Corps de l’article

Plus que d’autres courants protestants, le pentecôtisme paraît lié aux mobilités contemporaines, sociales ou géographiques, soit qu’il les facilite en affaiblissant les relations d’autorité et de solidarité héritées, soit qu’il les compense en contribuant à la reformulation de liens communautaires en situation de migration. L’élément-clé de la croissance pentecôtiste consiste, écrit D. Martin, en « un “mouvement” religieux accompagnant et facilitant le mouvement des personnes » (Martin 2002 : 23). Le pentecôtisme s’adresse avant tout à des « individus-trajectoires » (Ehrenberg 2000 : 230) qui, s’étant éloignés des structures traditionnelles d’encadrement, sont à la fois convaincus de la nécessité de « faire leur vie » et fragilisés par l’insécurité identitaire qui en découle. De quelle manière prend-il en charge cette double contrainte? Encourage-t-il l’émancipation individuelle vis-à-vis de tout destin collectif en prônant un salut personnel ou construit-il au contraire des « îles d’humanité » (Hollenweger 1988 : 458) où des naufragés de la modernité peuvent abandonner leur destin aux mains d’une communauté englobante fondée sur l’autorité incontestable du pasteur et une lecture biblique normative?

En milieu rural burkinabé, note P.-J. Laurent (1999), l’adhésion aux assemblées de Dieu induit une mise à distance des obligations communautaires et facilite la poursuite d’un destin personnel. En milieu urbain, au contraire, elle débouche sur une sorte de « re-villagisation » en reconstituant une sociabilité communautaire. On ne peut mieux souligner l’apparente ambiguïté de la socialisation pentecôtiste, individualiste ou communautaire, à moins qu’elle ne soit finalement les deux en même temps : il faudrait alors envisager un type d’« individualisme communautaire », une hypothèse avancée récemment par J.-P. Willaime (2004) pour rendre compte de certains rapports individu-communauté observables en modernité religieuse avancée.

C’est à partir de l’analyse du pentecôtisme en Polynésie française, et plus particulièrement des assemblées de Dieu qui en sont aujourd’hui l’institution centrale, que nous tenterons ici de dénouer la contradiction entre une réelle autonomisation des individus (qui contribue à leur adhésion au pentecôtisme) et leur intégration à une communauté religieuse contraignante (qui contrarie la liberté des choix personnels). D’août 2000 à septembre 2002, nous avons conduit des recherches de terrain au sein des Églises et groupes pentecôtistes de Polynésie française : une observation régulière des différentes réunions, plus d’une centaine d’entretiens individuels et la collecte de témoignages et documents permettant de restituer l’histoire de ce pentecôtisme, depuis son implantation en 1962 parmi la communauté chinoise de Tahiti (Fer 2004) jusqu’à sa diffusion plus large au sein de la société polynésienne.

Nous préciserons donc les modalités spécifiques de la socialisation religieuse au sein des assemblées de Dieu. Celle-ci contribue, par un travail institutionnel « invisible », à l’instauration d’une relation personnelle « enchantée » avec un Dieu personnel et des « frères et soeurs en Christ ». Elle s’inscrit par là dans la continuité symbolique d’une évolution plus générale de la société polynésienne, des communautés « naturelles » vers des communautés choisies.

Communautés, individus et associations en Polynésie française contemporaine

Églises de professants et individus en Océanie : des idées « étrangères »?

Les Églises protestantes les plus anciennes, nées au XIXe siècle dans le sillage de la London Missionary Society et de ses évangélistes polynésiens (Forman 1970), ont contribué, dans une grande partie de l’Océanie, à la cristallisation d’identités culturelles communautaires, puis nationales, fondées sur l’alliance historique entre une Église et un peuple, une terre. Ainsi, l’Église évangélique de Polynésie française (EEPF)[2] a élaboré depuis les années 1980 un discours de la tradition ma’ohi, fondé sur une mémoire collective (protestante et polynésienne) qui légitime son engagement contre les différentes formes de domination occidentale et pour la défense de la culture et de la terre ma’ohi. Son action s’inscrit dans une perspective « multitudiniste », c’est-à-dire qu’elle se donne pour mission de s’occuper des intérêts de l’ensemble de la population ma’ohi (Reymond 2001), quand bien même celle-ci tend aujourd’hui à se disperser toujours davantage entre diverses Églises concurrentes[3].

