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INTRODUCTION

Les technologies de l’information et de la communication (TIC) font pleinement partie de notre environnement et leurs usages varient en fonction des générations et des individus. La population étudiante actuelle est composée de personnes nées à l’ère des technologies digitales, pour qui l’utilisation des outils numériques est très courante et totalement intégrée à leur quotidien.

Comment détecter la différence entre des usages à caractère pathologique de ces technologies et d’autres usages, où la potentialité thérapeutique de ces outils est intégrée au cadre des professionnels?

Sur le plan psychopathologique, la question de l’apparition de nouvelles formes de maladies mentales a été soulevée depuis l’apparition d’Internet et son accès au grand public, à la fin des années 90. Des auteurs ont exprimé très tôt des inquiétudes quant à l’usage des jeux vidéo comme facteur de risque pour la santé mentale des enfants et des adolescents (Young, 1998).

Depuis 2018, l’Organisation mondiale pour la Santé a annoncé vouloir intégrer le trouble du jeu vidéo (Gaming Disorder) à la nouvelle version de la Classification Internationale des Maladies (CIM-11), qui s’appuie sur l’usage pathologique du jeu vidéo pour réaliser ce diagnostic. Le DSM-5, et plus généralement l’American Psychiatric Association (APA), envisage les usages problématiques des jeux vidéo ou des outils connectés comme des éléments diagnostics « à l’essai » en santé mentale (APA, 2013). Ces nuances dans les positions alimentent un débat très actuel sur la qualification des usages et la prévention des risques dans les pratiques numériques, notamment sur des sujets plus jeunes. Ainsi, l’addiction, ou la dépendance, aux jeux vidéo constitue l’une des thématiques principales retrouvées dans la littérature en ce qui concerne les usages des TIC présentant un risque psychopathologique. Nous présenterons un portrait large de l’offre d’aide actuelle au Québec et en France. Nous détaillerons également des stratégies de prévention en lien avec l’usage des TIC, pouvant concerner la population étudiante.

Par la suite, nous aborderons les phénomènes de cyberviolence qui préoccupent également les professionnels de terrain en santé mentale (comme le cyberharcèlement ou la cyberintimidation). Nous verrons comment le Québec et la France y répondent en termes légaux, de modes de prises en charge et de prévention.

Enfin, au-delà des risques repérés dans ces usages pathologiques, nous aborderons l’aspect psychothérapeutique de l’utilisation des TIC, notamment dans le champ de la cyberpsychologie.

USAGES DES TIC : PSYCHOPATHOLOGIE ET RISQUES CHEZ LES ÉTUDIANTS

TIC et addictions

Le point de vue des classifications

Si l’Organisation mondiale de la santé (OMS) va probablement reconnaître le trouble du jeu vidéo dans la prochaine version de sa classification internationale des maladies (CIM-11; OMS, 2018), l’autre référence internationale en matière de diagnostic psychopathologique, le DSM-5 (APA, 2013), ne reconnaît officiellement comme trouble que le jeu d’argent pathologique ou trouble lié au jeu d’argent (qui inclut le jeu d’argent sur Internet). Il propose des critères diagnostics « à l’essai » pour un trouble qui ne se recoupe pas complètement avec celui de la CIM-11 : le trouble du jeu vidéo sur Internet (voir critères de la CIM-11, Figure 1). Là où la CIM-11 ne fait pas de différence concernant le support (Internet ou pas) et se focalise sur le comportement addictif, le DSM-5 (APA, 2013), quant à lui, requiert que le comportement soit sur Internet.

Mais qu’en est-il alors des addictions aux contenus pornographiques, smartphones, achats en lignes, réseaux sociaux? En effet, historiquement, on a commencé à se préoccuper, à la fin des années 1990, de l’addiction à Internet et aux jeux vidéo (Young, 1998), mais le contexte s’est complexifié avec l’évolution technologique (téléphone portable, puis smartphone, jeux en ligne et en réseaux, jeux d’argent sur Internet, réseaux sociaux, …). Si certains saluent l’avancée que constitue l’introduction dans le DSM-5(APA, 2013) même à titre exploratoire, de l’addiction au jeu vidéo sur Internet, ils déplorent l’absence de reconnaissance officielle d’autres sous-types de comportements problématiques relatifs aux achats ou aux réseaux sociaux, par exemple (Wu, Lee, Liao et Ko, 2019).

Figure 1

Critères de la CIM-11

Critères de la CIM-11

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Même si les experts du DSM-5 (APA, 2013) retrouvent des similitudes entre l’usage pathologique du jeu sur Internet, les troubles liés à une substance et le jeu d’argent pathologique, ils constatent, en 2013, un manque de données scientifiques suffisantes pour inclure tous ces autres comportements aux apparences d’addiction.

Peut-on et faut-il différencier ces comportements? D’après Bioulac et Michel (2012), la notion d’addiction aux jeux vidéo se trouve souvent incluse dans une notion plus large : l’addiction à Internet. Ces auteurs insistent sur différents sous-types d’utilisation pathologiques de l’ordinateur : le jeu excessif, les achats compulsifs en ligne (pouvant aussi concerner les enchères en ligne), la cybersexualité (sexualité à distance via webcam, visionnage de contenus pornographiques avec ou sans comportement masturbatoire), les communications (courriels, messageries instantanées, réseaux sociaux), la recherche excessive d’information (le « surf » excessif).

Nous ne rentrerons pas dans une description des modèles et hypothèses explicatifs de ces troubles, mais allons illustrer, sans aucune prétention d’exhaustivité, une synthèse des publications récentes sur ces sujets (moins de 5 ans pour la plupart), qui proposent des définitions, établissent des prévalences, des comorbidités et facteurs associés. Les articles ont été sélectionnés à partir de deux bases de données (Medline et PsychInfo) et ont été sélectionnés, outre leur récence, sur des critères de rigueur méthodologique et de diversité de thèmes et supports rencontrés (Internet, jeux vidéo, smartphone…) afin d’illustrer le plus largement possible la thématique.

Remarques préliminaires : Depuis la parution du DSM-5 (APA, 2013), différentes recherches ont été conduites sur l’addiction aux jeux vidéo sur Internet. Bon nombre d’études concernent les adolescents, ou encore les populations adultes, moins souvent les jeunes adultes ou les étudiants. Nous avons constaté que la recherche en Asie est particulièrement active sur ces questions, probablement pour la raison suivante : « les jeux sur Internet auraient été définis comme une « addiction » par le gouvernement chinois, et un système de soin a été mis en place » (DSM-5; APA, 2013; p. 934). Cependant, on peut supposer que la différence culturelle dans l’adoption et la représentation des TIC entre l’Asie et l’Europe limite une comparaison directe avec une population européenne des résultats obtenus dans les recherches asiatiques (Stip, Thibault, Beauchamp-Chatel et Kisely, 2016). Il serait intéressant de poursuivre, à l’avenir, une réflexion plus approfondie sur les différences culturelles dans les usages et les représentations des TIC.

