Corps de l’article

Introduction

Les littératies numériques bousculent les pratiques d’écriture actuelles (Cordero, Nussbaum, Ibaseta, Otaíza et Chiuminatto, 2018), y compris celles des étudiants à l’université (Bryant, 2017). Ces pratiques, de même que les performances qui en découlent, dépendent de compétences sous-jacentes, qui s’entrecroisent et s’influencent mutuellement, notamment les compétences scripturales (Leu, Kinzer, Coiro, Castek et Henry, 2017), mais aussi les compétences informationnelles (Salisbury et Karasmanis, 2011), de référencement documentaire (Adam, 2016), collaboratives (Perrenoud, 2013) et, bien évidemment, numériques (Cailleau, Bouchardon, Crozat et Bourdeloie, 2010).

Si le numérique a complètement transformé les pratiques d’écriture, il semblerait qu’il ait peu transformé l’enseignement universitaire : on fait toujours appel principalement à l’écrit, plutôt qu’à des modalités orales ou à des analyses de pratiques professionnelles, pour permettre aux étudiants d’avoir accès au savoir, d’en rendre compte ou de l’exploiter. Or, l’arrivée de l’écriture numérique implique l’apprentissage et la mobilisation de stratégies distinctes (Penloup, 2017).

C’est dans ce contexte que nous avons mené une recherche portant sur les différentes stratégies d’écriture numérique, en particulier les stratégies de créacollage numérique (SCN)[1] utilisées par les étudiants et prises en compte par les enseignants universitaires, qui doivent composer avec cette nouvelle réalité. Il nous semble essentiel, avant même de réfléchir à des interventions pour développer la littératie universitaire numérique, d’établir un portrait des SCN utilisées par les étudiants universitaires. C’est ce que nous avons fait par le truchement de données issues de questionnaires en ligne remplis par des étudiants et des enseignants québécois.

Après avoir tracé un portrait du contexte de littératie universitaire numérique, nous présenterons le concept de pratiques d’écriture numérique universitaire. Celui-ci s’inspirera des compétences scripturales, développées dans un contexte didactique, et des SCN, permettant d’appréhender l’écriture par le biais de la psychologie cognitive (Hayes et Flower, 1980), mais en mettant en évidence les stratégies d’écriture numérique faisant appel à l’intertextualité. Nous décrirons ensuite la méthodologie quantitative basée sur l’opinion employant le questionnaire comme mesure de collecte de données arbitraires ensuite analysées pour soulever des résultats statistiques descriptifs (Boudreault et Cadieux, 2011). Puis seront présentées les différentes SCN exploitées par les étudiants et les corrélations avec leur sentiment de compétence. Nous montrerons également qu’un clivage persiste entre les stratégies utilisées et à développer par les étudiants, et celles qui sont prises en compte par les enseignants. Nous encouragerons finalement les enseignants universitaires à prendre les SCN en considération dans leur enseignement, pour que les étudiants développent leurs compétences scripturales et leur apport transversal aux disciplines.

Contexte

La littératie universitaire constitue un champ de recherche suscitant de plus en plus d’intérêt. Cela n’est pas sans raison : on constate que les compétences qu’elle requiert sont parmi les plus recherchées sur le marché du travail (Beaudet, 2015) : compétences informationnelles, rédactionnelles, esprit critique, d’analyse et de synthèse, de collaboration, etc. Qui plus est, à plus court terme, la compétence scripturale, qui est une composante importante de la littératie universitaire, est un des facteurs les plus discriminants, et ce, peu importe le domaine d’étude (Trenkic et Warmington, 2019). Face à la situation, plusieurs mesures sont mises en place par les universités : des cours à dominante méthodologique cherchant à développer la maîtrise des genres propres à l’université, une attention particulière en cours de formation aux écrits professionnels et la mise en place de ressources universitaires (centre d’aide, formation en ligne, etc.) pour pallier les lacunes des étudiants à l’écrit (Garnier, Rinck, Sitri et de Vogüe, 2015).

Or, au moment où ces ressources visant le développement de la compétence scripturale des étudiants se développent, les pratiques d’écriture vivent des bouleversements sans précédent (Badouard, 2015; Nicholas et al., 2008). Ainsi, au concept de littératie universitaire, qui s’intéresse aux caractéristiques propres à une population dans un contexte d’enseignement/apprentissage, se combine celui de littératie numérique, qui peut être défini comme « un ensemble d’habiletés utilisées pour lire, comprendre, écrire et naviguer sur le web afin de trouver une diversité d’informations pour ensuite s’en servir éthiquement, avec une multitude d’outils numériques, pour créer et communiquer dans une culture numérique » (Peters et Gervais, 2016, p. 65).

