Corps de l’article

Introduction

Les discussions muséologiques actuelles sont centrées sur les défis des nouvelles technologies, le concept d’expérience, et sur le musée en tant qu’agent de la démocratie et des droits de l’homme (Ames 1995; Marstine 2011). Les questions de décolonisation et de rapatriement des objets autochtones dans les musées ethnographiques sont au centre de ces discussions (Kreps 2009; Phillips 2011). Il devient nécessaire et urgent de raconter ces histoires de négociation de la propriété des objets, du renouvellement des relations entre colonisés et colonisateurs, d’hybridité et de l’affirmation des identités autochtones dans les musées (Rein 2010). Ce renouvellement de la muséologie doit se faire avec la participation de diverses voix, d’autant plus que les publics se montrent avides de participation et d’interaction avec le musée (Chaumier 2005; Coody Cooper 2007; Kreps 2003; Witcomb 2003).

Dans le cas des musées ethnographiques, ce n’est pas avant les années 1990 que les collaborations avec les peuples autochtones ont commencé à se développer (Ames 1995; Phillips 1998). Aujourd’hui, les concepts d’inclusion et de participation de voix émergentes sont au coeur des débats, mais également des recommandations normatives (NAGPRA 1990; Task Force 1992; UNESCO 2003; UNESCO 2008; ICOM 2019). Les communautés autochtones ont enfin la possibilité de revendiquer leur souveraineté culturelle sur la manière de représenter qui elles sont et ce qu’elles font dans les cadres institutionnels. Aussi, leurs membres démontrent une volonté de participer aux débats muséologiques et de s’approprier le musée (Dubuc et Turgeon 2002). La décolonisation est donc désormais le défi principal des musées afin de décentrer la vision eurocentrique blanche et de valoriser le récit des autochtones ayant été altéré au cours des siècles.

Si les études récentes traitent utilement de la participation accrue des Autochtones dans les musées ethnographiques des colonisateurs blancs, très peu abordent l’étude des musées proprement autochtones, pourtant de plus en plus nombreux. En effet, nous avons assisté au cours des cinquante dernières années à une multiplication de musées créés par et pour les Autochtones, partout en Amérique du Nord et notamment au Québec[1]. Il s’agit donc de comprendre comment les Autochtones sont parvenus à créer leurs propres musées et gérer leur propre patrimoine. Nous nous sommes ici limités à l’étude du Musée Huron-Wendat, institution de la nation Wendat de Wendake (Québec). Il s’agit d’une étude muséologique sur la gouvernance autochtone et non d’une analyse sur l’identité ou la culture Wendat. Il est ici question d’analyser comment cette culture (et par extension son identité) est représentée par le musée et comment les visiteurs la comprennent et interagissent avec elle. Le Musée Huron-Wendat offre une occasion unique de réaliser une étude ethnographique sur un musée autochtone, au sens propre. La contribution de cet exemple vise également à combler les lacunes dans l’étude des musées des Premières Nations au Québec, qui ont peu retenu l’attention des chercheurs jusqu’à présent.

Nous présenterons tout d’abord le Musée Huron-Wendat, institution nationale de la Nation Huronne-Wendat, afin de situer l’étude de cas. Nous poursuivrons avec l’analyse de l’étude de terrain afin de comprendre, dans un premier temps, quelles sont les pratiques de représentation du patrimoine Wendat au sein de leur musée. Nous verrons par la suite comment ces pratiques sont mises en valeur et comment la communauté ainsi que les visiteurs du musée interagissent avec celles-ci. Étudier les possibilités d’interaction dans le musée entre les personnes, les objets, et les médias, nous permet de comprendre comment les publics sont liés au discours sur le patrimoine wendat.

Historiographie

Les théories postcoloniales et féministes ont largement contribué au mouvement de décolonisation (Ames 1995; Kreps 2003; Turgeon 2003; Smith 2006; Coody Cooper 2007; Kreps 2009). Y sont examinées les relations de pouvoir social et politique, les récits qui soutiennent le colonialisme, et le néocolonialisme. Dans le cas des musées ethnographiques, l’autorité européo-centrée est sujette à la controverse, en particulier dans les anciennes puissances coloniales telles que les États-Unis, l’Inde, l’Australie, le Canada, le Brésil et le Mexique (Dubuc et Turgeon 2004). Dans une perspective postcoloniale, il est donc nécessaire d’équilibrer les discours et les représentations afin d’écrire une histoire inclusive.