Internet / jeu pathologique : Bien qu’il existe des échelles permettant de mesurer l’addiction aux jeux vidéo, leur validité est discutée, notamment parce qu’ils ne prennent souvent en compte que la variable « durée de jeu ». Par exemple, la Compulsive Internet Use Scale existe depuis 2009 (Meerkek, Van den Eijnden, Vermulst et Garretsen, 2009). Ainsi, aucune des échelles actuelles ne semble faire l’unanimité, les comportements à quantifier étant très variés.

Très récemment, Wu et al. (2019) s’intéressent aux troubles liés à l’usage d’Internet, dont le « jeu pathologique » du DSM-5, considéré comme un sous-type, dans un échantillon représentatif de la population taïwanaise. Déplorant l’absence de prise en compte d’autres types de comportements que le jeu sur Internet par le DSM-5, ils incluent une mesure de ces deux troubles : l’une concernant l’activité sur Internet en général, l’autre concernant uniquement le jeu pathologique en ligne. Pour le sous-groupe des étudiants (n=250), ils sont 95,2 % à utiliser Internet et 4,4 % y présentent une addiction. Parmi ces derniers, 82 % auraient aussi une addiction aux jeux vidéo sur Internet. Dans cette étude, les étudiants et les adolescents font partie des groupes d’âge les plus à risques de développer une addiction à Internet et/ou aux jeux vidéo sur Internet (35 % des dépendants aux jeux sur Internet de l’échantillon initial sont étudiants). Les auteurs rappellent que ces troubles sont rarement isolés : « l’addiction à Internet est très comorbide avec d’autres troubles mentaux tels que : le trouble déficit de l’attention/hyperactivité (TDA-H), la dépression, les troubles anxieux, l’anxiété sociale, la faible estime de soi, l’impulsivité et le suicide... Les étudiants avec un attachement insécure sont plus enclins à développer une dépendance à Internet » (p. 515, Wu et al., 2019).

Une étude espagnole sur un échantillon de 2780 étudiants (Fernández-Villa et al., 2015) montre que l’usage problématique[2] d’Internet (UPI), fréquent ou occasionnel, concerne 6,08 % des jeunes, et ce, indépendamment du genre, contrairement aux autres études dans lesquelles être un homme est très souvent un facteur de risque. Avoir moins de 21 ans et être étudiant dans des disciplines autres que dans le domaine de la santé augmenterait le risque de présenter un usage problématique. De plus, l’étude montre une association entre l’UPI et des problèmes de santé divers : migraine, douleurs lombaires, surpoids ou obésité, fatigue. Le risque de troubles psychopathologiques en général est augmenté de 4 fois, dont les troubles du comportement alimentaire et la dépression. La présence de problèmes familiaux et de discrimination est aussi liée à un risque accru d’UPI. Enfin, le double d’UPI est retrouvé chez les étudiants à risque d’usage problématique d’alcool. Se focalisant sur les différences de genre chez les utilisateurs problématiques, les auteurs constatent que les hommes utilisent Internet plus volontiers à des fins de jeux et d’achat, tandis que les femmes l’utilisent plus à des fins de socialisation (chats et réseaux sociaux). Concernant le sommeil, l’intérêt de cette étude est de montrer que ce n’est pas tant la durée de sommeil qui est liée à l’UPI mais sa qualité perçue. Si les étudiants ne se sentent pas reposés après leur sommeil, le risque est doublé.

En Chine, sur une cohorte de 1173 participants, 15,2 % présentaient une addiction à Internet. Des corrélations sont retrouvées entre l’addiction à Internet et des relations parent-enfant de faible qualité, des symptômes dépressifs et de moindres compétences psychosociales (Chi, Lin et Zhang, 2016).

Au Japon, la prévalence de l’addiction à Internet serait relativement stable. Elle se situerait autour de 21 % (Tateno, Teo, Shiraishi, Tayama, Kawanishi et Kato, 2018). Concernant les troubles associés, une méta-analyse sur l’addiction à Internet et les comorbidités psychiatriques a montré une association positive, avec dans l’ordre de force d’association : l’abus d’alcool, le trouble du déficit de l’attention avec hyperactivité (TDAH), la dépression et l’anxiété (Ho et al., 2014).

Si le DSM-5 (APA, 2013) précise qu’un usage pathologique des jeux sur Internet s’associerait à des troubles dépressifs, des TDAH et des troubles obsessionnels compulsifs (TOC), d’autres données sont venues compléter ces comorbidités.

Une étude aux USA, portant sur un échantillon de 1205 étudiants en premier cycle universitaire, relève 7 % de personne souffrant d’addiction aux jeux vidéo en ligne. Ces joueurs pathologiques présenteraient une moins bonne santé mentale, un fonctionnement cognitif plus perturbé, un moindre contrôle des impulsions, et plus de symptômes de TDAH que les témoins. Ils présentent aussi une augmentation des symptômes anxieux, dépressifs, un isolement social, et sont plus enclins à présenter des symptômes d’usage pathologique de la pornographie sur Internet. Les femmes seraient plus exposées aux conséquences délétères de cette addiction, notamment sur le plan de la santé physique (Stockdale et Coyne, 2018)

Cybersexualité : Dans une étude de 2017, sur un échantillon de plus de 1500 étudiants espagnols, la prévalence de l’addiction à la pornographie en ligne était de 0,7 %. Cependant 8,6 % des jeunes étaient à risque de développer cette pathologie (Ballester-Arnal, Castro Calvo, Gil-Llario et Gil-Julia, 2017). Dans une revue systématique de la littérature très récente (de Alarcón, de la Iglesia, Casado et Montejo, 2019), l’usage de pornographie en ligne deviendrait problématique s’il est quotidien et, dans ce cas, s’associerait à un fonctionnement social médiocre, des usages problématiques d’alcool, de cannabis, de jeux de hasard et d’argent et de jeux vidéo. Par ailleurs, dans une revue francophone très complète sur la question de l’usage problématique de la pornographie, les auteurs concluent sur la fonction d’évitement expérientiel que cela revêt (Sergerie et Corneau, 2017), au même titre finalement que tout comportement addictif. Toutefois, celui-ci touchant à la sexualité, ne doit pas être oublié ou stigmatisé par les professionnels de santé.

Les messages textes instantanés (MTI) : L’usage problématique de MTI a été étudié en France sur un échantillon de plus de 500 étudiants. Un peu moins de 5 % présente une utilisation problématique de MTI et 40 % seraient à risque de présenter un usage problématique. L’usage problématique s’avère lié à des symptômes dépressifs et d’anxiété sociale (Lafuente, Chabrol et Laconi, 2018).

Les Réseaux sociaux : L’usage de Facebook a été étudié en France chez des adolescents et des jeunes adultes. Dans leur échantillon de 456 jeunes de 12 à 25 ans, constitué à 72 % d’étudiants, est retrouvé un usage problématique modéré (aucun sévère) de Facebook chez 17 % des sujets adultes (5 % d’hommes et 12 % de femmes) (Moreau, Laconi, Delfour et Chabrol, 2015). En Chine, dans une cohorte de 1110 étudiants, sont observés 29,5 % d’étudiants addicts aux réseaux sociaux en ligne. Les comorbidités associées sont les addictions alimentaires, l’addiction aux achats, les troubles thymiques (dépressifs et maniaques) et anxieux (Tang et Koh, 2017).

