Recensions

Mireille Estivalèzes, La fin de la culture religieuse. Chronique d’une disparition annoncée, Montréal, Les Presses de l’Université de Montréal (coll. « Matière à pensée »), 2023, 348 p.

  • Jean-François Lapierre

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  • Jean-François Lapierre
    Université Laval, Québec

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Couverture de Michel Foucault et la théologie politique, Volume 79, numéro 3, 2023, p. 327-497, Laval théologique et philosophique

Dans La fin de la culture religieuse : Chronique d’une disparition annoncée, Mireille Estivalèzes propose une interprétation critique et bien informée de la courte histoire du programme Éthique et culture religieuse dans les écoles du Québec. En effet, à peine douze ans après son instauration aux niveaux primaire et secondaire, le ministre de l’Éducation annonce en 2020 une révision en profondeur du programme, avant de dévoiler, presque deux ans plus tard, « […] le projet d’un nouvel enseignement intitulé Culture et citoyenneté québécoise, pour remplacer le cours ECR » (p. 9). Ce sont précisément les raisons de cette décision, qu’elle qualifie de politique, que l’auteure cherche à exposer dans les deux parties de cet ouvrage. La première partie, intitulée « Un objet d’enseignement qui dérange », est consacrée à l’étude de l’opposition que rencontre le volet culture religieuse du programme, et ce, avant même sa mise en place dans les écoles. Selon la typologie employée par Estivalèzes, cette opposition est formulée au nom d’arguments de nature religieuse, de nature nationaliste et enfin de nature laïque et féministe. Révélatrices du rapport ambivalent des Québécois à la religion, les critiques adressées au programme ECR nous informent davantage, selon l’auteure, « […] sur les inquiétudes et les peurs de ses détracteurs que sur ce que le programme lui-même est réellement » (p. 13). Par ailleurs, les dénonciations du programme ECR par les acteurs des camps nationaliste, laïque et féministe illustrent bien, selon elle, certains travers de notre époque, à savoir « […] la montée en puissance de la militance qui tend à se substituer à l’analyse scientifique, la logique complotiste, de même que la polarisation des débats » (p. 199). Avant d’examiner l’opposition multiforme que rencontre le programme ECR et pour tenter d’en donner des clés de compréhension, Estivalèzes propose une analyse du concept de laïcité et de diverses conceptions de la liberté de conscience et de la liberté de religion. L’auteure explique que la nécessité d’une telle analyse tient au fait que ces conceptions conduisent à des manières fondamentalement différentes — voire opposées — de comprendre la laïcité et ses visées, à savoir, d’un côté « […] la garantie du pluralisme des convictions des citoyens et, de l’autre, […] une visée émancipatrice de la laïcité à l’égard du poids des religions pour ces mêmes citoyens » (p. 14). En ce qui concerne le Québec, Estivalèzes n’hésite pas à dire que sur le plan légal, au cours des dernières années, l’on assiste au passage d’une conception implicitement ouverte de la laïcité, dans laquelle s’inscrivait le programme ECR, à une conception de plus en plus antireligieuse de celle-ci (voir p. 81-82 et p. 214-215). Dans la deuxième partie du livre, intitulée « Naissance, vie, fin et transformation d’un programme », Estivalèzes invite en quelque sorte les lecteurs à entrer dans les coulisses de l’élaboration des programmes ECR et Culture et citoyenneté québécoise. L’on y apprend que le processus ayant mené au programme récemment annoncé aurait été déterminé par une logique de sondage de popularité et marqué par la précipitation et le manque de transparence, pour ne nommer que quelques expressions employées par l’auteure (p. 206, 248). En somme, les propos d’Estivalèzes ne sont pas tendres à l’égard du gouvernement actuel et de son ministre de l’Éducation, celui-ci en venant à adhérer, « […] sans aucun recul critique, aux discours critiques laïques et féministes, considérés comme les plus virulents, du programme ECR, confirmant par le fait même, s’il en était encore besoin, que tout le processus de consultation présentée comme citoyenne relevait d’une mascarade » (p. 276). L’enjeu de la proximité idéologique du gouvernement avec …