Bien que les pratiques d’écriture gardent leur prédominance dans l’évaluation universitaire (Beaudet, 2015; Beillet et Lang, 2017), l’avènement du numérique implique une transformation des stratégies de mobilisation de compétences scripturales. Les sources d’information sont facilement accessibles, grâce notamment aux navigateurs Internet et aux bases de données (Lopatovska et Regalado, 2016). Aussi, la rédaction est facilitée par le soutien des traitements de textes et des outils de révision linguistique [la prise de notes (Butcher, 2016), la révision du texte (Girasoli, 2016) et la création de bibliographies (Park, Mardis et Ury, 2011)]. Les défis de l’étudiant ne diminuent pas nécessairement, mais ils migrent vers d’autres aspects relatifs à la littératie universitaire numérique, comme le jugement de crédibilité des sources et la pertinence de celles-ci afin de produire un texte cohérent. Les pratiques d’écriture vivent aussi des transformations, bien que les stratégies utilisées par les étudiants soient peu documentées (Seror, 2013). Bref, la révolution numérique implique de nouveaux outils, de nouvelles stratégies, de même que de nouveaux genres textuels (Penloup, 2017).

Dans ce contexte où l’on observe l’importance certaine des compétences scripturales pour la réussite universitaire, et ce, sans tenir compte du domaine, il est essentiel d’établir un portrait plus précis de la situation, qui suscite nombre de questions : Quelles sont les stratégies d’écriture numérique exploitées par les étudiants universitaires? Quels sont les facteurs contextuels qui influencent leur utilisation? Comment les stratégies d’écriture numériques sont-elles prises en compte par les enseignants, tant dans leur enseignement que dans leur évaluation?

Appuis théoriques

Les pratiques d’écriture numérique universitaire

Comme mentionné précédemment, l’arrivée du numérique vient modifier les outils utilisés, les stratégies, de même que les genres textuels. Nous ne cherchons pas, ici, à faire une nomenclature des types d’écrits universitaires. Ceux-ci varient inévitablement selon les champs disciplinaires (Delcambre et Lahanier-Reuter, 2012). Certains champs mettent l’accent sur les écrits professionnels, visant le développement d’aptitudes rédactionnelles qui seront sollicitées dans la future profession (Russell, 2012). D’autres écrits encore sont dits professionnalisants et s’avèrent un retour ou une réflexion relative à une expérience professionnelle vécue (Colognesi, Celis, Dejemeppe et Van Nieuwenhovewn, 2017), tel le rapport de stage.

Grossmann (2012) montre que si l’on observe une différence importante entre les pratiques d’écriture des différentes disciplines, c’est souvent parce que celles-ci se fondent sur des caractéristiques des écrits scientifiques relatifs à chacune des disciplines. Les attentes diffèrent d’ailleurs de manière graduée selon l’avancement des cycles d’études, limitant de plus en plus les écarts entre les écrits universitaires et scientifiques. Nous nous intéresserons ici davantage aux caractéristiques communes des pratiques d’écriture universitaire pouvant être influencées par les compétences numériques et les stratégies qui en découlent, en particulier pour les études de premier cycle.

Si l’arrivée du numérique a peu changé les genres textuels attendus, elle permet toutefois un accès plus facile aux différents écrits scientifiques. Aussi, cet accès peut venir modifier certaines stratégies, dont celles menant à l’intertextualité, qui permet de faire référence à un texte à l’intérieur de son propre texte. Si ces stratégies sont exécutées selon les normes universitaires, on parlera de citation, d’emprunt ou de reformulation (Daunay et Delcambre, 2017). Leurs dérives, volontaires ou non, mèneront plutôt à une situation de plagiat (Elander, Pittam, Lusher, Fox et Payne, 2010).

La figure 1 ci-dessous est inspirée de deux modèles conceptuels : 1) les compétences scripturales, telles que définies initialement en didactique des langues par Dabène (1987, 1991) et Reuter (1996) et reprises ensuite par la majorité des chercheurs s’y étant intéressés; 2) les SCN (Peters, 2015), manifestations prégnantes des compétences numériques lors d’une pratique rédactionnelle, qui permettent de décrire les opérations mises en place par le scripteur à toutes les phases du processus d’écriture.

D’autres compétences ont été insérées dans la figure. Certaines ne seront pas abordées dans cet article (compétences informationnelles, de référencement). Il nous semblait toutefois pertinent de les représenter, par souci de cohérence avec le modèle des SCN auquel nous nous référons (Peters, 2015). D’autres (compétences collaboratives) ne seront pas approfondies ici, mais mentionnons qu’elles se manifestent par la motivation, l’activation et la facilitation de la collaboration entre étudiants dans différentes situations de production de travaux universitaires par la sollicitation d’habiletés, dont celles à communiquer, à négocier, à comprendre, à comparer et à évaluer des positions (Wiek, Withycombe et Redman, 2011). Contrairement à d’autres compétences transversales, les compétences collaboratives offrent un potentiel accru en contexte numérique (Cailleau et al., 2010). Nous y ferons donc référence lors de la discussion.