Cette perspective renvoie à une représentation idéalisée de la vie insulaire « authentique », telle qu’elle a pu exister dans les îles où la communauté tout entière se trouvait rassemblée dans une seule Église – là où protestantisme et catholicisme ne coexistaient pas et où les Églises minoritaires, comme les mormons et les adventistes (présents en Polynésie dès la fin du XIXe siècle), ne s’étaient pas encore implantées. Le discours de l’EEPF s’adresse donc à une communauté liée par l’appartenance à une même terre, non à des individus unis par un même engagement de foi personnel – une perspective qui est en revanche celle des Églises de professants constituant la « nouvelle vague du christianisme » en Océanie (Forman 1990 : 29). Établissant une continuité symbolique entre le mode de vie communautaire traditionnel, défini comme un des piliers de l’identité océanienne, et le rôle qu’elles revendiquent – celui d’institutions dépositaires de la mémoire et de l’identité d’une communauté culturelle ou ethnique –, les Églises historiques océaniennes inclinent assez inévitablement à disqualifier les Églises de la « nouvelle vague » comme étrangères par essence aux cultures locales. C’est ce qu’exprime bien le Rév. Featuna’i Liua’ana, de la Congregational Christian Church in Samoa :

My own point of view of my Church, the CCCS, is that it does not meet the needs of individuals because its priority is to meet the needs of the community. The concept of « individualism » is foreign to Samoans. « Individualism » (a central mentality within many NRGs[4]), is selfishness in the Samoan mentality. « Communalism » encourages sharing and relationships. This idea of sharing ensures that those in need are not neglected. The CCCS deals with the individuals’ needs, through the community to which they belong.

Liua’ana 1994 : 79

L’ethnologie océaniste, qui garde en mémoire le « grand partage » opéré au XIXe siècle entre les domaines dévolus à l’ethnologie naissante et la sociologie, tend souvent à conforter de telles conceptions de l’authenticité culturelle, en postulant une différence irréductible, ontologique, entre les sociétés « individualistes » occidentales et les sociétés « communautaires » d’Océanie. « Cette distinction, écrit B. Douglas, réapparaît sous diverses formes dans l’anthropologie moderne, allant de l’essentialisme simpliste de J. Linnekin et L. Poyer, aux abstractions complexes de M. Strathern » (Douglas 2002 : 83). « L’association systématique entre modernité, individualisme et occidentalisation », dénoncée par B. Douglas comme « ethnocentriste et anachronique » (ibid. : 84), incline à n’intégrer le christianisme dans la définition de l’identité océanienne que lorsqu’il prend les traits d’une « tradition chrétienne » revendiquant le primat de la communauté sur l’individu (Tcherkézoff 1997 : 335 et seq.). La reprise de ce discours de la tradition, dont les Églises historiques polynésiennes sont aujourd’hui les porte-parole, par les ethnologues du christianisme en Océanie est une des raisons pour lesquelles ils posent sur les « nouveaux mouvements religieux » un regard « au mieux indifférent – mais souvent plutôt hostile », note J. Barker, qui cite par exemple M. Ernst :

The new religious groups, he writes, promote « a form of Christianity particular to the US. There is nothing Pacific, local, or contextual in this […]. Focused on the individual, the newcomers promote a theology that is « oppressive and paternalistic » and that « has nothing to offer for the variety of social, economic and political problems in the present or future ».

Barker 2001 : 106

Le développement considérable des Églises mormones, adventistes ou pentecôtistes et l’implantation en Océanie d’une multitude de mouvements évangéliques, que M. Ernst (1994) a évalué avec précision, donne donc fréquemment lieu à une analyse des mutations de la religion en Océanie sous le seul angle de l’acculturation, de l’altération et de la domination.

En Polynésie française, la pluralisation croissante des affiliations religieuses et le succès des mouvements religieux réclamant un engagement volontaire et personnel (par la conversion ou par un réengagement s’apparentant à une « nouvelle naissance », dans le cas du renouveau charismatique catholique) apparaît concomitant avec un ensemble d’évolutions qui ne peuvent être ramenées aux seuls effets de contraintes exogènes.

L’affirmation progressive d’une autonomie individuelle : « faire sa vie »

En premier lieu, une mobilité sociale et géographique accrue a contribué, au cours des quarante dernières années, à une autonomisation tendancielle des individus vis-à-vis des structures d’encadrement traditionnelles telles que la famille ou l’Église. Le développement du système éducatif français participe d’au moins deux manières à cette nouvelle mobilité : d’une part, en incitant les enfants à quitter leur île pour rejoindre les collèges, puis les lycées (presque tous situés à Tahiti), parfois accompagnés de leurs parents ; d’autre part en diffusant de nouvelles valeurs. L’école affirme en effet la nécessité de s’élever dans la hiérarchie sociale en « sortant de son île » et en échappant à la reproduction obligée de la situation des parents (qui, le plus souvent, pratiquaient la pêche et l’agriculture). Elle proclame l’égalité des chances individuelles et met en avant la notion de mérite personnel, dont le revers consiste à faire porter sur l’individu seul (et non sur la fatalité d’un destin collectif) la responsabilité d’un éventuel échec.

