Corps de l’article

Introduction[2]

Cette recherche examine les opportunités de désistement assisté chez un échantillon de femmes enceintes ou mères ayant des antécédents criminels et de toxicomanie. Le « désistement assisté » décrit une orientation selon laquelle le désistement est un processus de développement humain qui, la plupart du temps, se déroule naturellement au fil du temps, avec ou sans l’aide d’un professionnel. Suivant cette orientation, le rôle des professionnels qui sont responsables de la supervision communautaire tels que les agents de probation et de libération conditionnelle consiste à « assister » au processus de désistement en fournissant un soutien pratique et en suscitant une narration de soi prosociale (Farrall, 2016 ; King, 2013). Le professionnel peut faciliter le développement personnel en pratiquant un contrôle social léger, en augmentant la confiance en soi et le sentiment de compétence, en plus d’accroître le sentiment d’avoir du pouvoir sur son avenir (King, 2013). Le concept de désistement assisté correspond au « paradigme de désistement » pour la probation et la libération conditionnelle de McNeill (2006), lequel propose que l’on intègre notre compréhension de la façon dont les contrevenants changent et ce qui soutient ce changement aux pratiques de supervision communautaire.

L’approche du désistement assisté s’inscrit dans les conceptualisations récentes du désistement primaire, secondaire et tertiaire. Développer la motivation et les opportunités est vraisemblablement important à l’« étape liminale » (liminal state, Healy, 2010) précédant ou marquant l’amorce du désistement primaire, soit l’accalmie initiale ou l’interruption des activités criminelles. Le désistement secondaire peut être encouragé en favorisant le développement d’un discours narratif prosocial et l’adoption d’une identité « non délinquante ». Enfin, McNeill (2016) décrit un stade tertiaire de désistement, caractérisé par « des changements dans le sentiment d’appartenance » à une communauté, « comment une personne est perçue par les autres et comment elle perçoit sa place dans la société ». À ce stade, le désistement assisté peut se concentrer sur le renforcement des relations et l’identification d’occasions de « redonner » à sa communauté en participant à des groupes et à des activités sociales (par ex. : Heidemann, Cederbaum, Martinez et LeBel, 2016).

McNeill (2006) propose que, dans un paradigme de désistement, les agents de probation et de libération conditionnelle puissent aider les futurs désisteurs en utilisant un dialogue explicite, ainsi qu’en privilégiant la négociation lors de l’évaluation des risques, des besoins, des forces et des ressources, en définissant les tâches à accomplir pour répondre à ces risques et ces besoins en collaboration avec les désisteurs, en développant le capital humain et social, et en offrant des possibilités de « redonner » à la communauté. Farrall (2004), s’appuyant sur Coleman (1988) et Putnam (1995, 2000), entre autres, établit une distinction entre le capital humain et le capital social. Le capital humain comprend les compétences et les connaissances qu’un individu possède (le plus souvent par le biais de l’éducation et l’emploi). Le capital social provient des réseaux de relations qui se tissent entre les individus et qui favorisent la transmission des connaissances, des conseils, des opportunités ; l’apprentissage des normes comportementales, des obligations, des attentes ; la confiance mutuelle et la reconnaissance. Cette forme de capital peut être un élément clé pour la validation identitaire et le développement d’un sentiment accru d’estime de soi et d’efficacité personnelle (Stone, Morash, Goodson, Smith et Cobbina, 2016). Le développement du capital social peut être facilité par la reconstruction de relations familiales qui s’étaient détériorées (par ex. : McCulloch, 2005) et par l’établissement de nouvelles relations qui favorisent la participation et l’inclusion sociale (Farrall, 2004).

Farrall (2002) observe que de nombreuses interventions actuelles offrent peu en termes de soutien au développement du capital social et donnent plutôt trop d’importance au développement du capital humain – particulièrement les habitudes, les connaissances et les compétences, qui facilitent l’obtention et le maintien d’un emploi rémunéré. Farrall (2004) observe toutefois que l’accent mis sur l’emploi et le mariage peut être perçu et vécu de façon très différente par les femmes et les hommes. Les mères ayant des démêlés avec la justice sont plus susceptibles que les pères de vivre avec leurs enfants avant leur incarcération et d’être des mères monoparentales (McCampbell, 2005). En étant les principales pourvoyeuses de soins aux enfants d’âge mineur, il arrive que des femmes doivent donner la priorité à ces derniers plutôt qu’à un travail rémunéré (Bianchi, Sayer, Milkie et Robinson, 2012), ce qui signifie que l’emploi peut jouer un rôle moins important dans le désistement des femmes, comparativement aux hommes. De plus, même si l’on reconnaît qu’un emploi très valorisé pourrait jouer un rôle important dans le désistement, il est particulièrement difficile pour les femmes ayant des enfants d’accéder à ce genre d’emploi (Giordano, Cernokovich et Rudolph, 2002 ; Morash, Stone, Hoskins, Kashy et Cobbina, 2019) en raison d’horaires atypiques ou variables et du manque d’options en ce qui a trait à la garde des enfants.

La majorité des femmes dans le système judiciaire américain sont des mères ou deviendront mères (Sawyer et Bertram, 2018). Il est donc essentiel de comprendre quelles sont les ressources et leurs motivations à se désister pour améliorer les pratiques de supervision communautaire. En outre, les femmes ayant des démêlés avec la justice doivent généralement jongler avec leurs responsabilités maternelles et leurs histoires personnelles d’événements traumatiques et de consommation de substances psychoactives. Les études féministes ont montré que la toxicomanie est l’un des principaux facteurs contribuant à l’implication des femmes dans le système de justice (voir Wattanaporn et Holtfreter, 2014). Une étude multisite portant sur les femmes en prison a révélé que 82 % de l’échantillon répondait aux critères de consommation abusive ou de dépendance à l’alcool et aux drogues, et qu’elles étaient deux fois plus susceptibles que les hommes d’avoir des troubles concomitants d’abus de substances et de troubles de santé mentale grave (Lynch, DeHart, Belknap et Green, 2012). Plus important encore, Lynch et al. (2012) ont montré le lien étroit entre les traumatismes vécus par les femmes durant l’enfance et à l’âge l’adulte (souvent aux mains des membres de leur famille et de leur conjoint), les problèmes de santé mentale, la toxicomanie et la criminalité. Ce lien est systématiquement relevé dans la littérature sur les trajectoires de délinquance des femmes (par ex. : Daly, 1992, 1994 ; Salisbury et Van Voorhis, 2009 ; Wattanaporn et Holtfreter, 2014). Il semble donc impossible de discuter du désistement des femmes sans tenir compte de leur consommation d’alcool et de drogues, ainsi que des sources de traumatisme dans leur vie, ces facteurs étant étroitement liés.

