau et de l’importance de cet élément vital pour le développement socio-économique des collectivités locales.

Une grande partie des terres agricoles du Nord‑Oriental du Maroc se trouve dans la plaine des Triffa, une zone semi-aride où l’activité agricole est entièrement dépendante de l’irrigation. Un gigantesque système de canaux gravitaires et conduits prélève de l’eau de l’oued Moulouya, dont la régulation des eaux est assurée par le complexe hydraulique Mohamed V – Mechraâ Hammadi.

Un opérateur régional (le gestionnaire public ORMVAM) est responsable de l’allocation de l’eau (planification), de la régulation hydraulique (gestion) et de la police des eaux (contrôle et résolution des conflits). En cas de pénurie d’eau, l’opérateur prend un certain nombre de mesures et d’actions en matière de gestion des ressources en eau et de sensibilisation des agriculteurs face aux aléas climatiques; il incite à l’utilisation de techniques modernes d’irrigation, économes en eau.

L’eau est allouée aux usagers selon un programme d’irrigation fonction de la superficie des cultures et de leur nature. Tout prélèvement illégal d’eau par un agriculteur induit une réduction du débit dans le canal et a un impact sur l’eau reçue par les usagers situés en aval du point d’intervention. Dans cette optique, l’ORMVAM a jugé bon de mettre en place des systèmes de contrôle de débit, répartis le long des différents canaux d’alimentation en eau. Cet objectif vise une utilisation rationnelle de l’eau d’irrigation par une diminution des pertes dans le réseau hydraulique.

Dans ce travail, nous avons tenu à apporter une contribution à la gestion des ressources en eau d’un réseau d’irrigation agricole, en nous intéressant à l’étude et au développement d’une instrumentation performante permettant de fournir les informations utiles sur l’état réel du système d’irrigation. La technique employée pour effectuer cette mesure utilise les ultrasons, eu égard aux nombreux avantages qu’ils procurent.

Nous nous sommes intéressés plus spécifiquement à la mesure de débit transitant dans les systèmes hydrauliques à surface libre (canaux d’irrigation) qui sont des systèmes distribués non linéaires fortement perturbés.

L’article est organisé comme suit : tout d’abord, nous avons présenté le concept de capteur intelligent considéré comme le coeur de notre débitmètre. Ensuite, une attention particulière est portée sur la technique du temps de transit des ondes ultrasonores afin d’évaluer la vitesse d’écoulement de l’eau dans le canal. En fait, dans le cas des canaux, les caractéristiques géométriques sont bien maîtrisées, et il est donc possible d’obtenir facilement le débit. Dans le cas où les conditions hydrauliques sont complexes, la loi Niveau-Débit exploite mal le profil réel des vitesses d’écoulement, des mesures des niveaux et des vitesses sont alors indispensables. Dans ce cas, nous avons proposé une solution basée sur l’exploitation du profil des vitesses en effectuant la mesure réelle de la vitesse existant en différent points de la veine liquide.

Nous avons élaboré et mis en oeuvre un procédé original de mesure de vitesses d’écoulement, capable d’assurer une meilleure précision. Le débitmètre est capable de détecter, de mesurer, de traiter localement les données collectées et de les communiquer pour servir à la conduite du système d’irrigation dans lequel il sera intégré.

Les premiers résultats expérimentaux sont exposés à la fin de l’article. Les mesures obtenues, à l’aide du débitmètre ultrasonique que nous avons réalisé, sont comparées à celles fournies par d’autres débitmètres étalons qualifiés de précision installés sur le banc d’essais.

2. Principes et techniques des mesures de débits par temps de transit d’ultrasons

Au même titre que les températures, les pressions, les niveaux, les débits de fluides sont un des mesurandes très importants dans de vastes domaines tels que la conduite des industries de procédés ou la supervision des systèmes d’adduction d’eau. Les débitmètres à ultrasons présentent, par rapport aux autres techniques, l’intérêt d’une absence de parties mécaniques sujettes à vieillissement et d’une interaction négligeable avec le milieu.

Il existe deux catégories de débitmètres à ultrasons pour la mesure des débits, celle basée sur la mesure de temps de transit et celle basée sur l’effet Doppler. La première catégorie est largement utilisée pour les mesures d’écoulement dans des canaux ouverts ou dans des conduits fermés, les débitmètres sont sensibles à la présence de solides en suspension ou à la présence de bulles dans le fluide, la seconde catégorie est plus répandue et moins chère, toutefois les débitmètres sont considérés comme nettement moins précis. Dans ce travail, on étudiera la conception d’un débitmètre à temps de transit et son expérimentation au sein un banc d’essai destiné aux mesures de débit dans des conduits sous pression et dans des canaux d’irrigation ouverts.