Le développement des moyens de transport et des échanges inter-insulaires a lui aussi contribué à un décloisonnement des espaces de sociabilité, encourageant notamment les alliances conjugales hors de la communauté d’origine. Il en est résulté un accroissement rapide et remarquable du nombre d’unions mixtes, entre individus originaires d’îles différentes ou d’appartenances religieuses différentes. Ainsi, un sondage réalisé à Tahiti en 2000[5] indiquait que le taux d’homogénéité religieuse est passé de 84,68 % chez les protestants de la génération des parents des personnes interrogées (84,68 % des protestants ont un conjoint protestant) à seulement 62,56 % pour la génération suivante. Ce brassage des populations (qui signale en filigrane la constitution progressive d’une nation polynésienne au-delà des identités insulaires) fragilise la notion d’appartenance religieuse héritée, en faisant apparaître, au sein d’une même lignée familiale, la possibilité – au moins théorique[6] de choisir sa religion sans pour autant renier sa famille.

Enfin, l’installation du Centre d’expérimentation du Pacifique (CEP) sur les atolls de Moruroa et Fangataufa en 1963 a fait naître en Polynésie française une économie marchande inégalitaire, fondée en grande partie sur les transferts financiers de la métropole et le fort pouvoir d’achat des nombreux fonctionnaires[7]. Porté par l’arrivée de personnels administratifs et militaires de la métropole, puis par l’émergence d’une nouvelle classe sociale – les fonctionnaires d’origine locale – le secteur du commerce a connu une croissance considérable, surtout à Tahiti, tandis que l’agglomération urbaine de Papeete accueillait de plus en plus de migrants des îles rurales, attirés par les grands chantiers d’infrastructure (aéroport international, réseau routier, constructions), mais souvent condamnés à des conditions de vie précaires, faute de salaires suffisants. Caractérisée par des écarts croissants de revenus, la cherté de la vie, de faibles protections sociales et des mécanismes de redistribution quasi inexistants, cette société de surconsommation s’est développée aux dépens d’une économie familiale non monétaire devenue aujourd’hui marginale. Elle produit deux formes principales d’anomie, qui laissent les individus littéralement désorientés face à l’effondrement des repères et des solidarités organisant jusque-là leur existence sociale – situations de crise dont ils ne peuvent « se sortir » que par eux-mêmes, au prix d’un sursaut personnel et volontaire.

Cet état d’anomie touche tout d’abord ceux qui ont délaissé une économie d’autosubsistance non monétarisée (pêche et agriculture) sans parvenir à s’intégrer à une économie marchande qui crée pour eux plus de besoins qu’elle n’en satisfait, les incite à l’endettement et entraîne finalement un déclassement social radical. La misère qui sévit en bien des endroits de la Polynésie française est à l’origine de véritables effondrements, l’alcoolisme achevant souvent la destruction de toute forme de solidarité ou de vie communautaire, y compris paroissiale. Mais l’anomie touche aussi, à l’inverse, ceux qui connaissent une « crise de prospérité » : « ce désir, dit une fidèle pentecôtiste, dans sa vie, quand tu gagnes bien ta vie financièrement, il y a cette tendance à vouloir tout »[8], « les ambitions démesurées [allant] toujours, écrivait É. Durkheim, au-delà des résultats obtenus, quels qu’ils soient ; car elles ne sont pas averties qu’elles ne doivent pas aller plus loin » (2002 : 280). Les structures d’encadrement traditionnelles perdent, là aussi, toute pertinence aux yeux d’individus lancés dans une course effrénée à la prospérité matérielle et convaincus de ne plus rien devoir à personne.

Le paradigme associatif : de la famille aux amis

Toutefois, l’affaiblissement des communautés « naturelles » et l’autonomisation tendancielle des individus (qui en est à la fois une cause et une conséquence) ne débouchent pas uniquement sur une désarticulation du lien social, ils ouvrent aussi la voie à une recomposition partielle du cadre communautaire, non sur le mode d’un héritage obligé, mais selon des logiques associatives et affinitaires. « Le paradoxe de l’association, souligne en effet J.-L. Laville, est […] de pouvoir relever à la fois du principe sociétaire et du principe communautaire » (1997 : 51). Les associations peuvent prendre appui sur :

Une appartenance héritée où les individus s’inscrivent du fait de leur origine comme la famille mais elles lui confèrent, ce faisant, un autre statut : l’appartenance n’est plus seulement héritée, elle est aussi revendiquée comme une source d’identité et de socialisation.

