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Lors de la première prise en main, mon intérêt se porta sur la table des matières qui brasse de manière exhaustive l’ensemble des points touchant au monde du tourisme culturel/ patrimonial : histoire, présentation des acteurs, offres touristiques et leurs fréquentations ainsi que l’économie et la gestion qui en découlent. La succession des numéros de pages laisse deviner une concision dans les sujets traités.

Cette nouvelle édition de Tourisme et patrimoine est l’actualisation des deux précédentes éditions 1 . Valéry Patin analyse, dans cette dernière édition, la relation entre tourisme et patrimoine. Dès l’introduction, il spécifie (en note de bas de page) et définit clairement la position qu’il prend dans cet ouvrage. Cette dernière s’articule autour d’une différenciation entre « tourisme culturel » et mise en tourisme du patrimoine pour s’intéresser plus spécifiquement « aux problèmes concrets et quotidiens que posent la protection, la mise en valeur et la gestion touristique du patrimoine monumental, muséal, naturel et événementiel » (p. 11). Les lieux patrimoniaux sont soumis, d’une certaine manière, à une gestion financière de plus en plus accrue par la mise en place de politique d’augmentation des taux de fréquentation, ceci porté par une vision du « tourisme culturel » comme moteur des économies locales, cela n’est pas sans conséquence sur les sur les modalités de gestion des biens culturels et sur leur représentation. Pour l’auteur, à travers des exemples concrets en France, en Europe et à l’international, montre que le tourisme patrimonial est devenu un produit standard de consommation et que sa gestion se rapprocherait donc soit du monde de l’entreprise, soit par répulsion aux principes du développement durable.

L’ensemble de l’ouvrage est un bel exercice de synthèse et permet de comprendre la complexité du lien qui existe entre patrimoine et tourisme. Les trois premiers chapitres présentent, à la fois, un bref historique du tourisme culturel, la globalité de l’offre touristique culturelle, et la façon dont les différents acteurs, organisations internationales (OI), non-gouvernementales (ONG), étatiques, régionaux mais aussi privés œuvrent au sein du monde patrimonial. Les trois derniers chapitres s’insèrent dans les étapes qui guident la mise en place des politiques de gestion touristique pour expliquer comment les acteurs, à travers les offres qu’ils proposent, tirent profit de la mise en tourisme du patrimoine culturel ou naturel. Sans oublier une présentation de la gamme d’outils d’expertise dont peut-être ces acteurs disposent pour analyser les retombées économiques et sociales sur les fréquentations du patrimoine et leurs effets. Il en résulte donc un ouvrage fortement scindé, en parties et sous-parties, mais le propos n’en est pas altéré et expose clairement les manières de faire et d’agir. Bien que l’ouvrage ne soit pas un manuel technique, il permet de prendre conscience des outils de gestion touristique du patrimoine et s’adresse avant tout à un public novice ou tout du moins curieux.

De plus, l’écriture a l’avantage d’être neutre, exception faite sur le maintien d’un propos souvent critique, de l’introduction à la conclusion, Valéry Patin prend position sur la dénaturation, du paysage naturel et culturel, qui affecte les patrimoines, mais également sur la dégradation de l’offre et de l’accueil des touristes. Cette situation serait engendrée par de multiples causes, comme le recul de l’aide publique ou la croissance des besoins financiers, et donc de la nécessité, pour les gestionnaires, d’augmenter la rentabilité du patrimoine en tentant d’accroître la fréquentation touristique. Cette gestion, proche du monde de l’entreprise, est discréditée au regard de celle qui se targue d’être respectueuse de l’environnement culturel et naturel. Cette dernière est, pour l’auteur, la situation la plus adéquate pour la mise en tourisme et la gestion touristique, car elle permettrait de limiter les problèmes de dégradation et de dénaturation. De part en part de l’ouvrage, l’auteur soulève des questions pertinentes, sans y apporter de réponse précise, notamment sur la notion d’authenticité des biens culturels.

Toutefois, l’auteur offre peu d’ouvertures quant aux questions de mise en tourisme et de gestion touristique du patrimoine à l’international, et notamment dans les pays dits en développement, et se cantonne à une grande majorité d’exemples en France et en Europe. Les patrimoines culturel et naturel sont devenus un nouvel enjeu stratégique de développement social, économique mais aussi identitaire sur les plans international et régional pour les pays en développement. Depuis plusieurs années, nous voyons un grand nombre d’OI, comme l’Organisation mondiale du tourisme (OMT) avec le Programme des Nations-Unies pour le développement (PNUD), et d’ONG, soutenir des programmes nationaux de gestion touristique culturel/patrimonial en favorisant le développement intégré des populations locales, souvent dans l’espoir de réaliser les Objectifs du millénaire pour le développement. Cette nouvelle évolution des politiques de gestion touristique est, également, de plus en plus présente dans les offres de formations universitaires et professionnelles en France. Il serait intéressant dans les prochaines éditions de voir apparaître un chapitre sur cette thématique, afin d’en montrer les principes de mise en tourisme du patrimoine et de sa gestion dans les pays en développement, et donc d’offrir au public estudiantin une meilleure connaissance de base du monde patrimonial.