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En 1966, Mao Zedong déclare la Révolution culturelle dans un effort de reprendre le pouvoir, saisi par ses rivaux du parti communiste après les échecs du Grand Bond en avant (1958–1962). En mobilisant l’ensemble de la jeunesse chinoise, Mao désigne les ennemis du régime qu’il accuse d’avoir trahi les principes de la révolution. C’est une grande période de tumulte où les jeunes s’arrachent de leurs liens sociaux par allégeance au Grand Timonier. Les parents, les patrons d’entreprise et les professeurs sont dénoncés et condamnés dans de grands procès publics organisés par les gardes rouges. Avec ces séances de critique, Mao réaffirme son pouvoir et tasse ses adversaires. Mais la jeunesse ne s’arrête pas pour autant. La révolution dérape tandis que plusieurs actions contestataires sont commises au nom du Grand Timonier. Éventuellement, les gardes rouges et les cadres du parti viennent à se livrer une véritable guerre civile où chacun prétend porter les véritables vertus de la révolution. La répression survient en 1968 lorsque l’armée de libération est appelée pour arrêter les gardes rouges dans une longue manifestation qui reflète, selon l’historien Song Yongyi « l’attitude du pouvoir qui assassinait sans vergogne ses citoyens »[1]. La répression sonne le glas pour certaines franges des gardes rouges : ils n’ont plus leur place en Chine. Plusieurs s’enfuient alors à Hong Kong, qui est encore une colonie britannique à l’époque. Le choix de la destination n’est pas anodin : la région est fréquemment sujette à diverses vagues de migration depuis la victoire des communistes en 1949 et s’avèrent être un refuge sûr[2].

L’un de ces gardes rouges, Wu Man, s’enfuit de la Chine en 1973 pour se rendre à Hong Kong. La militante Yu Shuet part aussi avec des camarades la même année. La traversée est difficile alors que deux de ses compagnons se noient dans les eaux froides séparant le continent et l’île[3]. Rendus à Hong Kong, ces gardes rouges n’arrêtent pas leur militantisme pour autant. En se joignant avec des militants locaux, ils fondent le « 70s ». Sans allégeance idéologique précise, les membres du groupe se voient plutôt comme étant les partisans de la liberté et de l’égalité : les véritables porteurs d’une révolution au service des masses. Ils déclarent ainsi : « The aim of revolution is to change society, not to register the correctness of this or that ism. With an open attitude, we therefore recognize, criticize and welcome all progressive thought. Any “pure xxx-ism” is absolutely meaningless »[4]. Le « 70s » représente ainsi l’émergence de l’extrême gauche alternative après l’échec du maoïsme à Hong Kong[5]. C’est un groupe complètement dissocié de la pensée maoïste qui développe sa propre vision révolutionnaire.

Avec le décès de Mao en 1976, le « 70s » en vient à s’interroger sur l’avenir de la Chine. Pour eux, la mort de Mao représente l’espoir d’une nouvelle ère. Mais la nature de cet avenir suscite plusieurs discussions au sein du groupe. La Chine devra-t-elle continuer dans la tendance autoritaire que le groupe lui attribue ou bien devra-t-elle s’ouvrir aux idées des masses ? Quelle est la forme de changement au sein du régime chinois qu’espère voir apparaître l’extrême gauche hongkongaise suivant le décès de Mao Zedong ? C’est une question large à laquelle le « 70s » répond selon leurs connaissances de l’histoire chinoise.

Il est indéniable pour ces militants que les évènements en Chine affectent Hong Kong, car selon eux, les deux régions et leurs enjeux ne font qu’une[6]. C’est en étudiant les années de la Révolution culturelle qu’ils découvrent deux textes importants. Le premier, Whither China?, est rédigé par l’écrivain Yang Xiguang de l’organisation « Sheng Wu-Lien », un groupe militant basé dans la province du Hunan. Dans son texte, l’auteur s’inspire directement des évènements de la commune de Shanghai d’octobre 1967 à janvier 1968 pour souligner le besoin du peuple de se réveiller du contrôle des cadres du parti. Quant au deuxième, Concerning Socialist Democracy and Legal System—Dedicated to Chairman Mao and the Fourth National People’s Congress, il est écrit en 1974 par le collectif « Li Yizhe ». Originaire de Guangzhou, le collectif réunit divers auteurs et militants de la région qui publient plusieurs textes politiques. Les auteurs accusent le PCC d’être gangréné par des factions embourgeoisées qui détournent les intentions de la révolution. Les deux textes et leurs auteurs sont vivement critiqués par le parti après leur publication. Mais des années plus tard, ils deviennent une inspiration majeure pour ces militants hongkongais. C’est avec une lecture attentive de ces textes que le « 70s » répond à leurs interrogations sur le futur. Mais avant de procéder à une analyse de ces réflexions, nous allons commencer par retracer l’historique du groupe.

