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L’invitation de Jean-Paul II dans son encyclique Ut unum sint adressée « aux pasteurs et théologiens […] », « aux responsables ecclésiaux et leurs théologiens », afin qu’ils cherchent « ensemble », « dans un dialogue fraternel et patient, dans lequel nous pourrions nous écouter […] », une « forme concrète d’exercice de la primauté […] » ou « les formes dans lesquelles ce ministère pourra réaliser un service d’amour reconnu par les uns et par les autres » (nos 95 et 96), a connu un grand retentissement. Des colloques et des publications, dans les diverses Églises chrétiennes ou sur le plan oecuménique ont voulu répondre à cet appel. R. Pesch, exégète et professeur aux universités de Francfort et de Fribourg-en-Brisgau, apporte ici sa contribution à ce débat. Il reprend, dans une version revue et augmentée, la communication qu’il avait donnée sur le sujet au colloque tenu à Rome en 1996. Sa perspective est d’examiner les fondements bibliques de ce ministère primatial du successeur de Pierre.

Ce qui distingue cette étude de toutes les autres, c’est le fait de considérer la Bible comme un ensemble cohérent, car, dit-il, « le texte final n’est pas pour l’exégèse biblique telle péricope particulière, ni même tel écrit particulier d’un auteur de l’Ancien ou du Nouveau Testament, […], mais le canon […] » (p. 18). « C’est le texte final, et le monde de signification qu’il représente, qui doit être interprété », qu’il faut interroger et c’est là qu’il faut rechercher « la “volonté de l’auteur” ecclésial qui sous-tend le canon, c’est-à-dire la volonté rédactionnelle qui a constitué l’Ancien et le Nouveau Testament comme un texte qui fait un tout » (p. 19). Or, suivant Pesch, le dépassement de l’analyse des péricopes particulières ou des textes particuliers pour embrasser l’ensemble du texte comme unité littéraire est le fruit d’un tournant méthodologique qui a « commencé à se dessiner depuis l’introduction de la méthode de la critique rédactionnelle et l’apparition du structuralisme ». Et, d’ajouter, « l’exégète doit bien sûr toujours se préoccuper, de façon historique et critique, de toutes les étapes préalables de la rédaction du texte. Il ne doit toutefois pas les considérer pour elles-mêmes mais en ce qu’elles constituent un outil pour la juste compréhension du texte final » (p. 18).

Cette position méthodologique, on le devine, le conduit à relire des passages du Nouveau Testament dont l’interprétation, principalement à partir de l’approche historique et critique, est disputée depuis des années, sinon des siècles. Cet ouvrage de théologie biblique — plus que d’exégèse — a la limite, comme le fera remarquer B. Sesboüé dans la postface (p. 167-168), d’isoler Pierre du collège des douze et de ne pas suffisamment situer sa vocation et sa mission dans celle des douze. Une contribution suggestive qui ajoute un élément au dossier déjà riche sur cette question.