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La pensée visionnaire de Santi Romano sur le concept d’ordre juridique ne cesse d’offrir, depuis sa première parution en italien en 1918 et sa traduction en langue française en 1975[1], un cadre théorique riche et porteur pour penser les relations entre le droit et la société. Près de 100 ans après sa parution, c’est cette pertinence toujours aussi fine et sans cesse renouvelée que Jean-Sylvestre Bergé, professeur de droit à l’Université de Lyon (Jean Moulin Lyon 3) et membre sénior de l’Institut universitaire de France, met en lumière dans son commentaire intitulé Les ordres juridiques, publié en 2015. Les travaux du professeur Bergé ancrés tout à la fois dans le droit national, européen et international et, en particulier, l’originalité de ses réflexions sur les « situations de circulation interterritoriale[2] » lui permettent non seulement de démontrer la pertinence contemporaine de la pensée « prémonitoire[3] » de Romano, mais aussi d’en dégager l’esprit pour favoriser l’émergence de nouvelles pistes théoriques. Cette réflexion synthétique trouve appui dans la richesse intellectuelle du parcours du professeur Bergé qui est engagé dans plusieurs équipes de recherche en droit international, comparé et européen et dont les travaux ont porté sur le droit international de la propriété intellectuelle, les interactions entre le droit international et le droit européen, l’européanisation du droit et le pluralisme juridique mondial. Le programme de recherche international et interdisciplinaire d’envergure qu’il dirige depuis 2016, intitulé « La circulation totale au-delà du contrôle et le droit[4] », s’inscrit d’ailleurs dans la foulée de la proposition théorique sur les rapports entre le droit et les « réalités sociales construites méconnues[5] » qu’il formule dans son commentaire de l’oeuvre de Romano[6].

Publié dans la conviviale collection « Tiré à part » des éditions Dalloz, qui veut permettre à un large public de s’approprier des textes fondamentaux, « souvent oubliés[7] » et qui, de notre point de vue, constitue une lecture enrichissante tant pour les professeurs de droit que pour leurs étudiants des cycles supérieurs, le commentaire de Bergé (45 p.) est suivi d’extraits choisis de L’ordre juridique (84 p.) pertinents quant à la compréhension de la réflexion proposée. L’analyse est structurée en trois temps : hier, aujourd’hui et demain, ce qui permet au professeur Bergé de revenir sur la perspective institutionnaliste de Romano, de démontrer toute sa valeur heuristique pour expliquer, du point de vue du pluralisme juridique, les phénomènes juridiques contemporains et, enfin, de sortir de la pensée de Romano en vue de projeter des pistes de réflexion pertinentes pour l’avenir du champ des études juridiques.

Bien que l’ouvrage de Romano suive un plan formel en deux parties (« I – La notion de l’ordre juridique » et « II – La pluralité des ordres juridiques et leurs relations »), le professeur Bergé scinde la seconde partie pour aborder, au final, « trois blocs[8] » plus à même de rendre compte de toute la portée de la pensée de Romano : 1) l’ordre juridique ; 2) la pluralité des ordres juridiques et le pluralisme juridique ; et 3) les rapports possibles ou impossibles entre les ordres. Le choix du titre du commentaire, qui appréhende l’ordre juridique au pluriel, n’est pas étranger à cette lecture tripartite de l’oeuvre car, selon le professeur Bergé, la question centrale n’est plus tant celle de l’existence ou des contours définitionnels de l’ordre juridique qui demeurent ouverts à des réalités « vaste[s] et protéiforme[s][9] », mais bien plutôt celle des « rapports qui se nouent[10] » entre les divers ordres juridiques afin d’évaluer si cette conceptualisation permet de « comprendre, même partiellement, la société contemporaine et les défis auxquels elle est confrontée pour l’avenir[11] ».

Au début de son commentaire, le professeur Bergé offre une brève analyse de la pensée du juriste italien relative à l’ordre juridique, telle qu’elle a initialement été développée. Sans entrer dans une approche historique du travail de Romano[12], il présente, dans un premier temps, la définition de l’ordre juridique en mettant en lumière la motivation première qui animait Romano, soit de dégager une définition du droit allant au-delà de celle qui régnait à l’époque. C’est ainsi qu’il rappelle que la démarche de Romano a pris forme en s’appuyant sur le constat des limites, dans la science juridique, d’une conception du droit fondée sur la « règle de conduite[13] » ou sur un « ensemble » ou « système » de « normes » et sur la volonté de mettre en évidence un point de départ englobant, en plus des normes et des règles de conduite, l’organisation qui les sous-tend, les englobe[14] et les conduit[15]. Bien que l’appellation « ordre juridique » puisse, d’après Bergé, prêter à confusion parce « qu’elle évoque “l’idée de règles et de normes”[16] » – par exemple, conformément à la perspective moniste de Hans Kelsen, l’ordre juridique renvoie à l’idée d’un système de normes qui « requiert la présupposition d’une “norme fondamentale”[17] » –, il précise simplement que Romano a « fait le choix de la conserver[18] ». La lecture du passage pertinent à cet égard de l’ouvrage de L’ordre juridique, qui se trouve dans la seconde partie de l’ouvrage, permet de comprendre que, au dire de Romano, ce n’était là qu’une difficulté « extrinsèque et presque exclusivement verbale[19] ». Quant au droit, Bergé retient principalement que Romano puise dans la notion d’institution pour le définir comme étant, avant toute autre chose, « organisation[20] », « structure[21] », ordre social. C’est à l’approche institutionnaliste du droit[22] qu’adhère Romano car, à son avis, « l’institution […] est la manifestation première, originaire et essentielle du droit[23] ». Par cette symétrie entre ordre juridique et institution, et parce qu’il est aisé de reconnaître la multiplicité des institutions, Romano dégage une vision pluraliste du droit.