Le smartphone : En Chine, chez des étudiants en premier cycle d’études médicales, le taux d’usage problématique du Smartphone serait de 29,8 %. Les facteurs associés sont l’usage d’applications de jeu, l’anxiété et la mauvaise qualité de sommeil chez les hommes (30,3 %), les applications multimédia, les réseaux sociaux, l’anxiété, la dépression et la mauvaise qualité de sommeil chez les femmes (29,3 %) (Chen, Liu, Ding, Ying, Wang et Wen, 2017). Sur un échantillon japonais de 573 étudiants, 22,8 % des hommes et 28 % des femmes présentent, d’après les auteurs, une addiction au Smartphone quand, dans le même échantillon, 4,5 % présentent une addiction sévère à Internet (Tateno, Kim, Teo, Skokauskas, Guerrero et Kato, 2019). Aux États-Unis, l’usage problématique du téléphone s’associe à plus d’anxiété et de moins bonnes performances académiques (Lepp, Barkley et Karpinski, 2014). Les étudiants les plus sévèrement dépendants aux Smartphones présentent des scores plus élevés de souci et de colère que ceux qui ne sont pas dépendants (Elhai, Rozgonjuk, Yildirim, Alghraibeh et Alafnan, 2019).

TIC et cyberviolences

Les TIC ont ouvert le champ à des modes de socialisation et de communication différents pour les jeunes et les adultes, mais aussi à des mésusages et nouvelles formes de violences tels que le cyberharcèlement. Les cyberviolences peuvent avoir des conséquences psychologiques dramatiques sur les victimes (Hinduja et Patchin, 2010).

Là encore, le manque de consensus dans les définitions et les méthodologies rend difficile les comparaisons (Tokunaga, 2010) et toute forme de classification des comportements relevant de la cyberviolence (multiplicité terminologique, transférabilité des critères du bullying, contextualisation, prise en compte des spécificités numériques, etc.). Blaya (2013) conseille d’adopter un regard large sur les pratiques numériques entre pairs et les formes de violence qui y sont associées, en parlant notamment de cyberviolence plutôt que de cyberharcèlement, pour ne pas restreindre le champ d’étude (Berguer, Blaya et Berthaud, 2012). Cela implique d’envisager la diversité du phénomène de victimisation en ligne, tant dans les formes qu’elle peut prendre, que dans les modes d’interaction et de communication utilisés.

Les critères retenus pour la victimisation traditionnelle comme l’intention, la répétition et le déséquilibre de pouvoir, nécessitent pour la plupart une contextualisation (Walrave, Demoulin, Heirman et Van der Perre, 2009). D’ailleurs, on remarque très souvent que les victimes de cyberharcèlement sont également victimes de harcèlement en milieu scolaire. La particularité des TIC est d'intégrer des modes d’expression et de socialisation spécifiques et de présenter des caractéristiques qui leurs sont propres :

  • Anonymat facilité, capacité décuplée de dissémination, victimisation continue, sans limites spatio-temporelles (Patchin et Hinduja, 2008);

  • Distance instaurée par les outils, qui facilite le passage à l’acte. L’espace numérique devient lieu de transgression, d’impunité ou d’exutoire (Corroy, 2008; Kubiszewski, Fontaine, Huré et Rusch, 2012). Les actions s’opèrent en « effet cockpit » (l’auteur agit sans voir son destinataire ni percevoir sa réaction; Blaya, 2013);

  • Partage et diffusion dépossèdent les internautes de leurs actions et invitent d’autres à y prendre part;

  • Le déséquilibre des forces est redéfini par le biais des TIC, modifiant ainsi les prédispositions à endosser un rôle de victime ou d’agresseur. Une forte réciprocité des figures de victime et d’agresseur est d’ailleurs constatée dans de nombreux travaux menés auprès d’adolescents et d’étudiants (Berthaud et Blaya, 2014; Jose, Kljakovic, Scheib et Notter, 2011; Zhang, Land et Dick, 2010).

Le Tableau 1 présente une synthèse réalisée par Blaya (2013) des différents termes que l’on peut trouver lorsqu’il s’agit de cyberviolence.

Tableau 1

Le vocabulaire de la cyberviolence (Blaya, 2013, Annexe Tableau A1)

Le vocabulaire de la cyberviolence (Blaya, 2013, Annexe Tableau A1)

Tableau 1 (suite)

Le vocabulaire de la cyberviolence (Blaya, 2013, Annexe Tableau A1)

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La prévalence de la victimisation varie fortement d’une enquête à l’autre selon la méthodologie employée et la population interrogée. Il ressort néanmoins que la cyberviolence est une réalité pour de nombreux étudiants et que les insultes, les rumeurs et les menaces sont généralement les formes les plus fréquentes (Kennedy et Taylor, 2010; Molluzzo et Lawler, 2011; Patchin et Hinduja, 2010; Walker, Rajan Sockman et Koehn, 2011).

Dans les travaux menés auprès d’étudiants anglo-saxons, les téléphones et les messageries sont les médias les plus utilisés (Kavoura et Kiriakidis, 2010; Kowalski et Limber, 2007; Smith, Mahdavi, Carvalho, Fisher, Russell et Tippett, 2008; Zhang et al., 2010). Les réseaux sociaux tendent toutefois à être de plus en plus présents, notamment chez les plus âgés (Livingstone, Haddon, Görzig et Ólafsson, 2011; Walker et al., 2011). Élèves comme étudiants sont d’abord la cible d’autres pairs de la même classe ou du même établissement (Blaya, 2013), même si les victimes ne savent pas toujours qui est l’agresseur (Turan, Polat, Karapirli, Uysal et Turan, 2011; Vandebosch, 2009; Walker et al., 2011).

Cyberviolence chez les étudiants?

Les travaux sur la cyberviolence accordent une large prédominance aux élèves de l’enseignement secondaire, les études s’intéressant à l’enseignement supérieur étant minoritaires. Pourtant, l’âge n’apparaît pas comme un indicateur systématique de cybervictimisation (Tokunaga, 2010).

En France, Berthaud et Blaya (2014) ont réalisé une recherche auprès de 1 125 étudiants issus de deux universités, afin d’évaluer la prévalence de la cyberviolence et d’identifier ses caractéristiques. À notre connaissance, il s’agit de la seule étude française sur ce thème portant sur la population estudiantine. Les étudiants déclarent avoir vécu des phénomènes de cyberviolence une ou deux fois dans l’année. Les formes les plus fréquemment mentionnées sont l’envoi de messages désagréables (humiliants, vulgaires, intimidants), le partage d’informations personnelles, de photos à caractère sexuel, par : 1) SMS, 2) un réseau social, 3) courriel. Globalement, les étudiants ont déclaré davantage de violences en ligne émanant de personnes qu’ils connaissent que d’inconnus. Les étudiants sont moins nombreux à se reconnaître comme auteurs de cyberviolences; seuls l’envoi de courriels ou de SMS désagréables ainsi que les appels téléphoniques déplaisants passés à des pairs sont déclarés par 3 % à 6 % de l’échantillon. Très peu d’étudiants (de 1 % à 3 %) déclarent avoir été auteurs de violence envers des enseignants (généralement, il s’agit de commentaires ou de messages agressifs postés sur un blog ou un réseau social). En revanche, les résultats globaux sur la cyberviolence indiquent que 50,8 % des étudiants interrogés déclarent avoir été victimes d’au moins une forme de cyberviolence ou plus, une ou deux fois ou plus souvent lors des 12 derniers mois et que 14 % déclarent en avoir été auteurs. Globalement, les étudiants se sont assez peu déclarés auteurs de cyberviolence en comparaison avec les cas de victimisation subie retrouvés, contrairement aux taux rapportés dans les recherches impliquant des élèves de l’enseignement secondaire.

