Corps de l’article

Introduction

Au Québec, l’éligibilité à l’assurance médicale publique est notamment liée au type de statut migratoire (Gouvernement du Québec, s. d.). Certaines personnes possédant un statut migratoire temporaire autorisé (comme les visiteurs, les étudiants internationaux exclus des ententes de sécurité sociale et les travailleurs ayant un permis de travail ouvert) et celles sans statut migratoire autorisé se voient refuser l’accès à la couverture médicale publique (CIUSSS du Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal, 2019). En 2020, on estimait que 50 000 à 70 000 personnes (0,59 % à 0,83 % de la population du Québec), tous statuts migratoires confondus, ne possédaient pas d’assurance médicale (Cleveland, Hanley, Jaimes et Wolofsky, 2020). La précarité économique de beaucoup de personnes migrantes sans assurance médicale se traduit par des difficultés, voire une impossibilité, à souscrire à une assurance privée (Magalhaes, Carrasco et Gastaldo, 2010). L’offre de soins de santé sans frais à Montréal se limite à quelques organismes communautaires, dont Médecins du Monde (Médecins du Monde, s. d.). L’inaccessibilité des soins de santé dans le réseau public de santé est en lien avec de multiples barrières d’accès liées, entre autres, aux complexités administratives auxquelles sont confrontées les personnes migrantes sans assurance médicale (Belaid, Benoit, Kaur, Lili et Ridde, 2020; Brabant et Raynault, 2012b; Hacker, Anies, Folb et Zallman, 2015), à la méfiance à l’endroit des travailleurs du réseau de la santé (Belaid et al., 2020) et aux coûts prohibitifs pour accéder à des soins de santé (Ministère de la Santé et des Services sociaux, 2016). Toutefois, depuis l’entrée en vigueur de la loi 83 sur l’accès à la Régie de l’assurance maladie du Québec (RAMQ) en septembre 2021, tous les enfants mineurs dont la famille a l’intention de rester au Québec plus de 6 mois ont accès à la couverture RAMQ, sauf les enfants demandeurs d’asile, qui bénéficient de la couverture du Programme fédéral de santé intérimaire (PFSI) (Médecins du Monde, 2021).

Dans leur étude sur les migrants sans assurance médicale résidant à Montréal, Ridde et ses collaborateurs (2020) suggèrent que l’absence d’assurance médicale est associée à une proportion élevée (70 %) de besoins non comblés en matière de soins de santé. Ainsi, ces personnes doivent renoncer à des soins médicaux non seulement parce qu’elles ne possèdent pas d’assurance médicale, mais aussi pour des raisons financières et, dans une moindre mesure, parce qu’elles craignent d’être dénoncées aux autorités. L’inaccessibilité aux soins se traduit par des délais de consultation (Brabant et Raynault, 2012a) menant à des complications (Hynie, Ardern et Robertson, 2016; Magalhaes, Carrasco et Gastaldo, 2010; Seto Nielsen, Goldstein, Leung, Lee et Buick, 2019) et à des décès évitables au sein de la population migrante sans assurance médicale (Ruiz-Casares et al., 2013). Selon une autre étude récente, une proportion élevée de personnes migrantes sans assurance médicale perçoivent plus souvent leur santé de façon négative (Cloos et al., 2020). Dans cette étude, les variables y étant associées sont, mis à part les besoins en soins non comblés, l’éducation, le revenu, l’origine, le racisme subi, le type de réseau social, un logement insalubre et la détresse mentale. La corrélation de certaines de ces variables avec la santé perçue négativement varie en fonction du genre. Ainsi, la question du statut migratoire – qu’il soit temporairement autorisé ou non – met en jeu un ensemble de circonstances rendant la situation de ces personnes médicalement, socialement, économiquement et politiquement précaire (Brabant et Raynault, 2012a). En d’autres mots, la santé des personnes migrantes sans assurance médicale est non seulement liée à l’absence d’assurance médicale mais aussi à leur précarité socio-économique, dont le statut migratoire constitue l’une des composantes (Cloos et al., 2020; Gautier, Casseus, Blanc et Cloos, 2020).