Laville 1997 : 67

C’est ainsi que l’on observe en Polynésie française une série de réappropriations associatives des appartenances familiales, religieuses ou culturelles. En 1999, on comptait par exemple plus de 500 associations dites « familiales », souvent créées en appui d’une revendication foncière, dont le but est – précisent les statuts de l’une d’elles – de « regrouper tous les membres de l’association afin de consolider et retrouver les liens de parenté qui les unissent et de les faire connaître ainsi à tous les membres » (Journal Officiel de la Polynésie française 13.09.01 : 2346). Cette dynamique associative est à l’oeuvre au sein même des institutions religieuses histo- riques : dans l’Église catholique, à travers les adhésions individuelles aux groupes diocésiens charismatiques ou à des « communautés » telles que le Rosaire vivant ; dans l’EEPF, avec la création d’associations rassemblant, au sein des groupes intra-paroissiaux (‘amuira’a) les fidèles qui s’engagent à financer la construction d’une maison commune (fare ‘amuira’a) et s’en réservent du même coup l’usage. Enfin, les associations culturelles, qui assurent l’apprentissage et la mise en spectacle des danses et chants polynésiens, sont le lieu par excellence où se joue la réappropriation volontaire d’une identité et d’une tradition culturelles, notamment de la part de la jeune génération (Brami 2000).

Sur le terrain plus général des relations sociales, la dynamique associative se traduit par une relative désaffection vis-à-vis de la famille (en particulier la famille élargie, les feti’i), de plus en plus perçue comme une source de contraintes et de pe’a pe’a (ennuis, soucis), au profit des amis, qui tendent à devenir la figure emblématique du lien social heureux. Les « affaires de terre », litiges fonciers liés à de difficiles sorties d’indivision, sont les manifestations les plus courantes de la tension croissante entre d’une part, la famille comme « sujet collectif », dont l’unité repose sur la soumission inconditionnelle de ses membres à sa volonté transcendante (Bourdieu 1994 : 195-196) et d’autre part, des individus qui ont tendance à dénier à quiconque le droit d’exprimer cette volonté commune. Dans les cas les plus extrêmes, la mémoire familiale, encombrée par des strates de conflits et autres problèmes jamais résolus ni oubliés, donne vie à de « mauvais esprits » qui en sont l’expression dramatisée :

Dans ma famille – dit ainsi Vincent, converti au pentecôtisme – les frères et soeurs ne se parlent plus, même dans leur religion, ils ne se parlent plus entre eux. […] Ils se disputent entre eux, personne veut se soumettre. […]. Le soir, ils dorment pas, pendant une semaine, ils criaient, ils brûlaient les affaires, parce qu’ils sont allés voir le tahu’a [guérisseur]. Nous, on est là dans notre petit coin, à côté il y a dix frères et soeurs. Ça a été sur eux, ça fait pitié quand tu vois, hurler la nuit.

Assemblée de Dieu de Tiarei, entretien du 19 juin 2001.

Encadrement institutionnel et personnalisation de l’expérience religieuse : le paradoxe pentecôtiste

La conversion au pentecôtisme, qui offre au croyant la possibilité d’une « nouvelle naissance » symbolisée par le baptême d’eau, l’autorise par là à « dénouer les liens » qui l’inséraient dans un réseau de solidarités et d’antagonismes : en pardonnant à ceux qui sont demeurés « dans le monde », il peut désormais « se libérer de l’emprise de ses adversaires »[9] et commencer une autre vie. En ce sens, le rejet du « monde » revendiqué par les pentecôtistes est bien, comme l’a noté C. A. Kray, « une forme d’individualisme du fait qu’il est un acte par lequel on se sépare des autres » (2001 : 417). Mais s’il s’émancipe des liens obligés « du monde », le converti entre aussi, par un même mouvement, dans une communauté exigeante qui attend de lui une mise en cohérence de sa vie personnelle contrastant avec la pluralité des associations disponibles dans la vie sociale « mondaine ». Et les premières victimes de cette restriction radicale sont précisément ceux qui incarnaient le mieux la liberté de choisir ses relations selon une logique affinitaire : les amis, que l’on cesse très rapidement de fréquenter pour ne plus se lier qu’avec les membres d’une « nouvelle famille », celle des « frères et soeurs en Christ ».

Faut-il alors comprendre l’adhésion au pentecôtisme comme un marché de dupes? Le discours pentecôtiste conditionnant le salut individuel à un choix personnel et volontaire n’apparaît en effet de prime abord que comme « un discours de plus » justifiant une autonomisation des parcours individuels (Kray 2001 : 402), une traduction religieuse de ce que l’économie, la société et l’école enseignent déjà : la nécessité de « faire sa vie ». Mais la socialisation pentecôtiste semble réduire rapidement cette autonomie à néant, en soumettant le converti au contrôle communautaire de ses coreligionnaires, à l’autorité des pasteurs et à la stricte discipline d’une doctrine englobant tous les domaines de l’existence.

L’observation attentive des modes de socialisation mis en oeuvre par les assemblées de Dieu de Polynésie française, de l’articulation spécifique par lesquelles elles relient personnalisation de l’expérience religieuse et encadrement institutionnel, permet d’éclairer cet apparent paradoxe.