Dans le cas du Musée Huron-Wendat, la littérature se révèle particulièrement incomplète. En fait, il existe très peu d’études critiques et à jour sur les musées des Premières Nations au Québec et au Canada en général. Au Québec, ce n’est que récemment grâce aux travaux de Élise Dubuc, Laurier Turgeon, Elisabeth Kaine, Julie Bibaud et Virginie Soulier, que l’attention a été attirée sur la participation des Autochtones à la muséologie (Dubuc et Turgeon 2004; Dubuc et Kaine 2010; Bibaud 2015; Soulier 2013). Grâce à une méthodologie participative, ces chercheur·se·s allochtones ont pu étudier quelques initiatives interculturelles établies au Québec par et pour les communautés autochtones. Au Canada anglophone, Ruth Phillips, historienne de l’art et conservatrice spécialisée en art autochtone nord-américain, reste la figure de proue de la muséologie postcoloniale. Par l’étude des contestations autochtones et des critiques postcoloniales des années 1980 et 1990, elle aura permis l’élargissement de la recherche vers les changements de représentation. (Phillips 1998; Phillips 2011) Les études postcoloniales s’inspirent aussi d’expériences dans d’autres nations issues de l’empire britannique afin d’analyser les traitements des approches autochtones en muséologie. Les États-Unis, le Canada, l’Australie et la Nouvelle-Zélande sont les principaux pays actuellement à la portée des chercheur·se·s (Williams 2003; Coody Cooper 2007; Waterton et Clarke 2015).

L’unique étude portant sur le Musée Huron-Wendat est l’article d’Annette de Stecher, « Integrated Practices: Huron-Wendat Traditions of Diplomacy and Museology » (De Stecher 2014). En faisant le lien entre la création du Musée Huron-Wendat avec les traditions wendates de conservation, de préservation et de transmission du patrimoine, la chercheuse dresse un portrait de la muséologie autochtone à partir de sources historiques. Cet article est donc un excellent point de départ mais l’approche est essentiellement historique alors que la nôtre est ancrée dans le présent et se fonde sur une ethnographie critique et réflexive. En effet, notre objectif est d’analyser les pratiques du Musée Huron-Wendat, ici considéré comme un outil identitaire mais aussi une entreprise touristique et un atout culturel porteur d’un discours politique autochtone.

Méthodologie

Bien que cette étude soit produite par une chercheuse allochtone et immigrée au Québec, l’approche proposée sur le Musée Huron-Wendat repose sur la collaboration sur le terrain avec les Wendat. Cette recherche fait aussi appel à l’empirisme ainsi qu’à la muséologie critique par une approche inductive, c’est-à-dire construite à partir des données brutes et réelles observées sur le terrain (Soulier 2014). L’étude a été réalisée sur place, au Musée Huron-Wendat, à l’hiver 2019.

Il s’agit premièrement d’établir une analyse descriptive du discours du Musée Huron-Wendat en termes de représentations. Cela permet de comprendre les choix stratégiques du musée afin de véhiculer une vision de l’identité wendat. Cette analyse qualitative est basée sur l’observation méticuleuse de l’exposition permanente, une lecture poussée des rapports annuels du musée, un recensement des outils de marketing développés par différents acteurs locaux ainsi que des entretiens semi-dirigés avec un groupe de cinq professionnel·le·s. Ainsi, en discutant les principaux concepts de la recherche avec les participant·e·s (musée ethnographique, décolonisation, participation), les entretiens permettent d’évaluer quels outils sont élaborés pour assurer la gouvernance autochtone du musée.

En second lieu, les pratiques d’interaction sont étudiées. Il a donc fallu procéder à une autre analyse descriptive des instruments interactifs et de leurs fonctions, à la fois dans les espaces physiques et virtuels du Musée Huron-Wendat. L’établissement d’une liste de ces instruments, l’observation de tours guidés et de l’organisation de l’espace muséal, la lecture des commentaires et avis sur les réseaux sociaux du musée ainsi que la conduite de questionnaires auprès des visiteurs représentent l’ensemble des données collectées. Les questionnaires, principale source quantitative, ont été complétés par vingt visiteurs du musée en présence de la chercheuse. Ceux-ci sont appuyés par les données statistiques établies dans l’enquête de satisfaction des visiteurs réalisée par les praticiens du musée au cours de l’été 2019 auprès de 454 visiteurs. L’analyse inférentielle de ces sources permet d’évaluer le profil des visiteurs du Musée Huron-Wendat, leur niveau de satisfaction et de compréhension, et leurs expériences avec le patrimoine Wendat.