Histoire du « 70s » : de la marginalité à l’oubli

Il reste très peu de traces de l’existence du « 70s » et nous retrouvons encore moins d’informations concernant ses activités. Le philosophe américain Ken Knabb les rencontre brièvement en 1978 et prend ensuite la peine de leur envoyer une « appréciation critique » de leurs activités[7]. Dans la même veine, le musicien anarchiste montréalais Norman Nawrocki conduit une interview en 2009 avec l’un des anciens membres du « 70s », Lenny Guo. Selon ce dernier, il se convertit à la musique après la dissolution du groupe et par le biais de son art, il continue son militantisme[8]. Ces deux sources externes nous donnent quelques informations qui aident à reconstituer un petit historique du « 70s ».

L’absence de consensus concernant le nom du groupe révèle son passé nébuleux. Au sein de Minus, leur magazine anglophone, ses membres se présentent comme étant le « 70s Front ». Toutefois, ils précisent que le magazine est édité par des membres du « 70s Biweekly »[9]. Pour leur premier recueil, ils se décrivent comme étant le « 70s Collective ». Quant à Knabb et Nawrocki, ils les appellent simplement le « 70s »[10]. Il y a des chances que ce dernier nom soit leur appellation officielle et que les titres additionnels désignent les sous-groupes qui s’attèlent à une tâche précise : la rédaction de textes en chinois, la traduction en anglais ou encore, l’édition des ouvrages. Guo mentionne qu’il est parmi les quatre ou cinq membres les plus impliqués du groupe, auquel s’ajoute une multitude de contributeurs de différents horizons de l’extrême gauche locale[11]. De fait, la question du nombre exact des membres et des amis participants aux activités du groupe est peu claire. Nawrocki qualifie le collectif de « large », sans apporter plus de précision.

Les années d’activités du groupe sont tout aussi floues que le nom. Nos meilleures estimations apparaissent en étudiant les années de leurs publications. Le premier numéro de leur périodique en anglais est daté de mai 1976. Il demeure toutefois la possibilité que le groupe commence ses activités quelques années avant cela, avec la publication de leurs périodiques en chinois. Toutefois, aucun de ces numéros ne nous est parvenu. Il nous est ainsi impossible de déterminer leurs dates de publication ou d’étudier ces textes pour notre recherche. Comme mentionné, Wu Man arrive à Hong Kong en 1973, mais il semble avoir commencé à travailler avec le « 70s » seulement en 1974[12]. Dans un texte datant de la même année, ils citent l’article d’un autre groupe, « Our Position », pour expliquer leur idéologie politique en démontrant que de fortes similitudes existent entre leurs opinions. Il est possible que les deux groupes aient des liens similaires et que des membres participent dans l’un comme dans l’autre[13]. Concernant la dissolution du « 70s », nous serions d’abord tentés de désigner 1979 comme l’année fatidique, conformément à la dernière réédition de leur premier recueil en anglais. Les témoignages tendent toutefois à montrer que le groupe cesse tout simplement ses activités en anglais pour se concentrer sur leur publication en chinois. Un deuxième recueil est donc publié et leur autre journal continue pour encore quelques années. Knabb annonce que le « 70s » se dissout au début des années 1980[14]. Quant à Guo, il témoigne qu’ils arrêtent toute opération vers la fin des années 1980[15].

Le centre d’activité du groupe réside dans la librairie radicale Black and Red[16], probablement située au premier étage du 180 Lockhart Road du quartier de Wanchai[17]. Le « 70s » se démarque par ses publications. Avec le magazine Minus, le collectif vise à couvrir l’actualité contestataire en Chine et à Hong Kong, avec occasionnellement une mention pour les nouvelles internationales[18]. Comme mentionné plus haut, Minus est une traduction en anglais de leur magazine homonyme (« The 70s »)[19]. Tout au long de leurs années d’activité, le groupe cherche à diffuser ses publications à l’étranger en cultivant des liens avec d’autres militants à travers le monde. L’anarchiste portugais Jorge Valadas (de son pseudonyme Charles Reeve), remercie ainsi le groupe d’avoir reçu ses copies de Minus et s’engage à les distribuer à ses camarades[20]. Le « 70s » recommande aussi Our Generation, tribune littéraire de la culture politique alternative montréalaise, comme une lecture pertinente[21]. L’équipe de rédaction vise d’abord à publier régulièrement ses numéros au fil des années jusqu’à atteindre le chiffre symbolique de 1984, en référence au roman éponyme de George Orwell, avec chaque numéro désignant un décompte vers l’année ciblée[22]. Ainsi, le nombre de publication de Minus s’élève à huit en 1976, puis à sept l’année suivante. C’est une mission ambitieuse que le groupe ne réussit pas à accomplir, considérant le faible nombre de numéros publiés[23].