2.1 Les principes opérationnels de l’approche ultrasonique

La méthode du Temps de Transit est fondée sur l’influence de la vitesse propre du milieu sur la célérité d’un signal ultrasonore qui le traverse. En effet, des perturbations de pression de faible amplitude se propagent dans un fluide à une vitesse qui est la vitesse de propagation acoustique dans ce milieu. Si, de plus, ce milieu a une vitesse propre, la vitesse de propagation de la perturbation, par rapport à un repère immobile, est la somme algébrique de la vitesse acoustique et de la vitesse du milieu. La méthode de mesure de la vitesse d’écoulement d’un liquide ou d’un gaz consiste alors à mesurer le temps de transit d’impulsions à haute fréquence entre une ou plusieurs paires de transducteurs ultrasonores. La relation entre la mesure du temps de transit de l’impulsion ultrasonore et la vitesse moyenne le long du chemin suivi par l’impulsion a été décrite en détail pas divers auteurs comme FREUND et warner (1995), DRENTHEN (1995), Van DELLEN (1996) et l’AMERICAN GAS ASSOCIATION (1996).

Dans LYNNWORTH (1989), le transducteur émet des impulsions ultrasonores alternativement vers l’amont et vers l’aval. Le temps de transit du signal se propageant dans la direction de l’écoulement, TBA :

est plus court que le temps de transit du signal se propageant en sens inverse, TAB :

où V est la vitesse du milieu, C la célérité du son dans ce milieu, L la longueur du parcours de l’impulsion, e le vecteur unitaire tangent au chemin de l’onde ou le chemin de l’onde, θ l’angle entre le chemin du son et l’axe du conduit. La valeur de θ n’est pas critique mais doit être connue, elle est généralement prise dans un intervalle de 30 à 60 degrés. Des circuits électroniques associés aux capteurs à ultrason mesurent la différence de temps de transit de l’onde. Si le milieu est immobile, les deux temps amont et aval sont identiques, leur différence est nulle et le débitmètre indique zéro. La vitesse du fluide est proportionnelle à la différence des inverses des temps de transit et peut être exprimée comme :

Dans la méthode des transducteurs accolés « clamp-on tranducers » mentionnée par GENTHE et YAMAMOTO (1974), puis par DROST (1980) et HILL (2000), les deux transducteurs sont fixés sur la surface extérieure du tube, l’onde ultrasonique est transmise à travers la paroi du tube puis se propage dans le fluide dans des directions obliques par rapport à son axe.

La célérité Cf dans le fluide s’exprime en fonction de l’angle α de l’onde par rapport au transducteur, de la célérité Ct dans le transducteur et de l’angle θ du chemin de l’onde par rapport au fluide et est donnée par :

La distance L est reliée au temps de transit par L = Cf•Tf et l’angle α est relié aux longueurs a et h par cosα = a/h , l’équation du débit Q est alors :

Cette relation est utile quand la dimension L du conduit n’est pas connue avec certitude.

2.2 Influence des composantes transversales des vitesses d’écoulement le long des deux chemins croisés entre transducteurs.

On considère l’installation de la figure 1 qui comporte deux chemins croisés entre transducteurs.

Figure 1

Géométrie de l’installation avec deux transducteurs à chemins croisés.

Schematic of the geometry and set-up of two crossed-path transducers.

Géométrie de l’installation avec deux transducteurs à chemins croisés.

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En un point, la vitesse d’écoulement possède trois composantes : Vx axiale et (Vy,Vz) transversales. On peut ignorer la composante Vz, elle est en effet perpendiculaire au plan des chemins des ondes et elle n’affecte pas les temps de transmission.

Les temps de transit peuvent s’écrire :

d’où :

et la vitesse le long de la corde AB est :

tandis que la vitesse le long de la corde CD est :

Il existe donc une différence dans les vitesses de propagation :

due à la composante transversale <Vy> de la vitesse du milieu.

3. Conception technique et évaluation en laboratoire du débitmètre ultrasonore.

Il est bien connu en technique de mesurage, comme le souligne par exemple BARMTTLER (1992), que, si les signaux sont échantillonnés de nombreuses fois, la résolution augmente avec le nombre d’échantillons. Ce principe est appliqué en effectuant un traitement répétitif des signaux de temps de transit. On utilise deux compteurs, le premier Nt est synchronisé durant la phase de mesure par un oscillateur à quartz de fréquence stable, le deuxième compteur compte le nombre Ns d’échantillons acquis. La mesure complète dure quelques millisecondes. Les deux nombres Nt et Ns sont utilisés pour calculer le temps de propagation de l’impulsion ultrasonore, proportionnel au rapport Nt / Ns. Le schéma fonctionnel de la figure 2 montre l’agencement de l’électronique rapide pour l’exploitation du débit-mètre.