Cette étude pilote tend à confirmer l’existence de l’implication des étudiants comme victimes et auteurs de cyberviolence, rejoignant les travaux qui rendent compte d’une continuité du risque de victimisation dans l’enseignement tertiaire (Molluzzo et Lawler, 2011; Walker et al., 2011; Zacchilli et Valerio, 2011). Ces éléments confirment la forte propension des victimes de violence en ligne à se venger par les mêmes moyens, conduisant ainsi les victimes à devenir agresseurs et inversement (Jose et al., 2011; Zhang et al., 2010).

Des liens entre victimisation et pratiques numériques ont pu être relevés (Patchin et Hinduja, 2008; Berthaud et Blaya, 2014), comme un plus fort risque d’être concerné par la cyberviolence, notamment en tant que victime, chez les étudiants passant le plus de temps en ligne, ou ayant une utilisation variée d’Internet (Berthaud et Blaya, 2014; Wolak, Mitchell et Finkelhor, 2007). Enfin, le fait d’avoir supprimé des contacts de son profil Facebook augmenterait le risque de cyberviolence. Si globalement les étudiants français déclarent ne poster que peu de données, il s’avère que face au danger de l’usage des données, on observe deux profils divergeant : 1) des étudiants très informés et inquiets des dangers liés à l’usage des données (sécurisation de leurs comptes, peu de publications contenant des informations privées, filtrage des ajouts de contacts) qui peuvent s’inquiéter du vol des données bancaires, fichiers, de l’image ou de la création de faux-comptes, et 2) des étudiants qui ne se considèrent pas concernés (Blaya, 2017).

Pour conclure, au-delà des subtilités et difficultés nosographiques qui peinent à suivre le rythme des évolutions technologiques et qui rendent les études (épidémiologiques notamment) complexes et les comparaisons difficiles, il n’en demeure pas moins qu’il existe un pourcentage non négligeable d’étudiants qui présentent des comportements problématiques en lien avec les TIC. Ces comportements, chez les étudiants, comme chez tout le monde, relèvent d’une problématique addictive ou sont à risque de le devenir, et en présentent quasiment les mêmes facteurs de risques (facteurs individuels, environnementaux, contexte d’usage) et de protection (la connaissance des risques, les compétences psychosociales, les relations familiales, sociales et l’insertion professionnelle). Ils nécessitent d’être repérés et pris en charge afin de limiter leur retentissement sur la santé et sur les performances académiques des étudiants pour ne pas nuire à leur avenir. Si la prévention nécessite de toucher les jeunes sur tous les supports et objets possibles, c’est dans l’intimité d’une prise en charge psychologique individuelle et/ou de groupe sur mesure que la question de l’objet et du support prendra son sens et son importance et nécessitera des ajustements thérapeutiques. Par ailleurs, les victimes de cyberviolence ont aussi besoin de reconnaissance du phénomène, ce qui est heureusement de plus en plus le cas, et de pouvoir bénéficier d’aides appropriées tant du côté de la loi, que de celui de la psychothérapie.

Intervention et prévention : les exemples Français et Québécois

La France et la province du Québec offrent deux exemples différents de prise en charge des problématiques liées à l’usage des TIC - auprès de la population étudiante notamment. Nous présentons ici un portrait synthétique des structures d’aide et des stratégies actuelles de prévention.

Des terminologies différentes

Avant de présenter les offres d’aide, il est important de mentionner que la France et le Québec emploient parfois des terminologies distinctes en matière de TIC et de santé mentale. Il n’existe pas, à notre connaissance, d’article ou d’ouvrage traitant spécifiquement de ces écarts au sein de la Francophonie. Mais l’Office québécois de la langue française (OQLF) a publié plusieurs fiches terminologiques à des fins de clarification.

Premier exemple: bien que relativement proches, les termes « addiction » et « dépendance » ne sont pas employés et compris de la même façon dans les deux endroits. « Addiction » est utilisé de façon majoritaire en France, mais au Québec, ce terme est vu comme un emprunt littéral de l’anglais auquel le terme « dépendance » est préféré (OQLF, 2019a). Autre exemple, « cyberintimidation » est plus fréquent au Québec qu’en France, où l’on parle davantage de « cyberharcèlement » (OQLF, 2019b). Les deux termes ne désignent pas la même chose dans les deux pays, l’OQLF précisant que ce sont deux concepts distincts. Enfin, troisième exemple : « cyberaddiction » a souvent été employé dans des pays francophones (France, Suisse), mais son usage est critiqué au Québec où on utilise l’appellation « cyberdépendance » (OQLF, 2019c).

Ces exemples illustrent un décalage actuel parfois important aux niveaux terminologique et conceptuel. Il n’est pas rare de trouver dans des documents ou sites institutionnels une grande variabilité dans les mots adoptés, d’un pays à l’autre (et parfois dans un même pays). Pour les parties ci-dessous, dans un but de simplicité et de fidélité aux documents trouvés, nous avons restitué les termes tels que nous les avons trouvés.

Les offres d’aide

Au Québec. Comme vu dans les parties précédentes (1.1, 1.2), les TIC sont parfois associées à des usages excessifs et des troubles de santé mentale. En ce qui concerne les dépendances, le Québec dispose de nombreuses structures qui ont progressivement fait évoluer leurs services pour prendre en compte les nouvelles problématiques en lien avec les TIC (comme la cyberdépendance). Ces ressources peuvent être utilisées par tous, dont les étudiants.

À un niveau public, il existe des réseaux importants de services de santé : les Centres Intégrés de Santé et de Services Sociaux (CISSS) et les Centres Intégrés Universitaires de Santé et de Services Sociaux (CIUSSS). Ils sont gratuits et accessibles à tous les résidents du Québec (MSSS, 2019). Ils peuvent être une porte d’entrée pour rediriger les personnes vers des services adaptés. Le CIUSSS de la Capitale-Nationale a, par exemple, mis à disposition un portail présentant les types de troubles pris en charge en son sein, comprenant la consommation de drogues, les dépendances aux jeux de hasard et d’argent, ainsi que la cyberdépendance (CIUSSSCN, 2016). Certains de ces regroupements peuvent même disposer de structures expertes, comme les centres de réadaptation en dépendance (CRD). Un exemple peut être le Centre de réadaptation en dépendance de Montréal - Institut universitaire (CRDM-IU) affilié au CIUSS Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal. Ce dernier offre plusieurs types de soins pour, entre autres : les problèmes liés à la consommation d’alcool et de drogues, les problèmes de jeux et de cyberdépendance (CIUSS - Centre Sud, 2019).