Au cours de son existence, le « 70s » publie deux livres. Le premier, China: The Revolutions is dead—Long live the Revolution, est traduit et publié en 1977 par les éditions montréalaises Black Rose Books. Il s’agit d’une anthologie de textes politiques portant sur la Révolution culturelle, ses significations et ses impacts sur la société chinoise. On y retrouve aussi plusieurs textes de penseurs occidentaux tels que l’économiste Nigel Harris et les philosophes Raya Dunayevskaya et Cajo Brendel, en plus de plusieurs essayistes chinois comme le trotskyste F. H. Wang. C’est un livre largement théorique qui vise à offrir diverses perspectives, Chinoises comme occidentales, sur les idées de la gauche radicale compilées dans un même recueil. Le deuxième livre semble être resté à Hong Kong. Revelations That Move the Earth to Tears est un autre recueil écrit cette fois-ci exclusivement en chinois qui réunit divers textes, poèmes et histoires courtes prohibés par le PCC durant la Révolution culturelle[24]. Le groupe prévoit une traduction en anglais, mais outre le titre et une introduction, elle ne voit jamais le jour.

Outre les publications, le « 70s » est aussi actif sur le terrain. Il participe, par exemple, à un forum organisé à la suite de la manifestation de Tiananmen le 5 avril 1976. Cet évènement survient durant les funérailles de Zhou Enlai, le premier ministre de la RPC et le bras droit de Mao. Alors que la foule tente de lui rendre hommage, les autorités répriment le mouvement, provoquant ainsi une petite émeute. Le groupe couvre largement cet évènement avec Minus. La répression est ainsi perçue comme un acte d’entrave à la volonté du peuple à honorer la mémoire du bien-aimé Zhou Enlai : « The authority had made it clear that it would mobilise [sic] great forces for suppression which the masses could never successfully resist »[25]. Le forum se tient donc en réponse à la manifestation le 16 mai au parc Victoria à Hong Kong et réunit environ 1 000 personnes. Le « 70s » se présente comme l’un des commanditaires de l’évènement et rejoint trois autres groupes aux tendances trotskystes. Deux des membres du « 70s » prononcent un discours qui condamne le PCC et qui appelle à une révolution sociale en Chine. Selon eux, le discours est chaleureusement accueilli par la foule[26]. Il n’y aurait aucune autre référence indiquant que le collectif participe à d’autres actions de ce genre sur le terrain. Cependant, nous verrons que le groupe milite activement pour la libération de prisonniers politiques, principalement pour les auteurs de Whither China? et de Concerning Socialist Democracy and Legal System. L’un des numéros de Minus déclare ainsi le 5 juin 1977 comme étant la journée internationale de libération pour Yang Xiguang et Li Zhengtian de « Li Yizhe ». Selon le « 70s », plusieurs actions en soutien aux auteurs sont ainsi portées par des militants à travers le monde[27]. De même, ils indiquent qu’ils sont engagés dans plusieurs causes locales comme la lutte pour l’amélioration des logements ou sur les politiques restrictives contre les marchands ambulants.

Nous retrouverons un peu plus d’indices qui expliquent la dissolution du groupe. Le manque de financement semble être un facteur important. Dans chaque numéro, on souligne l’importance des dons pour l’existence du groupe. Si la publication de Minus est plutôt régulière à ses débuts, nous retrouvons un écart important entre le troisième numéro (septembre & octobre 1976) et le quatrième (avril & mai 1977). Les éditeurs attribuent ce retard à leur maigre financement dont une grande partie est destinée à d’autres activités, comme la création de leur premier recueil[28]. Une autre raison qui explique la dissolution du groupe est liée aux dissensions internes. L’une des particularités du « 70s » est sa tolérance envers toute contribution venant de la gauche radicale. Durant le forum, des maoïstes sont ainsi venus perturber les discours. Plutôt que de les chasser, les membres du « 70s » leur offrent une tribune pour s’exprimer[29]. Leur recueil propose aussi plusieurs textes dont ils jugent la lecture pertinente, tout en admettant leurs désaccords sur certains points. Dans sa lettre critique envoyée en 1978, Knabb perçoit cette tolérance comme étant contraignante : sans idéologie claire, le groupe ne peut pas s’organiser et se bâtir une base militante solide. Comme il l’explique :

The 70s’s looseness of self-definition results in the usual defects of vague “affinity groups.” Nonparticipants coast along with the projects of those with more initiative or “more experience.” Internal differences are seldom polarized practically or publicly. Independent ideas, instead of leading to independent projects, get lost in lowest-common-denominator collective action, leading to boredom and dropping out. Their toleration of virtually anybody dilutes the clarity of their efforts[30].

Selon Knabb, sa lettre provoque un débat à l’interne sur l’organisation du groupe alors que plusieurs membres soutiennent sa critique[31]. Or, le groupe cesse tout de même ses activités quelques années plus tard en arrêtant ses publications et en fermant la librairie.