La maternité et le désistement

Même s’il est largement accepté que la maternité constitue une transition de vie majeure, les études sur le lien entre la maternité et le désistement ont donné des résultats mitigés. Certaines études qualitatives indiquent, par exemple, que le début de la maternité peut changer les trajectoires de délinquance en déplaçant les femmes de la rue vers la maison, où elles forment de nouveaux réseaux sociaux et établissent des liens avec leur communauté (Fleisher et Krienert, 2004 ; Hunt, Joe-Laidler et MacKenzie, 2005). En analysant les récits des femmes impliquées dans des gangs de rue, Moloney, Hunt, Joe-Laidler et MacKenzie (2011) ont constaté que les récits des femmes décrivaient ce changement comme une « retraite de la rue » pour passer plus de temps à la maison, mais ce changement s’accompagnait d’un sentiment de perte d’autonomie et de liberté, comparativement à leur vie antérieure. Devenir mère signifie aussi une rupture avec les amis qui sont toujours membres du gang. Ces résultats font écho à d’autres études sur des jeunes mères qui mentionnent la maternité comme étant la cause du développement de leur autonomie, de leur sens des responsabilités et de leur maturité générale et affective (Breen, 2014 ; Shea, Bryant et Wendt, 2016). Les femmes issues de communautés marginalisées peuvent percevoir la maternité comme étant une opportunité de faire la transition vers des rôles sociaux valorisés, qui s’accompagnent de changements positifs quant à leur engagement dans la formation ou l’emploi et de leur retrait des activités criminelles (Edin et Kefalas, 2005). Il faudrait par contre examiner de quelle façon les exigences de la maternité peuvent complexifier les efforts consentis pour s’engager vers la formation ou l’employabilité.

Bien que la recherche qualitative arrive à démontrer que certaines femmes attribuent leur éloignement de la délinquance et de la toxicomanie à la maternité, les études quantitatives ou à devis mixte brossent un tableau plus complexe. La maternité semble être associée au désistement chez les adolescentes et les jeunes femmes adultes (Kreager, Matsueda et Erosheva, 2010 ; Pyrooz, McGloin et Decker, 2017 ; Walker et Holtfreter, 2016), mais cet effet est plus prononcé au cours de la première année de la maternité (Monsbakken, Lyngstad et Skardhamar, 2012) et pour les mères qui ont un statut socioéconomique plus élevé (Giordano, Seffrin, Manning et Longmore, 2011). Dans leur examen du désir de grossesse et de la criminalité, Giordano et al. (2011) ont constaté que les plus importantes diminutions de la délinquance sont observées chez les parents qui ont à la fois une grossesse désirée et une meilleure situation socioéconomique.

La présente étude analyse le capital social et humain et les changements dans la vie d’un échantillon de 28 femmes enceintes ou mères de famille ayant des antécédents criminels et de consommation abusive. La plupart de ces femmes n’étaient pas en suivi probatoire ou en liberté conditionnelle au moment des entretiens. Que peuvent-elles donc nous dire à propos des opportunités qu’offre le désistement assisté ? Comme il s’agit d’un échantillon en milieu communautaire, leurs expériences permettent de déterminer les motivations et les processus à l’oeuvre à l’extérieur du système de justice formel. Compte tenu du fait que certaines de ces femmes ont connu le désistement primaire, secondaire ou tertiaire sans périodes d’incarcération prolongées ou de supervision communautaire, leurs expériences peuvent nous en dire beaucoup sur la façon dont les transitions dans leur vie ont été amorcées et soutenues (ou non soutenues) à l’extérieur du système judiciaire.

Méthodologie

Les observations décrites dans cette étude sont tirées d’entretiens approfondis réalisés auprès de 28 femmes enceintes ou mères ayant des antécédents criminels et de toxicomanie. Elles ont été interviewées dans le cadre d’une recherche plus vaste sur la consommation de drogues pendant la grossesse et leurs expériences avec les systèmes de justice pénale et de soins de santé. Le recrutement et les entretiens ont eu lieu entre la fin de 2013 et le début de 2014. Les participantes ont été recrutées dans une petite ville postindustrielle du Midwest des États-Unis et ont été sélectionnées par la méthode d’échantillonnage intentionnel ciblé pour obtenir une variation maximale des concepts théoriques au coeur de l’étude (Creswell, 2007 ; Miles et Huberman, 1994). Les femmes ont été recrutées directement dans la communauté et non par l’entremise d’un organisme ou d’un programme spécifique. Trente femmes ont été interviewées pour l’étude principale. Toutefois, 2 d’entre elles n’ayant pas d’antécédents judiciaires ou de consommation de drogue (tabagisme uniquement) ont donc été exclues de la présente étude, portant l’échantillon final à 28 femmes enceintes ou mères.

La plupart des femmes ont déclaré avoir consommé différents types de substances au cours de leur vie, mais elles ont identifié les deux ou trois substances qu’elles consommaient le plus souvent. Les substances les plus couramment utilisées étaient les opioïdes (17 ; 60,7 %), comprenant l’héroïne et les opioïdes analgésiques sur ordonnance. La consommation de marijuana était également très courante (13 ; 46,4 %). La cocaïne (7 ; 25 %), les benzodiazépines comme le Xanax (4 ; 14,3 %) et la méthamphétamine (3 ; 10,7 %) étaient utilisées un peu moins couramment. Une femme a déclaré consommer de l’ecstasy, une autre des hallucinogènes comme la diméthyltryptamine (DMT) et la psilocybine (« champignons magiques »). Dix femmes (35,7 %) ont également signalé une forte consommation d’alcool, certaines en buvant plus de 750 ml chaque jour.

Les activités délinquantes étaient autodéclarées et n’ont pas toutes fait l’objet d’une arrestation ou d’une condamnation – dans certains cas, les infractions étaient inconnues de la police, mais un complice en avait pris la responsabilité. Les types d’infractions les plus courants étaient le vol simple ou le vol, la vente de biens volés, la fraude (fraude par chèque, fraude bancaire, au détail, etc.), les voies de fait et les coups et blessures, la prostitution et les infractions liées à la possession et à la vente de substances réglementées.

Les femmes avaient entre un et huit enfants (moyenne = 2,6 ; médiane = 2), sans compter les grossesses en cours. Les enfants étaient âgés de 8 semaines à 22 ans. Six femmes étaient enceintes au moment de l’entretien. La plupart des femmes avaient la garde complète de leurs enfants et en étaient le principal pourvoyeur de soins. Deux femmes n’avaient pas la garde de leurs enfants tandis que d’autres avaient différents arrangements de garde et de prise en charge. Certaines situations comprenaient, par exemple, la prise en charge et la garde complète d’enfants plus jeunes mais pas des plus vieux, ou bien la garde à temps partiel de leurs enfants qui étaient toutefois sous la tutelle d’un autre adulte (comme une parente plus âgée).

Les entretiens retranscrits ont été codés selon les techniques de codage flexibles décrites par Deterding et Waters (2018) et guidées par les concepts de capital humain et social définis précédemment. Les transcriptions ont d’abord été indexées suivant le protocole d’entrevue, cette étape ayant été réalisée davantage pour des fins d’organisation que d’analyse. Chaque document transcrit a été codé pour extraire les caractéristiques de l’échantillon, y compris l’âge, l’appartenance ethnique, la principale substance consommée, le nombre d’enfants et d’autres informations pertinentes pour chaque participante. Ces caractéristiques sont présentées dans le Tableau 1. Chaque transcription a ensuite été lue attentivement en examinant particulièrement les concepts sensibilisateurs de capital humain et de capital social. Les concepts sensibilisateurs sont des « idées de base qui éclairent le problème de recherche général » et peuvent fournir un point de départ pour l’analyse, sans en être le point final (Charmaz, 2003, p. 259). Ainsi, les concepts sensibilisateurs ne sont pas des hypothèses de raisonnement déductif, mais des guides pour l’exploration inductive des données (Blaikie, 2000). Les concepts de capital humain et de capital social ciblés dans la présente étude et leur relation avec le désistement assisté ont été utilisés comme point de départ pour une analyse plus approfondie du sens et de l’interrelation de ces concepts dans la vie de mères toxicomanes.