Le Québec dispose également d’autres ressources communautaires et privées certifiées en dépendances (MSSS, 2019), dont certaines sont spécialisées dans le jeu excessif et la cyberdépendance, comme le centre CASA nommé par le Ministère de la santé et des services sociaux comme « Service régional d’information et de sensibilisation pour la prévention des problèmes liés aux jeux de hasard et d’argent » (CASA, 2018), ou encore l’organisme « le Grand Chemin » (situé à Montréal, Québec et Saint-Célestin) oeuvrant avec les adolescents (jusqu’à 17 ans) souffrant de toxicomanie, jeu excessif (ou pathologique) et cyberdépendance. Ces centres peuvent offrir des services de thérapie (individuelle ou de groupe), de réinsertion et de dépistage. Il existe enfin également de nombreux services au privé. Par exemple, l’Ordre des Psychologues recense actuellement 188 psychologues accrédités (la plupart en libéral) offrant des services spécialisés en « Dépendances (jeu, Internet, achat compulsif) » (OPQ, 2019).

Par ailleurs, des ressources en ligne ou à distance existent en matière de jeu d’argent (« Jeu : Aide, Référence »), de drogues (« Drogue : aide et référence »). Ces services offrent renseignements et soutien aux personnes vivant des difficultés en lien avec ces sujets (ou à leurs proches). Ils peuvent servir de relais pour rediriger les personnes vers les services adaptés. D’autres numéros « généralistes » (comme « Tel Jeunes » ou « Ligne Parents »), non dédiés exclusivement aux dépendances, peuvent également aider à cette mission. “Tel Jeunes” propose, par exemple, des sections dépendances et technos, contenant de l’information, notamment sur la cyberdépendance, la cyberintimidation et l’usage des réseaux sociaux (Teljeunes, 2019).

En dernier lieu, les universités contribuent également à l’offre d’aide. Elles disposent fréquemment de services d’écoute ou de soutien, proposant de l’information ou des personnes ressources pour aborder les questions liées à l’usage des TIC. L’Université de Laval propose, par exemple, de l’information écrite par des psychologues sur des sujets touchant les étudiants universitaires (comme les réseaux sociaux ou la cyberdépendance) (Coulombe, 2017). Ou encore, l’Université de Montréal offre, via le site de son service de consultation psychologique, des renseignements comme son pamphlet « Accros d’Internet » (CSCP UdeM, 2012). Autre type d’action: les universités peuvent également collaborer avec les milieux de pratique au Québec pour comprendre comment mieux venir en aide pour ces nouvelles problématiques. Un exemple récent est l’étude de grande ampleur « Virtuado » (Dufour, Gagnon, Nadeau et Légaré, 2017). Elle visait à fournir un portrait détaillé des utilisateurs problématiques d’Internet (UPI) et a impliqué 13 CRD à travers le Québec.

En France. Comme le Québec, la France dispose d’un réseau de services publics pour lutter contre les addictions, en particulier chez les jeunes populations. Des hôpitaux disposent de consultations gratuites pour diagnostiquer et repérer les dépendances et addictions. Ils vont souvent référer à des unités de soin spécialisées, comme les ELSA (Équipes de Liaison et de Soins en Addictologie). Le secteur médico-social dispose, quant à lui, de CSAPA (Centres de Soins, d’Accompagnement et de Prévention en Addictologie). Ces organismes peuvent référer et travailler avec d’autres structures spécialisées comme les CAARUD (Centres d’Accueil et d’Accompagnement à la Réduction de risques pour Usagers de Drogues) et les CJC (Consultations Jeunes Consommateurs). Ces dernières sont des lieux ouverts aux jeunes (de 12 à 25 ans) et à leur entourage. Ils sont présents sur presque l’intégralité du territoire français et sont souvent hébergés par d’autres structures comme les CSAPA. Ils sont conçus comme un lieu où recevoir de l’information sur des problématiques variées comme la consommation d’alcool et de cannabis, ou encore l’usage de jeux vidéo et d’Internet.

En matière de traitement, la France était dans les premiers pays à avoir des structures offrant de l’accompagnement pour des problématiques liées au TIC, à l’instar de l’hôpital Marmottan (Vaugeois, 2006). Depuis lors, d’autres structures spécialisées sont venues renforcer le secteur, tel que le Centre de référence - Jeu Excessif du Centre hospitalier universitaire de Nantes (CRJE, 2007). Ce dernier offre des soins, de la formation et est un pôle de recherche. Il a aussi contribué à la création de l’Institut fédératif des addictions comportementales, dont le but est de diffuser les connaissances sur un ensemble varié de troubles : « addiction aux jeux de hasard et d'argent ou jeu pathologique, addiction aux jeux vidéo, achats compulsifs, troubles du comportement alimentaire, dépendance à l'activité physique, dépendances sexuelles et affectives, dépendances sectaires » (IFAC, 2010). En dehors du CRJE ou de l’hôpital Marmottan, il ne semble pas exister d’autres structures publiques aussi spécialisées. Il n’existe pas encore, à notre connaissance, de stratégie nationale unifiée en matière de soin pour les problématiques liées aux TIC (comme la cyberdépendance).

Enfin, à l’instar du Québec, des lignes d’écoute sont à disposition des jeunes, dont les étudiants. « Fil Santé Jeunes » permet d’obtenir de l’aide anonyme et gratuite par messagerie (de groupe et individuelle) ou appel téléphonique. Ils proposent également des informations de santé, notamment sur les « addictions sans produits » : l’utilisation excessive des écrans, la cyberdépendance, l’addiction à la pornographie, au sport ou aux jeux d’argent (Fil Santé Jeunes, 2019). Une autre ligne d’écoute gratuite « Joueur Info Service » (09 74 75 13 13) est spécialisée dans l’aide pour les joueurs excessifs ou pathologiques de tous les âges.

Enfin, nous pouvons mentionner qu’en plus de cette offre publique, des organismes privés oeuvrent également dans le champ de la santé étudiante. Ils peuvent collaborer avec les universités, écoles et des structures publiques. À titre d’exemple, Apsytude (2019) offre de l’information générale (notamment sur les addictions ou la dépression), des liens vers des tests pour évaluer son niveau de risque.

Stratégies de prévention

En France. Nous avons tâché de recenser les stratégies et organismes de prévention, en lien avec les questions de l’usage des TIC et de la population étudiante.