En mars 2020, le Gouvernement du Québec déclarait l’état d’urgence sanitaire dans la province canadienne à la suite des premiers cas déclarés de COVID-19. Depuis le début de la pandémie, les services offerts en lien avec la COVID-19 (soins médicaux, dépistage, vaccination, etc.) sont en principe offerts à tous, indépendamment de l’éligibilité à une assurance médicale (Canadian Institute for Identities and Migration, 2020; Régie de l’Assurance Maladie du Québec, 2020). Toutefois, l’application des mesures rendant universel l’accès au dépistage et aux soins liés à la COVID-19 ne semble pas être constante ni uniforme entre les établissements du réseau de la santé (Canadian Institute for Identities and Migration, 2020; Cleveland et al., 2020). Ainsi, dans le contexte de la pandémie, différentes publications suggèrent que les communautés culturelles, dont des personnes migrantes sans assurance médicale (Cleveland et al., 2020; Côté et al., 2021), sont parmi les groupes de population risquant d’être les plus affectés sur les plans sanitaire et socio-économique (Adrien, Markon et Springmann, 2020; Médecins du Monde, 2020; Page, Venkataramani, Beyrer et Polk, 2020; Razai, Kankam, Majeed, Esmail et Williams., 2021). Constatant l’importance de s’intéresser aux enjeux rencontrés par les personnes migrantes sans assurance médicale, nous présentons dans cet article les résultats d’une étude qualitative visant à discuter de l’expérience vécue des personnes migrantes sans assurance médicale, avec ou sans statut, pendant la pandémie de COVID-19 à Montréal (Canada), en lien avec leur position sociale, à l’intersection avec leur statut migratoire, leur revenu, leurs conditions d’emploi et leur genre.

Méthodologie

Contexte de l’étude et échantillonnage

De mai à octobre 2020, des entretiens semi-structurés ont été menés auprès de 19 personnes migrantes sans assurance médicale vivant à Montréal. Par souci de cohérence, des critères de sélection similaires à ceux utilisés pour la recherche-parent à ce projet (Pilabré, 2018) ont été choisis. Un échantillonnage théorique par choix raisonné a été utilisé afin d’obtenir une variation maximale lors de l’identification des participants (Hunt, 2009; Thorne, Kirkham et MacDonald‐Emes, 1997). Toutefois, comme il est reconnu que les personnes migrantes sans assurance médicale sont difficilement atteignables en recherche – particulièrement dans un contexte de restrictions sanitaires comme celui associé à la COVID-19 – la méthode boule de neige (Schutt, 2011) a été utilisée pour compléter l’échantillon. Une première phase de recrutement a eu lieu à distance lors de la première vague de la pandémie. Durant cette première phase, 12 participants, dont 2 recrutés par boule de neige, ont été sélectionnés à partir des réseaux sociaux et avec la collaboration d’organismes communautaires. Une seconde phase de recrutement a permis de recruter 7 autres participants, directement à la clinique pour personnes migrantes à statut précaire de Médecins du Monde à Montréal.

Collecte de données

Les entretiens, menés à distance, ont été faits par le biais de la plateforme Zoom ou par téléphone, selon la préférence des participants. Un guide d’entretien a été développé, adapté pour le contexte de la COVID-19 à partir de celui utilisé par Pilabré (2018) dans le cadre d’une étude qualitative auprès de personnes migrantes sans assurance médicale à Montréal, afin de s’assurer que les données recueillies répondaient aux objectifs de recherche. Le guide d’entretien, incluant des questions principales ainsi que des questions complémentaires et de clarification, abordait les thèmes suivants : l’expérience migratoire; l’expérience en contexte de COVID-19; les problèmes de santé vécus; l’utilisation (ou non) des soins de santé dans le contexte de la COVID-19 ainsi que les ressources ou services consultés; les conséquences liées à une absence d’utilisation ou à un délai dans l’accès aux soins de santé et enfin les recommandations pour améliorer l’accès aux soins de santé pour les personnes migrantes sans assurance médicale. La majorité des entretiens (18/19) ont été menés en français ou en anglais. Une rencontre a eu lieu en créole, grâce au soutien d’une collaboratrice créolophone associée au projet. La durée des entretiens a varié entre 30 et 78 minutes. Des notes de terrain, un journal réflexif et la transcription intégrale des verbatim ont été rédigés à la suite de chacun des entretiens avec les personnes rencontrées. Cette proximité avec les données recueillies aura été favorable à la familiarisation avec les données collectées et à leur analyse (Braun et Clarke, 2006; Thorne, 2016).

Approche d’analyse et cadre de recherche

Cette recherche qualitative adopte une approche d’analyse descriptive interprétative inspirée de Thorne (Thorne, 2016; Thorne et al., 1997) et de Braun et Clarke (2006). Conformément à cette approche, une méthode d’analyse thématique a été choisie afin d’identifier des thèmes centraux dans les données recueillies pour en faciliter l’analyse et l’interprétation. Le logiciel QDA Miner a été utilisé afin de guider l’analyse des données. Une première phase de codification inductive a été réalisée avec l’entièreté des transcriptions, comme le suggère Thorne (2016). Un dictionnaire de codification a été rédigé afin de sélectionner les codes, de les définir et d’en suivre l’évolution (Braun et Clarke, 2006). La seconde phase d’analyse, plus déductive, a été guidée par le Cadre des déterminants sociaux de la santé de l’Organisation mondiale de la santé (Solar et Irvin, 2010, adapté par Gautier et al., 2020, figure 1). Utiliser le cadre proposé par Gautier et al. (2020) lors de l'analyse aura permis d'élargir et de préciser le regard posé sur les déterminants structuraux proposés par le cadre original de Solar et Irvin (2010). En effet, Gautier et al. (2020) mettent de l'avant des déterminants structuraux jusqu'ici absents, dont les politiques migratoires, le statut migratoire et la langue. Cette approche de codification hybride a été favorable à l’identification de thèmes ancrés dans les propos des participants, tout en reflétant les contextes sociaux, politiques, économiques et culturels dans lesquels ceux-ci évoluaient (Braun et Clarke, 2006).