Dans un deuxième temps, le professeur Bergé s’attarde sur cette définition du pluralisme juridique qu’il oppose à ce qu’il qualifie d’« ennemi[24] » pour Romano, soit « l’exclusivisme juridique au nom duquel il n’est de droit que par et à travers la seule figure de l’État[25] ». Il est ici particulièrement intéressant que le professeur Bergé rappelle le raisonnement de Romano qui, en s’appuyant sur une perspective historique, défendait l’idée suivante : avant que l’État et le droit se superposent dans l’État moderne, le droit existait en dehors de l’État et donc ce dernier n’est, en fin de compte, « qu’une espèce du genre “droit”[26] ». En témoignent l’ordre international, l’ordre ecclésiastique, les ordres juridiques non étatiques ignorés de l’État ou déclarés illicites et les ordres juridiques « réglementés par l’État mais qui disposent d’une existence autonome[27] » tous susceptibles, suivant l’analyse qu’en tire Bergé, de « s’intéresser de manière autonome aux mêmes questions de société[28] ». Ce constat est crucial aux fins du commentaire du professeur Bergé. Il illustre toute la pertinence du concept de « relevance », soit des « relations entre les divers ordres[29] », qui, d’après lui, est d’une « grande importance dans la pensée de Santi Romano[30] ».

La définition de la « relevance » est ensuite abordée. C’est l’occasion pour le professeur Bergé d’appuyer sur le fait que cette notion, qui renvoie aux relations plurielles qui se nouent entre les différents ordres, permet de confirmer les principes préalablement avancés[31] par Romano, à savoir « l’acceptation large de l’ordre juridique, compris comme toute forme “d’institution”[32] ». Les rapports de relevance sont ainsi susceptibles de concerner une multitude d’institutions aux caractéristiques diverses (« originaires », « dérivées », poursuivant des « fins particulières ou générales », etc.) que Bergé ne cherche pas à décrire. Partant de la définition offerte par Romano (« pour qu’il y ait relevance juridique, il faut que l’existence, le contenu ou l’efficacité d’un ordre soit conforme aux conditions mises par un autre ordre : cet ordre ne vaut pour un autre ordre qu’à un titre défini par ce dernier[33] »), ce qui exclut tout rapport spontané ou issu du hasard, Bergé précise que Romano a envisagé 14 formes différentes de mises en relation entre ordres juridiques, ce que l’auteur italien qualifie de « titres de relevance », où l’existence, le contenu ou l’efficacité d’un ordre est considéré comme relevant pour un autre ordre. On comprend alors, des propos succincts de Bergé, que la relevance peut être totale ou partielle, selon le cas. Un bref survol des paragraphes de l’oeuvre de Romano situés en seconde partie de l’ouvrage permet de constater que ces rapports peuvent prendre la forme de rapports de « hiérarchie, de succession, de dépendance, d’interinfluence[34] » et de fermeture.

Le professeur Bergé termine son analyse du temps d’hier de son commentaire en situant la pensée de Romano dans la pensée juridique. Du point de vue de Bergé, partagé par des nombreux auteurs, le travail de Romano, ancré dans une approche positiviste[35] et juridique[36] du droit a marqué la pensée juridique à double titre, soit sur le plan de sa contribution à l’institutionnalisme juridique et au pluralisme juridique. Bergé prend soin toutefois de revenir sur une critique souvent opposée à la pensée de Romano, c’est-à-dire celle des limites d’une définition du droit large et non discriminante[37] au sein d’une théorie juridique valorisant les modèles où le droit est isolé des « éléments qui pourraient lui être étrangers[38] ». Or, comme le précise Bergé, la pensée de Romano « emprunte […] une direction opposée à celle retenue » par ces modèles théoriques puisqu’elle vise précisément à faire « entrer dans le droit une réalité sociale qui[39] », jusque-là, était considérée comme lui étant « antécédente[40] ». Cette manière de penser les rapports entre le droit et la société s’avère fondamentale pour le professeur Bergé, comme nous le constaterons dans son analyse de l’avenir de la pensée juridique au prisme de la théorie de Romano.