« Ouvrir son coeur à Jésus » : de l’évangélisation à l’entrée dans l’Église

Ceux qui, à l’issue d’une des réunions d’évangélisation organisées régulièrement dans les églises ou en plein air, s’avancent pour « répondre à l’appel » en « ouvrant leur coeur à Jésus » sont généralement convaincus de ce que les évangélistes pentecôtistes ne cessent de répéter : « ce n’est pas une religion ou une Église qui sauve, c’est Jésus ». De fait, la rhétorique évangélisatrice ne repose pas seulement sur l’évidence de manifestations spectaculaires de l’action divine ici et maintenant (guérisons, parlers en langue) ou sur l’émotion que procure tout rassemblement fervent, elle travaille plus profondément à une appropriation personnelle du message et des enjeux. À travers l’évocation de « vies transformées », une compréhension psychologisante de la Bible[10] et un prédicateur qui accepte de se laisser « distraire » par le contexte social de ses auditeurs[11], l’évangélisation pentecôtiste incite le croyant à « prendre pour soi » des énoncés de portée assez générale. Ce faisant, il se convainc qu’une communication personnelle avec un Dieu qui « connaît sa situation » s’est véritablement instaurée, et qu’il ne tient qu’à lui de la pérenniser, de l’approfondir.

Ce peut être un évangéliste qui, tout en évoquant des situations courantes en Polynésie française ou dans le quartier visé par l’évangélisation, semble interpeller chaque personne individuellement : « Dieu a vu ta situation. […]. Je m’adresse à toi, femme, toi qui traverses un temps de dépression, toi qui prends des traitements qui ne changent rien à ta situation » (Pasteur Barber, réunion du 6 mai 2002 à Faa’a, Tahiti). Ce sont aussi, très souvent, des récits bibliques bien connus, comme le fils prodigue ou la brebis égarée :

Le message, ce jour-là, dit Alice, c’était sur la brebis égarée. C’est comme s’il retraçait ma vie tout entière devant. J’ai pleuré, il parlait du berger qui va chercher cette brebis, je me voyais sur Ses épaules, j’avais mal, il imitait tout, c’est comme si ma vie défilait devant moi.

Assemblée de Dieu de Papeete, entretien du 18 avril 2001

Les « conseillers » (des membres des assemblées aguerris ayant, pour la plupart, été formés aux techniques de « l’évangélisation explosive »[12]) qui accueillent les personnes « touchées » amorcent avec elles la transition délicate entre l’expérience personnelle vécue pendant la réunion et l’adhésion concrète à une institution religieuse. La conciliation entre ces deux registres opposés repose sur une représentation de l’Église non comme institution, mais comme communauté : il s’agit de rejoindre des « frères et soeurs qui ont vécu la même chose », autrement dit d’adhérer non à « une Église de plus », mais à un « régime de validation communautaire du croire » fondé sur une sociabilité affinitaire et amicale (Hervieu-Léger 1999 : 182-183).

Quand une personne nouvelle a accepté Christ – explique un conseiller – elle arrive, on lui explique que ce n’est pas une religion qu’elle a accepté, mais Jésus, on dirige sur la façon dont elle va continuer, on lui donne un Nouveau Testament, on lui donne un petit guide, pour l’encourager à prier dans sa famille, ne pas hésiter à appeler des frères et soeurs si elle a des questions ou des besoins, pour qu’ils puissent t’aider, venir écouter la parole de Dieu.

Assemblée de Dieu de Papeete, entretien du 20 décembre 2001

Travail institutionnel « invisible » et relation personnelle à Dieu

Le travail institutionnel réalisé au sein des assemblées de Dieu polynésiennes s’efforce donc d’instaurer, dès les prémisses de l’adhésion, une socialisation religieuse fondée sur un double enchantement : celui d’une relation personnelle à Dieu sans médiation institutionnelle ; celui d’une communauté de « frères et soeurs en Christ » fondée sur des affinités plus profondes que l’appartenance commune à une Église. Cet « évangile relationnel » est au principe des programmes de « formation à la vie chrétienne »[13] suivis par la plupart des nouveaux adhérents. Animés par des « mentors » – figures exemplaires d’une autorité « amicale » investie de fait par l’institution (les mentors sont des membres expérimentés désignés par les pasteurs), mais apparemment fondée sur la seule force d’un témoignage personnel – ces groupes sont en effet un lieu privilégié d’apprentissage des relations à Dieu et aux autres. On y apprend à « entendre la voix de Dieu » à travers quelques clés de lecture de la Bible qui en font une « parole pour soi » assez univoque et normative, mais aussi par le biais d’une série de médiations « invisibles » : la « voix du Saint-Esprit », qui traduit l’intériorisation d’une éthique pentecôtiste comme voix de la conscience[14] ; les prédications inspirées par Dieu, les conseils prodigués par les coreligionnaires ou les pasteurs « de la part de Dieu » ; les messages délivrés lors des parlers en langue.