Le Cadre des déterminants sociaux de la santé a permis de guider l’analyse pour approfondir la compréhension de l’impact de la pandémie de COVID-19 sur les enjeux d’équité et l’exclusion qui ont été vécus par les personnes migrantes sans assurance médicale. Dans les entretiens, les rapports horizontaux entre les déterminants structuraux incluant les politiques sociales, publiques et la position sociale ont été analysés de façon déductive à la lumière de ce cadre théorique. La position sociale est entendue comme la place que les gens occupent dans la hiérarchie sociale en fonction de leur statut migratoire, de leur statut socio-économique, de leur lieu de naissance, de leur genre, de leur l’âge et de la langue parlée.

Figure 1

Cadre des déterminants sociaux de la santé

Cadre des déterminants sociaux de la santé
Source : Solar et Irvin, 2010, p. 6

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Considérations éthiques

Le projet 20-026-CERSES-P (1) a été approuvé par le Comité éthique de la recherche en sciences et en santé de l’Université de Montréal (CERSES). Une attention particulière a été portée au respect de la confidentialité et à l’anonymisation des données, compte tenu du statut migratoire précaire des participants. Le choix d’utiliser une plateforme en ligne pour les entretiens et pour l’enregistrement a été étudié avec le comité éthique. Les entretiens ont été enregistrés à l’aide d’un logiciel libre et hors ligne (Open Broadcaster Software) pour assurer un maximum de confidentialité. Le consentement verbal des participants a été obtenu avant chaque entretien.

Résultats

L’échantillon se compose de 19 participants (10 femmes et 9 hommes). Le tableau 1 présente les caractéristiques sociodémographiques fournies par les répondants. L’analyse des entretiens démontre que la position sociale des participants, en particulier leur statut migratoire, fragilise leurs conditions de vie. Nous avons développé trois thèmes principaux afin de mettre en exergue les façons dont leur statut migratoire interagit avec leur situation financière, leurs conditions de travail et leur genre pour moduler leur accès aux soins de santé lors de la pandémie de COVID-19. Des pseudonymes ont été assignés à chaque participant afin de conserver leur anonymat.

Tableau 1

Caractéristiques sociodémographiques des participants

Caractéristiques sociodémographiques des participants

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Statut migratoire et revenu : précarité financière et exclusion sociale

Nos analyses montrent que la majorité des étudiants internationaux et des personnes sans statut migratoire autorisé ayant participé à notre étude vivaient en situation de précarité économique avant la crise sanitaire. L’arrivée de la pandémie a contribué à la perte d’un emploi ou d’un revenu chez la plupart des participants, indépendamment de leur statut migratoire. Ainsi, pour les étudiants internationaux (ÉI), comme Idris, les opportunités d’emploi et les offres de contrats de recherche sont devenues moins fréquentes. Les revenus sur lesquels il comptait pour subvenir aux besoins de la famille ont même disparu.

When the COVID started, really, a lot of things were affected, I can't go anywhere to work, even if I want to struggle for at least part time to have more money to support my family, but I can't do that.

Idris, 25-35 ans, ÉI, bonne perception de la santé, mauvaise pour femme/enfants

La perte de revenu est aussi rapportée par des participants sans statut migratoire autorisé qui vivent un défi supplémentaire : l’absence de soutien financier. Dans le nouveau contexte de la pandémie, la précarité économique est accentuée par leur exclusion des politiques de sécurité sociale comme la Prestation canadienne d’urgence (PCU) qui a assuré un revenu minimal garanti aux personnes bénéficiant d’un permis de travail, mais qui n’a pas été offerte aux personnes sans statut autorisé. C’est le cas de Moussa, sans statut (SS), qui vit et travaille au Québec depuis 27 ans. N’ayant pas de statut migratoire autorisé, il ne bénéficie d’aucun soutien financier de la part du gouvernement à la suite d’une mise à pied. Pour plusieurs participants, dont Moussa, l’impossibilité de recourir au soutien du gouvernement ou de dénoncer un employeur lors de mises à pied sans compensation sont des véritables enjeux de survie.

Le travail a été coupé et il n’y a pas de travail en ce moment. Surtout pour les gens qui... c’est pas officiel, tu n’as pas un permis de travail, tu n’as rien, t’es sous la table, t’es comme : "Qu’est-ce que je fais pendant ce temps-là?" Je n’ai pas de revenu. Je ne peux pas demander de l’aide du gouvernement non plus.