Le Musée Huron-Wendat comme institution nationale du peuple Wendat

Situé à Wendake, près de la ville de Québec, le Musée Huron-Wendat est une institution nationale du peuple Wendat créée en 2008. Sa mission principale est de conserver et de mettre en valeur le patrimoine wendat, ainsi que de partager et de rendre accessible l’histoire et la culture de la communauté. Le musée est également un centre de recherche car il contribue à accroître l’expertise sur le patrimoine des Wendat. L’exposition permanente, intitulée Territoires, Mémoires, Savoirs, traite de l’histoire des Wendat grâce au déploiement d’une élégante muséographie basée sur la culture matérielle et quelques sources orales. Dans la salle d’exposition permanente, chaque vitrine est centrée et organisée autour de l’un de ces thèmes. Y sont présentées et expliquées la signification des objets par rapport à la culture wendate. Les expositions temporaires sont axées sur l’art ou l’archéologie notamment, avec la participation régulière d’artistes ou d’intellectuels autochtones. À l’extérieur, la maison longue, inaugurée en 2013, est une reproduction d’une habitation traditionnelle représentant les modes de vie et le patrimoine immatériel wendat. Il est également possible de visiter la maison de Nicolas Vincent Tsawenhohi, grand chef Wendat du début du XIXe siècle, située au sein du complexe muséal. Le musée propose des visites individuelles, guidées et audio-guidées pour un prix unique, ainsi que des forfaits spéciaux avec des activités éducatives et ludiques. Konrad Sioui, grand chef de Wendake,[2] est l’actuel président du conseil d’administration comprenant six membres sur dix issus de la communauté Wendat. Fêtant alors son dixième anniversaire, le musée atteignit pour la première fois le nombre record de 22 000 visiteurs en 2018; c’est également l’année durant laquelle le musée fut labellisé par la certification gouvernementale « Institution Muséale Agrée », soulignant sa qualité et sa pertinence au niveau national.

La création du Musée Huron-Wendat témoigne d’un lien historique entre les Wendat, leur culture matérielle et leurs connaissances communes, et l’Autre, c’est-à-dire le touriste. En effet, tout au long du 19e siècle, la communauté wendat a maintenu une présence visible et dynamique dans l’environnement politique, social et commercial du Québec. Wendake, également connue sous le nom de Lorette par les Français, fut établie puis développée comme attraction touristique par les Wendats eux-mêmes, pour les résidents du Québec et les visiteurs étrangers. La réserve était une destination de luxe pour les voyageurs aristocrates, et connue principalement pour son environnement exotique et sauvage (la cascade Kabir Kouba est située à côté du site) ainsi que pour l’hospitalité des familles Wendat, comme en témoignent les cérémonies et les sagamités. Les touristes pouvaient y voir des étalages d’objets et d’art, écouter les histoires du gardien de la culture et acheter des souvenirs (De Stecher 2017 : 55).

Comme l’explique une membre de la communauté Wendat ayant participé à la vie active du musée depuis sa création en 2008, plusieurs tentatives de muséification du patrimoine wendat ont vu le jour au cours des années (Entrevue Inf#3, Musée Huron-Wendat, 20 novembre 2019). Mais le Musée Huron-Wendat est l’initiative qui a véritablement permis l’implantation de Wendake et la participation des Wendat dans le circuit touristique et culturel de la ville de Québec. Le musée attire aujourd’hui des visiteurs québécois, canadiens, et internationaux. Il représente un jalon pour la communauté et pour la transmission du patrimoine, de l’histoire et de la culture autochtone. Le caractère unique du Musée Huron-Wendat réside dans le fait que cette institution est une initiative des Premières Nations visant à servir la communauté wendat dans le but de dynamiser le territoire, puisque le musée est situé au coeur de leur réserve. La méthodologie muséologique est centrée sur l’autoreprésentation et l’autohistoire (Sioui 1995), et tout le contenu exposé est contrôlé par le Conseil de la Nation Huronne-Wendat et l’organisme touristique officiel du Conseil, Tourisme Wendake. Créé et géré par et pour les Wendats en coopération avec des professionnels allochtones, le Musée Huron-Wendat est aussi et surtout un produit touristique associé à un hôtel quatre étoiles et un restaurant proposant une cuisine d’inspiration autochtone, devenu principal moteur économique pour la communauté locale. L’institution hôtel-musée anime la vie culturelle de Wendake; l’association originale de ces deux concepts est également un choix intéressant qui jusqu’à présent s’est révélé être un succès. L’approche de proximité confirme le rôle d’acteur culturel et économique du musée dans la communauté. Cet ancrage a permis l’expression d’un caractère unique, auquel s’ajoute un intérêt évident d’attraction du touriste (Sioui Durand 2014 : 279). Le Musée Huron-Wendat est également la preuve que la conservation, la protection et la mise en valeur du patrimoine autochtone ne sont plus le monopole des grands musées ethnographiques urbains.

La représentation : un enjeu politique qui façonne l’expérience muséale

Le concept et pratique de représentation consiste à évoquer un phénomène ou événement, grâce à l’application d’une ou plusieurs significations sur celui-ci (Hall 1997). La représentation se réfère non seulement à l’imagerie, mais aussi aux récits. Dans le contexte patrimonial, on peut parler d’un discours donnant un sens à l’expérience du présent et servant à exposer une identité. Aussi, l’identité telle que représentée par le musée est l’affaire d’interprétations emblématiques et d’un discours performatif qui vise la légitimité d’un peuple, surtout dans le cadre des musées ethnographiques (Chaumier 2005 : 26). Dans les musées, la représentation est proposée grâce à des objets, textes, outils audiovisuels, performances et arrangements dans l’espace (MacDonald 1992 : 401). Ainsi sont impliquées des interactions créatives entre les visiteurs et les expositions. Les musées ont une responsabilité évocatrice : la représentation peut affecter la façon dont les gens pensent, valorisent et agissent.