Le commentaire du professeur Bergé se poursuit avec le temps d’aujourd’hui qui permet une analyse des manifestations contemporaines de l’ordre juridique. À ce titre, il met l’accent de façon importante sur le caractère « prémonitoire » de la pensée de Romano pour expliquer le rôle des institutions non étatiques dans les phénomènes juridiques contemporains. Il est en effet indéniable que le cadre théorique pensé par Romano au début du xxe siècle – lequel a permis, à l’époque, une réflexion sur le droit international et ses rapports avec le droit national, l’ordre constitutionnel ou administratif fédéré, décentralisé et autonome et les ordres juridiques religieux, mafieux, professionnel, marchand et sportif – présente une valeur heuristique fondamentale pour comprendre et expliquer, de nos jours, des phénomènes qui ne pouvaient être envisagés autrefois. Bergé cite en exemple la multiplication des ordres juridiques internationaux et régionaux, la décentralisation contemporaine de l’État, qu’il décrit de manière originale comme un « mille-feuilles juridiques où les niveaux publics se superposent les uns aux autres[41] », la lex mercatoria et l’ordre juridique sportif qui ont respectivement fait l’objet de travaux relatifs au droit qu’ils produisent et, enfin, à une échelle d’organisation plus microscopique, la famille postmoderne[42].

Sans s’arrêter à cette description, le professeur Bergé procède à l’analyse des manifestations contemporaines des rapports de relevance entre les ordres juridiques, « courantes dans la pratique du droit actuel[43] », dans le but d’« évaluer la valeur du travail de Santi Romano au regard du droit positif actuel[44] ». Cette analyse lui permet de s’inscrire en faux contre la vision de l’ordre juridique exclusif et autocentré, défendue notamment par Kelsen, et de préciser que sur cet aspect Romano lui-même estimait qu’un ordre juridique « peut se considérer comme exclusif de tout autre[45] », mais qu’il ne s’agit là que d’une option, non impérative, au même titre qu’un ordre peut envisager d’autres ordres juridiques qui lui sont étrangers. La relevance permet donc, d’une manière complètement différente d’autres méthodes qui présentent aussi des concepts pour analyser les rapports entre les normes[46] ou entre le droit et les faits[47], d’analyser les voies de passage entre les ordres juridiques, soit, comme le précise Bergé, entre des réalités organisées, qui peuvent ou non exister, selon le cas. Trois grandes situations permettent d’illustrer ce jeu dialectique, de l’avis de Bergé : le rapport au droit étranger, le rapport au droit européen et le rapport au droit a-étatique.

Le rapport au droit étranger est étudié à travers le droit international privé et les situations de pluralisme juridique appliqué qu’il révèle. Le professeur Bergé met principalement en lumière l’idée qu’en ce domaine ce ne sont pas les « seules ressources de l’ordre juridique de réception[48] » qui sont mobilisées, mais bien également les éléments d’organisation de l’ordre juridique étranger, comme c’est le cas avec le mécanisme de « renvoi », l’application des dispositions impératives étrangères[49] et les mécanismes de « reconnaissance mutuelle[50] ». Le rapport au droit européen, quant à lui, met en lumière la proximité flagrante entre la pensée de Romano et l’intégration européenne ayant déjà été soulignée par les préfaciers des deux éditions françaises de L’ordre juridique. D’après Bergé, ce constat est profondément juste dans la mesure où le droit européen (droit de l’Union européenne et droit de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales[51]) est intrinsèquement un « droit d’interactions qui s’efforce de définir, dans un jeu dialectique permanent ou, à tout le moins, récurrent les rapports qu’il entretient avec [le droit national des États membres et le droit international][52] ». En ce sens, il apparaît indéniable, aux yeux de Bergé, que l’approche de Romano est en « parfaite adéquation[53] » avec ce phénomène et donc porteuse pour remettre en question de manière pertinente le droit européen dans ses rapports aux ordres juridiques qui l’entourent. Pour étayer cette thèse, Bergé la confronte au processus d’intégration qui anime le droit européen et à son caractère fondamentalement incomplet. Il démontre que les processus d’intégration « ascendante[54] » (le fait « d’intégrer le système national à un espace juridique plus vaste[55] ») et « descendante[56] » (le fait « d’accueillir au sein de la structure nationale […] une dimension juridique commune à plusieurs États[57] ») font naître, aux termes du rapport de relevance qui prend forme entre les ordres juridiques nationaux et européen, un « droit propre et spécifique[58] » qui est « développé en commun[59] » et qui « se superpose ou se combine, aux règles existantes[60] ». Ce passage n’est pas sans évoquer, de notre point de vue, l’existence d’affinités électives entre les ordres juridiques, ce qui pourrait aussi constituer une hypothèse de travail intéressante[61]. Quant à l’incomplétude du droit européen, le professeur Bergé note que le principe de spécialité, selon lequel chaque compétence exercée à l’échelle européenne doit préalablement avoir été consentie par les États membres, traduit l’existence d’un rapport de relevance qui impose aux institutions européennes de s’en remettre au droit national des États membres pour pallier certains vides du droit européen. Il souligne aussi le fait que, pour assurer son développement, ce dernier ne cesse, depuis ses débuts, d’emprunter au droit international, révélant ici aussi, des rapports de relevance entre l’ordre juridique régional et l’ordre international. En définitive, le professeur Bergé appuie sur le fait que l’intégration et l’incomplétude du droit européen constituent deux phénomènes qui laissent voir une multitude de rapports de relevance entre ordres juridiques nationaux, européen et international, lesquels peuvent aujourd’hui encore être expliqués par la grille d’analyse élaborée par Romano. Enfin, le rapport au droit a-étatique est illustré par les nombreux exemples contemporains qui ne cessent de se développer en dehors de tout engagement de l’État, tels l’arbitrage international et les codes de conduite des entités privées. À cet égard et selon le professeur Bergé, ce qui mérite maintenant d’être mis en doute au prisme de la pensée de Romano, ce sont les rapports qui prennent forme entre ces ordres juridiques a-étatiques et les autres ordres juridiques qui gravitent autour.