Tableau 1

Description de l’échantillon (N = 28)

Description de l’échantillon (N = 28)

* Deux femmes de cette catégorie recevaient des prestations en vertu de la Social Security Disability Insurance (SSDI) ou Social Security Income (SSI).

** La couverture santé offerte par le comté n’est pas une « assurance » santé, mais elle permet d’obtenir des rendez-vous médicaux ou des prescriptions de médicaments à faible coût. Pour y être admissible, le revenu familial annuel doit être en deçà de 224 % du niveau fédéral de pauvreté. L’assurance privée que détiennent des femmes provient soit d’avantages sociaux d’un emploi à temps plein ou du fait de leur âge (< 26 ans), qui leur permet d’être intégrées à la couverture parentale.

*** Les femmes ont des ententes de garde variées et complexes. « Garde complète » signifie que la mère a la garde de tous ses enfants mineurs ; « Garde partielle » inclut les mères dont la garde est partagée avec un partenaire non résident et celles qui ont la garde de certains de leurs enfants, mais pas tous ; « Aucune » signifie que les enfants de la mère sont à la charge d’une autre personne ou qu’elle ne détient plus de droits parentaux.

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Résultats

Le capital social par les pairs, les membres de la famille et les conjoints

Les pairs

Sept femmes ont mentionné le rôle des pairs dans leur vie, mais sans jamais les associer positivement à leurs efforts de désistement. Pour les femmes de cette étude, les pairs représentaient une source d’encouragement ou de pression pour consommer de la drogue ou enfreindre la loi. Cela peut représenter une différence cruciale entre le capital social fort qui « lie » et le capital social faible qui « sert de pont » (Putnam, 2000) dans la vie des femmes. Barry (2007) attire l’attention sur cette distinction dans son étude du capital social chez les jeunes contrevenants en transition vers la vie adulte, notant qu’ils peuvent accéder à un capital social fort qui les lie à des groupes très soudés, mais manquer de capital social faible, qui leur permet de « faire le pont » avec d’autres groupes ou communautés, en particulier ceux qui ont plus de pouvoir ou de ressources. Ce même schéma est observé dans la présente étude, c’est-à-dire que les femmes avaient des liens au sein de leurs communautés marginalisées, mais manquaient de liens avec des personnes qui les auraient aidées à se sortir de leur situation. Afin de se protéger des influences négatives, les femmes étaient plus susceptibles de couper les liens que d’en créer de nouveaux.

Sophie dit qu’elle désirait mettre fin à sa consommation durant sa grossesse, mais a succombé aux invitations lancées par ses amis, qui savaient pertinemment qu’elle était enceinte. Pour leur part, Iona et Chloe sentaient la pression de consommer, de peur d’être rejetées par leurs amis. C’est finalement en s’éloignant d’eux qu’elles ont fini par cesser. Chloe explique : « De temps en temps, ils venaient chez moi, mais je ne traînais pas vraiment avec eux, parce que je savais qu’ils touchaient à la drogue et je ne voulais plus vraiment être mêlée à ça. » En fait, se distancier de son cercle d’amis se révèle être une stratégie courante pour les femmes qui tentent de changer leurs comportements. Ce type « d’auto-contrainte » (self-binding, Bottoms, 2013) peut aider une personne à se désister du crime, mais peut par contre l’éloigner de sources de soutien matériel et social importantes et limiter les opportunités de nouer de nouvelles relations. En fait, aucune des femmes s’étant isolées par elles-mêmes n’a mentionné avoir noué de nouvelles amitiés. Ce qui n’étonne personne : la maternité peut être en soi une expérience fortement marquée par l’isolement (Cowan et Cowan, 2000 ; Graham, Lobel et Deluca, 2002), exacerbée par la marginalisation économique et sociale des participantes, qui n’étaient probablement pas accueillies chaleureusement par les associations locales de mères.

L’isolement peut également rendre les femmes plus vulnérables à la manipulation et aux abus de la part de leur conjoint (Coohey, 2007). Lucia a parlé en bien de son petit ami actuel, qui purgeait une peine de 14 mois de prison pour avoir volé des vêtements et les avoir vendus. « Il est allé en prison, apparemment, juste pour prendre soin de moi. » Pourtant, elle semblait à l’écart des autres et a indiqué que c’était en partie à cause de son petit ami, qui lui a dit : « Écoute, je dois te dire, cette personne ne doit plus être dans ta vie parce qu’elle n’est pas bonne pour toi. » Cela convenait à Lucia parce que « finalement, il y a quelqu’un qui est là pour moi, […] contrairement à toutes les personnes qui disent vouloir que j’aille mieux, mais qui me blesseront en se servant de moi plus tard ». De l’extérieur, cependant, la vulnérabilité de Lucia aux tactiques de manipulation de son partenaire est flagrante. Lucia s’est trouvée entièrement livrée à elle-même le temps de l’incarcération de son partenaire.

Les membres de la famille

Pour un petit nombre de femmes de l’échantillon, le soutien familial a été très bénéfique, en particulier lorsqu’il a pris la forme d’un logement sécuritaire et stable, d’une aide au transport et à la garde d’enfants ou d’une aide financière directe. Nicole a pu confier à sa mère la garde de son premier enfant, hors du système de familles d’accueil. Au moment de l’entretien, elle vivait chez sa mère, avec son enfant plus âgé (toujours sous la garde légale de cette dernière) et son nouveau bébé. Lorsque sa mère a acheté une nouvelle voiture, elle lui a donné sa vieille. Nicole s’épanouissait grâce au traitement à la méthadone et au soutien de sa mère. « J’avais des personnes pour me soutenir, donc c’était bien, car je sais qu’il y a beaucoup de monde qui n’[ont] personne, leur famille les a reniés et je me sens mal pour eux. » L’histoire de Tanisha est probablement la transformation la plus spectaculaire observée dans cette étude. Elle a réussi à quitter sa vie de travailleuse du sexe et de consommation de cocaïne. Sa mère, qui venait d’obtenir une grosse somme d’argent à la suite d’un règlement judiciaire, lui a dit que « si je revenais à la maison [après le traitement pour toxicomanie], elle aurait quelque chose pour moi et si je réussissais, elle me montrerait comment être une vraie dame, et c’est ce que j’ai fait ». Quand Tanisha a été expulsée de sa maison de transition pour avoir utilisé un téléphone portable (un article interdit), sa mère lui a payé une chambre d’hôtel pendant trois mois, puis l’a transférée dans un appartement avec une chambre.

Elle est restée près de moi, elle m’a encadrée, elle m’a payé la coiffure et la manucure, pour que j’aie une nouvelle image, et je n’avais jamais ressemblé à ça auparavant. Elle m’a acheté du maquillage, des serviettes, je… je ne savais pas que je valais tout ça. Elle a organisé tout ça pour que je ne sois pas obligée d’aller chercher quelque chose ou de demander à quelqu’un.