Figure 2

Schéma-bloc de l’électronique du débitmètre ultrasonore.

Block diagram of the transit time ultrasonic flow meter electronics.

Schéma-bloc de l’électronique du débitmètre ultrasonore.

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3.1 Débitmétrie en canal ouvert et mesure de niveau de surface.

3.1.1 Expérimentation sur canal à surface libre.

À côté des tests en laboratoire, le débitmètre a été évalué sur canaux ouverts. Les mesures de débits dans les canaux ouverts peuvent être obtenues par le biais de courbes de correspondance utilisées pour convertir en débit des mesures de niveau d’eau. De nombreux phénomènes peuvent modifier une courbe de correspondance, et elle doit être réévaluée périodiquement.

Dans ce contexte, la technique de mesure du temps de transit ultrasonore est très intéressante pour la gestion de l’eau. Grâce à cette technique, le débit peut être mesuré en utilisant des configurations à un ou plusieurs chemins en faisant particulièrement attention à définir la distribution verticale des vitesses et une méthode adaptée d’intégration.

L’expérience a été conduite dans un canal d’eau de section trapézoïdale, de longueur 4,2 m, de largeur 0,45 m et de profondeur variant de 0,05 à 0,38 m, avec une pente variable de 0,001 à 0,020 permettant d’ajuster le débit. On a fait varier la vitesse du liquide de 0,075 m/s à 2,4 m/s. Les mesures de temps de transit ont utilisé la technique avec un chemin unique avec deux transducteurs (le profil de vitesse est alors échantillonné le long d’une corde unique) et la technique à double chemin et quatre transducteurs (Figure 3).

Figure 3

Positionnement des capteurs pour la mesure ultrasonique le long de deux cordes dans un canal trapézoïdal.

Position of the two ultrasonic chordal path measurements in a trapezoidal channel.

Positionnement des capteurs pour la mesure ultrasonique le long de deux cordes dans un canal trapézoïdal.

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La figure 3 montre la disposition des équipements pour le système de mesure à deux paires de transducteurs.

3.1.2 Méthodes de référence

3.1.2.1 Méthode des mi-sections

Une turbine convertit la vitesse d’écoulement en fréquence de rotation de l’hélice qui tourne librement et dont un compteur peut enregistrer le nombre de rotations. Nous utilisons une mini-turbine dotée d’une hélice à deux pales métalliques, placée dans l’eau en direction opposée à l’écoulement (Figure 4). La fréquence n de rotation de l’hélice est fonction linéaire de la vitesse d’écoulement V au point de mesure : V = k*n + D, où k (pas hydraulique) et D sont des caractéristiques de la turbine déterminées lors d’une phase d’étalonnage et n est obtenu par comptage d’un nombre d’impulsions N sur une durée t.

Figure 4

Schéma de l’instrument de référence pour les vitesses d’écoulement.

Schematic of the reference device used for measuring flow velocities.

Schéma de l’instrument de référence pour les vitesses d’écoulement.

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Pour notre appareil, nous avons trouvé (jaugeage) :

avec V en m/s et n en Tr/s.

Tableau 1

Spécifications techniques du débimètre à hilice

Technical specifications of the propeller flowmeter

Caractéristique du débitmètre

Vitesse minimale détectable

0,01 m/s

Vitesse maximale détectable

2,5 m/s

Précision de la mesure de vitesse

± 1 %

Diamètre de l’hélice

40 mm

Pas de l’hélice

20 mm

Intervalle de mesure

20 sec

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En vue d’avoir un résultat précis, il faut s’assurer de mettre le capteur dans une portion aussi rectiligne que possible et d’obtenir une répartition transversale aussi régulière que possible.

La méthode des mi-sections (Figure 5) est une méthode d’intégration approchée des vitesses en vue d’obtenir le débit. La procédure consiste à découper la section droite en N sous‑sections (8 par exemple) de largeur wi et placées aux hauteurs h’i= ½( hi + hi+1) est la position verticale du centre de chaque sous-section et V’i = ½ ( Vi + Vi+1) est une estimation de la vitesse moyenne dans la sous-section (dans le cas de faibles variations temporelles du niveau, on peut limiter le nombre de mesures en assimilant la vitesse moyenne sur chaque verticale à celle mesurée à 6/10 de la profondeur à partir de la surface libre). Le débit de référence peut alors s’obtenir à partir d’une série de mesures selon :

où ki est le coefficient hydraulique.