En rejetant les étiquettes idéologiques et en accueillant tous les points de vue de la gauche radicale (qu’ils soient anarchistes, trotskystes ou marxistes), le « 70s » devient marginal. D’une part, ils sont marginaux au sein des cercles gauchistes. Durant les émeutes de 1967, l’ensemble de la société hongkongaise se range derrière l’administration britannique pour arrêter les violences engendrées par les communistes. Cela occasionne un démantèlement important des réseaux du PCC à Hong Kong[32]. Malgré tout, les maoïstes restent les plus actifs dans la sphère radicale[33]. Par rapport au « 70s », ils sont en mesure de passer sous silence leurs activités grâce à leurs organes de presse. C’est le cas durant le forum du parc Victoria où aucun journal communiste ne prend la peine de rapporter l’évènement[34]. D’autre part, le « 70s » est aussi marginal par rapport à toute la société hongkongaise. Après les émeutes de 1967, toute notion de gauche radicale perd en popularité. Les émeutes sont un point critique de la présence maoïste à Hong Kong, mais elles affectent aussi la culture gauchiste en général tandis qu’elles deviennent synonymes de violence[35]. Le « 70s » défend la portée pacifique de ses actions, mais il ne nie toutefois pas la légitimité de la violence dans un contexte révolutionnaire :

A violent socialist revolution is necessary, and if we are to radically transform society and construct in its place one of free workers, there is no way for us to accomplish this save by a violent socialist revolution. But naturally we cannot encourage and sing the praises of violence. Rather than saying violence inevitably and logically proceeds from revolution, better to say that we are forced to resort to violence because, in order to secure their own profits, the counter-revolutionaries suppress us with violence[36].

C’est selon cette définition de la violence que le « 70s » justifie l’idée d’un renversement du PCC. Seulement, cette violence n’est légitime que si elle émane d’un désir général des masses. Mais pour ce faire, celles-ci doivent se rendre compte de sa situation. Le « 70s » tient cette conclusion selon sa lecture attentive du texte de Yang Xiguang, Whither China? dont nous ferons l’analyse.

L’éveil de Yang Xiguang : Whither China?

C’est en plein milieu de la Révolution culturelle que le jeune Yang Xiguang grandit à Changsha, dans la province du Hunan. Étudiant dans une école qui prime l’excellence, il participe en juin 1966 à la formation d’un petit groupe secret dont les intentions sont simplement de démontrer leur respect envers Mao[37]. Après avoir être mis en arrestation durant quelques semaines, Yang s’affilie avec « Sheng Wu-Lien » qui devint l’une des organisations les plus populaires de l’époque. De son nom complet, le « Comité de l’alliance prolétarienne de la province du Hunan », « Sheng Wu-Lien » rassemble tous les désaffranchis et les marginaux de la société[38]. Beaucoup de ses membres ont ainsi été persécutés d’une manière ou d’une autre par le parti.

« Sheng Wu-Lien » se compare aux Soviets de 1917 : une organisation née des actions du peuple et visant à travailler pour celui-ci[39]. Yang et ses camarades s’inspirent alors grandement de la Commune de Paris de 1871, où plusieurs districts se révoltent contre le gouvernement et instaurent un système d’autogestion durant plusieurs mois. Yang s’identifie immédiatement avec l’organisation et devient l’un de ses écrivains les plus prolifiques. Lorsque d’autres organisations militantes tentent l’expérience avec la commune de Shanghai en janvier 1967, « Sheng Wu-Lien » (et en parallèle, Yang) y voit une légitimation de leur pensée comme pratique viable. Si la « tempête de janvier » est un échec cuisant[40], « Sheng Wu-Lien » considère tout de même l’expérience comme un succès. Pour Yang, l’expérience de ses camarades l’influence directement dans ses idées : il existe ainsi une classe au sein de l’élite qui oppresse la masse[41].

Whither China? est publié un an plus tard. Yang commence en citant Lénine qui énonce que le but d’une révolution est de remplacer une classe par une autre. Il argumente ainsi que la commune de Shanghai est une réussite parce qu’approximativement 90 % des cadres du parti sont rééduqués ou écartés du pouvoir[42]. Yang est ainsi l’un des premiers à désigner les cadres du parti comme les ennemis du peuple. Il conclut que le démantèlement de la commune ne doit être attribué qu’au retour des cadres du parti qui réussissent à reprendre le pouvoir grâce à l’armée[43]. Pour Yang, c’est la preuve que le peuple chinois est persécuté par une classe de gens qui cherchent à tout prix à préserver leur position privilégiée. Il fait toutefois la séparation entre Mao et le parti. Mao est perçu comme un militant et un idéologue dont les exploits sont détournés par des cadres malveillants pour leurs fins personnelles. L’armée devient aussi un problème. Si elle est d’abord vue en 1949 comme l’outil de libération du peuple, elle devient sa source principale de répression par la suite. La révolution est donc retirée au peuple pour revenir à l’élite. Le constat dès 1968 est ainsi que la révolution n’est jamais véritablement réalisée[44].