Historiquement, la représentation des peuples autochtones au sein des musées a été marquée par une faible collaboration des personnes concernées. Dans le cas du Musée Huron-Wendat, le récit sur l’identité et la culture autochtones est défini par les Wendat eux-mêmes, comme l’expliquent les professionnel.le.s rencontré.e.s en entretien. Pour une des premières fois au Québec, une communauté des Premières Nations réussit à transmettre son message politique dans leur propre musée. Les expositions reflètent leurs expériences, ainsi que les passés coloniaux et les luttes actuelles (Entrevue Inf#4, Musée Huron-Wendat, 28 novembre 2019). L’observation prolongée sur plusieurs semaines des collections nous indique que celles-ci s’inscrivent dans un mélange hybride entre traditions locales et pratiques muséologiques contemporaines. En effet, la représentation est autodéterminée par le Conseil de la Nation, mais le musée révèle une volonté de faire appel aux pratiques éducatives et muséologiques occidentales. L’une des forces du Musée Huron-Wendat est sa capacité à représenter les Wendat dans une perspective d’évolution et d’adaptation, contrairement à d’autres musées ethnographiques qui présentent des identités ethniques de façon latérale, homogène, figée; issues du passé.

Les expositions du Musée Huron-Wendat ne sont pas basées sur le discours des anthropologues mais sur les découvertes archéologiques et les perceptions de l’histoire en termes wendat (Entrevues Inf#2 et Inf#5, Musée Huron-Wendat, 20 et 28 novembre 2019). Le.a recherchiste du musée nous a d’ailleurs indiqué lors de son entretien que tout son travail devait être validé par le Conseil de la Nation. Comme expliqué dans les textes des cartels et noté tout au long des observations, la notion d’une histoire unifiée ou linéaire de la colonisation québécoise est remise en cause par les récits autochtones locaux : toutes les références historiques sont basées sur des travaux wendat ou des écrits allochtones ayant été approuvés par le Conseil de la Nation. Tous les contenus produits par le Musée Huron-Wendat doivent obtenir le soutien du Conseil. L’accord tacite avec le Bureau de Nionwentsïo, basé sur le respect de la nation Wendat, définit donc le cadre narratif autochtone des pratiques muséales de représentation.

Le Musée Huron-Wendat accorde aux participants de la communauté une certaine forme d’autonomie et des compétences pour se représenter, à travers le choix des médiums et des contenus, ainsi que la création d’outils de représentation. Cela permet une cohésion communautaire ainsi qu’une revitalisation culturelle (Dubuc et Kaine 2010). Le musée sert donc principalement à la réappropriation de la culture wendat ainsi qu’à la reconnexion avec les traditions (Entrevues Inf#3 et Inf#4, Musée Huron-Wendat, 20 et 28 novembre 2019). L’affirmation culturelle est un enjeu majeur pour les peuples autochtones et le Musée Huron-Wendat correspond justement aux attentes et aux intérêts des communautés pour lesquelles il a été créé (Entrevues Inf#1 et Inf#3, Musée-Huron-Wendat, 20 novembre 2019). Il est cependant intéressant de noter qu’une écrasante majorité des professionnels et guides du musée sont allochtones; lors des entrevues, seulement une personne s’est identifiée comme Wendat (Entrevue Inf#1, Musée Huron-Wendat, 20 novembre 2019). Une des personnes interrogées travaillant au musée a également mentionné le manque d’accessibilité à la muséologie pour les Premières Nations et le fait que la main-d’oeuvre ne soit pas toujours autochtone (Entrevue Inf#5, Musée Huron-Wendat, 28 novembre 2019). Bien qu’en théorie le Musée Huron-Wendat soit géré par la communauté source, il ne reste sous l’autorité des Wendat que par l’intermédiaire du Conseil de la Nation, qui contrôle les pratiques narratives et muséologiques de son institution nationale. Les représentations qui en résultent sont donc celles de sections particulières de cette communauté (Witcomb 2003), c’est-à-dire une minorité de la population wendat détenant le pouvoir.

Les concepts les plus importants de l’identité wendat sont les coutumes ancestrales, la généalogie et le lien avec le territoire. La tradition orale, le « cercle de la vie », la spiritualité et les arts visuels, tels que la broderie et la présentation du wampum, sont également fondamentaux. Le patrimoine dans son ensemble contribue à la force et à la résistance du peuple wendat (De Stecher 2017: 54). Certains éléments de l’identité wendat sont donc naturellement mis en évidence dans les expositions du musée, dans le but d’attirer des visiteurs et de développer des activités éducatives significatives. Par exemple, le territoire représente et véhicule l’identité wendat. C’est un thème central de l’exposition permanente Territoires, Mémoires, Savoirs. Celle-ci met en évidence les liens avec la terre et proclame la relation avec les territoires wendats, également connus sous le nom de Nionwentsïo. Le territoire étant la source de l’agriculture, de la pêche, de la chasse, du piégeage et de la récolte, ces activités humaines apparaissent comme des mots clés dans les cartels. La terre est également la source des Trois Soeurs, une technique agricole de cultures complémentaires entre maïs, courge et haricot au coeur de l’économie wendat. Aussi, l’exposition est configurée autour d’un espace multimédia composé d’une bande sonore de bruits d’animaux et de nature, la reconstitution d’une petite forêt (douze arbres avec une charge symbolique et une constellation au plafond), et trois grands écrans affichant des images du Nionwentsïo sauvage. Tous ces éléments contribuent à créer une atmosphère mystique qui plonge le visiteur dans le monde wendat. Cet espace prend une forme ronde donnant un aspect convivial, basé sur l’architecture d’un fumoir traditionnel. L’atmosphère, plus que les outils d’interprétation, véhiculent l’idée de territoire.