En plus d’être un soutien afin que Tanisha ne ressente pas le besoin d’aller « chercher quelque chose », sa mère lui a également fourni une ressource relationnelle importante : la confiance. « Elle me faisait confiance avec de l’argent et autre, on ne m’avait jamais fait confiance avec autant d’argent. C’était différent. C’était un nouveau sentiment pour moi. » Bien que Tanisha ait apprécié les 90 jours de traitement en milieu résidentiel, « ce qui a vraiment compté, c’est le soutien de ma mère ».

Le récit de Tanisha évoque aisément les concepts de désistement primaire, secondaire et tertiaire. Au départ, elle n’était pas pleinement engagée dans le processus de changement, mais elle a fait ses premiers pas en quittant son ancienne ville et en commençant un traitement en toxicomanie, avec l’encouragement de sa mère. Son expulsion de sa maison de transition aurait facilement pu mettre fin à ce stade de désistement primaire, mais sa mère a pu lui fournir un logement sécuritaire. L’encadrement, les soins et les articles fournis par cette dernière l’ont aidée à percevoir la possibilité d’une nouvelle identité, quelqu’un à qui elle n’avait jamais ressemblé auparavant ou qu’elle ne pensait pas pouvoir être. Finalement, lorsque Tanisha a adopté ce nouveau rôle, la confiance de sa mère a été une ressource qui a confirmé sa réintégration dans la société morale en tant que personne à qui on peut faire confiance en ce qui concerne l’argent. Et mieux encore, elle a récemment été invitée à revenir à la maison de transition pour partager son expérience :

Ils m’ont laissée parler devant tous les autres probationnaires et détenues en liberté conditionnelle de [par ici], je pense qu’il y avait plus d’un millier de filles là-bas, et ils m’ont laissée me tenir debout devant elles et leur parler. Je me sentais bien ce jour-là, je l’ai fait. J’étais comme, wow ! Toute ma vie, j’ai voulu me tenir debout, et je suis quelqu’un maintenant. […] C’est pourquoi je vous le dis, tout le monde peut changer.

Pour Tanisha, parler de son expérience avec les autres a été l’occasion de souligner sa réussite et une manière de vivre « activement » son désistement. Comme le modèle de « l’orateur » de Goffman (1963, p. 24-25), elle a fourni « un modèle vivant d’une réussite tout à fait normale ». Son acte générateur était lié à son sentiment d’estime personnelle et à sa connectivité sociale (Heidemann et al., 2016), ce qui pouvait renforcer son engagement envers sa nouvelle identité.

Peu de femmes de l’échantillon avaient des familles en mesure de fournir le type de soutien qu’a reçu Tanisha. Pour celles qui sont issues de « familles vides » (Schaffner, 2006 ; Morash, Stevens et Yingling, 2014), caractérisées par des problèmes de dépendance, l’incarcération et la maladie mentale, reconnecter avec sa famille mène inévitablement vers la récidive. Keira, parlant de sa mère : « [Elle] m’a présenté l’héroïne, l’aiguille. Ouais, je sais, comment aimerais-tu fumer du crack et prendre de l’héroïne avec ta mère ? » Plus tard, alors qu’elle suivait un traitement en milieu résidentiel, son père « m’a encouragée à quitter le centre de désintoxication avec une fille qu’il avait rencontrée là-bas » et « il me donnait de l’argent pour que je puisse me procurer de la drogue ». Deborah a une histoire familiale semblable. Le problème de toxicomanie de sa mère a conduit Deborah et son frère à vivre dans la rue alors qu’ils étaient très jeunes. Tout au long de sa vie, chaque réunification avec sa mère a été rapidement suivie de sa rechute. Selon les propres mots de Deborah, « elle a été mon déclencheur principal ». On sait que les femmes dans le système de justice pénale proviennent généralement de familles violentes ou qu’elles se retrouvent impliquées dans des délits par leurs relations familiales (Covington, 2001 ; voir aussi Chesney-Lind, 1997). Ces exemples indiquent que l’utilisation de la réunification familiale pour accéder à du capital social doit se limiter aux femmes dont les familles peuvent offrir un soutien et ces cas doivent être étudiés attentivement afin de s’assurer qu’il ne s’agit pas de familles qui les ont mises sur la voie de la délinquance.

Les conjoints

Seules trois femmes ont explicitement fait un lien entre l’affranchissement de leur problème de consommation et leur désistement et le soutien de leur conjoint. Après que son ex-partenaire violent a été arrêté et retiré de chez elle, Hayley a continué à lutter contre sa dépendance aux opioïdes sur ordonnance. Elle a essayé plusieurs types de traitement mais « finissait par sortir de là » chaque fois, jusqu’à ce qu’elle rencontre son nouveau partenaire, Daniel. Il « me donnait le sentiment d’être spéciale et que j’étais aimée », a-t-elle raconté. « J’ai réalisé que je comptais pour quelqu’un et que je devais me reprendre en main. » Même si Hayley dit de Daniel qu’il était son pilier, elle reconnaît avoir fait ses premiers pas vers le désistement avant de le rencontrer. « Comment cela a-t-il commencé ? Je pense que j’en ai eu juste marre, je n’en pouvais plus. » Elle est contente d’avoir traversé cette étape parce que « je n’aurais jamais rencontré Daniel ni été heureuse ». Kayla a également reconnu le soutien d’un partenaire qui l’a aidée dans sa décision de commencer un traitement médical. Elle consommait de la drogue quand elle l’a rencontré, et elle est tombée amoureuse de lui car « il voulait les mêmes choses que moi dans la vie » et « il m’aimait pour qui j’étais ». « Il m’aime pour ce que je suis à l’extérieur, il m’aime pour qui je suis à l’intérieur et m’accepte comme je suis. » Elle s’est retrouvée « à vouloir changer pour le mieux, donc c’est à ce moment-là que j’ai arrêté l’héroïne, mais, vous savez, je n’avais pas d’assurance ». Elle a donc dû payer de sa poche pour le Suboxone, un traitement excessivement cher. Peu de temps après, elle est tombée enceinte et a pu être couverte par Medicaid[3], et a ainsi pu suivre un traitement en milieu résidentiel puis s’inscrire à une clinique de méthadone. Sa décision a été motivée en partie par sa relation avec son petit ami (maintenant son fiancé), mais aussi parce que « je le voulais vraiment, vraiment dans mon coeur, et je ne le faisais pour personne d’autre ». Le fil conducteur des récits de ces trois femmes est leur sentiment d’être acceptée et aimée par leurs conjoints, qui, selon elles, partagent leurs valeurs et leurs buts, en particulier leurs visions « normales » du futur, le mariage, un foyer stable et des enfants. Leurs témoignages mettent en évidence la convergence, peut-être fortuite, de la volonté des femmes de changer et leur rencontre d’un partenaire qui les a soutenues dans ce changement et permis d’ouvrir la voie à un avenir souhaité.

