Comptes rendus

Julien Mauduit. La guerre d’indépendance des Canadas : démocratie, républicanismes et libéralismes en Amérique du Nord, Montréal, McGill-Queen’s University Press, 2022, 356 p.

  • Olivier Guimond

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  • Olivier Guimond
    Université d’Ottawa

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Couverture de Regards intellectuels sur la Révolution tranquille, I, Volume 23, numéro 1, automne 2022, p. 5-132, Mens

Dans le premier chapitre, « L’Amérique révolutionnaire des années 1830 », Mauduit avance qu’existait parmi la population des Canadas un véritable esprit révolutionnaire qui, en se radicalisant, a préparé la lutte armée amorcée en 1837. Cette radicalisation se fondait notamment sur l’idée que les institutions politiques coloniales étaient antidémocratiques et, partant, contraires au cours de l’Histoire et à l’ordre naturel du Nouveau Monde. Tout cela ne constitue certes pas une matière nouvelle. Plus notable, cependant, est l’affirmation que la radicalisation idéologique des patriotes a incontestablement légitimé la militarisation du mouvement. Ce phénomène est bien réel, souvent envisagé par les chefs des patriotes, sinon encouragé, même avant novembre 1837, insiste Mauduit. Ainsi, comme les autorités coloniales qui « opèrent des mouvements de troupes » et comme les ultra-tories qui ne rechignent pas à l’idée de réprimer à bras raccourcis les « rebelles », les révolutionnaires canadiens participent également à la mise en place d’un horizon au bout duquel seul un affrontement armé paraît inévitable (p. 33). De l’autre côté de la frontière, Mauduit observe la même radicalisation des esprits. L’Amérique jacksonienne est alors marquée par de forts contrastes sociaux forgés par des crises économiques et financières récentes et est divisée sur la question de l’esclavage et de l’expansion possible de la république. Nombreux sont les Américains qui s’inspirent du spirit of ‘76 pour réclamer une démocratisation de la vie politique et économique. Cette situation voisine n’échappe pas aux patriotes canadiens, eux-mêmes imprégnés de « l’esprit de 1776 »; aussi trouveront-ils d’importants appuis dans les États frontaliers à compter de 1838 (p. 50). Le chapitre 2, « Amalgame des nations », est l’occasion pour l’auteur de réaffirmer le caractère essentiellement politique, républicain, et non pas nationalitaire, du mouvement patriote. Mauduit rappelle que la création d’un « espace républicain » où peuvent s’épanouir dans le respect des droits naturels de l’homme « différentes nationalités européennes » (p. 51) amalgamées – placées en situation de cohabitation sans qu’une culture soi-disant supérieure serve de pôle d’assimilation –, est l’utopie privilégiée des patriotes. Dans leur discours, lorsqu’il est question des Canadiens des deux provinces, des Américains, des Irlandais, etc., impliqués dans la cause, le même verbe républicain, conjugué au « nous », est constamment employé. Les nombreuses difficultés qu’ils rencontrent ébranlent toutefois, dès 1838, ce désir d’amalgame des nationalités chez les patriotes, tout comme elles font ressortir les limites de leur cosmopolitisme (p. 188-192). Dans le troisième chapitre (« Droits naturels et égaux : démocratiser l’expérience républicaine »), Mauduit brosse le portrait du « socle philosophique amplement partagé » (p. 108) sur lequel repose le républicanisme des patriotes canadiens (surtout ceux qui en viennent à dominer le mouvement à compter de 1838) et des radicaux américains, aussi appelés les « vrais » républicains. Ces hommes, imprégnés des Lumières radicales, considèrent que les institutions politiques coloniales et étatsuniennes, de même que l’organisation sociale du Nouveau Monde plus généralement, ne respectent pas les droits naturels des hommes (Blancs d’ascendance européenne), tout comme leur égalité devant ces droits. Sur le plan économique, ceux-ci sont d’avis que l’essor du commerce moderne s’est fait de manière trop inégalitaire. Le coupable : un capitalisme sans morale ni portée sociale. Ils sont plusieurs aussi à déplorer l’existence persistante de privilèges et de monopoles encouragés par l’État. Une profonde réorientation sociale – égalitaire et démocratique – se dessine donc dans leurs idées. La clé ici me semble résider en ce que pour les républicains radicaux, l’institutionnalisation des principes qui ont inspiré la révolution américaine ne s’est pas accomplie, déroutée par le frein qu’impose à l’élan démocratique le spirit of ’87 incarné par la Constitution. …