Figure 1

L’exposition permanente, intitulée Territoires, Mémoires, Savoirs, se veut un hommage au Nionwentsïo

L’exposition permanente, intitulée Territoires, Mémoires, Savoirs, se veut un hommage au Nionwentsïo

L’exposition a par ailleurs reçu le prix d’excellence de la Société des Musées Québécois.

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La visite guidée est axée sur l’identité, notamment sur la généalogie et le commerce. Le sens de la visite, tout comme la narration de l’audioguide et celui de la visite guidée, commence par le mythe de la création et raconte les liens sociaux entre les individus, les familles, les clans, les animaux et la nature. Les mythes et légendes sont au coeur des activités de médiation culturelle (Entevue Inf#5, Musée Huron-Wendat, 28 novembre 2019). Tout au long de la visite, l’idée de parenté est également centrale. Le guide explique généralement par la suite les principaux événements historiques liés au territoire wendat. La chronologie affichée près de l’entrée fait à peine référence à l’histoire pré-européenne; celle-ci présente plutôt les événements historiques majeurs mettant en évidence les relations entre les Wendats et les Européens. Dans la salle d’exposition permanente, les raquettes, les poteries et les canots sont présentés comme les artefacts vedettes de la collection. En effet, en plus d’être fabriqués localement depuis plusieurs générations, tous les trois sont des marqueurs identitaires importants pour les Wendats. Le wampum est également un élément remarquable de l’exposition puisqu’il possède une importance historique, diplomatique et sociale primordiale. Le wampum est un objet de grande valeur pour les Premières Nations du Nord-Est de l’Amérique, prenant la forme d’une ceinture de perles de coquillages. Il représente les ententes conclues entre peuples, de la même manière que les traités et les pactes occidentaux. L’activité Sur les traces de la tortue et de l’ours proposée aux élèves du primaire est une exploration à la découverte des artefacts iroquois datant du 16e siècle. Les enfants sont donc encouragés à étudier l’organisation de la société wendat, à s’ouvrir à la diversité des peuples autochtones et, par extension, à structurer leur propre identité. En revanche, l’observation sur le terrain nous révèle que ni l’exposition, ni les forfaits de visite et les activités ne traitent du cercle de la vie. Seules deux activités réservées aux adultes proposent d’explorer certains aspects de la spiritualité wendat. Ceux-ci présentent aux publics les mythes, la religion, la philosophie et la cosmogonie wendat, en plus de permettre aux participants de s’exprimer sur les thèmes de la pensée circulaire, leurs rôles dans la société et leur impact sur l’environnement.

La représentation de l’histoire et les références temporelles ont tout autant d’importance que les thèmes emblématiques discutés précédemment. En effet, l’histoire est un élément d’unité puisqu’elle rassemble autour d’événements. Par exemple, le mythe fondateur Wendat est d’une importance capitale car il unifie la communauté et l’introduit aux visiteurs. Ce mythe est représenté par une peinture contemporaine dans le hall d’entrée du musée. C’est également au début de la visite que le guide explique l’histoire d’Aataentsic, personnage fondateur. Un autre événement marquant est l’affaire Sioui, présentée dans l’audioguide et à travers des éléments interactifs de l’exposition permanente. Entre 1982 et 1990, les quatre frères Sioui, dont le grand chef Konrad Sioui et l’historien George Sioui, ont été inculpés et reconnus coupables de camping illégal, d’allumage de feux et d’abattage d’arbres dans le parc de la Jacques-Cartier, au Québec. Cependant, soutenant qu’ils avaient des droits autochtones sur le territoire, les Sioui prirent appui sur le traité signé par le général James Murray en 1760 garantissant le « libre exercice de leur religion, de leurs coutumes et de la liberté de commercer avec les Anglais » aux Wendat. Finalement, cet épisode aura transformé la compréhension des interprétations des traités au Canada. L’affaire Sioui a également inspiré la renaissance socioculturelle wendat. Les droits ancestraux, les territoires, les valeurs, l’histoire et la culture sont à la base de la cause politique autochtone (Phillips 2011).