Figure 5

Méthode des mi-sous-sections pour la détermination du débit dans un canal ouvert.

Mid-section method for the determination of the flow rate in an open channel.

Méthode des mi-sous-sections pour la détermination du débit dans un canal ouvert.

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3.1.2.2 Mise en oeuvre pratique de la méthode, estimation de la vitesse au fond du canal et algorithme de calcul de débit de référence

Nous subdivisons la section en n sous-sections (ou tranches) verticales i = 1, 2, …n. Sur une verticale passant au milieu de la ie sous-section, nous mesurons plusieurs vitesses locales Vik aux hauteurs hik, k variant de 1 à m. Les points ne sont pas forcément équidistants (Figure 6).

Figure 6

Position des points de mesure et distribution verticale des vitesses.

Positioning of the measurement points and vertical velocity distribution.

Position des points de mesure et distribution verticale des vitesses.

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À proximité du fond du canal, nous estimons la vitesse à partir de l’équation de Von Karman :

Vib est la est valeur extrapolée de la vitesse en un point à la distance hib du fond, sur la ie verticale; Vid est la valeur mesurée de la vitesse à la distance di du fond sur la ie verticale; α est un coefficient numérique empirique adimentionnel qui dépend de la nature des parois du canal, et qui peut prendre des valeurs entre 5 et 7.

Le débit unitaire qi sur la ie verticale est :

Le débit de référence peut alors être calculé à partir de :

3.1.3 Une nouvelle méthode de placement des capteurs et de calcul du débit dans un canal ouvert

Les composantes non longitudinales du champ de vitesses, causées par des perturbations, altèrent les temps de transit entre détecteurs. Pour réduire les incertitudes sur le profil de vitesse et atteindre une précision élevée, même dans des condition hydrauliques défavorables, une configuration multi-chemins doit être adoptée en augmentant le nombre de chemins acoustiques. La vitesse d’écoulement est alors mesurée sur plusieurs niveaux entre la surface libre et le fond du canal.

On divise la section S du canal en n sous-sections (i = 1, 2, 3,…, n) horizontales aux frontières desquelles on mesure la vitesse d’écoulement par la méthode ultrasonore. Le niveau de l’eau est aussi mesuré par une méthode ultrasonore, ce qui permet de connaître la section mouillée (Figure 7).

Figure 7

Mesure multi-chemin dans un canal à l’air libre.

Multi-path measurement in an open channel.

Mesure multi-chemin dans un canal à l’air libre.

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Un avantage important de la mesure multi-canal est la redondance qui autorise le débitmètre à fonctionner (en mode dégradé) même en cas de défaillance de l’un des transducteurs.

3.1.3.1 Contribution au calcul du débit en écoulement à l’air libre et exploitation des résultats

L’expression analytique du débit contient l’équation intégrale suivante :

où : L(y) = x2(y) ‑ x1(y).

Nous mesurons v̅(yi) sur n cordes aux cotes yi (Figure 8), il vient alors :

Figure 8

Calcul du débit en écoulement à l’air libre avec chemin unique de mesure.

Calculation of the flow rate in an open channel with a single pair of sensors.

Calcul du débit en écoulement à l’air libre avec chemin unique de mesure.

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Cette intégrale peut être calculée numériquement par des techniques d’intégration numériques quadratiques de type Gauss-Legendre. Ces techniques remplacent l’intégrale par une sommation discrète utilisant les ordonnées de la fonction à des abscisses successives, avec des pondérations appropriées, résultant de la décomposition de la fonction en polynômes de Legendre. La précision de la méthode dépend du nombre de points connus et de la nature de la fonction à intégrer; l’expérience a montré qu’une sommation utilisant 8 à 20 points de mesure fournit une précision suffisante.

L’expression du débit lorsque le niveau d’eau dans le canal est constant

où ri est le ie zéro du polynôme de Legendre.

Lorsque le niveau d’eau dans le canal est variable, alors nous préconisons de limiter la méthode numérique quadratique à la portion de l’écoulement qui reste toujours en dessous d’un niveau minimal hmin. L’intervalle d’intégration gaussienne est donc [0, hmin], et nous mesurons v̅(yi) sur cet intervalle. Par ailleurs, nous proposons d’améliorer la précision des mesures en plaçant une ou deux cordes de mesure supplémentaires au milieu de l’intervalle situé entre le niveau minimal hmin et le niveau nominal atteint par le liquide.

Nous supposons un profil de vitesse logarithmique :

dans lequel le coefficient de friction Cf ≅ 0,0016 et que l’eau peut subir des fluctuations de ± 5 % de son niveau nominal.