Malheureusement, un thème beaucoup plus courant et récurrent dans les récits des femmes est le rôle de la violence conjugale, en particulier en lien avec la consommation d’alcool et de drogues. Treize des vingt-huit femmes ont mentionné de graves situations de violence conjugale qui ont interféré avec leur désir de se désister ou de cesser de consommer des substances illicites. Dans certains cas, la violence conjugale a occasionné le premier ou le seul contact avec les services policiers et de protection de l’enfance. Tamara vivait dans un logement subventionné avec son partenaire et leurs enfants, lorsqu’elle a l’affronté à propos des magazines pornographiques laissés dans la voiture, sur lesquels les enfants pouvaient tomber. Il a commencé à la frapper et les voisins, entendant l’agitation, ont appelé la police. Tamara a raconté que la police est arrivée et a arrêté son conjoint. Mais le lendemain, les services de protection de l’enfance sont venus chez elle et lui ont fait passer un test de dépistage de drogue. Elle a été testée positive au THC parce qu’elle fumait de la marijuana. Quelques jours plus tard, elle a été expulsée de son appartement. L’expérience de Tamara est malheureusement courante aux États-Unis, où des « ordonnances de nuisance » permettent d’imposer des sanctions civiles et pénales aux propriétaires s’il y a plusieurs appels faits à la police pour la même propriété au cours d’une année. Cela incite ces derniers à avoir une approche tolérance zéro pour les « nuisances », entraînant ainsi l’expulsion des locataires qui appellent la police. Une analyse a révélé que plus de la moitié des plaintes dites de nuisance dans une ville étaient dues à la violence conjugale et familiale (Mead et al., 2017). Ces politiques, ainsi que les politiques répressives et punitives sur la consommation de substances, ont entraîné, dans le cas de Tamara, son expulsion et la perte de la garde de ses enfants. Ses enfants, y compris un bébé né quelques semaines seulement après cet incident, ont vécu dans des familles d’accueil pendant environ un an pendant qu’elle devait « aller à un centre de traitement pour la dépendance à la marijuana, avoir des évaluations psychiatriques et du counselling et, maintenant, je suis un cours sur les drogues ». Elle devait en outre trouver un nouvel endroit pour vivre avec ses enfants, en plus d’un travail et d’un transport fiable.

La violence que les femmes ont subie est liée à leur sentiment de ne pas avoir de valeur, au désespoir et à l’échec personnel. Lorsqu’on la questionne sur son plus grand échec ou regret, Tamara déclare : « laisser un homme me mener au point où je n’ai plus mes enfants » et « j’aurais dû en faire plus pour ne pas laisser quelque chose comme ça se produire. J’aurais pu le quitter », indiquant ainsi qu’elle se sent responsable même si elle avait expliqué précédemment que l’abus se poursuivait en partie parce que c’est son conjoint qui contrôlait les finances de la famille et la maintenait dépendante de lui. Hayley, qui a abusé des opioïdes sur ordonnance pour contrôler la douleur physique et émotionnelle due à la violence subie de la part de son partenaire précédent, a expliqué que son expérience avec la police, l’arrestation de son partenaire et les enquêtes subséquentes des services de protection de l’enfant l’ont fait se sentir « sans valeur ». « Avec tout ce qui se passait, il aurait mieux valu que je ne me réveille pas. »

Le manque d’espoir était un thème clairement énoncé dans les récits des femmes portant sur leurs relations conjugales violentes – l’espoir que la violence prenne fin et qu’elles aient peut-être un jour quelque chose de mieux. Et quelles sont les répercussions de la violence conjugale sur la capacité des femmes à imaginer une nouvelle identité souhaitée (Healy, 2014) ? Il est connu que le désespoir est lié à la délinquance et à la récidive en général (par ex. : Burnett et Maruna, 2004 ; Dekhtyar, Beasley, Jason et Ferrari, 2012 ; Duke, Borowsky, Pettingell et McMorris, 2009 ; Martin et Stermac, 2009), mais peu d’études font le lien entre la violence conjugale, les émotions comme la honte et le désespoir et les répercussions sur le désistement des femmes. Or, de telles études pourraient contribuer à une compréhension du désistement sensible au genre, dont nous avons grandement besoin. De plus, la primauté de la violence conjugale dans la vie de ces jeunes mères, en particulier le lien avec la consommation d’alcool et de drogues et le sentiment d’échec, est un indicateur fort que le désistement assisté pour des femmes dans des contextes similaires doit offrir un soutien et des ressources pour les aider à survivre et à quitter de façon sécuritaire leur partenaire violent.

Le capital humain par l’éducation et l’emploi

Éducation

L’éducation et l’emploi sont deux des voies les plus citées pour accroître le capital humain, en particulier pour les personnes qui sont sous surveillance correctionnelle (Farrall, 2004). Il existe une abondante littérature sur le lien entre l’éducation et l’emploi et le désistement (ou du moins sur la réussite de la probation ou de la supervision des libérations conditionnelles ; voir Rodermond, Kruttschnitt, Slotboom et Bijleveld, 2016). Les résultats quant aux effets de l’éducation sont mitigés, et Rodermond et al. (2016) soulignent la nécessité de réaliser davantage d’études qualitatives sur l’influence de l’éducation sur le désistement, selon le genre. L’éducation avait une valeur symbolique et instrumentale élevée pour les femmes de notre échantillon, et plusieurs ont parlé longuement de ce que cela signifiait ou signifierait pour elles de terminer leurs programmes d’équivalence d’études secondaires (General Education Development, GED) ou d’aller à l’université. De même, de nombreuses femmes cherchaient un travail valorisant, mais avaient du mal à s’y retrouver sur le marché de l’emploi ou encore à en dénicher un « bon », compte tenu de leurs importants antécédents criminels, de leurs responsabilités parentales et de leur manque de capital social.

L’éducation est souvent perçue comme étant un moyen essentiel pour l’obtention d’un emploi mieux rémunéré ou plus stable, mais les femmes ayant participé à cette étude y attachaient beaucoup plus d’importance que cela. Avoir terminé ses études secondaires ou universitaires était un signe de réussite, et sans cela, certaines femmes avaient un sentiment d’échec. Deborah a abandonné l’école en 8e année, une décision qu’elle a décrite comme le plus grand échec ou regret de sa jeune vie. « Je ne sais pas pourquoi je l’ai fait. […] Je ne veux même pas y penser. » Elle a raconté que les personnes de son entourage, comme son petit ami, sa mère et son frère, se servaient de son manque d’éducation contre elle lors de disputes, comme : « Oh, peut-être que si tu étais restée à l’école tu le saurais. »

Je me sens horrible, je me sens comme une merde, comme je ne veux pas que ma fille grandisse [et se dise] : « Oh, je suis allée plus loin que ma mère. » Je ne veux pas que ma fille m’apporte son livre de mathématiques et que je le regarde en disant comme « qu’est-ce que c’est que ça ? » Et en plus, si je n’y vais pas, si je ne termine pas ça, alors je ne peux pas aller à l’école de cosmétologie, je ne peux pas faire ce que je veux faire dans la vie.

