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Cet ouvrage collectif, de haute tenue, s’adresse à ceux et celles qui s’intéressent aux journaux, à la méthode d’analyse de ceux-ci et bien sûr à la guerre. Le titre est légèrement trompeur, car les études présentées portent sur la fin de la Première Guerre et sur le début de la seconde, et le sous-titre reflète plus fidèlement le contenu de l’ouvrage qui se centre sur deux moments : la fin de la Première Guerre mondiale et le début de la seconde, donc la période 1918-1920 d’une part, et 1939-1940 d’autre part. Avant l’ère de la télévision et d’internet, les journaux constituent le média de masse par excellence et à ce titre, comprendre le Québec de la première moitié du XXe siècle passe nécessairement par l’analyse de la presse.

Les journaux étudiés dans l’ouvrage sont divers, et comprennent tant des publications « nationales » c’est-à-dire montréalaises (La Presse, La Patrie) que régionales (L’Abitibi et Le Progrès du Golfe, pour ne nommer que ces deux journaux qui embrassent le Québec de l’ouest à l’est), certaines étant plus « à gauche » (Le Jour) et d’autres plus conservatrices (L’Autorité, L’Action catholique), des publications populaires (La Revue populaire, La Revue Moderne) ou d’élite (Le Devoir), généralistes (Le Canada) ou spécialisées (Le Panorama – revue de cinéma). Micheline Cambron, Myriam Côté et Alex Gagnon ont raison de souligner en introduction que les journaux québécois du XXe siècle ont peu été étudiés, à l’exception du Devoir; les analyses qu’ils proposent font la preuve de la richesse de ce corpus et ne présentent que la pointe d’un iceberg, comme il apparaît clairement à la lecture de l’ouvrage, centré sur deux moments et un thème fédérateur, la guerre.

Les questions traitées dans les textes sont non moins diverses que les sources, et comprennent notamment les bons de rationnement, l’alcool et la prohibition, l’élection fédérale de mars 1940, les pages féminines et l’invasion de la France en mai 1940. À cet égard, et contrairement à d’autres études sur les journaux, les auteurs ne se limitent pas aux éditoriaux, sans pour autant les négliger, car ils scrutent aussi rubriques et chroniques, caricatures, photographies et publicités.Aussi trouve-t-on dans l’ouvrage de nombreuses illustrations, reproduisant tant un article, une caricature, une publicité, qu’une page entière. En effet, les auteurs ne prennent pas pour objet uniquement les articles et illustrations, mais aussi la page comme entité. En fonction des sujets traités, les études sont parfois centrées sur une semaine (autour de l’invasion de la France en 1940), sur une date (les élections fédérales de 1940), sur un thème (la prohibition), mais aussi sur le journal comme objet et sa structure, son « écologie », par exemple les pages féminines. Enfin, les analyses portent soit sur un seul journal ou en comparent quelques-uns. L’iceberg ici sous-jacent ne tient pas qu’au corpus, mais aux modes d’appréhension de celui-ci.

Mentionnons en terminant qu’il s’agit d’un livre électronique, téléchargeable gratuitement à partir du site de Codicille éditeur et qu’il est possible de l’obtenir en version papier pour un prix modique, selon la formule « impression à la demande », signe s’il en est besoin que l’époque de la presse papier dont traite le livre s’éloigne de nous.