La Révolution culturelle n’est donc qu’une révolution de façade où le parti dicte ses décisions au peuple. Ce qui régit la Chine durant toutes ces années est le principe de la « dictature du peuple » : un autoritarisme dicté par le parti et conduit par la masse[45]. Bref, un subterfuge faisant passer les décisions du parti comme étant celles du peuple. Durant la Révolution culturelle, cette dictature se voit surtout durant les procès publics, des « séances de lutte », où les gens approuvent sous contrainte les coupables désignées par le PCC. Dans le cas de la commune de Shanghai, Yang voit un autre exemple lorsque le parti mentionne que le système des communes n’est pas adéquat. Pour Yang, le fait que le peuple chinois accepte ces mensonges constitue la preuve qu’il n’est pas politiquement mature[46]. En résumé, si la commune est d’abord une belle réussite, elle s’avère une déception tandis qu’elle est rapidement démantelée par les cadres du PCC. Cette tromperie au peuple chinois se rajoute à plusieurs autres. Pour Yang, celui-ci doit se réveiller s’il veut un jour s’émanciper.

Dès sa publication, le texte de Yang fait des vagues. Dès la fin du mois, Whither China? et les autres textes de « Sheng Wu-Lien » sont distribués nationalement par le parti comme des exemples de publications à être critiquées[47]. La pression du PCC sur l’organisation cause sa dissolution, mais le texte réussit à survivre et à se transmettre à Hong Kong pour atteindre les membres du « 70s ». Pour ces derniers, le texte de Yang est l’un des plus importants produits durant la Révolution culturelle[48]. Avec les dernières années du règne de Mao, Whither China? est plus que jamais d’actualité selon le collectif Hongkongais, à l’exception maintenant que Mao est complètement désavoué par les militants du « 70s ». Par exemple, dans un texte satirique, on déconstruit le mythe du dirigeant en critiquant autant ses qualités de poète, de patriote et de théoricien pour conclure finalement qu’il ne soit qu’un grand machiavélien[49]. Le « 70s » conclut lui aussi que le peuple est encore trop enivré par le Grand Timonier. Selon le groupe, l’opinion de la majorité n’était pas nécessairement celle à suivre au temps du règne de Mao[50]. Pour que la masse gagne véritablement sa liberté, elle doit sortir de l’ombre de Mao et du parti. Les témoignages d’anciens gardes rouges qu’ils consignent sont la preuve vivante de la véracité du texte de Yang.

Dans une discussion retranscrite au sein de Minus, d’anciens gardes rouges désignent la propagande comme étant la principale cause de leur enivrement envers Mao. L’un d’eux explique par exemple avoir été hystérique lorsqu’il l’entrevoit durant un défilé : « I was overwhelmed at that time; even lost my voice. Frankly I was not that crazy over [Mao Zedong], but I could not help being excited along with the rest of the people »[51]. Pour ces gardes rouges, le fait que la Révolution culturelle ne soit réduite qu’à une lutte de pouvoir entre les diverses factions du PCC trahit toute légitimité. Elle révèle que l’élite, prétendument au service du peuple, n’agit encore une fois dans son propre intérêt. Les inconsistances à petite échelle du parti jouent beaucoup individuellement. Pour un, les critiques diffamatoires de certains membres du parti contre l’un de ses amis décédés sont le moment de rupture définitif quant à son estime envers le PCC. Un autre témoigne des disputes qu’il menait avec ses camarades contre un comité élu par le PCC concernant différentes directives inspirées des écrits de Mao qui s’avéraient contradictoires. Selon lui, le conflit mena à plusieurs décès et à son étiquetage antirévolutionnaire[52]. C’est en se servant de ces témoignages que le « 70s » émet son constat : le peuple a besoin d’un évènement collectif pour qu’il se réveille de cette grande tromperie orchestrée par le parti. En bref, il faut déclencher le processus d’éveil des masses.

Selon le « 70s », le processus d’éveil des masses se fait d’abord lors de la manifestation de Tiananmen en avril 1976[53]. C’est là le signe d’un changement pour la Chine. Whither China? devient l’interrogation principale du groupe quant à la façon dont la Chine doit s’organiser maintenant qu’elle se réveille. Pour le « 70s », la réponse est évidente : ce sont les masses qui doivent dicter ce qu’elles désirent sans l’entrave d’une classe d’élite. La lutte de succession n’est donc qu’une distraction, une autre manoeuvre de celle-ci. Ils citent en exemple le double discours orwellien de certains membres du parti par rapport à la situation de Deng Xiaoping : que ce soit concernant sa destitution en février 1976 ou sa réinstallation en octobre de la même année, certains membres n’hésitent pas à présenter la situation comme la volonté du peuple[54].