Moussa, 45-54 ans, SS, bonne perception de la santé

Un seul participant parmi les répondants sans statut autorisé évoque de nouvelles opportunités de travail avec la crise sanitaire. Alors qu’il travaillait initialement dans le domaine de la construction, il trouve un nouvel emploi dans le secteur de l’hygiène et de la salubrité grâce à la pandémie.

Avec la pandémie, je travaillais plus qu’avant! Et je peux dire que si je perdais mon travail, j’étais vraiment préoccupé. Si on arrête le travail, si la personne me dit bye-bye. […] J’évitais de faire les discussions avec les gens... maintenant je peux dire ok, je peux m’exprimer plus, je peux m’exprimer, si je ne suis pas content pour ça ou... admettons... s’il me dit bye-bye, ben... je peux avoir un deuxième travail en désinfection ou nettoyer.

José, 45-54 ans, SS, bonne perception de la santé

L’expérience de José illustre que le contexte de la COVID-19 semble lui offrir la capacité de pouvoir choisir un nouveau travail dans un nouveau secteur d’activité. En effet, de nouvelles opportunités lui permettent pour la première fois d’envisager une démission en cas d’insatisfaction. Cela étant dit, son revenu ne semble pas s’être amélioré. Son témoignage met aussi en lumière la précarité à laquelle font face les personnes sans statut migratoire autorisé en lien avec ce type de travail. Cette précarité peut renforcer la crainte de perdre son travail, et la loi du silence qui y règne. Ces résultats suggèrent que la relation entre statut migratoire et situation d’emploi peut moduler l’expérience sociale des migrants sans assurance médicale en contexte de pandémie.

Statut migratoire et conditions de travail : sécurité au travail et pouvoir de revendication

La peur de contracter la COVID-19 est réelle pour la plupart des participants rencontrés. En réponse à la pandémie, la majorité des employeurs ont instauré des précautions à plus ou moins grande échelle pour assurer la protection de leurs travailleurs, qu’ils aient ou non un statut autorisé. Malgré cela, les personnes sans statut semblent être celles dont l’emploi les place le plus à risque de contracter la COVID-19. L’employeur de Rafael, qui a un permis de travail ouvert (PTO), met un maximum de mesures de protection en place.

Il recevait les mémos, les masques étaient fournis pour le personnel, il se lavait les mains, ils fournissaient les gants. Il doit travailler avec les gants, c’est obligatoire, les lunettes pour travailler, c’est obligatoire.

Conjointe de Rafael, 35-44 ans, PTO, mauvaise perception de la santé

Au contraire de Rafael, Sydney n’a pas bénéficié de soutien de son employeur pour assurer sa protection contre le virus.

I didn't really get protection from them, they just... I have to protect myself; they just give me a little mask like this and that's it!

Sydney, 45-54 ans, SS, bonne perception de la santé

Le témoignage de Sydney est révélateur de potentielles exacerbations de la vulnérabilité en milieu de travail pour les personnes sans statut migratoire autorisé. Le désengagement de son employeur face aux mesures de prévention des infections qui devraient être mises en place en constitue un exemple. Cette citation suggère effectivement que le statut migratoire est particulièrement déterminant pour les conditions de travail, celles-ci étant moins sécuritaires pour les personnes sans statut migratoire autorisé.

Ce sont également majoritairement les participants sans statut autorisé qui rapportent avoir subi le plus de situations d’abus ou de négligences pour leur sécurité avant la pandémie. C’est le cas de Maria, qui n’a pas pu faire de réclamation face à un congédiement de son employeur à la suite d’un accident de travail.

J’ai perdu mon travail en décembre [2019]. Je travaillais avec une personne, un homme, euh... riche. C’est à moi de sortir de la maison pour nettoyer la maison et j’ai glissé et suis tombée, je me suis frappée très fort.

Maria, 55-64 ans, SS, mauvaise perception de la santé

La loi du silence qui semble régner est aussi évoquée par José lors de ses rapports à son employeur et aux collègues au quotidien.

J’étais préoccupé à l’idée de perdre mon travail, si on m’arrêtait de travailler, par exemple si la personne [l’employeur] me disait bye-bye. Après [...] par exemple, j’évitais de faire des discussions avec les gens [l’employeur ou le personnel].