Figure 1

Les pratiques d’écriture universitaire numérique

Les pratiques d’écriture universitaire numérique

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Les compétences scripturales

Les compétences scripturales – initialement au singulier – ont été à l’origine définies en didactique du français par Dabène (1987) comme un « ensemble de savoirs, de savoir-faire et de représentations concernant la spécificité de l’ordre scriptural et permettant l’exercice d’une activité langagière (extra)ordinaire » (p. 15). Cette définition a été légèrement nuancée par Reuter (1996) qui y voyait plutôt l’adéquation de trois grandes composantes : 1) les savoirs; 2) les représentations, investissements et valeurs; 3) les opérations. Depuis, ces définitions sont reprises par les auteurs faisant appel à ce concept (Lafont-Terranova, Niwese et Colin, 2016).

Admettons d’emblée que la définition des compétences scripturales a le mérite, surtout dans une perspective d’enseignement au primaire et au secondaire, de circonscrire un certain nombre de notions pouvant être définies et didactisées. Dabène (1987) affirme d’ailleurs qu’il vise par cette modélisation à déterminer les spécificités de l’écrit au sein des grandes compétences discursives pour ainsi nourrir la réflexion quant à la légitimité du champ de recherche en didactique de l’écrit.

Les connaissances et habiletés des étudiants sont de plusieurs ordres (linguistiques, sémioticoscripturales, sémioticosociales, métacognitives, métascripturales, etc.) (Reuter, 1996). Ainsi, pour écrire, un scripteur doit avoir certaines connaissances linguistiques, mais aussi connaître les caractéristiques d’un genre, les conventions quant à l’utilisation de formes linguistiques selon les destinataires, les étapes du processus d’écriture, etc.

Les représentations issues du rapport à l’écrit incluent, selon Chartrand et Blaser (2008), les investissements, opinions, attitudes et conceptions de la « lecture et [de l’] écriture ainsi que les produits de ces activités, les textes lus et écrits […] » (p. 111). Leur apport constitutif à la compétence scripturale est démontré en psychologie socioculturelle (Barré-de Miniac, 2015). Blaser, Lampron et Simard-Dupuis (2015) définissent le rapport à l’écrit comme « l’ensemble des significations construites par un individu à propos de l’écrit, de son apprentissage et de ses usages » (p. 52). Ces significations concernent tant les sentiments que l’étudiant entretient pour l’écrit que les valeurs, les conceptions et les jugements qui s’y rattachent. Elles influencent les pratiques, qui dans une interrelation, nourrissent le rapport à l’écrit.

Finalement, être compétent en écriture implique des ressources cognitives (Gagnon et Ziarko, 2009), terme que nous préférerons à ceux de « savoir-faire » (Dabène, 1987) et d’« opérations » (Reuter, 1996), spécifiquement parce qu’il permet de regrouper les mobilisations non intentionnelles et intentionnelles, comme c’est le cas pour les autres composantes des compétences scripturales. Dans une perspective d’enseignement, l’accent est surtout mis sur les stratégies, utilisées sciemment par le scripteur. Parmi celles-ci, les SCN s’avèrent aujourd’hui incontournables pour la compétence scripturale en contexte universitaire.

Difficile par ailleurs de singulariser la compétence scripturale, qui nous semble plus juste au pluriel, si l’on tient compte des contextes d’écriture pluriels ou des caractéristiques distinctes de l’écriture numérique (Cailleau et al., 2010).

Non seulement la pluralité, mais l’extensivité des compétences scripturales est essentielle pour en comprendre la mobilisation. En effet, un modèle fixe qui marquerait spécifiquement les composantes des compétences scripturales, indépendantes de celles d’autres compétences, nous semble difficilement opérationnel. Ainsi, certaines stratégies pertinentes pour l’écriture d’un texte peuvent s’inscrire à la fois dans les compétences scripturales et dans d’autres, comme les compétences informationnelles (Shao et Purpur, 2016), de référencement documentaire (Bailey, 2015), numériques (November et Day, 2012), collaboratives (Wiek et al., 2011), ou d’autres compétences discursives (Bergeron et Granger, 2016).

Nous définirons donc les compétences scripturales en contexte universitaire comme la mobilisation d’un ensemble de connaissances, d’habiletés, de ressources cognitives et de représentations en contexte d’écriture universitaire, dont les tâches et les ressources accessibles impliquent un rapport extensif et pluriel aux autres compétences.

Dans le cadre de cet article, nous nous intéresserons spécifiquement à un ensemble de ressources cognitives aux frontières des compétences scripturales, numériques et collaboratives, soit les SCN.