Whither China? a donc fait comprendre au « 70s » qu’il existe toujours une classe privilégiée au sein du PCC et que cette classe dicte la façon d’agir et de penser du peuple chinois. En consultant les anciens gardes rouges et en étudiant l’actualité en Chine, le collectif Hongkongais corrobore les propos rapportés par le texte de Yang. Pour eux, la première étape pour bâtir une société post-maoïste est donc de s’affranchir du parti et de laisser le peuple décider par lui-même. Concrètement, ce n’est toutefois pas suffisant pour bâtir un futur. Le texte de Yang n’est pas parfait. Les membres du « 70s » désavouent par exemple le système des communes prôné par le texte qu’ils voient comme étant « naïf » et « idéaliste »[55]. Mais sans les communes prônées par Yang, on implique que les masses doivent gérer une classe supérieure sans pouvoir être protégées de celle-ci. Le « 70s » fait donc référence à un autre texte influent de la Révolution culturelle pour compléter celui de Yang.

La réforme légale de « Li Yizhe »

Concerning Socialist Democracy and Legal System est originalement une affiche géante de plus de 90 mètres, accrochée dans la ville de Guangzhou le 7 novembre 1974. Le texte est impressionnant par sa taille : plus de 20 000 caractères étalés sur 67 pages de papier journal. Le travail est signé de la plume du collectif « Li Yizhe », constitué de trois hommes, mais dont Li Zhengtian est l’auteur principal. Il commence l’écriture lors de son séjour en prison, en 1971, et la finalise seulement quelques années plus tard, après plusieurs ébauches complétées. Dans un premier temps, une trentaine de personnes signent le premier brouillon, mais seulement trois décident de mettre leurs noms sur la version définitive[56]. Chen Yiyang et Wang Xizhe sont membres, avec Li Zhengtian, d’un petit groupe de gardes rouges de la région, le « Red Headquarters Call-to-Arms Combat Group »[57]. Dès sa diffusion, le texte devient populaire dans toute la région. Les passants sont continuellement acculés près de l’affiche pour la lire et prendre des notes. La diffusion est importante, plusieurs copies sont fabriquées et distribuées à tour de bras. Un manifestant des funérailles de Zhou Enlai soutient par exemple que plusieurs camarades auraient lu le texte[58]. Bien après l’établissement de l’affiche originale, le texte se propage à travers la Chine puis jusqu’à Hong Kong. Au début, la réaction du PCC est dubitative. Le texte camoufle ses critiques du parti en se concentrant sur la condamnation sévère du général déchu Lin Biao. C’est après vérification avec les plus hautes instances locales du parti que le collectif est classé comme étant antirévolutionnaire et que le texte est banni. Ainsi, entre janvier et mars 1975, les membres de « Li Yizhe » font l’objet de plus de 7 600 séances de critiques[59].

D’entrée de jeux, « Li Yizhe » reprend la thèse de Yang en accusant les premiers révolutionnaires du PCC d’être devenu les agents d’une classe privilégiée régnant sur le peuple. Cette mainmise, « Li Yizhe » la qualifie précisément comme étant une dictature sociale fasciste féodale[60]. Elle est sociale, car elle est basée sur l’embourgeoisement de l’élite du parti, ce qui signifie un virage vers le capitalisme[61]. Par cela, le collectif voit le capitalisme comme la domination d’un groupe (c’est-à-dire l’élite) sur un autre (c’est-à-dire les masses) dans le but de protéger ses intérêts personnels. Le capitalisme justifie le contrôle des masses. Le simple fait qu’elles soient contrôlées signifie pour les auteurs un tournant vers le fascisme. Ils notent que chaque émergence de ces factions coïncide à une révolution des masses. Les années sous Liu Shaoqi suivent le Grand Bond en avant tandis que celles de Lin Biao débutent avec la Révolution culturelle. Face au risque de se faire renverser par les masses, ces groupes dominants ne firent que réaffirmer leur mainmise. Dans cela, les auteurs voient un processus naturel qui est joint dans toute l’histoire chinoise, en commençant par le premier empereur Qin Shi Huang de la dynastie des Qin (221–206 av. J.-C.). Selon eux, le système dynastique est encore trop présent dans la mentalité chinoise. La confiance du peuple face au PCC et à ses dirigeants est donc une erreur grossière qui résulte d’une manipulation de ces derniers qui profitent d’une mentalité d’un autre temps[62].