José, 45-54 ans, SS, bonne perception de la santé

Comme ils souhaitent éviter d’attirer l’attention, aucun des participants rencontrés ne dénonce les abus ou la négligence subis avant et durant la crise sanitaire. Comme Sydney le souligne, il doit plutôt mettre en place des mesures de manière individuelle afin de diminuer les risques pour sa santé. Par ailleurs, les nouvelles mesures de protection financière mises en oeuvre au début de la pandémie ne sont pas accessibles aux personnes vivant sans statut migratoire autorisé, et dans certains cas aux étudiants internationaux. Ils sont laissés sans filet social dans ce contexte. Certains participants sans statut migratoire autorisé et ayant un travail précaire pour lesquels dénoncer l’employeur n’est pas envisageable ont mentionné subir des abus de la part de leurs employeurs et demeurent sans ressource pour réagir. D’ailleurs, l’absence de revendications des personnes sans statut autorisé à cause de la crainte de représailles est amplement rapportée dans la littérature scientifique (Belaid et al., 2020; Rousseau, Ricard-Guay, Laurin-Lamothe, Gagnon et Rousseau, 2014). Cette réalité, spécifique aux personnes sans statut autorisé, est révélatrice du rôle central que joue le statut migratoire sur les conditions de travail et, par le fait même, sur la précarité socio-économique et, potentiellement, sur la santé.

Statut migratoire et genre : entre dépendance financière et manque d’accès aux soins

La majorité des participants à notre étude évoquant une situation de dépendance par rapport au conjoint déjà présente avant la pandémie étaient des femmes. La plupart de ces femmes ont connu un parcours migratoire similaire : elles ont en majorité suivi leur partenaire dans leur projet migratoire, soit pour des études ou à la suite de l’obtention d’un permis de travail. Depuis le début de la pandémie, ce sont les femmes qui ont été les plus touchées par une perte d’emploi ou de revenus, exacerbant leur dépendance vis-à-vis de leur partenaire. Cette perte d’autonomie peut créer des tensions au sein du couple, parce que le conjoint doit maintenant assumer seul le rôle de pourvoyeur et de protecteur du foyer dans un contexte de perte d’emploi ou de diminution des opportunités d’emploi. Pour Dayoto, étudiant international ayant vu les opportunités d’emploi et le revenu lui servant à soutenir sa famille s’évaporer rapidement, l’inquiétude est palpable.

It has been a challenge, I try as much as possible to manage the situation. I have to… take money back home, and you know...money back home to pay my rent and... tuition which is very challenging especially with the PhD I'm doing. The money I'm earning I have to pay tuition fees […] It's meant for only one person; it's not meant for 4. So... It has been the challenges of not having enough money to pay rent, enough money to feed.

Dayoto, 35-44 ans, ÉI, très bonne perception de la santé

Pour les hommes sans statut tenant un rôle de conjoint ou de chef de famille, les difficultés pour subvenir aux besoins du ménage semblent similaires à ceux ayant un statut autorisé, mais ils rencontrent également un enjeu supplémentaire : le manque d’accès à un système de protection sociale du fait de leur absence de statut autorisé au Canada. Pour ces participants, le discours est aussi empreint du sentiment d’avoir failli à leur tâche de pourvoyeur du foyer.

Ça fait presque 8 semaines sans travailler pour moi, c’est beaucoup […], mais n’avoir pas d’aide sociale, quelque chose comme ça... c’est difficile et... même moi... je suis capable de dire à ma femme que je ne peux pas travailler... payer le loyer.

José, 45-54 ans, SS, bonne perception de la santé

Pour la plupart des femmes qui ont immigré avec leur conjoint, c’est ce dernier qui a accès à une assurance médicale, alors qu’elle leur est inaccessible. Ainsi, la nécessité de recevoir l’aval de leur conjoint pour recourir à des soins de santé est mentionnée par plusieurs femmes. La dépendance envers leur conjoint sur le plan économique pour l’obtention de soins mène à des délais, au renoncement à certains soins et à un stress au sein du couple. Les femmes vivent alors de fortes inquiétudes face aux coûts qui pourraient être engendrés par des problèmes de santé ou lors d’une grossesse. Ces frais de santé doivent alors être assumés par le pourvoyeur du ménage. Toutefois, malgré cette inquiétude, les femmes qui ont un statut autorisé peuvent tout de même souvent compter sur le soutien de leur partenaire. C’est le cas d’Isabelle, une femme ayant un visa visiteur (VV), qui exprime une certaine reconnaissance envers son conjoint en lien avec le support émotionnel et financier associé aux frais pour des examens diagnostiques ou des traitements.

Je pense qu’il s’est un peu [pause]. Il y a un peu de frustration de ne pas avoir, de ne pas pouvoir, enfin de devoir mettre en suspens des trucs, mais clairement, franchement, si un matin je me lève et que ça va vraiment pas... les autres fois, il me disait "Si tu penses que ça va pas, on va aller consulter, c’est pas grave".