En matière d’addictions. Aujourd’hui, la France dispose de plusieurs structures spécialisées sur les dépendances et addictions, pouvant travailler sur des addictions « sans substance » (presque exclusivement les jeux d’argent et de hasard). On compte tout d’abord l’Observatoire français des drogues et toxicomanies (OFDT). Cette institution fondée en 1993 a pour but d’informer les pouvoirs publics sur les drogues, addictions et leur actualité. Cette dernière met à disposition de l’information sur les addictions, notamment les jeux d’argent (mais ne mentionne pas les « addictions non comportementales » ou la cyberdépendance) (OFDT, 1993). Autre institution: la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (MILDECA, 2019). Elle a pour but de superviser les actions en lien avec la toxicomanie et plus généralement les addictions. Elle coordonne des stratégies nationales sur les addictions pour renforcer les dispositifs actuels et les moyens d’aider les populations vulnérables. Ainsi, après un plan 2013-2017, elle coordonne un nouveau plan de mobilisation contre les addictions 2018 à 2022 (MILDECA, 2019). Ce plan fixe comme objectif une meilleure prise en compte des addictions comportementales dans les stratégies de prévention et de soin, en particulier celles qui toucheraient les jeunes (MILDECA, 2019). Ce dernier rapport établit aussi des recommandations pour améliorer l’utilisation problématique des « écrans ». Il s’agira de diffuser des critères « simples » de repérage auprès des professionnels de santé pour mieux repérer et plus vite les usages problématiques (MILDECA, 2019).

OFDT et MILDECA peuvent agir ensemble pour mieux organiser l’accès à l’information et aux ressources. Elles ont contribué à la création d’une plateforme Internet publique (intervenir-addictions.fr). Son objectif est d’aider les soignants de première ligne à mieux repérer, prévenir et intervenir. Elle informe, entre autres, sur les addictions sans substance, en mettant elle aussi l’accent principalement sur les jeux d’argent et de hasard.

En dernier lieu, une structure transversale a été créée afin de mieux lutter contre les addictions aux jeux d’argent. Il s’agit de l’Observatoire des jeux (ODJ). Son but est d’observer « les impacts sanitaires, sociaux et économiques des jeux d'argent et de hasard pour éclairer l'action de l'État » (ODJ, 2019). L’observatoire contribue ainsi conjointement à la prévention, la régulation et la recherche (avec, par exemple, l’université québécoise Concordia).

Cet organisme regroupe des représentants concernés par ce secteur de prévention dont l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), Santé publique France (SPF), l’OFDT et l’Autorité de régulation des jeux d’argent en ligne (ARJEL). En plus de contrôler le marché, l’ARJEL a pour mission secondaire de renforcer la présence de messages de prévention sur les sites de jeu.

En matière d’utilisation des écrans. De façon générale, les stratégies de prévention ou d’utilisation adaptée des TIC semblent plus nombreuses pour le domaine de la petite enfance et des adolescents (jusqu’à 17 ans). SPF propose par exemple de l’information, redirige vers les CJC. Y sont donnés également des suggestions de stratégies éducatives à l’usage des parents, pour réguler l’usage des jeux vidéo de leurs enfants. Il existe aussi des initiatives privées comme la campagne « Ensemble, gardons le contrôle” sur le site “le bon usage des écrans » de l’institut d’Éducation Médicale et de Prévention (IEMP - Lyon). On peut également citer l’initiative 3-6-9-12 initiée par Serge Tisseron, ou encore « Internet sans crainte » de l’agence du numérique qui a reçu le soutien de l’Union européenne.

Au Québec. En matière de dépendances. Le Ministère de la Santé et des Services Sociaux a annoncé en 2018 un Plan d'action interministériel en dépendance 2018-2028 « Prévenir, réduire et traiter les conséquences associées à la consommation de substances psychoactives, à la pratique de jeux de hasard et d'argent et à l'utilisation d'Internet » (MSSS, 2018). Ce plan visera à concerter pendant dix ans la prise en charge (avec les Services Dépendances qui regroupent les services de CRD et de CLSC) et les missions de prévention. L’objectif sera de prolonger les efforts actuels et d’intégrer davantage les problématiques grandissantes (notamment l’utilisation d’Internet).

Comme le souligne le rapport, ce plan pourra s’appuyer sur l’importance de la recherche sur les dépendances au Québec et les efforts de prévention des vingt dernières années, notamment en matière de jeux d’argent (MSSS, 2018). Des campagnes ont été menées, en collaboration avec le monopole, Loto Québec. Il existe un numéro public (« Jeu, Aide et Référence » : 1 800 461 0140) et une campagne de prévention secondaire et tertiaire « Bien Joué » sur « Espace Jeux ». Cette dernière met l’accent sur les risques encourus, les fausses croyances, les moyens de se limiter ou de trouver de l’aide.

En matière d’utilisation des écrans. Des initiatives de prévention sur l’usage des écrans existent. Comme en France, elles se concentrent principalement sur les enfants en milieu scolaire, à l’instar du « Guide pour une saine utilisation des écrans chez les tout-petits » du MSSS (2014). Néanmoins, elles peuvent parfois inclure les adolescents. L’Institut National de Santé Public du Québec a également diffusé en 2016 des recommandations en matière d’usage des écrans chez les plus jeunes (INSPQ, 2016). Enfin, le Ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur du Québec a publié un « cadre de référence de la compétence numérique » (2019).

On peut enfin noter l’existence d’initiatives menées par des organismes à but non lucratif, tels que centrecyber-aide.com, ecranferme.soisfute.ca, ou « Pause ton écran » de l’entreprise en santé Capsana, soutenue par le Secrétariat de la Jeunesse du Québec (Capsana, 2018). Ces initiatives visent à donner des outils pour les individus, les éducateurs ou les parents pour mieux gérer l’utilisation des écrans et prévenir les utilisations problématiques.

Lutte contre le cyberharcèlement et la cyberintimidation

Législation actuelle sur le cyberharcèlement et la cyberintimidation. Le cyberharcèlement a fait l’objet de nombreux débats et discussions. Mais face à l’ampleur du phénomène, on trouve de nombreuses mesures législatives et juridiques tant au niveau des provinces qu’au niveau fédéral. Statistiques Canada estime qu’en 2014 (données mises à jour en 2018), environ 2.5 millions de personnes vivant au Canada ont été victimes de cyberharcèlement (Statistiques Canada, 2018). Sa prévalence est supérieure chez les femmes que chez les hommes et, par comparaison avec les personnes qui disent ne pas avoir vécu de cyberharcèlement, les victimes ont également des probabilités plus faibles de rapporter avoir une santé mentale « très bonne » ou « excellente ». Au vu de l’ampleur et des conséquences potentiellement nombreuses et graves, plusieurs articles du Code Criminel Canadien peuvent être utilisés. Il s’agit des articles sur la diffamation (art. 301), l’extorsion (art. 346(1)), le harcèlement criminel (art. 246(1)) et sur les faux-messages (art. 372(1)). Les peines encourues peuvent aller de 2 à 5 ans dans certains cas (comme sur la diffamation) (Gouvernement du Canada, 1985) sécurité publique et code criminel. L’âge minimum est de 12 ans.

Face aux difficultés de statuer sur des cas parfois complexes, la Charte québécoise des droits et libertés de la personne peut apporter également des outils supplémentaires. Les articles 1 à 4 et 10, précisent le genre d’offense, pour savoir s’il s’agit, par exemple, d’une atteinte discriminatoire, basée sur des caractéristiques individuelles (comme l’appartenance ethnique ou le genre) (Criminal Code of Canada, 1985). Très récemment, au niveau fédéral, le Canada a promulgué une Charte Canadienne du Numérique, renforçant la protection contre la cyberintimidation ou le mésusage des TIC (Gouvernement du Canada, 2019). Ceci illustre que la lutte contre le cyberharcèlement est donc un sujet d’actualité important aux niveaux politique et législatif.