De fait, si le groupe souhaite que la Révolution culturelle soit la rupture finale de cette tradition féodale, les membres se rendent compte rapidement que ces dernières années ont plutôt renforcé la dictature du PCC sur le pays[63]. « Li Yizhe » considère Lin Biao et son entourage comme étant les dirigeants principaux de cette faction tiers. Malgré son décès en 1971, Lin Biao reste une figure ennemie chez les gardes rouges qui le voient comme étant l’instigateur principal de la perversion du parti. Tout le long du texte, « Li Yizhe » accuse ainsi le général d’être l’ennemi principal. Mais comme avec le texte de Yang, Mao est dispensé des critiques :

The masses of people are […] fully aware of the source of their misfortune. The cutting edge of their attack is directed at the [Lin Biao] System. No one of them has manifested hatred of Chairman Mao’s revolutionary line and policies. On the contrary, they hate [Lin Biao]—the one who distorted and hindered this line and these policies—and those who enjoy vested interests from the [Lin Biao] System[64].

Ce qu’espère le collectif pour freiner le développement d’une telle classe est l’imposition d’un système légal qui protègerait le peuple des abus. L’existence du PCC n’est donc pas remise en jeu. Seulement, le parti doit être encadré pour assurer qu’il opère dans l’intérêt des Chinois. Pour ce faire, les auteurs suggèrent que la masse exerce une pression sur les cadres du parti, ce qu’ils appellent la « dictature du prolétariat »[65]. C’est ainsi que la quatrième édition de l’Assemblée nationale populaire, prévue pour janvier 1975, devient l’espoir de « Li Yizhe » qu’un véritable changement législatif s’opère[66].

Concrètement, les auteurs souhaitent que les changements se portent sur une restriction des privilèges spéciaux des cadres du parti. Ils citent en exemple les enfants de membres proéminents du parti qui reçoivent une meilleure éducation que les enfants des citoyens ordinaires, ce qui leur donne accès par la suite à des postes importants. À la place, les postes devraient être accordés à des gens qui se démarquent par leurs talents. L’attribution de postes devrait se faire selon une décision des masses. De même, le parti devrait avoir des mesures en place pour destituer ces gens lorsqu’ils ont perdu la confiance du peuple[67]. Par exemple la possibilité de remplacer un fonctionnaire par un autre assure qu’il ne s’embourgeoise pas avec le temps. En théorie, cela assure aussi qu’ils veilleront à respecter les intérêts des gens. Finalement, ils lancent l’idée que le parti ne devrait pas punir le peuple d’avoir exprimé son mécontentement envers certains cadres.

Peu après sa diffusion à Guangzhou, le texte atteint rapidement Hong Kong. Pour le « 70s », le texte du collectif est fondamental pour la compréhension du régime communiste en Chine. La première partie du numéro de juin 1977 de Minus est ainsi consacrée à l’ensemble des écrits de « Li Yizhe » et de Li Zhengtian. D’un texte à un autre, on remarque quelques similarités. Dans What is to be Done in Kwangtung, le collectif prône une restauration des pouvoirs démocratiques du peuple dans le but de déloger les cliques indésirables du PCC. Dans, The Revolution is Dead; Long Live the Revolution!, les auteurs reprennent encore la thèse de Yang en avançant que les Chinois sont encore trop « politiquement immatures » pour saisir pleinement les enjeux de la Révolution culturelle[68].

Nous apercevons clairement l’influence du collectif « Li Yizhe » dans les discussions du « 70s » concernant la fin de l’ère maoïste. Le numéro de septembre & octobre 1976 fait un bilan mortuaire du règne de Mao où l’auteur commence en citant « Li Yizhe » et sa thèse sur la conception d’une classe privilégiée au sein du PCC. Il présente Mao comme étant un « communiste moyen » avec une vue « simpliste » du socialisme. En référence directe avec le collectif, l’auteur conclut ensuite qu’une véritable société socialiste est dictée par le pouvoir du peuple qui décide et qui gère ses propres affaires[69]. « Li Yizhe » inspire aussi les débats quant à la succession de Mao. Le numéro de juillet & août 1977 présente ainsi trois groupes de discussions parmi d’anciens gardes rouges. S’ils ne sont pas formellement membres du « 70s », ils sont tout de même considérés comme des amis du groupe et leurs idées sont les bienvenues[70]. Ainsi, les membres sont d’abord soulagés de l’ascension de Hua Guofeng à la tête de la RPC, car elle signifie la fin de la lignée de Mao avec l’élimination de la bande des quatre. Cependant, ils s’entendent tous pour dire que Hua n’a pas d’acquis social et politique suffisamment solide pour soutenir son règne[71]. Ils anticipent ainsi que Hua s’engage à faire certains compromis pour augmenter sa popularité. Fondamentalement, les participants voient Hua simplement comme un autre cadre embourgeoisé. Les membres de la discussion citent deux raisons : le refus du gouvernement à réévaluer le cas des gens emprisonnés durant la manifestation de Tiananmen et aussi, son refus à commenter la restitution de Deng Xiaoping malgré les pressions populaires. Ce manque de transparence ne fait, selon eux, que renforcer la dissension entre les décisions du parti et la volonté du peuple. Finalement, leur plus grosse crainte réside dans la suppression des forces rebelles comme « Sheng Wu-Lien » et « Li Yizhe ». Pour eux, une telle mesure ne ferait que démontrer que le PCC n’a que remplacé un dictateur par un autre[72].