Isabelle, 35-44 ans, VV, bonne perception de la santé

En revanche, pour les femmes sans statut autorisé, l’accès aux soins semble encore plus compromis que pour les femmes ayant un statut autorisé. C’est le cas de Raymonde, qui attend la naissance de son troisième enfant. Ses conditions de vie sont précaires et sont devenues particulièrement critiques avec la crise sanitaire. Son conjoint a dû quitter la province pour trouver du travail à la suite d’un congédiement sans compensation financière en lien avec la pandémie de COVID-19. L’annonce de la grossesse dans le contexte a créé des tensions dans le couple. L’anticipation des coûts pour l’accouchement de Raymonde leur fait craindre le pire, alors qu’il est déjà difficile d’offrir plus de deux repas par jour à leurs enfants.

Fâché, parce qu’il sait que ça va être difficile, parce que quand on savait, on était juste en début de quarantaine, donc... c’était… c’était vraiment difficile. […] Il ne savait pas, comment… comment il allait gérer ça... parce que d’habitude il pouvait payer les échographies, les visites et tout ça, mais il… il savait depuis le début qu’il ne serait pas capable de payer.

Raymonde, 35-44 ans, SS, bonne perception de la santé

L’absence d’assurance maladie superposée à la précarité financière de leur ménage retarde les soins auxquels devrait avoir accès Raymonde. Au moment de notre rencontre, aucun soin et examen de routine n’avaient été faits pour assurer la santé de la mère et de l’enfant à naître, une situation potentiellement délétère. Bien que la nécessité d’améliorer l’accès aux soins de santé pour les femmes enceintes ait été soulevée bien avant la pandémie (Rousseau et al., 2014), le contexte de la COVID-19 met en lumière les lacunes engendrées par la transformation de l’offre de services, en particulier pour les migrants sans statut autorisé. En effet, les politiques d’accès aux soins liés à la COVID-19 mises en place durant la pandémie pour l’entièreté de la population ne prennent pas en compte le cumul de multiples déterminants sociaux de la santé, tels que le genre ou le statut migratoire.

Ainsi, le genre semble façonner l’expérience sociale et le rapport à la santé des personnes migrantes sans assurance médicale avant et durant la pandémie. Les hommes rapportent davantage de tensions relatives à leurs difficultés à maintenir leur rôle de pourvoyeur au sein du foyer. La pression causée par cette réalité semble plus difficile à supporter dans ce contexte, et entraîne des tensions psychologiques chez certains participants. Pour les femmes, la dépendance économique envers leur conjoint est ancrée dans leur expérience de santé et semble associée au manque d’accès aux soins de santé. Les frais à assumer pour recevoir des soins dans le réseau public de santé leur imposent de se tourner vers un proche, généralement leur conjoint, pour obtenir les fonds nécessaires au paiement des factures. Ces difficultés, tant chez les hommes que chez les femmes, semblent être encore exacerbées par l’absence de statut migratoire autorisé.

Bien que la position sociale ne se limite pas à ces catégories, il semble que l’expérience des participants ait un ancrage fort au statut migratoire, qui se trouve lui-même lié à d’autres déterminants sociaux de la santé, tels que le revenu, la situation professionnelle et les dynamiques de genre. En effet, les perceptions des participants quant à leur droit d’accès aux soins et la sécurité d’emploi semblent inextricablement liées à leur statut migratoire, qui émerge comme un élément transformateur dans le contexte de la pandémie. Les politiques antérieures, déjà discriminantes pour certaines personnes migrantes sans assurance médicale – surtout pour celles qui sont sans statut migratoire autorisé – sont insuffisamment assouplies, et ce, malgré une réalité socio-économique grandement précarisée en contexte pandémique pour plusieurs participants. Finalement, nos données révèlent que le genre joue un rôle primordial dans l’expérience sociale et de santé des participants, et en particulier chez les personnes sans statut autorisé. La dépendance des femmes envers un proche, généralement leur conjoint, semble être décisive dans leur dynamique de couple : elle accentue leur vulnérabilité face à leur conjoint et mine leur accessibilité aux soins et aux traitements. Pour les hommes, la définition du rôle de pourvoyeur devant être assumé par plusieurs semble agir comme facteur de stress.

Discussion

Cette recherche qualitative est, à notre connaissance, la première à étudier l’expérience sociale, de santé et de soins auprès de personnes migrantes sans assurance médicale durant la pandémie de COVID-19. Les résultats suggèrent que la position sociale, en particulier l’absence de statut migratoire autorisé, contribue à la vulnérabilité de certaines personnes migrantes sans assurance médicale et a pu exacerber les inégalités sociales en santé auxquelles elles sont confrontées. Le statut migratoire interagit effectivement avec le revenu, les conditions d’emploi et le genre, qui semblent particulièrement déterminants dans la transformation des expériences rapportées dans le contexte de la crise sanitaire. Les constats émergeant de cette recherche pourraient être favorables à la mise en place de nouvelles initiatives propices à une diminution des inégalités sociales en santé rencontrées par les personnes migrantes sans assurance médicale, durant la pandémie et au-delà de cette dernière. L’utilisation du Cadre des déterminants sociaux de la santé (Gautier et al., 2020; Solar et Irvin, 2010) a permis l’analyse des résultats afin de mettre en lumière les interactions entre les politiques sociales et publiques, la position sociale, le statut migratoire, les conditions de vie et de travail ainsi que le bien-être et la santé des personnes migrantes sans assurance médicale rencontrées.