Pour Deborah, son manque de formation n’était pas seulement un obstacle à l’atteinte de ses buts, mais une source de honte et un point douloureux que d’autres pouvaient exploiter pour la manipuler. L’obtention de son GED a été la première étape vers son but d’aller à l’université, et elle a lié cela à l’abandon de sa consommation de substances. Son histoire ressemble à celle d’Iona, qui a terminé ses études secondaires et un programme de cosmétologie, mais qui a dit : « J’ai toujours voulu aller à l’université et y réussir. » Elle a expliqué qu’elle avait toujours eu envie d’apprendre et qu’elle n’avait jamais eu la chance de le faire. Aller à l’université l’aiderait à « ne pas se sentir coincée ». « J’aurais l’impression d’accomplir quelque chose pour lequel j’ai toujours ressenti de la passion. »

Comme Deborah, pour Jodie aussi c’était le décrochage scolaire qui représentait son plus grand échec ou regret. Elle était devenue enceinte à l’adolescence et voulait terminer ses études, mais sa mère lui avait dit : « Les autres filles, elles vont t’affronter », et avait refusé de l’aider à poursuivre ses cours. Aujourd’hui, mère de trois enfants et enceinte de son quatrième, elle tente de terminer ses études secondaires grâce à des cours gratuits. « Je sais que je suis capable d’obtenir mon diplôme d’études secondaires ou le GED… mais je dois m’occuper de mes enfants et juste essayer de m’assurer qu’ils ont de la stabilité, ça interrompt un peu mes études. » C’était d’ailleurs le cas de la plupart des femmes qui poursuivaient des études. Tamara essayait de suivre des cours, mais avait cinq enfants à charge et personne pour l’aider. Lucia avait obtenu son GED et avait essayé de s’inscrire à l’université, et elle avait même trouvé un programme d’aide pour avoir des services de garde pour ses enfants. Malheureusement, il y avait un écart entre la date du début de ce programme et son premier jour de classe (plusieurs semaines après le semestre, car elle s’était inscrite en retard). Elle a organisé la garde de ses enfants avec son frère, mais il n’est pas venu comme prévu matin-là. Comme elle n’a pas pu se présenter en classe, on l’a « désinscrite » et son aide financière (dont elle avait besoin pour payer le loyer) lui a été retirée. « J’ai été expulsée de l’école, j’ai perdu mon appartement un mois plus tard. J’ai fini par tout perdre. »

Les programmes de préparation au GED sont difficiles à trouver, même pour les femmes bénéficiant du soutien de leur famille ou de leurs pairs. Emily a apporté une perspective intéressante, ayant elle-même obtenu son diplôme universitaire et travaillant en tant qu’instructrice principale ou mentor pour un programme GED. Elle a parlé du contexte des coupes budgétaires en cours qui ont entraîné la fermeture de nombreux programmes GED. « Ils peuvent soit sous-financer chaque programme, donc personne ne peut faire du bon travail, soit abolir la plupart des programmes et verser tout l’argent dans les plus gros programmes. À part [deux programmes majeurs], chaque autre établissement de GED va perdre son financement. Il y a en fait seulement deux options pour les personnes qui veulent obtenir leur diplôme pour les trois comtés. » Et même s’il y a des programmes de GED disponibles, il arrive que les candidats soient vraiment sous-préparés pour les cours. « Les programmes sont destinés aux étudiants qui ont au moins un niveau de 8e année. Et la plupart des étudiants qui viennent chez nous en sont très loin. » Ainsi, même si les femmes surmontent les obstacles que constituent la motivation, la garde des enfants, les coûts du programme et d’autres aspects logistiques comme le transport et les horaires de travail, elles peuvent se retrouver avec très peu d’options en raison de la réduction des budgets et des exigences de préparation irréalistes.

Emploi

Opsal (2012) constate dans son étude que les femmes ayant été récemment libérées de prison considéraient l’emploi comme une voie vers un changement d’identité prosociale, même s’il s’agissait d’emplois de « faible qualité », alors que l’instabilité de l’emploi pouvait conduire les femmes à abandonner leur projet de désistement pour retourner vers le crime. Morash et al. (2019) ont analysé les récits de femmes pour déterminer les domaines dans lesquels elles ont pu connaître des épisodes de rédemption. Ils ont constaté que peu de femmes ont reconnu le travail comme étant l’un de ces domaines, dû en grande partie au fait que les emplois leur étaient difficilement accessibles (en raison d’obstacles tels que le transport, la garde des enfants ou la stigmatisation relative à leur casier judiciaire) ou encore parce qu’elles trouvaient des emplois à court terme, serviles et instables. La même observation se dégage des résultats de la présente étude. Ceux-ci démontrent la tension qui existe entre le désir des femmes de trouver un travail valorisant et les nombreux obstacles qui les empêchent de décrocher et de conserver un tel emploi.

Trois femmes ont explicitement lié l’emploi à leurs périodes de désistement, mais leurs histoires montrent les obstacles auxquels les mères se heurtent pour obtenir un emploi valorisant. Danielle a décrit le fait d’obtenir un emploi comme un tournant dans sa vie. Une connaissance l’a aidée à trouver un travail dans la construction. « J’ai adoré. Cela m’a aidée à me remettre en forme. Mes muscles se sont développés et je travaillais de 6 h à 19 h et j’étais épuisée, et quand j’avais fini, nous avions des projets réalisés que je regardais en disant : « Oh ! mon Dieu, je l’ai fait, c’est vraiment cool. » » Son travail s’est terminé à la fin de la saison de la construction et Danielle ne savait pas quoi faire ensuite. Elle a envisagé de retourner aux études mais ne voyait pas comment elle pourrait s’intégrer : « et je dois retourner au travail, même si j’ai un emploi superficiel, je dois faire quelque chose. Je ne suis pas née riche. » Lorsqu’on lui a demandé si elle allait reprendre le travail dans la construction, elle a répondu qu’elle aurait souhaité pouvoir le faire, mais que les horaires ne correspondaient pas à ceux des services de garde. « Nous pouvons nous lever à 5 heures du matin et travailler jusqu’à 7 heures du soir et trouver une garderie pour ces heures se révèle tout simplement impossible. » Sans partenaire avec qui partager les responsabilités parentales ni famille pour l’aider à s’occuper des enfants, ce type d’emploi valorisé et lucratif n’était pas possible pour Danielle, même si elle aimait le travail et croyait que cela améliorait sa santé physique et mentale.

Les difficultés que vit Rochelle pour faire garder son fils en bas âge dans un milieu sécuritaire montrent bien les répercussions des familles toxiques et des réseaux de pairs limités sur l’emploi des femmes. Notre entretien était prévu le matin, avant qu’elle se rende travailler dans un centre d’appels, et elle s’inquiétait de savoir qui garderait son fils ce jour-là. Au cours de l’entretien, elle a raconté qu’elle avait été adoptée par une famille aisée mais que sa mère était très violente physiquement et psychologiquement. Alors qu’elle me décrivait un incident spécifique de violence maternelle (« Ma mère m’a dit qu’elle allait me frapper jusqu’à ce que je m’en souvienne, et c’est ce qu’elle a fait… »), son téléphone a sonné. Après une brève conversation téléphonique avec une amie, elle s’est retournée vers moi pour me dire :

Il semble que je dispose d’une gardienne, mais cette fille est une ancienne héroïnomane, et, vous savez, elle est bonne avec les enfants, elle a un enfant, mais [les services de protection de l’enfance] lui en ont retiré la garde. […] Je m’inquiète pourtant, parce que vous ne savez jamais qui va passer chez elle : un drogué va-t-il passer chez elle ? C’est une bonne gardienne, une bonne figure maternelle, mais je n’aime pas le laisser là tout seul… C’est compliqué, essayer de trouver quelqu’un.

