Recensions

Génération MBC. Mathieu Bock-Côté et les nouveaux intellectuels conservateurs de Frédéric Boily, Québec, Presses de l’Université Laval, 2022, 193 p.

  • Jean-Pierre Couture

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Mathieu Bock-Côté (MBC) mène un combat contre le pluralisme sous toutes ses formes depuis vingt-cinq ans. Dans son étude, le politologue canadianiste Frédéric Boily s’intéresse au MBC parvenu, adoubé par les éditions du Boréal à partir de 2007. Il délaisse toutefois ses textes antérieurs même si ceux-ci restent en phase avec les manies actuelles de la star de Québecor et de CNews qui mettent « au banc des accusés essentiellement le multiculturalisme et la rectitude politique, lesquels découleraient d’une gauche pluraliste et multiculturelle occidentale » (p. 41-42). Loin d’être nouvelle, cette rhétorique des « nouveaux intellectuels conservateurs » dont MBC est la « figure de proue » (p. 2) a certainement remporté quelques manches. Elle est reprise au sein du gouvernement de la Coalition avenir Québec qui va même jusqu’à intégrer la marque MBC à ses stratégies de communication. En effet, remarque Boily, « le seul fait que l’actuel premier ministre puisse se réclamer aussi ouvertement de Bock-Côté témoigne à sa face même des changements qui sont survenus au cours de la décennie 2010, alors qu’aucun chef de parti n’aurait ouvertement osé, comme l’a fait [François] Legault, recommander de tels livres » (p. 16). De tels livres sont tout aussi appréciés par Boily qui considère que l’ascension de MBC s’explique avant tout par la force de ses idées. Leur auteur ne vivrait pas seulement du commentariat médiatique, mais il se serait « aussi imposé dans le champ intellectuel avec des ouvrages de calibre » (p. 3). Cette lecture généreuse des opus inclus au corpus primaire (dont on ne connaît pas la méthode de composition) contraste cependant avec les nombreuses réserves émises envers la littérature secondaire dont Boily n’apprécie pas les travaux. Cette méthode d’analyse textuelle, moins explicative que compréhensive, n’est heureusement ni béate ni hagiographique. Elle formule même plusieurs critiques qui forgent l’intérêt d’un tel ouvrage. Spécialiste de l’histoire de la pensée conservatrice au Canada, Boily fait valoir son érudition et sa largeur de vue historique pour mettre en question deux motifs d’autopositionnement chez MBC : la défense de la « démocratie libérale » et de la « tradition conservatrice ». La première se greffe à la revendication de l’héritage de Raymond Aron ; la seconde, à une sorte de posture sceptique envers les excès de la modernité. Prenant note de ces étiquettes revendiquées, Boily les passe au test de validité et au détecteur de non-contradiction. À propos du libéralisme aronien, Boily compile au chapitre deux la série d’entorses qui doivent lui être appliquées pour tenter de le tirer du côté du nationalisme conservateur. D’abord, son pragmatisme politique comme son pluralisme, y compris en matière religieuse, sont tout simplement ignorés. Il en est de même, ensuite, à propos de sa position intrinsèquement libérale, en dernière instance, « voulant que chaque individu choisisse la voie qu’il croit la meilleure » (p. 65). L’écart se creuse enfin quant au culte que réserve MBC à Charles de Gaulle. À la fin des années 1960, Aron a vertement critiqué l’autoritarisme du président français qui se comportait « de manière bien peu libérale » (p. 149). Nous ajouterions que, en sus de ces faits rapportés par Boily, Aron était fort inquiet de la position plutôt antisioniste de l’homme d’État qui, dans le sillage de la guerre des Six Jours, risquait d’exposer la minorité juive de France à la recrudescence de l’antisémitisme. Évidemment, la furie antimarxiste d’Aron qui cracha des mots bien plus durs encore à l’endroit de la révolte étudiante de mai 1968 a tout pour plaire à MBC. Or, si Aron « sert de caution idéologique » (p. 70), il demeure, comme le dit …