Les conditions d’efficacité du travail institutionnel « invisible » ne sont jamais plus manifestes qu’à l’occasion de ces messages, reçus par les croyants comme une communication intense et personnelle avec Dieu et qui nécessitent en fait la mise en branle d’un ensemble de mécanismes complexes. Tout d’abord, le « don des lan- gues », c’est-à-dire la capacité reconnue d’intervenir au cours du culte dans un langage extraordinaire (non compréhensible) inspiré par Dieu, ne devient authentique et légitime que lorsqu’il est validé par les garants de l’ordre institutionnel – responsables d’Église, anciens, pasteurs. Ainsi, au sein des assemblées de Dieu polynésiennes, tous les fidèles baptisés du Saint-Esprit prient en langues (une pratique consistant à communiquer avec Dieu par le biais de « paroles ineffables » qui n’ont pas d’autre signification que cette communication elle-même, selon une logique de « métacommunication »[15]), mais tous n’ont pas la capacité statutaire de parler en langues au cours des cultes. Ils sont encore moins nombreux à pouvoir légitimement interpréter ces parlers en langue, interprétations qui prennent généralement la forme de rappels à l’ordre ou de paroles de réconfort adressés à des fidèles qui se reconnaîtront ou que l’on reconnaîtra. Faire ainsi « parler Dieu » est un enjeu d’autorité considérable, un don auquel Claire, par exemple, qui a pourtant grandi dans l’Église, n’a jamais osé aspirer : « Je ne suis pas prête, c’est peut-être pas pour moi, on n’est pas obligé d’avoir les différents dons, c’est chacun dans son don. Interpréter ou parler en langues, c’est quelque chose de fort, c’est pour édifier l’Église […] » (Assemblée de Dieu de Papeete, 22 juillet 2001).

La médiation « invisible » assurée par les interprètes concourt, comme les différents leviers du travail institutionnel d’encadrement et de socialisation, à conforter les fidèles dans leur expérience subjective d’une relation personnelle « enchantée » à Dieu. Cet enchantement permet d’établir une continuité symbolique avec les conditions qui ont rendu possible et souhaitable une adhésion au pentecôtisme : à l’émancipation tendancielle des individus vis-à-vis de l’autorité familiale et communautaire répond l’apparente autonomie du croyant vis-à-vis de toute forme d’autorité ecclésiale ou de contrainte communautaire.

Les « frères et soeurs en Christ », famille ou amis?

Les « frères et soeurs en Christ » participent de cet « enchantement » en contribuant tout à la fois à la mise en conformité objective des existences, des comportements personnels et au sentiment subjectif d’avoir véritablement accédé à une « nouvelle vie » libérée des appartenances obligées – deux « preuves » expérimentales de l’efficacité de la conversion. Les relations au sein de la « famille » pentecôtiste, qui devient l’espace privilégié de sociabilité au fur et à mesure que les amis « restés dans le monde » s’éloignent, obéissent en effet à trois grandes règles.

La première consiste en un devoir de témoignage et de transparence, lié à la « grande mission » d’évangélisation qui incombe à tout converti : « une vie droite devant le Seigneur est l’arme la plus puissante pour l’évangélisation, ne donne pas seulement ton témoignage, sois un témoignage » (leçon 9 du premier niveau de formation du disciple, Venditti 1992 : 195). La conversion débouche ainsi sur l’intériorisation d’un devoir-être qui, dans les relations avec les inconvertis, les coreligionnaires et même avec soi-même (la « vieille nature »), devient rapidement la « véritable » identité. Ce principe, nourri d’un idéal de modération et d’une confiance quasi absolue dans les vertus de la communication, a pour effet de neutraliser, entre « frères et soeurs en Christ », les incertitudes des relations sociales ordinaires : les signes d’apaisement et de fraternité y sont surlignés, les tensions interpersonnelles traduites en « déficits de communication » et soumises à la médiation de Dieu, chacun est incité à exprimer en toute transparence son être « vrai », ses émotions, ses soucis. Les risques habituellement liés aux rapports de genre sont eux aussi englobés dans cette entreprise de sécurisation, de telle sorte que l’on serait tenté de prendre au pied de la lettre les appellations « frères » et « soeurs » utilisées par les fidèles. Ainsi, une fidèle célibataire de Raiatea (îles Sous-le-Vent) explique ne pas s’être inquiétée d’accueillir un homme sous son toit, jusqu’à ce qu’elle découvre qu’il n’était pas « chrétien » :

Le pasteur m’a envoyé H., il me dit c’est un chrétien, il est venu dormir à la maison. Après, je vois : il fume! Il m’a avoué : « mamie, je suis pas bapti-sé ». J’ai dit : « Seigneur! comment je vais faire? », j’étais paniquée : moi, avec cet homme dans la maison, qui n’est pas baptisé! Après, le pasteur a dit : « c’est vrai », il est allé ailleurs.