Structures d’aides pour les victimes de cyberharcèlement. De nombreuses ressources existent pour soutenir les personnes victimes de cyberharcèlement et d’intimidation en général. Au Québec par exemple, il existe des services gratuits pour les jeunes en particulier. Ces derniers peuvent bénéficier d’aide pratique pour stopper une situation de cyberharcèlement (« Aidez-moi svp »), au niveau psychologique (« Tel Jeunes », « Suicide Action Montréal »), légal (« Mercredi j’en parle à mon avocat »).

En France et en Europe, la question du cadre législatif de la cyberviolence se pose. Dans de nombreux pays européens, il est possible de se référer à une dizaine de lois non spécifiques afin de sanctionner les actes tels que la diffamation, la protection des données personnelles, le droit à l’image et les abus sexuels à l’encontre des enfants. Toutefois, il n’existe pas de texte de loi spécifique aux situations de cyberharcèlement (Calamaestra, Mora-Merchan, Del Rey et Ortega, 2010). En France, la plupart des problèmes de cyberviolence basés sur le dénigrement et les insultes publiques sont couverts par :

  • La loi sur la liberté de la presse[3], bien que ce texte soit particulier au milieu professionnel et ne précise rien quant au cadre scolaire.

  • La loi de mars 2007 adopté par le Parlement afin de lutter contre le phénomène du « happy slapping » (premier texte de loi spécifique faisant suite à deux condamnations en février 2006 et janvier 2007), montrant une prise très au sérieux du phénomène par les services judiciaires français.

  • La loi d’Orientation et de Programmation pour la Performance de la Sécurité Intérieure (LOPSSI 2)[4].

  • La loi Informatique, fichiers et libertés, prévoit aussi que le traitement de données à caractère personnel d’un individu sans son accord est un délit sanctionné pénalement.

Quel que soit le pays concerné et sa position quant à la criminalisation de la cyberviolence, on se heurte à un problème majeur, que nous avons déjà souligné quant à la mesure et à la possibilité d’effectuer des comparaisons sur la prévalence du phénomène, c’est celle de la définition. L’imprécision des définitions utilisées, le manque d’homogénéité quant à l’abord du phénomène rendent son identification et sa prise en charge légale épineuse. La qualification des faits reste difficile, alors même qu’assurer une prise en charge de la cyberviolence d’un point de vue légal permet non seulement de poser un cadre mais contribue à reconnaître le statut de victime.

TIC ET RESSOURCES PSYCHOTHÉRAPEUTIQUES

Après avoir tenté de passer en revue les grandes problématiques psychopathologiques évoquées autour des usages des TIC chez les populations étudiantes, nous aborderons la question du traitement de ces troubles. Par ailleurs, un autre aspect important parmi les usages des TIC est la prise en charge psychothérapeutique grâce aux outils technologiques. Ainsi, le champ de la cyberpsychologie regroupe diverses applications actuelles dans des cadres psychothérapeutiques variés.

Peut-on envisager les TIC comme des ressources fiables pour la pratique psychothérapeutique? Comment penser la place de ces outils dans le travail, la formation et la recherche des psychologues?

Prises en charge des usages problématiques des TIC

Les recommandations sur la prise en charge spécifique des conduites et de l’usage problématiques des TIC sont encore timides et peu présentes. Par exemple, aucun mode de traitement de la dépendance à Internet n’est préconisé par rapport à un autre. En revanche, la plupart des modèles psychothérapeutiques publiés et disponibles ont été conçus sur le modèle des addictions avec substance, supposant alors des mécanismes étiopathogéniques similaires (Weinstein et Lejoyeux, 2010). Des programmes comportementaux et cognitifs ont été publiés en Autriche, Italie, Allemagne et Hong Kong (Kalke et Rashke, 2004; Shek, Tang et Lo, 2009). L’objectif est de travailler avec les patients sur les stratégies de coping pour changer les comportements liés à l’usage des TIC. Cela peut, par exemple, passer par une évaluation psychométrique, mais aussi par des entretiens motivationnels, des analyses fonctionnelles du comportement, des méthodes d’auto-observation des comportements et des pensées, de prévention de la rechute ou de restructuration cognitive. Par exemple, l’idée de départ pourrait être de reporter sur un carnet les durées, les horaires, les contenus consultés sur Internet, puis de noter les pensées automatiques, les émotions, etc.

En ce qui concerne l’addiction à Internet, une méta-analyse (Winkler, Dorsing, Rief, Shen et Glombiewski, 2013) recense 17 traitements dont quatre sont comportementaux et cognitifs, huit sont des programmes intégratifs, une psychothérapie d’acceptation et d’engagement (Acceptance and Commitment Therapy, ACT) et trois sont des traitements médicamenteux. Parmi ces propositions, 11 sont des programmes individuels et six se conduisent en groupe. Tous les résultats sont positifs et les tailles d’effet (d de Cohen) varient de moyennes à grandes. Certaines formes de psychothérapie montrent également une généralisation des bénéfices sur la dépression et l’anxiété. Cela soulève à nouveau la question des comorbidités souvent présentes dans l’usage problématique des TIC. Point important, cette méta-analyse ne parvient pas à montrer la supériorité d’une forme de psychothérapie sur une autre parmi les 17 étudiées, si ce n’est sur le temps passé sur Internet et les indices de dépression.  

Prises en charges avec des outils numériques

Il est important de distinguer les prises en charge psychothérapeutiques qui concernent l’usage problématique des TIC des prises en charge utilisant les outils numériques pour soigner des troubles psychopathologiques, tels que la dépression, les troubles anxieux, les troubles du comportement, les dépendances, entre autres. Ces nouveaux cadres psychothérapeutiques s’inscrivent dans le champ de la cyberpsychologie, qui a pour objet l’étude des effets du cyberespace sur le comportement humain et la société en général[5]. Par ailleurs, on note un certain développement de la diffusion de programmes psycho-éducatifs et d’actions de prévention en ligne, ainsi que la mise en place de lignes d’appels et d’écoute (Auxéméry, 2010; Lezin et Thouin, 2000).

La télépsychothérapie

L’essor de la télépsychothérapie depuis plus d’une vingtaine d’années soulève plusieurs questions (Recupero et Rainey, 2006; Shapiro et Schulman, 1996). Ces pratiques questionnent notamment la téléprésence et la qualité de l’alliance thérapeutique qui peut s’installer à distance entre le psychothérapeute et son patient, tout en permettant une amélioration de l’accès aux soins dans certaines conditions.

La télépsychologie est définie comme la prestation de services psychologiques à l’aide des télécommunications. Un Guide de pratique en télépsychologie a été publié par l’Association de psychologie américaine (APA) et l’Ordre des psychologues du Québec en 2013.

Différentes formes de psychothérapies à distance sont proposées et on observe une certaine gradation entre des échanges écrits ou verbaux médiatisés par un tiers numérique et la technologie de la visioconférence. La présence du corps est donc un facteur important à considérer dans une relation médiatisée par l’écran, d’autant plus si elle a une visée psychothérapeutique (Haddouk, 2013).