Le premier thème présenté dans cet article évoque les corrélations entre le statut migratoire, le revenu et l’accès à l’aide sociale gouvernementale. Pour les étudiants internationaux et les travailleurs ayant un visa de travail délivré par le gouvernement fédéral, l’exclusion des politiques assurant l’accès à l’assurance maladie est perçue comme injustifiée. Les participants ayant un statut migratoire autorisé dénoncent leur exclusion et semblent la percevoir comme un droit bafoué. Leur position semble s’être renforcée durant la pandémie. A contrario, pour certaines personnes sans statut, l’inadmissibilité à certaines ressources qu’offrent les politiques aux autres membres de la communauté québécoise est normalisée, acceptée comme une fatalité. Leur discours semble différent de celui des personnes migrantes sans assurance médicale ayant un statut autorisé. Ce constat a également été fait dans une recherche canadienne s’intéressant à l’expérience des personnes sans statut migratoire vivant au Canada. Cette étude suggère que le statut migratoire sert d’outil politique et social, renforçant la perception selon laquelle les personnes sans statut n’appartiennent pas à la société ou n’ont pas droit aux soins et services offerts au reste de la population (Alcaraz, Ferrer, Abes et Lorenzetti, 2021). Cette vision du « nous » versus « eux » dicterait d’ailleurs les politiques sociosanitaires, potentiellement délétères, mise en place dans le contexte de la pandémie (Chen, 2020). Les personnes sans statut migratoire autorisé semblent adopter cette position, interprétant que l’absence de statut migratoire les maintient à l’extérieur du « nous », justifiant l’inaccessibilité à la couverture médicale publique ou encore à la PCU. Leur perception rappelle la théorie de la domination symbolique, qui suggère que le rapport de domination de l’État sur certains groupes d’une société peut être intégré, voire normalisé par ceux-ci. Ainsi, selon la théorie de Bourdieu (1997), la normalisation des politiques discriminatoires pourrait s’ancrer dans une perception des normes prescrites par l’ordre social qui sont défiées par les personnes sans statut autorisé en demeurant au Québec.

Le deuxième thème présenté se rapporte au rôle du statut migratoire et de l’emploi dans l’expérience des personnes migrantes sans assurance médicale dans le contexte de la pandémie. Parmi celles-ci, les étudiants internationaux et les personnes sans statut migratoire autorisé sont celles qui ont davantage mentionné un accroissement de leur vulnérabilité socioéconomique en lien avec leur exclusion des politiques publiques. Ces personnes sont d’ailleurs celles indiquant en majorité vivre avec un revenu insuffisant ou très insuffisant pour répondre aux besoins de leur ménage. La perte d’emploi ou la réduction des heures hebdomadairement travaillées mènent pour ces deux groupes de migrants à une perte de revenus qui ne sera pas dédommagée. Cette accentuation de la précarité socioéconomique pour ces mêmes groupes de personnes migrantes sans assurance médicale est aussi constatée par Shields et Alrob (2021) : pour les personnes sans statut migratoire autorisé, il s’ajoute la nécessité de maintenir leur anonymat. Cette situation est propice aux abus de la part des employeurs envers les travailleurs qui auront gardé leur travail. Les mesures de prévention des infections sont parfois délaissées ou sont perçues comme insuffisantes. Sur la scène internationale et québécoise, on rapporte des constats similaires, alors que les conditions de travail se précarisent et que la probabilité de retrouver un emploi est faible pour les personnes sans statut autorisé dans le contexte de la pandémie (Hayward et al., 2021; Page et al., 2020).

Le troisième thème présenté porte sur la relation entre le statut migratoire et le genre, qui semble aussi transformateur de l’expérience sociale pendant la pandémie. Malgré les nuances qui se rapportent aux expériences de chacun des participants, nos résultats suggèrent que les femmes souffrent davantage de la dépendance économique à un proche. Cette observation est aussi faite sur la scène internationale (Kabeer, Razavi et van der Meulen Rodgers, 2021; Nieves et al., 2021) et au Québec (Couturier et Posca, 2021). Durant la pandémie, la dépendance des femmes à un proche se serait d’ailleurs accentuée, du fait des pertes d’emploi et de la diminution des opportunités de travail (Nieves, Gaddis et Muller, 2021).