Entretien du 24 juin 2001

Mais si les « frères et soeurs en Christ » forment bien une « famille », c’est moins sur le modèle de la famille polynésienne traditionnelle, fondée sur l’autorité transcendante d’un « sujet collectif » s’imposant à chacun des membres, que sur celui d’une famille contemporaine à la fois « relationnelle » et sélective. En effet, la sociabilité pentecôtiste construit un espace distinct de la société globale, où les relations sont plus sûres et où les membres de la famille ont « de plus en plus d’intérêt à être ensemble, à partager une intimité, [sont] de plus en plus sensibles à la qualité de leurs relations » (de Singly 1993 : 7). La vie « familiale » y repose davantage sur les liens affectifs que nouent les individus que sur leur appartenance commune à une Église, même si ces liens sont en partie prédéterminés par le travail « invisible » de l’institution (à travers, par exemple, la constitution des groupes de formation INSTE ou le discernement des « dons » de chacun).

Dans les assemblées de Dieu des petites îles, la conversion produit un isolement d’autant plus radical (et douloureux) qu’une bonne part des relations sociales des convertis étaient structurées par l’une des deux Églises dominantes, catholique (comme aux Marquises) ou protestante (comme aux îles Sous-le-Vent)[16]. En revanche, la multiplication des rassemblements (à l’échelle d’un archipel ou de toute la Polynésie française, comme lors des journées annuelles de la Pentecôte) et le développement important des assemblées en milieu urbain (agglomération de Papeete) ou semi-urbain (Taravao) à Tahiti font émerger une « famille » plus étendue au sein de laquelle peuvent se redéployer les logiques sélectives et affinitaires qui présidaient, avant la conversion, au choix des amis. La grande diversité des « services » et « ministères » au sein de chaque Église favorise cette sorte d’« appropriation volontaire des liens de parenté » (de Singly 1993 : 77) dans les limites d’un espace des relations « familiales » possibles : on se retrouve à quelques-uns pour prier dans la chapelle de l’hôpital le samedi matin, dans une chorale, autour d’un projet d’évangélisation dans les rues de Papeete ou pour une prière d’intercession au domicile d’un « frère ».

Cette seconde règle, qui veut qu’une relation interpersonnelle, au sein de la « famille » pentecôtiste, n’est authentique et heureuse que si elle est librement consentie et fondée sur des affinités réelles, agit en retour sur les liens familiaux « naturels ». Plusieurs convertis ont ainsi renoué volontairement avec un père ou une mère qu’ils n’avaient pas véritablement connus jusque-là, notamment parce qu’ils avaient été adoptés et élevés par un autre membre de la famille élargie (un cas fréquent en Polynésie française). On observe alors la réinvention d’une relation familiale-amicale, comme dans ce récit d’Anna, membre de l’assemblée de Faa’a :

Pendant ma conversion, depuis que je suis convertie, j’ai accepté le Seigneur dans mon coeur, c’est le mot « pardon » qui revient : pardonner à mon papa, à ma maman. […] Je suis allée demander pardon à la femme de mon papa [sa seconde épouse, qui n’est pas la mère d’Anna] […], elle était étonnée, elle en a parlé à mon papa et lui est venu me voir un jour, il m’a embrassée, il m’a dit « Anna, ça va? » et j’ai dit « oui, très bien », il m’a dit « ça se voit » et on a lié amitié.

Entretien du 6 décembre 2000

Enfin, la « famille » pentecôtiste est régie par un principe de mobilité, qui entraîne d’au moins deux façons une reconfiguration constante des relations interpersonnelles. Sur son versant le plus visible, cette mobilité apparaît comme une expression religieuse de la modernité, si l’on considère que « la césure entre l’univers de la tradition et celui de la modernité [intervient] au point (évidemment idéal) où l’évidence de la permanence [se transforme] en une vision du changement représenté comme progrès » (Hervieu-Léger 1993 : 241). La « vie chrétienne » est une marche et même une course (« si tu t’engages pour le Seigneur, tu es dans la course, si tu cours avec le Seigneur, tu vas y arriver »[17]) qui exige du rythme, de l’endurance et la volonté de toujours faire plus et mieux pour le service de Dieu. Désireux d’aller « plus loin », d’assurer des responsabilités plus élevées dans l’Église ou de connaître des expériences charismatiques plus intenses, beaucoup de fidèles pentecôtistes évoluent donc d’un cercle de relations à un autre et circulent au sein de réseaux affinitaires plus ou moins formalisés, qui comprennent notamment un « pentecôtisme des maisons » largement émancipé des appartenances institutionnelles. « Ils m’ont connu par des amis qui m’ont connu » explique l’animateur d’un de ces groupes, une formule qui résume bien la démarche de ces croyants dont on dit communément qu’ils sont « dans la recherche ».