La télépsychologie inclut :

  • Des échanges écrits (tchat, emails, SMS),

  • Des échanges verbaux (téléphone, VOIP, avatars),

  • La visioconférence

On note également que plusieurs méthodes psychothérapeutiques existent en télépsychothérapie. Ainsi, des thérapies cognitivo-comportementales sont proposées depuis plusieurs années avec ce type de méthode et assez bien documentées sur le plan scientifique, notamment au Québec (Bouchard et al., 2004). Bien que de nombreux professionnels de la psychothérapie psychodynamique aient pratiqué l’entretien au téléphone, cette pratique reste encore assez peu théorisée. Les recherches sur la visioconsultation (Haddouk, 2016) illustrent l’apport de la psychologie psychodynamique dans l’étude du cadre en télépsychothérapie.

Les médiations numériques

Les médiations numériques par le jeu vidéo sont une pratique assez répandue en France, depuis un certain temps. Certains jeux vidéo sont utilisés comme des outils de médiation lors de suivis psychothérapeutiques individuels, notamment avec des enfants et des adolescents (Stora, 2005, 2018). Les particularités du jeu choisi à travers les compétences qu’il sollicite chez le joueur et sa narrativité sont choisies par le clinicien, qui connaît lui-même bien l’outil. Ainsi, par exemple, un groupe de cliniciens et de chercheurs de Lyon proposent un modèle de médiation thérapeutique à l’aide de jeux vidéo (Haza, 2019).

Par ailleurs, les jeux vidéo sont également utilisés avec des groupes de patients, lors d’ateliers, dans certaines institutions comme plusieurs Maisons des Adolescents en France aujourd’hui. Le cadre de prise en charge est alors différent et vise à mobiliser d’autres processus, en lien avec le groupe, autour de l’outil jeu vidéo. Dans ces contextes, il semble que le jeu vidéo soit considéré comme un média nouveau, mais qui se trouve intégré dans un cadre connu qui est celui des médiations à visée psychothérapeutique.  

L’immersion en réalité virtuelle

Par définition, la réalité virtuelle n’expose pas le patient à des situations réelles. Le patient se trouve en immersion en réalité virtuelle à l’aide de l’écran, mais aussi d’un équipement technique particulier : gants de données, visiocasques ou casques de réalité virtuelle, capteurs de localisation. L’utilisation de la réalité virtuelle en psychothérapie est réalisée avec des jeux vidéo existants mais modifiés, permettant de créer des environnements virtuels adaptés à la pathologie envisagée. Cette méthode a tout d’abord été expérimentée avec des sujets souffrant de troubles anxieux (Rothbaum et Hodges, 1995). Le sujet interagit alors avec son environnement, le but étant de réduire son anxiété par un procédé d’habituation aux objets ou aux situations anxiogènes. L’exposition à ces situations est progressive et se déroule souvent en présence du thérapeute. Un entretien clinique est généralement mené avant et après chaque immersion.

L’efficacité de ce type de prise en charge des troubles anxieux par immersion en réalité virtuelle est assez bien documentée concernant différentes problématiques : arachnophobie (Bouchard, St-Jacques, Robillard et Renaud, 2007), agoraphobie (Vincelli, Choi, Wiederhold, Bouchard et Riva, 2002), acrophobie (Bouchard, St-Jacques, Robillard, Côté et Renaud, 2003), etc.

D’autres recherches portent sur le traitement des troubles des conduites alimentaires (Riva et Molinari, 2009), des syndromes post-traumatiques (Rothbaum, Hodges et Alarcon, 1998; Wiederhold et Wiederhold, 2010) ou encore des addictions (Girard, Turcotte et Bouchard, 2009).

Les programmes et applications auto-thérapeutiques / Serious games

Des logiciels et applications à visée auto-thérapeutique ou en self-help sont proposés, notamment pour la gestion du stress dans la population étudiante (Saleh, Camart et Romo, 2017).

Ces outils rejoignent les objectifs que l’on retrouve dans certains serious games (ou jeux sérieux), tels que Sparx®, jeu développé en 2009 pour lutter contre la dépression, ou plus récemment Clashback®, jeu proposant une aide à la gestion des situations conflictuelles.

Bien que certains auteurs s’interrogent sur les processus de soins qui utilisent directement le media TIC en question (Petit et al., 2016), ces nouvelles pratiques changent les comportements et les représentations mais peuvent également permettre de recueillir des données puissantes et en temps réel sur les nouveaux comportements, les nouveaux mécanismes d’apprentissage et d’expression des plaintes et symptômes chez les jeunes.

CONCLUSION

Les TIC font aujourd’hui pleinement partie de l’environnement des étudiants et plus généralement de l’ensemble de la population.

La possibilité d’envisager l’usage problématique de ces outils numériques de façon isolée semble mériter une catégorisation plus précise du type de comportement en question. La variabilité des données actuelles dans la littérature amène certaines interrogations. Cette nouvelle symptomatologie correspond-elle à un nouveau type de maladie mentale ou à une forme actuelle d’expression de la souffrance? Comment intégrer les variables culturelles dans l’observation des usages “pathologiques” des TIC?

Pour aller vers une meilleure compréhension du concept de dépendance à Internet, qui rappelons-le, n’est qu’un outil, il semble important de mieux définir l’usage problématique observé : quel support technologique est utilisé? S’agit-il de dépendance à un jeu vidéo (en ligne ou hors-ligne), à un réseau social en ligne, à des séries diffusées en ligne, à des images à contenu pornographique en ligne, etc. La liste pourrait être longue et cette diversité pourrait souligner que l’apparition d’usages problématiques des outils numériques vient souvent se greffer à une vulnérabilité coexistante, voire préexistante, dans la vie du sujet. Ainsi, on note que dans les problématiques de dépendance, de nombreuses comorbidités sont présentes chez les sujets étudiés. Par ailleurs, dans les phénomènes de cyber-violence, une violence préalable est souvent exercée sur les victimes.

La variabilité des usages des TIC s’illustre aussi dans ses aspects thérapeutiques, qui se développent dans différentes sous-disciplines de la psychologie et en lien avec des problématiques très diverses. Les supports utilisés se multiplient ainsi que les usages, individuels (comme dans les serious-games), duels (comme en télépsychothérapie), ou en groupe (comme dans certaines médiations par le jeu vidéo, ou encore certains groupes de pairs sur les réseaux sociaux en ligne). Il est ainsi difficile d’aborder ces dispositifs avec exhaustivité, ce qui constitue une limite au présent travail.

Il est possible que la familiarité socio-culturelle de la population étudiante avec les outils numériques favorise l’accès aux soins via des prises en charges utilisant ces mêmes outils. Il est important de noter également que ces outils viennent souvent s’inscrire en complément d’une prise en charge individuelle plus traditionnelle, dans un but d’amélioration du cadre proposé.

Les enjeux autour des usages des outils numériques en santé mentale sont importants, notamment pour les étudiants d’aujourd’hui et les professionnels de demain. C’est pourquoi une meilleure connaissance des pratiques problématiques et thérapeutiques, ainsi que des cadres méthodologiques proposés est essentielle pour la formation des psychologues et plus généralement des professionnels de santé.