Kan San, du « 70s », est d’accord avec les idées de ces anciens gardes rouges. Dès l’arrivée de Hua, il y voit une chance que la période maoïste est terminée. Mais, la répression des forces rebelles ruine ses espoirs. L’arrivée de Hua ne signifie pas grand-chose quant à la possibilité d’une rupture avec le régime maoïste : il n’est qu’un cadre comme un autre[73]. Deux amis du « 70s » voient dans l’arrivée de Hua le résultat d’une lutte interne au sein du parti, au lieu de l’aboutissement d’une véritable pression populaire. Ainsi, ils énoncent que les manifestants amassés à Tiananmen se sont prononcés sur leur mécontentement du PCC, plutôt que sur leur appui d’un candidat[74]. Ce sont les masses qui sont vectrices d’un changement et qui pourraient prendre conscience de leur pouvoir. Mais la dictature du PCC fait comprendre au « 70s » que le seul moyen d’atteindre le « bonheur » est d’utiliser la force[75]. En attendant, le cycle dynastique se perpétue.

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En étudiant les textes de Yang et de « Li Yizhe », le « 70s » et ses associés ont réussi à donner réponse sur leurs conceptions d’un futur post-maoïste. Dans ce sens, la réponse en soi est simple : le peuple chinois doit se réveiller de son sommeil et de son apathie millénaire et forcer le PCC à réformer son organisation pour assurer qu’il agisse pour le bien du pays. L’existence du parti n’est pas remise en cause et plusieurs ne remettent pas en question le fait que le PCC soit pertinent sur un plan administratif. Seulement, il doit être sujet à la critique et au changement[76]. Le décès de Mao est propice à un tel changement. Les membres du « 70s » imaginent que sa mort et l’élimination de sa clique offrent un contexte idéal pour qu’une véritable révolution s’opère. Seulement, tout cela reste dans un cadre purement idéaliste. La manifestation de Tiananmen de 1976 signifie pour le groupe la première étape de l’éveil du peuple. Mais en réalité, elle ne servira qu’à consolider le pouvoir de Hua[77].

Durant la manifestation, la foule scande le slogan « China is no longer the China of yore. And the people are no longer wrapped in sheer ignorance. Gone for good is [Qin Shi Huang]’s feudal society. What we want is genuine Marxism-Leninism »[78]. Peut-être que les membres du « 70s » se sont laissés emportés par l’enthousiasme des manifestants, car le slogan est plusieurs fois recopié dans leurs publications. Mais considérant des évènements survenus en Chine après la mort de Mao, l’avenir est loin de ce qu’anticipe le groupe. Après un court règne, Hua Guofeng est écarté du pouvoir et Deng Xiaoping devient le nouveau dirigeant de la Chine. En entreprenant un virage important par rapport au maoïsme, Deng n’abandonne tout de même pas les visées totalitaires du PCC : la manifestation de Tiananmen de 1989 et sa répression sanglante fait directement écho à celle de 1976.

Étudier la Révolution culturelle permet d’étudier la nature de la révolution en Chine et la façon dont elle affecte la société[79]. C’est en étudiant cette période que nous pouvons saisir la dynamique des masses et leur relation vis-à-vis des autorités. L’intention de cet article était de réétudier les tendances idéologiques au sein de l’extrême gauche hongkongaise durant les dernières années maoïstes. Si le « 70s » se présente comme étant beaucoup plus marginal que le phénomène des gardes rouges sur le continent, leur existence met tout de même en évidence la conscientisation d’une classe opprimée sur sa situation. Aujourd’hui, Hong Kong vit ses émeutes les plus importantes de son histoire. La loi d’extradition des prisonniers provoque l’ire des Hongkongais qui se soulèvent ouvertement contre le PCC. Pour tirer des conclusions de l’action du « 70s », nous pourrions parler d’un éveil des masses qui demandent plus fort que jamais une véritable démocratisation de leur société. Peut-être à ce niveau, ces émeutes sont l’évènement que le collectif attendait pour enclencher une véritable révolution. Mais à l’heure actuelle, il est impossible de prédire la suite des évènements à Hong Kong. Il est très possible que ces protestations se concluent similairement à celles de Tiananmen en 1976 et 1989. Ainsi, plutôt que d’annoncer le changement, le titre d’un essai de K. C. Kwok, un autre camarade du « 70s », ferait une meilleure prédiction du futur de la Chine et de Hong Kong : Everything Remains the Same After so Much Ado[80].