Les stratégies de créacollage numérique

Le créacollage numérique a évolué de ce que Ryberg et Dirckinck‐Holmfeld (2008) ont nommé le « patchworking » à une conceptualisation plus englobante des stratégies d’écriture numérique. Le patchworking est l’emprunt de bouts de textes par des étudiants de langue seconde et constitue pour le scripteur une étape intermédiaire vers le scripteur expert (Howard, 2008). Or, Peters propose que le patchworking ne reflète pas la réalité du monde numérique des étudiants d’aujourd’hui et suggère que ceux-ci font davantage du créacollage numérique, empruntant à d’autres auteurs du texte, mais également de l’audio, de la vidéo et des images qu’ils référencent ensuite. Ainsi, le créacollage numérique n’est pas réservé aux scripteurs débutants, mais est utilisé par tous les scripteurs, avec un taux de succès qui varie, selon le degré de compétences des scripteurs. Le créacollage numérique « constitue un processus constructif, créatif, productif et évolutif, puisque le texte peut continuellement être modifié en y ajoutant une nouvelle pièce » (Peters, 2015, p. 5), et ce, plus largement, en bénéficiant de l’apport de ressources extérieures. Les SCN sont donc des actions, des stratégies, qui permettent aux étudiants de cerner le sujet de leur travail, de chercher de l’information, de la trier et de se l’approprier, pour créer, polir et documenter un texte.

Lorsque les étudiants ont sélectionné de l’information du Web, ils doivent choisir comment l’intégrer à leur texte. Ils peuvent le faire par le biais de la citation directe ou indirecte. La citation directe consiste à utiliser les mots de l’auteur, sans changement. Une bonne citation est l’équivalent d’un copier-coller-citer.

Quant à la citation indirecte, communément nommée paraphrase dans la littérature anglosaxonne (Sun et Yang, 2015) et reformulation dans la francophonie (Daunay et Delcambre, 2017), les étudiants s’en servent pour présenter l’idée d’autres auteurs, mais dans leurs propres mots (Barrón-Cedeño, Vila, Antònia Martí et Rosso, 2013). La citation directe est habituellement utilisée par les étudiants pour argumenter et justifier leur position (Jomaa et Bidin, 2017), alors que la paraphrase, plus flexible, leur permet de présenter leur compréhension et leur interprétation des idées d’autrui (Bazerman, 2004). La paraphrase, selon Shi (2004), ne devrait pas contenir plus de deux ou trois mots consécutifs repris des auteurs. Beaucoup d’étudiants craignent de plagier par manque de compétences lorsqu’ils ont recours à la paraphrase en ne se distançant pas suffisamment de la phrase originale (Buerkle et Gearhart, 2017). Les SCN liées à la compétence de référencement documentaire sont donc une cause d’inquiétude pour les étudiants lorsqu’ils rédigent leurs travaux universitaires.

Objectif et méthodologie

L’objectif de cet article est triple. En premier lieu, nous cherchons à déterminer les SCN mobilisées par des étudiants québécois. En deuxième lieu, nous cherchons à vérifier quelle influence peut avoir une des représentations, soit le sentiment d’efficacité personnel en lecture et écriture (SEPLE), sur l’utilisation des SCN. En troisième lieu, nous cherchons à déterminer les SCN prises en compte par les enseignants. Ces données permettront d’avoir une vue d’ensemble des stratégies que déclarent utiliser les étudiants et prises en compte par les enseignants. Nous pourrons ainsi mettre en évidence certains clivages entre les pratiques déclarées et celles qui sont attendues et prises en compte par les enseignants. Cela permettra aussi d’envisager des pistes d’enseignement et d’évaluation assurant un arrimage entre les apprentissages nécessaires au développement des compétences scripturales en contexte numérique et les attentes universitaires.

Instruments de collecte de données

Pour atteindre nos objectifs, une enquête a été menée auprès d’étudiants et de professeurs de six universités québécoises. Des questionnaires ont été développés et validés selon la démarche en sept étapes proposée par Dussault, Valois et Frenette (2007). Le questionnaire destiné aux étudiants universitaires a pour but de déterminer les SCN que ceux-ci déclarent utiliser et d’explorer les variables susceptibles de les influencer dans leur utilisation de ces stratégies.

Une recension de la littérature a mené à l’élaboration d’une version préliminaire du questionnaire comprenant 154 énoncés distribués dans cinq dimensions : 1) la compétence informationnelle, 2) la compétence rédactionnelle, 3) la compétence de référencement, 4) les connaissances sur le plagiat, et 5) les attentes des étudiants face à l’enseignement des SCN. Cette première version du questionnaire a été soumise à un groupe d’experts qui s’est prononcé sur la clarté et la pertinence de l’ensemble des énoncés. À la suite de cette étape de validation, 128 énoncés ont été retenus pour une première mise à l’essai auprès de 24 étudiants universitaires.

Une analyse statistique a mené au retrait des énoncés ayant une forte asymétrie positive ou négative. Au total, 54 énoncés ont été retenus, dont 38 sur les SCN (incluant 15 stratégies relatives à la compétence rédactionnelle) et 16 sur les représentations des étudiants au regard de leur formation universitaire, de leur compétence perçue en littératie, du plagiat et de ses conséquences. Une deuxième mise à l’essai du questionnaire auprès de 151 étudiants a aussi fait l’objet d’analyses statistiques (voir Peters, Vincent, Fontaine et Fiset-Vincent, 2018) qui ont mené, entre autres, au retrait d’un énoncé en lien avec la compétence rédactionnelle. L’échelle de réponse de type Likert, initialement à cinq crans, est passée à sept crans (toujours, très souvent, souvent, à l’occasion, rarement, très rarement, jamais) pour permettre un choix plus nuancé de réponses. Le choix « ne s’applique pas » était également offert aux étudiants.