Reste que la représentation identitaire se limite à des images positives seulement. De nombreux silences demeurent quant aux aspects plus sombres de l’histoire des Wendats, tels que leur déplacement de l’Ontario au Québec et la violence des puissances coloniales envers leur peuple. Les mélanges modernes de culture autochtone et blanche sont absents : il n’y a aucune représentation de l’identité autochtone en rapport avec le sentiment national québécois, ni de patrimoines métissés. En réalité, les identités sont multiples, en constante évolution. Aussi, si ces aspects font défaut dans les expositions et la visite guidée, c’est peut-être en raison de la douleur et de la colère qu’ils provoquent pour les membres de la communauté. Au contraire, le patrimoine présenté dans le musée procure une image valorisante, donnant confiance aux Wendat et resserrant les liens d’appartenance au groupe (Chaumier 2005 : 24). Malgré le risque apparent d’isolement identitaire, le Musée Huron-Wendat parvient à établir des relations avec l’altérité et l’extériorité de la communauté grâce aux outils touristiques. Le musée contribue tout de même de façon significative à la représentation d’une communauté autochtone homogène, unifiée et souveraine. Il défend les intérêts du groupe qui compose la nation et rassemble la communauté sous l’institutionnalisation et la transmission de sa culture. Ainsi, les éléments constitutifs représentés dans son discours maintiennent cette identité, cette continuité et cette unité. La muséification du patrimoine wendat contribue ainsi à la cohésion communautaire et au sentiment d’appartenance, avec une ouverture chaleureuse à l’Autre, ici le touriste.

L’interaction : un enjeu muséologique qui stimule la communauté avec l’Autre

Le concept d’interaction fait référence aux processus de communication entre les personnes, les objets, les connaissances et l’espace muséal. Cette expérience peut prendre la forme de visites guidées, de discussions, de manipulations d’objets, de programmes éducatifs, de nouvelles technologies ou de jeux par exemple. Le niveau d’interaction est important à analyser, puisqu’il définit le musée du 21e siècle comme un réseau de relations sociales et une zone de contact (Rein 2010; Clifford 1997). C’est là que divers groupes sociaux et culturels peuvent partager, négocier et changer leurs perspectives et leurs connaissances. L’interaction permet aussi de donner aux populations le contrôle et la préservation de leur patrimoine afin de maintenir ou soutenir leur identité : toutes les personnes interrogées lors du travail de terrain sont unanimes pour désigner le dialogue avec les publics comme la plus grande force du Musée-Huron-Wendat. L’interaction est un outil clé qui peut conduire entre autres à la décolonisation des musées, car elle implique l’acceptation et la participation de divers groupes.

Le Musée Huron-Wendat s’engage dans sa mission et son mandat à rendre le patrimoine wendat accessible à sa communauté ainsi qu’à offrir une expérience authentique, puisque proche des Wendats, à ses visiteurs. Pour atteindre cet objectif, le musée s’efforce de créer des conditions d’interaction et d’engagement. Le travail du médiateur, tenu par le.a directeur.ice, est d’aider les visiteurs à établir des liens entre le contexte d’origine de l’objet et la culture du visiteur avec clarté, transparence et simplicité. Par conséquent, le musée est une zone de contact où les participants développent une relation avec la culture wendat à travers un accueil chaleureux, des échanges avec les guides et des contacts directs avec l’environnement (Entrevue Inf#5, Musée Huron-Wendat, 28 novembre 2019). L’interaction passe également par l’exposition et les activités de médiation culturelle. Ici, le rôle des guides est essentiel et le dialogue avec les visiteurs fait partie intégrante des stratégies muséales : les guides sont, comme l’a déclaré l’une des employées du musée durant son entretien, « des ambassadeurs » ainsi qu’un « pont entre deux cultures [Premières Nations et allochtones] » (Entrevues Inf#3 et Inf#4, Musée Huron-Wendat, 20 et 28 novembre 2019) .Leur mission est de promouvoir et partager la culture wendat à travers le monde en échangeant avec les visiteurs locaux et internationaux. D’après les entrevues, les professionnel.le.s du musée semblent bien conscients que l’interactivité se produit dans l’espace physique du musée et grâce à une communication et un dialogue partagés avec les visiteurs. Ceux-ci conviennent que la visite est meilleure avec un guide car elle permet aux visiteurs de rencontrer des Wendats et ainsi d’établir un lien avec la culture et les histoires autochtones (Entrevues Inf#1, Inf#4 et Inf#5, Musée Huron-Wendat, 20 et 28 novembre 2019). Aussi, ces interactions de qualité sont sans aucun doute le meilleur atout du musée.