L’envers de cette mobilité réussie, ce sont tous les « frères et soeurs » qui ont « chuté », se sont « refroidis » et ne fréquentent plus les assemblées qu’à de rares occasions, comme le spectacle de Noël ou la Pentecôte. La plupart de ces « refroidissements » apparaissent de prime abord comme des décrochages individuels face aux exigences du militantisme religieux et d’une orthopraxie rigoureuse. Mais ces retraits – plus ou moins temporaires – sont aussi le moyen ultime, pour les croyants qui se sentent « tiédir », de préserver l’illusion nécessaire (et en partie fondée) d’une communauté toujours en marche, enthousiaste et victorieuse. Cette mobilité « descendante » étant plus que compensée, au sein des assemblées de Dieu polynésiennes, par l’arrivée constante de nouveaux convertis (« bébés spirituels » qui attirent toutes les attentions et la sympathie des membres plus anciens), la « famille » pentecôtiste est finalement une famille en mouvement, en perpétuelle reconfiguration. Les « refroidis », dont on espère le retour mais avec qui les relations se distendent, les « frères et soeurs » que rapprochent un même « appel » vers de nouvelles expériences et les derniers venus dont il faut assurer la pleine conversion composent en fait un tableau de relations bien plus changeant que celui d’une communauté « familiale » épargnée par la révocabilité des liens sociaux ordinaires. La stabilité ne provient pas ici de la permanence des liens entre des membres donnés d’une même « famille », mais de la perpétuation d’un espace de sociabilité sécurisé où peuvent s’inventer des liens « familiaux » librement consentis.

De la fidélité enchantée à la désappartenance

La combinaison d’un encadrement institutionnel « invisible », d’un discours centré sur la relation personnelle avec Dieu et de cet espace de relations « familia-les » fluides a, sur le plan des rapports concrets des individus à l’institution, des conséquences équivoques que l’on peut résumer par trois figures idéal-typiques. La première est celle d’une fidélité enchantée à une Église, perçue comme « bien plus qu’une Église » : une communauté affinitaire où l’on aime à se retrouver. C’est la configuration recherchée par les responsables des assemblées de Dieu polynésiennes qui, sans concevoir tout à fait l’Église comme institution détentrice d’un monopole du salut, voient néanmoins en elle un lieu privilégié de communication avec Dieu, un espace ordonné où les manifestations surnaturelles restent soumises, en dernière instance, aux capacités de discernement des pasteurs. Mais la socialisation réalisée au sein des assemblées de Dieu produit aussi, sur un mode en partie paradoxal (non voulu) deux types de « mésappartenance » : la pratique religieuse devenant une « affaire privée » qui ne regarde que le croyant et son Dieu, on observe tout d’abord différentes formes de multi-appartenance, encouragées par la diversification croissante du champ pentecôtiste et le développement des réseaux de relations personnelles. Ainsi, certains membres des assemblées de Dieu sont encore des paroissiens de l’EEPF, « appartiennent » dans le même temps à des groupes hors Église ou même à des Églises concurrentes, comme l’Église du Plein évangile – une Église pentecôtiste nettement plus charismatique, rattachée à la First Assembly of God de Maui (Hawaii) – sans concevoir cette multiplication des affiliations comme une infidélité, puisque l’essentiel est de demeurer dans la grande « famille » des « frères et soeurs en Christ ». Enfin, les croyants les plus autonomes fréquentent les librairies chrétiennes, les sites Internet évangéliques et pentecôtistes, circulent dans les différents lieux du pentecôtisme polynésien mais ne s’engagent nulle part, de peur de voir leur communion personnelle avec Dieu contrainte par des routines et des conventions trop pesantes. Ils sont « spirituels, mais pas religieux »[18], préfèrent les concerts de musique « chrétienne » aux cultes dominicaux et se rapprochent ainsi d’une forme de désappartenance, comprise comme la condition ultime d’une vie spirituelle authentique.

Conclusion : désinstitutionalisation ou recomposition du religieux?

« La crise de la régulation institutionnelle » se traduit, selon D. Hervieu-Léger, par « un déplacement de la vérité du croire, de l’institution vers le sujet croyant » et par l’effondrement de la notion d’obligation religieuse (1993 : 243 et seq.). La socialisation observée au sein des assemblées de Dieu polynésiennes, centrée sur une relation « enchantée » entre l’individu et Dieu, témoigne tout à la fois de ce déplacement contemporain et des voies par lesquelles, en terrain pentecôtiste, l’institution peut conserver malgré tout un rôle déterminant quoique « invisible » dans la structuration de parcours personnels qui débordent fréquemment les frontières de l’Église et la notion d’appartenance. Comme le souligne S. Fath, l’alternative binaire entre le modèle institutionnel classique et une « religion en miettes » ne peut donc suffire à rendre compte de la diversité des formes sociales prises aujourd’hui par la religion (2005 : 325). Et le pentecôtisme est un terrain privilégié d’observation de cette recomposition contemporaine du religieux qui conjugue dynamiques associatives, mobilité et encadrement institutionnel.