Le deuxième questionnaire, destiné aux enseignants universitaires, a été élaboré en s’inspirant largement du questionnaire étudiant. La visée de ce questionnaire est de déterminer les SCN enseignées à l’université et d’explorer comment les professeurs préviennent le plagiat auprès de leurs étudiants.

La première version de ce questionnaire, incluant 108 énoncés, a été soumise à un groupe d’experts pour des fins de validation. Puis, une mise à l’essai auprès d’un groupe restreint de professeurs (n = 3) a mené à quelques modifications en vue de rehausser la clarté des énoncés et d’éliminer les redondances qui n’avaient pas été relevées lors de la première étape de validation auprès du groupe d’experts. Au total, 50 énoncés ont été retenus, dont 46 questions fermées et 4 questions ouvertes. Quatorze questions fermées et une question ouverte portent spécifiquement sur les compétences rédactionnelles. La même échelle de Likert a été utilisée pour les questionnaires des professeurs.

Participants

À l’automne 2017, la collecte des données a été effectuée dans six universités du Québec à l’aide de questionnaires en ligne. Au total, 878 étudiants, dont 677 femmes et 201 hommes, inscrits dans un programme d’éducation, d’informatique, d’arts, de génie ou de sciences de la santé ont rempli le questionnaire en ligne. Le questionnaire destiné aux professeurs a été rempli par 201 professeurs (113 femmes et 88 hommes) ayant une expérience de 1 à 13 ans en enseignement universitaire. Les répondants enseignaient en sciences sociales, sciences de la gestion et comptabilité, sciences humaines, lettres, traduction, rédaction et études langagières, sciences, relations industrielles, science politique ou sciences de la santé, au moment de l’enquête.

Analyses

Les 13 énoncés relatifs aux SCN en lien avec les compétences scripturales du questionnaire étudiant ont fait l’objet d’une analyse statistique descriptive. Pour toutes les analyses, l’échelle de Likert à sept crans a préalablement été recodée en trois catégories représentant la fréquence d’utilisation faible (jamais, très rarement, rarement), moyenne (à l’occasion) ou élevée (toujours, très souvent, souvent) dans le but d’illustrer les écarts entre les répondants.

Les 16 énoncés traitant des représentations sur la formation universitaire, la lecture et l’écriture universitaire, le plagiat et ses conséquences ont été soumis à une analyse factorielle confirmatoire à quatre facteurs. Le choix de quatre facteurs a été motivé par les résultats de l’analyse factorielle exploratoire réalisée lors de la dernière étape de validation du questionnaire étudiant (voir Peters et al., 2018). Un des quatre facteurs reflète particulièrement bien le SEPLE avec deux énoncés qui portent respectivement sur le sentiment de compétences en lecture et en écriture universitaire, et un troisième sur le sentiment de compétence à paraphraser. Ce facteur a été corrélé avec les 13 SCN pour les compétences scripturales.

Le questionnaire destiné aux professeurs a aussi fait l’objet de statistiques descriptives. Onze énoncés faisaient référence à l’enseignement des SCN, à des recommandations ou à de la rétroaction à leur effet. Pour toutes les analyses, l’échelle de Likert a aussi été recodée selon les trois mêmes catégories.

Résultats

Les SCN utilisées par les étudiants

La fréquence d’utilisation des SCN par les étudiants est présentée au tableau 1. Deux stratégies relatives à la citation sont utilisées par presque tous les étudiants. Ceux-ci utilisent la citation dans leur texte en s’assurant qu’elle soit en cohérence avec leur propos (97 %) et le font afin d’appuyer leurs propres idées (92 %). Moins d’étudiants disent l’utiliser fréquemment pour mettre en relation les points de vue de deux auteurs (42 %). Finalement, 24 % des étudiants disent utiliser fréquemment la citation afin de répondre aux exigences de l’enseignant.

Tableau 1

Fréquence d’utilisation des stratégies de créacollage numérique (SCN)

Fréquence d’utilisation des stratégies de créacollage numérique (SCN)

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La paraphrase quant à elle implique des SCN dont la fréquence d’utilisation est beaucoup plus variée. Cette variété s’observe également dans le sentiment d’efficacité personnel à paraphraser, alors que plus de la moitié des étudiants disent vivre des difficultés à paraphraser (26 % des étudiants mentionnent avoir souvent des difficultés et 28 % quelquefois) et que 46 % en vivent peu fréquemment. Ainsi, la reformulation impliquant un copier-coller et une transformation syntaxique est une pratique fréquemment utilisée par 33 % des étudiants, alors que 11 % d’entre eux disent utiliser fréquemment un traducteur en ligne pour les aider à paraphraser.