Dans le cas de Rochelle, le réseau de personnes pouvant assurer la garde de ses enfants était extrêmement limité. Elle venait d’une famille riche mais très violente, elle ne voulait donc pas laisser son fils à sa mère. Même si elle avait un certain capital social grâce à son réseau de pairs, Rochelle considérait qu’ils n’étaient pas nécessairement les plus adéquats pour prendre soin de son enfant. Elle devait également prendre des dispositions au jour le jour, devant appeler ses amis pour voir qui était disponible pour chacun de ses quarts de travail. Elle avait peu ou pas de relations en dehors de ce groupe.

Allie avait des problèmes de toxicomanie et vivait une situation de violence conjugale au moment de l’entrevue. Se remémorant un meilleur moment dans sa vie, elle a parlé de l’obtention de son GED au collège communautaire et son emploi dans un cabinet de dentiste – un processus possible grâce à une initiative d’éducation publique offerte à l’époque. Ce travail a marqué le début d’une trajectoire ascendante pour elle. « Ils m’ont donné de la formation, donc c’était ma première grande responsabilité, un travail de type lundi au vendredi. » Pendant qu’elle occupait ce poste, elle a étudié pour obtenir une certification en soins infirmiers. Concilier le travail et l’école l’a tenue occupée. « Je pense que cela a été un tournant pour moi. J’ai diminué ma consommation d’alcool et ne buvais que le week-end. » Après avoir travaillé au cabinet de dentiste un an ou deux, elle a trouvé un nouvel emploi dans un centre de soins pour personnes âgées, où elle a vécu un autre moment qui a marqué son parcours de vie : un pont vers quelque chose de mieux. Là, elle a rencontré une femme dont le mari travaillait dans un centre de détention pour mineurs et qui pouvait aider Allie à y trouver un emploi. « Elle m’a aidée à y entrer et j’y ai travaillé. C’est vraiment là que ma vie a commencé à changer parce que c’était pour moi le meilleur travail au monde. » Il était manifestement important pour Allie d’avoir un emploi stable et significatif. « Fini le travail en restauration rapide, ça c’est cool. Je me disais, wow, je porte une blouse médicale, tu sais ? » L’horaire, les responsabilités et son attachement à son poste l’ont motivée à limiter sa consommation au week-end, lorsque cela n’interférait pas avec son rendement au travail. Son expérience illustre l’importance, à la fois, du capital humain et du capital social. L’obtention de son GED lui a ouvert des portes et l’a aidée à restructurer sa vie autour du travail et non de l’alcool, de la fête et des conflits. Mais même en ayant ces différentes sources de capital (bien plus que chez les autres femmes de l’étude), sa relation toxique avec son mari l’empêchait de progresser dans son processus de désistement. Elle se percevait comme une femme condamnée par les hommes qu’elle avait choisis. « Les hommes dans sa vie » sont son plus grand échec, car elle « ne veut jamais les bons ». « Je fais les mêmes erreurs encore et encore et, pourtant, je suis plus intelligente que ça. » Elle se dit que si elle pouvait juste trouver un bon conjoint, un qui ne boit pas du tout peut-être, alors elle arriverait probablement à cesser de boire et de se battre. Jusqu’à ce que cela arrive, il semble toutefois qu’elle continue dans la même voie.

Le souhait d’avoir un emploi significatif a été évoqué de manière récurrente par les femmes pour expliquer leur historique d’employabilité. Danielle était fière de ses projets de construction terminés et redoutait de retourner à un travail servile. Allie était ravie de porter une blouse médicale et de voir la fin du travail en restauration rapide. Toutefois, certaines femmes n’avaient pas accès aux emplois valorisants en raison de leur casier judiciaire. Mia et Yasmine ont toutes deux mentionné vouloir poursuivre une carrière en soins infirmiers, en particulier en soins gériatriques et palliatifs. Elles ont parlé de l’importance de ce travail, de ce que cela signifierait pour elles d’apporter du réconfort aux patients en fin de vie. Toutes deux semblaient incapables de saisir en quoi leurs condamnations passées les empêcheraient de faire des études en soins infirmiers et d’obtenir les permis requis.

Discussion et conclusion

Cette étude a analysé le développement du capital social et humain et leurs liens avec le désistement chez 28 femmes enceintes ou mères ayant des antécédents criminels et de toxicomanie. L’étude a montré que les femmes de l’échantillon avaient des réseaux limités pour générer du capital social. Elles ont rapporté ne pas avoir de réseaux de pairs, ou si elles en avaient, ils étaient décrits comme ayant une influence négative dont elles s’étaient isolées. Les familles peuvent être une source de capital social transformateur et les femmes pourraient s’y appuyer pour avoir accès à des ressources pour la garde des enfants, pour du transport, du soutien matériel (vêtements pour enfants, sièges d’auto, etc.) ou des conseils. Il était toutefois plus courant pour elles d’associer la source de leurs problèmes de toxicomanie et activités criminelles à leur famille, et considérer ainsi que ces relations pouvaient susciter le retour à d’anciens comportements. Par ailleurs, même si certaines femmes ont trouvé de nouveaux partenaires qui leur apportent du soutien, nombreuses sont celles qui subissent de la violence psychologique et physique de la part de leur conjoint.

Même si les femmes ayant participé à l’étude accordaient une grande valeur à la réussite scolaire et à un emploi valorisant, elles ont décrit les obstacles auxquels elles se heurtaient à cet égard, dus au fait d’avoir la responsabilité de jeunes enfants, et en particulier pour celles qui avaient un casier judiciaire et un capital social faible. Plusieurs souhaitaient avoir des opportunités de formation et un emploi pour des raisons à la fois instrumentales et symboliques. Pour celles qui pouvaient bénéficier d’un certain capital humain et social, comme des études terminées et un réseau de personnes pour aider à la garde des enfants ou pour couvrir les frais de formation ou donner des références et des conseils, l’enseignement supérieur et l’emploi valorisant étaient légèrement plus accessibles. Ce n’était toutefois pas le cas de la plupart des femmes ayant participé à cette étude, n’ayant aucune réserve de capital. Les lacunes dans leur parcours scolaire dues à une enfance chaotique et à une maternité précoce les désavantageaient pour l’obtention du certificat d’équivalence d’études secondaires (GED) ou d’un diplôme universitaire. Leur rôle de mère monoparentale les empêchait de poursuivre leurs objectifs de formation. Sur le plan de l’emploi, certaines femmes avaient établi des liens forts entre les périodes de désistement primaire et leur participation à un travail valorisant, mais il pouvait s’avérer impossible de poursuivre ce travail en raison de leurs responsabilités parentales, de conflits relationnels ou de manque de soutien (assurance maladie, congé parental, congés de maladie payés, etc.). D’autres femmes souhaitaient un emploi valorisant, mais elles avaient l’impression de passer à côté d’opportunités à cause de leurs erreurs passées. Ne pouvant atteindre leurs objectifs, elles ont exprimé leur insatisfaction quant à leur avenir dans un travail servile et sans valeur qui les éloignerait de leurs enfants et leur offrirait peu de possibilités de stabilité (pas d’avantages sociaux liés à l’emploi comme les assurances et les fonds de pension) ou d’avancement.