Les enjeux structuraux multiples invisibilisent diverses formes de discrimination auxquelles sont confrontées les femmes migrantes. Les politiques de santé excluant spécifiquement certaines d’entre elles se superposent à des formes de discriminations plurielles (Fédération des Maisons d’Hébergement pour Femmes, 2021). La dépendance économique aux proches, à laquelle se superpose l’absence d’assurance médicale, semble mener à une perte d’agentivité des femmes vis-à-vis leurs besoins de santé. Plusieurs d’entre elles tarderont à recourir à des soins de santé ou éviteront de le faire, une situation potentiellement délétère. L’accroissement de la précarité financière des ménages, s’ajoutant à l’absence d’assurance médicale et à des besoins ponctuels ou chroniques de santé ou à des besoins en lien avec les soins périnataux de certaines femmes, semble un vecteur de tensions au sein des couples. Plusieurs des femmes rencontrées dépendront de l’approbation de leur conjoint pour obtenir des soins. Il est d’ailleurs reconnu que les politiques publiques et sociales maintiennent les femmes migrantes à statut précaire dans une situation de précarité socioéconomique (Nellums et al., 2021) et de dépendance à leur conjoint (Hanley, Larios, Ricard-Guay, Meloni et Rousseau, 2020). Chez les participants rencontrés, la tension rapportée dans les couples en lien avec la dépendance économique et l’absence d’assurance médicale ne semble pas avoir été vectrice de situation de violence au sein des ménages. Par contre, pour certaines, la superposition de la barrière de la langue, de la dépendance économique au conjoint et de l’absence de statut migratoire accentue la vulnérabilité aux violences conjugales (Magalhaes, Carrasco et Gastaldo, 2010).

Pour certains hommes, la perte d’emploi et l’accroissement de la précarité socioéconomique semblent générateurs de tensions associées aux difficultés à assumer leur rôle de pourvoyeur pour leur famille dans le contexte de la pandémie. La littérature a d’ailleurs suggéré que durant la crise sanitaire les hommes tendent à maintenir un rôle plus traditionnel encourageant les émotions contenues, la force de caractère et le rôle de pourvoyeur pour le ménage (Fisher et Ryan, 2021). La « masculinité précarisante » est un concept qui pourrait y être associé (Vandello et Bosson, 2013). Comme Fisher et Ryan (2021) le suggèrent, les défis rencontrés par les hommes pour assumer leur rôle de pourvoyeur pourraient mener à des tensions au sein des ménages, un constat renforçant les résultats ayant émergé de l’analyse des témoignages de nos participants. Pour les hommes, la difficulté à répondre aux besoins de la famille pourrait, en effet, être génératrice de souffrances psychologiques (Vandello et Bosson, 2013) et de conflits au sein des couples (Fisher et Ryan, 2021).

Limites

Les limites à cette recherche sont entre autres reliées au manque d’accès à un interprète lors des entretiens. Les participants devaient ainsi parler anglais, français ou créole pour pouvoir être rencontrés. Cette contrainte affecte nécessairement les résultats, comme l’échantillonnage exclut les personnes allophones. Ce groupe de personnes a possiblement rencontré des défis différents de ceux vécus par les personnes pouvant communiquer dans une des deux langues officielles de la province. Nos résultats offrent ainsi un portrait incomplet de l’expérience vécue par les personnes migrantes sans assurance médicale dans le contexte pandémique à Montréal.

Cette recherche transversale est limitée à une période spécifique de la pandémie, soit aux deux premières vagues de COVID-19. Les résultats se limitent donc à l’expérience de personnes migrantes sans assurance médicale dans les premiers mois de la pandémie, ne tenant pas compte de l’impact qu’ont pu avoir les vagues subséquentes sur les personnes migrantes sans assurance médicale, alors que de nouvelles mesures comme le couvre-feu se sont ajoutées aux restrictions en place lors des premiers mois de la crise sanitaire.

Conclusion

Notre étude suggère que la position sociale joue un rôle central dans l’expérience vécue par les personnes migrantes sans assurance médicale dans le contexte de la pandémie de COVID-19. La superposition du statut migratoire, du revenu, des conditions d’emploi et du genre semble avoir été centrale dans l’expérience de plusieurs d’entre elles. Les constats de cette recherche mettent en lumière l’urgence d’instaurer des politiques de santé et de protection sociale plus inclusives pendant et après la pandémie. Ces politiques devraient aller au-delà de l’approche populationnelle, où une même politique est appliquée à tous de façon uniforme, car cela risque d’exacerber les inégalités sociales et de santé (Gagnon-Dufresne et al., 2022). Cela pourrait par exemple mener à l’adoption de stratégies différenciées, qui seraient adaptées au niveau de désavantage social des personnes migrantes sans assurance médicale pour améliorer leur accès aux soins de santé (Marmot et al., 2010). Une telle stratégie est nécessaire pour diminuer les multiples barrières socioéconomiques auxquelles sont confrontées les personnes migrantes sans assurance médicale dans leur accès aux soins de santé, plus particulièrement les femmes et les travailleurs ayant des conditions d’emploi précaires (Ridde et al., 2020).