En ce qui concerne les révisions linguistiques, une stratégie utilisée fréquemment par presque tous (90 %) est le recours à des outils de révision numériques, comme les correcteurs linguistiques (Antidote, correcteurs intégrés aux logiciels de traitement de texte). Plusieurs (73 %) vont fréquemment privilégier une recherche en ligne, quant à un questionnement grammatical. Enfin, 41 % d’entre eux vont changer fréquemment la structure de leur phrase afin d’éviter une difficulté grammaticale.

Certaines SCN sont relatives spécifiquement aux phases de planification et de mise en texte. Organiser les citations collectées en ligne dans Word afin d’établir un plan est une stratégie privilégiée fréquemment par 52 % des étudiants. Une grande majorité d’entre eux (77 %) mentionnent profiter fréquemment des caractéristiques facilitantes des traitements de texte afin de déplacer des parties de leurs textes, des images ou des vidéos. Aussi, 65 % des étudiants assurent procéder fréquemment de manière récursive, en allant chercher de l’information en ligne en cours de rédaction.

Finalement, la stratégie faisant appel à la compétence collaborative qui consiste à utiliser le mode révision, par l’ajout de commentaires, est privilégiée fréquemment par seulement 12 % des étudiants, alors que 65 % affirment ne jamais l’utiliser.

Corrélation entre le sentiment d’efficacité personnel en lecture et en écriture et les SCN

Les corrélations entre le SEPLE et les SCN sont présentées au tableau 2. On remarque plusieurs corrélations significatives, bien que les effets des relations entre le SEPLE et les SCN soient de faible taille.

Tableau 2

Corrélations entre les stratégies et le sentiment d’efficacité en lecture et en écriture

Corrélations entre les stratégies et le sentiment d’efficacité en lecture et en écriture

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Certaines corrélations sont négatives, ce qui signifie que plus le SEPLE est élevé, moins les stratégies concernées sont utilisées. À l’inverse, certaines corrélations sont positives, ce qui signifie que plus le SEPLE est élevé, plus les stratégies concernées sont fréquemment utilisées.

Ainsi, le scripteur ayant un faible SEPLE possède certaines caractéristiques, qui se manifestent par les corrélations négatives présentées au tableau 2. Par rapport à la moyenne, ce scripteur a des difficultés à paraphraser et a l’habitude de copier-coller, pour ensuite transformer cette citation en paraphrase en reformulant certains mots ou propositions afin d’éloigner cette paraphrase de la citation originale. Par ailleurs, il justifie l’utilisation de la citation par les exigences de l’enseignant. Pour l’aider dans sa révision linguistique, en cas de difficulté, il fait une recherche grammaticale en ligne ou, plus simplement, modifie sa phrase pour éviter d’utiliser la forme grammaticale ou syntaxique problématique.

À l’inverse, le scripteur ayant un fort SEPLE utilise Word afin de copier-coller ses principales références et citations, et ainsi les organiser dans un plan. Il utilise aussi les fonctions de suivi des modifications et de commentaires du mode révision de Word afin de rétroagir en collaboration avec ses pairs. Contrairement au scripteur ayant un faible SEPLE, il justifie l’utilisation de la citation non pas par le fait de répondre aux exigences de l’enseignant, mais par celui de soutenir son propre argumentaire. Le scripteur ayant un fort SEPLE n’hésite pas à rédiger de manière récursive, et donc à retourner chercher de l’information en cours de rédaction ou lors de la révision.

Résultats du questionnaire destiné aux enseignants

Le questionnaire destiné aux enseignants compte 11 questions relatives à leurs pratiques d’enseignement des compétences scripturales (voir tableau 3) qui peuvent faire écho aux SCN telles que sondées dans le questionnaire destiné aux étudiants. Ces différentes questions portent sur la prise en considération des SCN dans leur enseignement.

Tableau 3

Fréquence de pratiques d’enseignement relatives à la compétence scripturale

Fréquence de pratiques d’enseignement relatives à la compétence scripturale

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Le tableau 3 présente les différentes pratiques par ordre de fréquence. La pratique la plus populaire consiste à recommander aux étudiants d’utiliser un outil de révision linguistique, tel qu’Antidote ou un dictionnaire en ligne (75 %). La deuxième pratique la plus populaire concerne la citation, alors que les enseignants disent expliquer comment l’utiliser pour appuyer des arguments (66 %). Cette pratique est aussi populaire que l’explication de la différence entre la citation et le copier-coller (65 %). Par contre, l’autre pratique relative à la citation, soit celle d’expliquer comment construire un texte cohérent et logique avec elle, est parmi les moins populaires (45 %). Les pratiques d’enseignement relatives à la paraphrase se retrouvent quant à elles dans la moitié inférieure du tableau, que ce soit la tolérance quant aux paraphrases maladroites référencées (53 %) ou les explications quant à la manière de paraphraser l’information trouvée en ligne (49 %).