Cette étude comporte des limites importantes. Tout d’abord, il s’agit d’un échantillon relativement restreint de femmes résidentes d’une seule ville américaine. Ce serait une erreur de généraliser sur la base d’une recherche à si petite échelle. Cependant, on constate une importante similitude entre les résultats de cet exercice et d’autres s’étant penchés sur la vie de femmes judiciarisées, comme l’ont montré les liens avec la littérature présentée tout au long de l’analyse. De plus, cette étude transversale repose sur les témoignages rétrospectifs des femmes quant à leurs motivations lors de ces importantes périodes de transition dans leur vie. Une étude de suivi serait idéalement prospective et longitudinale, et viserait de multiples entretiens sur plusieurs années afin de suivre les changements dans les réseaux sociaux et les occasions de développer des types de capital, et d’observer les processus de désistement primaire, secondaire et tertiaire, en particulier en lien avec la maternité et ses exigences en perpétuelle évolution (grossesse, nouveau-né, éducation d’enfants plus âgés, etc.). Outre les limites liées au devis employé, cette modeste étude, qui avait une portée limitée, ne permettait pas de répondre aux questions restées en suspens. Par exemple, l’étude a recueilli peu d’information sur la manière dont les femmes arrivaient à compenser leur environnement familial malsain en se procurant du capital social à d’autres sources. L’histoire de Rochelle aborde, brièvement, la façon dont elle dépendait de son réseau de pairs pour offrir un service de garde à ses enfants – comme il était hors de question que ce soit sa famille qui l’aide –, ainsi que les répercussions sur la qualité des soins à son fils. Mais l’analyse ne permet pas de faire ressortir si ou comment d’autres femmes ont pu compenser le fait de provenir d’une « famille vide » par un réseau de pairs plus positif ou si elles devaient se débrouiller seules.

Cette étude apporte plusieurs contributions à la littérature sur le désistement assisté. La population formée par les mères devant faire face au système de justice et ayant des antécédents de toxicomanie n’a pas reçu toute l’attention nécessaire, considérant la proportion importante de femmes judiciarisées qui entrent dans cette catégorie. Fondée sur le concept de capital social et humain, précédemment évoqué dans les études sur le désistement (par ex. : Barry, 2007 ; Farrall, 2002 ; McNeill, 2006), elle y ajoute une perspective genrée pour examiner en quoi les sources de capital social communément acceptées (pairs, familles, partenaires) et de capital humain (éducation, emploi) fonctionnent différemment dans la vie des femmes et des hommes. Enfin, les entretiens approfondis sur les parcours de vie et l’échantillon de l’étude permettent d’examiner les liens entre les traumatismes des femmes, leurs problèmes de toxicomanie et la délinquance. Même si les processus de réhabilitation en toxicomanie et de désistement de la délinquance se déroulent différemment, la recherche sur les trajectoires a montré à maintes reprises que, pour de nombreuses femmes, ces expériences sont inextricablement liées, non seulement en raison de la criminalisation de la consommation de substances, mais aussi par les liens avec des expériences traumatisantes (violence conjugale, par exemple) et des crimes motivés par des besoins économiques (vol, fraude, etc.).

Les résultats présentés ici fournissent quelques pistes pour soutenir le désistement de cette population de femmes. Il faut reconnaître que les sources traditionnelles pour développer du capital humain comme l’éducation et l’emploi sont inaccessibles aux femmes ayant des enfants, et il faut donc en améliorer l’accessibilité. À cet égard, l’État a un rôle à jouer pour fournir des services de garde subventionnés ou gratuits aux familles dans le besoin. Il serait particulièrement utile que ces services offrent des horaires flexibles, correspondant à ceux des emplois occupés par ces femmes. Ce sont rarement des emplois de bureau de type neuf à cinq, mais plutôt des postes dans le commerce de détail, les services et la construction, où l’on commence tôt ou finit tard le soir, en plus d’avoir des horaires variant au gré des besoins de l’employeur. Il faut également élargir l’accès aux possibilités de rattrapage scolaire pour les femmes dont le niveau de scolarité est inférieur au secondaire afin qu’elles puissent obtenir des certifications équivalentes au niveau secondaire et éventuellement poursuivre des études supérieures, si elles le souhaitent. En outre, et particulièrement pour les femmes dans cette étude, une assurance maladie universelle serait fort utile. La plupart des femmes avaient une assurance maladie Medicaid, principalement parce qu’elles avaient été enceintes ; cette couverture prenait fin dans l’année suivant la fin de la grossesse, et elles ne seraient plus assurées par la suite. En outre, comme les couvertures similaires sont généralement déterminées en fonction des ressources, certaines femmes – gagnant trop selon les critères établis pour avoir droit à une assistance, mais pas assez pour payer une assurance privée – passaient entre les mailles du filet. Cela limite considérablement l’accès des femmes aux soins préventifs de santé ainsi qu’aux traitements liés à la toxicomanie et aux services de santé mentale pour surmonter leurs traumatismes. Enfin, la supervision des femmes doit tenir compte des traumatismes vécus, non seulement en ce qui concerne les expériences durant l’enfance, mais aussi celles de la violence conjugale qu’elles peuvent subir pendant le processus de désistement. Cette étude met en lumière la relation entre la violence conjugale, la consommation de substances et un sentiment de désespoir qui érodent la confiance en soi et l’auto-efficacité des femmes, entravant sérieusement leurs efforts pour apporter les améliorations souhaitées dans leur vie. L’accès à l’éducation, le soutien psychologique et pratique pour permettre aux femmes de sortir en toute sécurité d’une relation abusive devraient être les priorités.

La plupart des femmes de cette étude n’étaient pas sous la supervision d’un service correctionnel au moment des entrevues, même si plusieurs avaient déjà eu une expérience antérieure d’incarcération ou de supervision correctionnelle. Leurs expériences livrent un aperçu de la façon dont des femmes dans des contextes similaires pourraient être soutenues par des professionnels de la justice pénale. Le désistement assisté pour ces femmes ayant des enfants à charge devrait prioriser le soutien et les conseils afin qu’elles développent de bons réseaux sociaux, puissent quitter de façon sécuritaire leur conjoint violent et surmonter les obstacles liés à l’éducation et à l’emploi. Il ne faut pas présumer qu’elles proviennent de familles saines ou considérer qu’elles doivent être encouragées à renouer avec leurs parents, frères et soeurs. Par contre, le fait de leur conseiller de rester à l’écart de certaines relations familiales ou entre pairs (ou en faire l’objet de conditions) peut entraîner de l’auto-isolement, les priver du soutien dont elles pourraient bénéficier et augmenter leur vulnérabilité aux agressions. Cet isolement contribue également aux difficultés d’accès à l’éducation et à l’emploi, car c’est en grande partie grâce aux relations interpersonnelles que les femmes trouvent des occasions d’emploi, de logement, de transport et de garde d’enfants. Les recherches futures visant à éclairer les pratiques de supervision pour cette population de femmes devraient se pencher sur la façon dont les superviseurs peuvent aider au développement de réseaux intentionnels d’amis prosociaux, de familles « reconstituées » et tout autre type de relation saine qui permettent aux femmes de créer et d’étendre leur capital social et humain.