Puisque la visite guidée représente l’activité interactive par excellence, il convient de décrire le déroulement de celle-ci. Le tour commence par une explication du mythe de la création dans le hall d’entrée. Un cadre narratif est établi sur ce mythe, faisant écho à la tradition orale wendat. La visite guidée se poursuit dans la salle d’exposition permanente, où une lecture avancée de la ligne chronologique a lieu. Les visiteurs peuvent ensuite observer des artefacts de la période coloniale, commentés par le guide. Cette période concerne surtout la culture des Premières Nations et ne traite pas tant des contacts avec les Européens, renforçant ainsi l’histoire de modes de vie indépendants et dynamiques des Wendats. Les questions contemporaines sont brièvement évoquées à travers des témoignages diffusés par téléphone dans la galerie interactive, dans le couloir arrière de la salle d’exposition permanente. Cette galerie, où se trouvent la plupart des médias interactifs (cartes, maquettes, téléphones, écouteurs, ordinateurs et tablettes), est rarement traversée par les visiteurs. Par la suite, le guide ne présente que brièvement l’exposition temporaire et laisse les visiteurs faire le tour de façon indépendante. Ces expositions temporaires (pas plus de deux par an) traitent généralement de théories historiques basées sur des découvertes archéologiques ou ethnographiques. C’est le seul endroit du musée où sont présentés des clips vidéo sur écrans de télévision. La visite guidée se termine généralement à la maison longue, bien qu’une autre option de visite permette aux visiteurs de découvrir la réserve de Wendake avec leur guide, notamment la maison Tsawenhohi, l’église Notre-Dame-de-Lorette et les cascades de Kabir-Kouba. Les photos et la manipulation d’objets sont autorisées dans la maison longue. La plupart des visiteurs interagissent donc ainsi avec les artefacts (outils, bûches, manteaux de fourrure et même le feu) et prennent davantage de temps pour observer les objets et le lieu. Sur la base des observations, le passage à travers la maison longue est généralement le moment où le dialogue prend le plus de sens. Les visiteurs sont autorisés à s’asseoir autour du feu avec le guide, le ton devient plus relaxant et l’ambiance tranquille, et les questions fusent de façon informelle.

La visite guidée du Musée Huron-Wendat est une expérience holistique, qui implique une rencontre avec les membres de la communauté autochtone (Entrevue Inf#3, Musée Huron-Wendat, 20 novembre 2019). Ceux-ci sont présents dans le musée puisque la plupart des guides et l’un.e des professionnel.le.s sont eux-mêmes Wendat. La visite embrasse les sens, la réflexion, et les connaissances. L’environnement multimédia donne le sentiment d’être dans le monde naturel, grâce aux images et aux sons diffusés, engageant alors les sens auditifs et visuels. Par exemple, la présence des arbres et de la cartographie du ciel de Wendake au plafond immersent les visiteurs dès leur entrée dans la salle d’exposition permanente. Cet environnement permet de transmettre l’idée de territoire définie plus haut. La tradition orale joue également un rôle important puisqu’elle passe par le dialogue. Les guides offrent des opportunités d’échanges et aident à comprendre les aspects les plus complexes de l’exposition. Grâce au guide, les visiteurs ont la possibilité de poser des questions et de discuter de leurs connaissances sur l’histoire, la culture, la société et la politique des Wendats. Comme observé sur le terrain lors de la visite, certains visiteurs ont tendance à interrompre leur guide afin de poser des questions et de faire des comparaisons avec la situation de leur pays, ce qui conduit à de nombreux échanges témoignant d’un intérêt certain pour la culture de l’Autre. Les gens communiquent également au sein de leur groupe, stimulés par la présentation du guide. Ce privilège de l’oralité crée un autre type de muséologie; l’expérience est personnalisée et dynamique, et encourage l’imagination (De Stecher 2014 : 67). Les visiteurs profitent d’un service sur mesure, et le caractère informel de l’oralité laisse beaucoup de place à la créativité.

L’analyse inférentielle sur les visiteurs nous indique que ceux-ci sont principalement allochtones, francophones et éduqués. 45% de la clientèle est étrangère, en majorité originaire de France, de Suisse, de Belgique et du Maroc. Selon le sondage, le musée semble aussi être un site touristique pour les visiteurs canadiens, tous étant de la province de Québec. Seul un.e visiteur interrogé.e s’est identifié.e comme Wendat. Selon les questionnaires, la principale motivation à venir visiter le musée est la curiosité, pour en savoir plus sur le peuple Wendat et la culture amérindienne. Bien que la grande majorité des visiteurs ne s’identifient pas comme autochtones, certaines personnes ont indiqué qu’elles avaient un intérêt particulier pour la culture autochtone et / ou un lien avec les peuples autochtones de leur pays d’origine (Questionnaires 20191130#02 et 20191130#07, Musée Huron-Wendat, 30 novembre 2019). À la question « éprouvez-vous un lien ou un sentiment d’appartenance avec le contenu du musée concernant votre identité culturelle? » la plupart des réponses étaient positives, soulignant un intérêt et une affinité pour ce que les visiteurs appellent la « culture amérindienne ». Cela prouve que le Musée Huron-Wendat est un lieu de découverte. Aussi, le livre d’or est ponctuellement rempli de commentaires positifs de diverses nationalités, soulignant souvent la qualité de la visite guidée et leur expérience émotionnelle concernant l’histoire des Premières Nations. Ce que les visiteurs disent apprécier le plus est sans aucun doute la proximité avec la culture, le passé et la mythologie autochtones à travers la rencontre avec les employés et les artefacts. De nombreux commentaires témoignent d’un fort soutien à la légitimité et la souveraineté des peuples autochtones. La majorité des avis démontrent que les visiteurs ont beaucoup appris pendant leur visite et la plupart des gens mettent vraiment l’accent sur la qualité de la visite guidée et l’amabilité des guides.