Nous avons mené une analyse en composantes principales à partir de ces 11 items, afin d’établir la dynamique entre les types de pratiques mises en place. L’indice KMO de 0,86 est excellent et le test de sphéricité de Bartlett est significatif (p < 0,001). La relation entre les énoncés (les pratiques enseignantes) montre donc que la préoccupation pour les compétences scripturales a tendance à se faire en bloc. Autrement dit, la préoccupation pour les compétences scripturales implique une plus grande fréquence de l’ensemble des pratiques. À l’inverse, un enseignant qui ne s’en préoccupe pas aura tendance à ne pas mettre en place fréquemment l’ensemble des pratiques du tableau (alpha de Cronbach = 0,837).

Interprétation et pistes d’intervention

Bien que le questionnaire destiné aux étudiants et celui destiné aux enseignants n’aient pas été construits de manière à pouvoir opérer statistiquement des corrélations, leur mise en relation permet de réfléchir à des pistes d’intervention. Nous en présentons trois qui nous semblent particulièrement prometteuses.

La révision : une porte d’entrée pour s’intéresser au processus

Prenons, par exemple, la pratique d’enseignement la plus fréquente, soit celle de recommander l’utilisation d’outils de révision : 90 % des étudiants mentionnent déjà l’utiliser fréquemment. Bien sûr, recommander n’est pas une pratique impliquant une importante quantité de ressources (temps en classe et hors classe) pour l’enseignant. Pourtant, d’autres pratiques s’inscrivant dans la logique de la recommandation sont beaucoup moins fréquentes chez les étudiants et gagneraient à être privilégiées par les enseignants. C’est le cas de la recommandation de retourner chercher de l’information en cours d’écriture ou de celle de rédiger un plan à partir des copier-coller. Rappelons que ces deux SCN sont caractéristiques des étudiants ayant un fort SEPLE, qui est en soi un facteur de développement des compétences scripturales (Barré-de Miniac, 2015). On remarque que ces stratégies, auxquelles nous pouvons ajouter la recommandation d’explorer tous les aspects du texte numérique – y compris les hyperliens, les images, les vidéos, etc., s’inscrivent dans la logique du processus plutôt que dans celle du résultat final, la performance.

Cela ne discrédite pas l’intérêt porté à l’utilisation de l’outil de révision linguistique, dont le potentiel d’amélioration de la compétence scripturale est documenté (Dezutter et al., 2012; Eid et al., 2013). Étant donné sa popularité chez les étudiants, nous croyons qu’il serait opportun non pas de rappeler l’importance de l’utiliser, mais bien d’en montrer le potentiel en révision. Les aspects normatifs de la langue (orthographes lexicale et grammaticale, syntaxe) peuvent être appréciés lors de l’évaluation de la performance, mais ces logiciels exécutent également des analyses linguistique, syntaxique, lexicale et stylistique qui permettent de commenter la production et de développer la compétence scripturale en soutenant certaines habiletés rhétoriques et communicationnelles. Il est alors possible de vérifier la présence de répétitions, de phrases longues, de vocabulaire faible, de logique relative au choix des marqueurs de relation, etc. Ce potentiel permet alors de faire un travail sur la langue qui n’est alors pas considéré comme un frein à la communication, mais comme une ressource.

Le référencement : aller au-delà des aspects techniques

Parmi leurs pratiques les plus fréquentes, les enseignants mentionnent aussi expliquer comment utiliser la citation pour appuyer leurs arguments (copier-coller-citer) et s’éloigner du plagiat (copier-coller). Les stratégies de citation avec un souci de cohérence pour soutenir ses idées sont les plus fréquentes chez les étudiants. Il est donc pertinent d’y apporter une attention particulière, comme le montrent les nombreux risques de plagiat (Doğan, Yağız et Kaçar, 2018) de même que les difficultés pour les étudiants (Click, 2017) que la citation implique. Il importe par ailleurs de souligner que plus d’un étudiant sur deux mentionne avoir de la difficulté à paraphraser. Or, selon nos résultats, les explications quant à la paraphrase sont moins fréquentes que celles relatives à la citation. Cela pourrait s’expliquer par une capacité à enseigner, et peut-être aussi à évaluer la citation selon des critères facilement observables, contrairement à la paraphrase, dont les frontières avec le plagiat sont beaucoup plus difficiles à établir.

Nous croyons encore une fois qu’en dehors des aspects purement normatifs (par exemple les normes de citation et de référencement), il est impératif, dans une logique de développement des compétences scripturales, d’utiliser ce contexte pour aussi réfléchir à la pertinence de la citation et de la paraphrase dans le cadre d’une pratique d’écriture universitaire numérique. D’ailleurs, les résultats montrent que les élèves ayant un faible SEPLE ont tendance à se concentrer sur ces aspects normatifs, peut-être par la difficulté mentionnée à paraphraser. D’un autre côté, les étudiants ayant le plus fort SEPLE s’intéressent aux stratégies visant la cohérence, la logique et l’argumentation. Ainsi, les nombreuses possibilités qu’offrent les SCN relatives aux compétences informationnelles (Peters et Gervais, 2016) doivent être sollicitées en amont pour organiser, hiérarchiser et structurer les références selon les exigences de la pratique d’écriture universitaire numérique. Encore une fois, cela implique d’apporter une attention au processus d’écriture, et non seulement à la production finale.

