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François-Olivier Dorais, L’École historique de Québec. Une histoire intellectuelle, Montréal, Boréal, 2022, 495 p.

  • Jean Lamarre

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  • Jean Lamarre
    Sociologue

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Couverture de Québec-Chili, 1973-2023 : mémoire d’un coup d’État et d’une expérience de solidarité, Volume 31, numéro 1-2, été–automne 2023, p. 7-331, Bulletin d'histoire politique

L’histoire scientifique est apparue, tant à l’Université de Montréal qu’à l’Université Laval, à la fin des années 1940. On connaissait déjà, depuis quelques décennies, comment s’est effectuée cette gestation à l’Université de Montréal. Il était temps que quelqu’un effectue un travail similaire pour l’Université Laval et mette en relief le parcours de ses trois principaux représentants : Marcel Trudel, Fernand Ouellet et Jean Hamelin. À n’en pas douter, ce livre constitue un apport intellectuel important. Pour la première fois, le cheminement de ces trois historiens est présenté de manière approfondie. L’auteur commence par rappeler que la naissance de l’historiographie universitaire – tant à Laval qu’à Montréal – se structure « autour de la tentative d’expliciter les causes de l’infériorité économique, sociale et politique des Canadiens français » (p. 10). Une même question aboutit à deux interprétations principales, lesquelles se partagent le champ des réponses possibles : il y aurait « les tenants d’une interprétation “néonationaliste” et ceux d’une interprétation néolibérale de l’histoire québécoise » (p. 11). L’auteur présente d’abord Marcel Trudel, dans l’enthousiasme de ses premières années, nouer des relations avec ses collègues de Montréal pour bâtir – avec eux – une histoire scientifique qui permettra de démystifier l’histoire providentielle antérieure. À cette époque, « Trudel partage aussi avec Michel Brunet un mépris pour le parti pris fédéraliste des jeunes sociologues de la Faculté des sciences sociales de Laval et pour leur scepticisme à l’égard du nationalisme canadien-français » (p. 101). Puis, curieusement, toute la démarche subséquente de Trudel reposera sur un rejet non équivoque du nationalisme canadien-français. Pour Dorais, « ce rapport critique au nationalisme […] peut s’expliquer par son désir de conclure des alliances stratégiques avec le monde universitaire anglo-canadien », pour qui le nationalisme canadien-français équivaut à un « ethnocentrisme revanchard » (p. 132). Au milieu des années 1960, il quitte l’Université Laval pour l’Université d’Ottawa, mais sa façon de travailler demeure la même. Il continue de « ramener le passé à l’exploitation du document » (p. 109), alors que « l’une des critiques les plus récurrentes » adressées à Trudel « est son déficit interprétatif » (p. 169). Se pourrait-il que Trudel n’ait fait qu’échanger un nationalisme pour un autre ? Lucien Febvre a déjà écrit : « On peut n’éprouver aucun sentiment patriotique, on ne peut pas ne pas appartenir à une nation. On peut la répudier. Elle peut vous rejeter. Dans les deux cas, on n’a d’issue qu’en s’incorporant à une autre nation ». Finalement, Trudel ne s’avance pas sur les causes de l’infériorité économique, sociale et politique des Canadiens français. Fernand Ouellet, pour sa part, est beaucoup plus explicite à ce sujet. Pour ce dernier, « la persistance des structures mentales d’Ancien régime chez les Canadiens français est à la source de leur incapacité à faire face aux défis conjoncturaux du capitalisme et, conséquemment, à s’engager sur la voie du progrès » (p. 254-255). Fernand Ouellet aurait eu, selon Dorais, cette « intuition » « quant au pouvoir explicatif des facteurs psychologiques et mentalitaires en histoire, [qui] représente une ligne interprétative de fond dans son oeuvre » (p. 255). Pour appuyer davantage son propos, Ouellet va également faire appel à l’orthodoxie conceptuelle exposée par des sociologues européens comme Werner Sombart ou Max Weber. L’historien Guy Frégault a déjà fait savoir ce qu’il pensait de cette « intuition » : « Il n’est réellement pas nécessaire d’exciper de Sombart, de Weber, de Tawney et des Annales pour la présenter comme une révélation : elle est sortie tout armée, il y a longtemps, du puissant cerveau de Parkman, d’où elle a abouti chez M. Mason …

Parties annexes