Nous utilisons une intégration de Gauss suivant trois cordes (n = 3) et l’intervalle gaussien sera tel que y/h ≤ 0,80. La corde de mesure auxiliaire sera alors placée à y/h = 0,90.

Les noeuds (ri) et les poids (wi) de la méthode quadratique de Gauss-Legendre dans le cas de i variant de 1 à  3 et n = 3  sont donnés par :

Cette formule est exacte pour tout polynôme défini sur [-1,1] et de degré inférieur à 2n – 1 = 5.

On écrit l’approximation polynomiale :

d’où : = 2ao + 2a2/3 + 2a4/5 = w1V1 + w2V2 + w3V3

et Vi = ao + a1ri + a2ri2 + a3ri3 + a4ri4 + a5ri5 pour i variant de 1 à 3.

En identifiant les coefficients, on obtient le système suivant :

La solution numérique de ce système est :

Dans ce qui suit, nous allons calculer le débit normalisé q avec cette nouvelle méthode, lorsque le niveau d’eau subit des variations de ± 5 % sa valeur nominale. Dans chaque cas, le débit normalisé est calculé comme la somme de l’intégrale gaussienne qgauss et de la contribution auxiliaire qaux (Tableau 2).

Tableau 2

Résultat du calcul du débit normalisé à niveau d’eau variable.

Calculation of the unit flow rate (q) at various water levels.

Niveau/Niveau nominal

qgauss

qaux

Qtot

Δq/q

100 %

0,8187

0,1923

1,0089

+ 0,8 9%

95 %

0,8596

0,1518

1,011

+ 1,10 %

105 %

0,7777

0,2289

1,0066

+ 0,66 %

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Ces résultats montrent que la méthode peut être appliquée efficacement pour calculer le débit dans des canaux ouverts avec une précision accrue.

Les résultats des mesures expérimentales sont illustrés ci-dessous dans les graphes de l’erreur relative (V – Vref) / Vref , où V est la vitesse du fluide indiquée par le débitmètre ultrasonore et Vref est la valeur de débit enregistrée par le capteur de référence. Le débitmètre présente une incertitude de ± 2,05 % du débit effectif dans le cas d’une mesure mono-canal et de ± 0,96 % dans le cas d’une mesure bi-canaux. Les erreurs les plus importantes se situent dans la zone des faibles vitesses de fluide. La performance est bonne et dépasse les méthodes classiques. La comparaison des deux graphes met en évidence l’intérêt d’un canal supplémentaire de mesure pour augmenter la précision de la mesure ainsi que l’insensibilité aux variations de profil (Figure 9).

Figure 9

Performances du débitmètre ultrasonore : chemin (a) simple; (b) double.

Performance of the ultrasonic flow meter: (a) single channel; (b) dual channel.

(a)

(b)

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Dans une configuration mono-canal, il faut définir la distribution verticale des vitesses avec beaucoup de soin si l’on veut atteindre une bonne précision. Dans une configuration multi-canaux, la vitesse sur la ligne médiane est bien définie, mais il faut choisir avec soin la méthode d’intégration. La fiabilité de la vitesse mesurée le long d’une corde dépend de la longueur du chemin, de la configuration et de la position radiale du chemin acoustique, de la forme de l’impulsion acoustique et de la synchronisation de l’électronique.

4. Conclusion

Les débitmètres ultrasonores sont à même de réduire de façon notable les coûts d’installation et de fonctionnement des stations de surveillance tout en fournissant un degré de précision conforme ou supérieur aux équipements de mesure traditionnels (vortex, pression différentielle, orifices, buses, venturi, tubes de Pitot, flux magnétique, etc.). La méthode proposée à détection de temps de transit donne une mesure fiable et précise des débits en canaux ouverts avec une incertitude ne dépassant pas 2 % pour la technique de mesure dite mono-canal et de 1 % seulement pour la mesure bi-canaux.

Le débitmètre proposé a été conçu en tant que capteur intelligent c’est‑à‑dire intégrant toutes les fonctions de traitement du signal et de transmission des données, il promet ainsi une réduction des coûts d’entretien et une information riche, incluant l’auto-diagnostic de la chaîne d’acquisition. Il se présente donc comme un maillon indispensable pour une gestion optimale des systèmes d’irrigation à grande échelle.

Ces premiers résultats sont donc encourageants concernant l’avenir de l’appareil, toutefois des essais ultérieurs restent à faire pour déterminer plus en détail les performances de l’instrument en matière de précision, de répétabilité, de linéarité, de fiabilité et de temps de réponse.