La collaboration : une valeur ajoutée

Il est à remarquer qu’un certain nombre de SCN ont un potentiel intéressant, mais semblent peu mises à profit, tant chez les enseignants que chez les étudiants. Les compétences collaboratives en sont un bon exemple. Étant donné les possibilités qu’offrent les ressources numériques, il nous semble évident, à l’instar de Gilliot (2012), que les perspectives d’écriture collaborative, par les plateformes de partage et d’échange ou l’utilisation du mode révision des logiciels de traitement de texte, devraient être davantage mises à profit. Du côté des enseignants, cette possibilité de partage et de commentaires durant le processus pourrait aussi être utilisée, si ceux-ci considèrent que les interventions en cours de production sont davantage profitables qu’une simple évaluation finale de la performance.

Les avantages de l’écriture collaborative – et de son enseignement – ont été démontrés pour l’enseignement primaire et secondaire (Blain et Lafontaine, 2010; Geoffre, 2013). La collaboration est considérée comme une compétence essentielle pour l’intégration sociale (Dede, 2010; Remington-Doucette et Musgrove, 2015) et est de plus en plus fréquente dans les exigences universitaires (Frisk et Larson, 2011), mais son enseignement, au même titre que celui des compétences numériques, est peu valorisé (Morris, 2010). Pourtant, les pratiques d’écriture actuelles, dans une perspective tant sociale que professionnelle, font de plus en plus appel à cette compétence (Liénard et Penloup, 2011).

Des pistes sont par contre envisageables. Hansen (2006) propose un enseignement qui prévoirait entre autres des attentes et des buts précis, du temps de classe pour le travail de groupe, de nombreuses rétroactions tout au long du travail et une détermination claire des contributions de chacun avec leur prise en compte dans l’évaluation. Les ressources numériques, avec entre autres les plateformes collaboratives (Google Drive par exemple), permettent les allées et venues entre le professeur et les étudiants de même qu’une conservation des versions successives et l’apport de chacun (Cailleau et al., 2010). Ainsi exploitées, les ressources numériques facilitent le développement conjoint des compétences collaboratives, numériques et scripturales, au service de la production d’un écrit universitaire numérique. À plus long terme, les compétences sous-jacentes développées au cours de cette production pourront être mobilisées dans les productions ultérieures, dans une perspective tant universitaire que professionnelle.

Conclusion

Nous cherchions à déterminer les SCN relatives aux compétences scripturales mobilisées par des étudiants québécois, la relation entre celles-ci et le SEPLE, de même que les SCN enseignées en contexte universitaire. Les résultats obtenus montrent que certaines SCN sont utilisées par presque tous les étudiants universitaires, comme l’utilisation des logiciels de correction ou celle de la citation afin d’appuyer des propos. D’autres SCN distinguent les étudiants ayant un fort SEPLE des autres. Mentionnons entre autres la stratégie de collecte de citations par copier-coller dans un traitement de texte, pour ensuite les organiser en plan, ou encore celle d’utiliser le mode de révision de Word dans une perspective d’écriture collaborative. Quant aux enseignants, leurs interventions sont plus souvent reliées aux aspects normatifs. Nous croyons que la mise en place d’interventions relatives au processus d’écriture, de la planification à la révision, permettrait de développer les stratégies permettant d’améliorer la compétence scripturale des étudiants.

Soulignons que les interventions des enseignants vont d’un extrême à l’autre, certains d’entre eux intervenant à plusieurs niveaux alors que d’autres interviennent très peu, ce qui laisse supposer qu’ils ne se sentent pas du tout responsables du développement de la compétence scripturale. Est-ce dû à des caractéristiques de domaines disciplinaires, impliquant très peu d’écrits? à une impression de manque de temps et de ressources? à une perspective épistémologique quant au rôle d’enseignant universitaire? Ici, les limites inhérentes à une enquête par questionnaire ne nous permettent pas de fournir des explications plus précises.

Ce portrait permet tout de même de confirmer ce que d’autres chercheurs constatent (Prior, Mazanov, Meacheam, Heaslip et Hanson, 2016), à savoir que les étudiants universitaires actuels n’arrivent pas avec un bagage numérique homogène, et que cela se confirme par les stratégies qu’ils déclarent utiliser. Pour amener les étudiants à réussir, le développement des compétences scripturales par l’apprentissage des SCN est une avenue à emprunter. Les enseignants universitaires ne peuvent que bénéficier d’un tel développement, sachant que la relation est étroite entre les compétences scripturales des étudiants et leur réussite disciplinaire. Ne serait-il pas conséquent, pour les enseignants de toutes les disciplines, de participer au développement des compétences scripturales?