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Cushing Frank Hamilton, 2022, Tenatsali ou l’ethnologue qui fut transformé en Indien. Écrits sélectionnés, présentés et commentés par Patrick Pérez et Frédéric Saumade, traduction par Éléonore Devevey. Paris, CNRS Éditions, coll. « Bibliothèque de l’anthropologie », 491 p.

  • Frédéric Laugrand

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  • Frédéric Laugrand
    Laboratoire d’anthropologie prospective (LAAP), Université catholique de Louvain, Louvain-la-Neuve, Belgique

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Couverture de Anthropologie politique du travail, Volume 47, numéro 1, 2023, p. 11-240, Anthropologie et Sociétés

Voici un livre qui présente la biographie et plusieurs contributions écrites d’un ethnographe et ethnologue : Frank Hamilton Cushing, ou Tenatsali Ehtohkyakona (« Fleur médecine » en zuñi), né en 1857 et décédé en 1900. Claude Lévi-Strauss, rappellent les deux éditeurs au début de l’ouvrage, le voyait à la droite de Morgan, parmi les grands précurseurs des recherches structurales. Aujourd’hui, l’ethnologue demeure pourtant oublié, une figure controversée du XIXe siècle que la discipline a placé dans la galerie de ses ancêtres. La présente publication de textes importants de cet ethnologue contemporain de Franz Boas est bienvenue. Cushing, que les deux éditeurs — Patrick Pérez et Frédéric Saumade — décrivent comme un précurseur et l’un des premiers ethnographes de terrain, est beaucoup moins connu en France qu’aux États-Unis, où nombre de ses travaux ont été publiés par le Bureau of Ethnology, et ses articles, par la revue American Anthropologist. Avec ce volume, le lecteur ne découvre pas seulement la contribution de Cushing à l’ethnographie des Zuñi, mais également un personnage fascinant, qui suscite le débat et la polémique. En effet, si Cushing signe une oeuvre inventive et novatrice, elle est celle d’un autodidacte qui n’a jamais suivi de cours en ethnologie. Et Cushing s’est surtout attaché à saisir les mythes et les grandes catégories de pensée des Zuñi. Il est aussi allé très loin dans l’expérience ethnographique et l’observation participante ou, devrait-on dire ici, la participation observante, faisant preuve d’« empathie participative », pour reprendre l’expression de Saumade (p. 23). Ses détracteurs, eux, lui reprochent une ethnographie un peu vague et imprécise. Alfred Kroeber et d’autres le considèrent même comme un imposteur, lui, le blanc qui voulait devenir indien et qui divulgue les secrets des initiations… Dès 1879, après une expérience muséographique au sein de la Smithsonian Institution à Washington, Cushing est envoyé chez les Zuñi, dans une réserve située à la frontière de l’Arizona et du Nouveau-Mexique. L’ethnologue devait y passer trois mois, il y restera quatre ans. Il revient transformé. Non seulement il passera toutes les épreuves d’initiation masculine, mais il est devenu chef de guerre et membre d’une société secrète, la Confrérie de l’Arc. Pour ce faire, Cushing aurait scalpé un adversaire et passé une journée sur un nid de fourmis, sans compter des mois de jeûnes, des pèlerinages et autres rites sacrificiels. Mais assez vite, ses relations avec les villageois se détériorent, des accusations de sorcellerie fusent, un rituel auquel il participe dérape, des transgressions sont commises. Cushing traverse de terribles crises. Sans doute est-il allé trop loin dans sa quête pour devenir un Zuñi et dans ses méthodes cavalières. Son décès se produit le 10 avril 1900, lorsqu’il s’étouffe avec une arête de poisson. Cushing vient d’avoir quarante-deux ans. On l’aura compris, ce livre est passionnant pour comprendre à la fois le travail ethnographique et l’errance d’un ethnologue qui a parfois l’allure d’un missionnaire, me semble-t-il. Cet avis mériterait toutefois une plus longue discussion et ne serait sans doute pas endossé par les éditeurs. Ces derniers et la traductrice, Éléonore Devevey, ont réalisé un solide travail de traduction, d’édition et d’annotation, rendant accessibles en français des textes clés de Cushing. L’ouvrage est structuré en quatre parties. La première revient sur ce que Pérez et Saumade ont appelé « La dramaturgie ethnographique de Cushing ». Dans cette section, les textes sont très autobiographiques, ils relatent différents épisodes marquants de son terrain chez les Zuñi. La seconde partie, intitulée « Ino’De’Kwe, le Peuple d’Avant », est consacrée à ce que Cushing a écrit sur les mythes et les récits oraux des Zuñi. La troisième partie, …

Parties annexes