Les conclusions du terrain démontrent également qu’il est difficile de juger l’attrait et la pertinence du musée auprès de la communauté. Les Wendats ne semblent pas visiter le musée et personne ne remet en cause l’exposition de son propre héritage. Un employé du musée interrogé a souligné la nécessité de développer et de varier l’offre, afin que les membres de la communauté wendat reviennent au musée. En effet, l’absence de visiteurs wendats peut s’expliquer par la lassitude par rapport à l’exposition permanente, la même depuis l’ouverture du musée, ou le manque de renouvellement. Cependant, le Musée Huron-Wendat stipule dans ses objectifs qu’en tant qu’institution par et pour la communauté, la participation active de la population wendat est encouragée. Dans son analyse de la manière dont la production artistique wendat contribue à la continuité et à la cohésion sociale de la nation, De Stecher met l’accent sur la programmation événementielle du musée, riche et variée, rassembleuse pour la population de Wendake (De Stecher 2017). Par exemple, le musée a célébré le 5 juin 2018 son 10e anniversaire, avec une soirée spéciale et des feux d’artifice. Commémoré en présence de la communauté de Wendake, cet anniversaire a également marqué le succès d’un musée rayonnant. Il est à noter que l’année de création du Musée Huron-Wendat était aussi celle du 400e anniversaire de Québec : le développement d’un musée autochtone est d’autant plus symbolique, marquant l’affirmation de la présence wendat parallèlement à l’établissement des colons français. Des avant-premières d’expositions, des lancements de programmes, des conférences privées et d’autres événements sont souvent annoncés auprès de la communauté, attirant parfois des Wendats et plus souvent des visiteurs extérieurs. Des personnalités et des artistes wendats sont également invités à participer. En fait, le musée attire plus de touristes que de locaux, et davantage d’Euro-Canadiens que d’Amérindiens. Les Wendats ne visitent pas, ou peu, leur propre musée. Est-ce si important, s’ils en sont fiers et en charge de son fonctionnement? Cela mériterait un approfondissement par la rencontre avec la communauté de Wendake.

Conclusion

La création du Musée Huron-Wendat en 2008 est une étape importante dans la reconnaissance des droits des peuples autochtones à l’autodétermination. Elle témoigne également de l’autorité de gestion de leurs propres patrimoines et institutions. Dans ces musées régis par les Premières Nations elles-mêmes, les relations entre exclusion historique et domination s’inversent; depuis lors, une renaissance culturelle a vu le jour. En effet, le musée a largement contribué à l’évolution et au renouveau de la culture wendat. Les programmes et expositions du musée contribuent aux changements sociaux tout en confirmant la présence continue des traditions culturelles wendates. Le Musée Huron-Wendat est une institution qui dessert sa communauté et son territoire par le développement d’une muséologie intégrative et d’une économie touristique.

Au-delà du statut de « zone de contact », le Musée Huron-Wendat est une institution nationale où le Conseil de la Nation Huronne-Wendat exerce un contrôle sur les processus de représentation et d’interaction avec sa communauté et d’autres groupes exogènes, comme des professionnels Québécois non-autochtones et des touristes étrangers. Si la gouvernance du musée est unilatérale, les pratiques muséologiques reposent sur un mot clé : le dialogue. Les combinaisons d’expositions efficaces et esthétiques avec des traditions culturelles dites authentiques en font un musée de qualité. Cette hybridation des pratiques fait la force du Musée Huron-Wendat dont l’identité distinctive possède un impact significatif sur les visiteurs. L’expérience totale et authentique est dûe à la rencontre entre guides wendats et visiteurs curieux. Les échanges humains y sont forts, et le cadre du musée est exceptionnel. Le Musée Huron-Wendat, en tant que marqueur territorial et acteur culturel, remplit un rôle politique, social et éducatif à la fois pour « Nous » et pour les « Autres ».

En revanche, la collecte des données et la méthodologie mettent en évidence un problème : le manque de sources issues de la communauté wendat. Comment analyser l’impact territorial et social du musée? Comment évaluer si le musée est un marqueur identitaire? Quel contrôle la communauté, hors Conseil de la Nation, exerce-t-elle sur l’interprétation du message véhiculé par le musée? Seule une étude plus approfondie de l’investissement de la communauté Wendat permettra d’évaluer s’il est possible d’établir une représentation sociale équitable. Reste à rencontrer les Wendats et à dialoguer ensemble de leur désir de collaboration directe. Celle-ci devra sûrement se réaliser à travers l’éducation et l’accès aux formations muséologiques. Nul doute qu’un meilleur accès à la muséologie aura des impacts positifs sur le développement communautaire, éducatif et touristique de Wendake.