La troisième et dernière partie du commentaire du professeur Bergé porte sur le temps à venir, soit demain. À ce titre, il propose d’élargir la pensée de Romano et d’aller au-delà de celle-ci pour dégager des perspectives d’analyse susceptibles d’expliquer le droit en devenir. Il se questionne tout d’abord sur la viabilité, pour un ordre juridique, d’une ouverture sans limites à l’égard de réalités juridiques qui lui sont étrangères. De notre point de vue, et bien que Bergé n’en traite pas directement, cette question est hautement pertinente pour interroger, voire critiquer, la légitimité des ordres juridiques et mérite d’être approfondie dans un contexte de crise de la démocratie[62] et d’individualisation du social[63]. Ces enjeux, qui traversent les sociétés contemporaines, entraînent un questionnement, notamment, comme le professeur Bergé le soulève, sur les limites des rapports que peuvent nouer les États avec des acteurs non publics, en particulier des acteurs économiques, en leur laissant carte blanche pour réglementer et réguler des « pans entiers de l’activité humaine[64] ». En réponse, Bergé propose d’« intégrer très en amont dans le processus de mise en relation entre ordres juridiques un questionnement sur les limites dudit processus[65] ».

L’intérêt marqué du professeur Bergé pour le processus de mise en relation en lui-même, qui découle naturellement des recherches qu’il effectue depuis quelques années[66], l’amène à conclure son commentaire en proposant une nouvelle perspective issue de « l’essentiel[67] » ou de « l’esprit[68] » de la démarche de Romano. Cette approche, qu’il décrit trop brièvement, croyons-nous, repose exclusivement sur deux éléments : 1) « les réalités sociales construites[69] » ; et 2) « les voies de passage susceptibles d’être établies entre elles[70] ». Le projet de Bergé consiste à « épurer la pensée[71] » de Romano et, ainsi, à se libérer de « toute référence première à “l’ordre juridique”[72] » ou, autrement dit, de la contrainte de passer par une définition préalable du caractère juridique de l’« objet [de recherche] qui est le résultat d’une organisation sociale[73] ». Le programme de recherche que Bergé propose est donc entièrement consacré à la « capacité à faire dialoguer, dans un même mouvement, des réalités sociales construites de nature potentiellement très différentes[74] ». Selon Bergé, le « fait de circulation[75] » commande la mobilisation d’une telle approche théorique pour appréhender le phénomène et ses multiples déclinaisons ainsi que les réponses juridiques qu’il suscite.

C’est avec un enthousiasme palpable que le professeur Bergé termine son commentaire de L’ordre juridique de Romano. On sent en effet toute la richesse qu’un travail de théorisation du fait de circulation internationale, au prisme des paramètres dégagés par le professeur Bergé, laisse entrevoir pour l’avenir. Le lecteur aimerait toutefois, de notre point de vue, mieux comprendre les fondements rationnels ayant conduit au choix de retirer toute référence première à l’ordre juridique qui, en tant que concept large et peu discriminant, ne semble pas a priori très contraignant. On peut également se demander si une théorie centrée sur l’étude des voies de passage entre des constructions sociales différentes trouve encore des ancrages dans le pluralisme juridique. En effet, sans référence préalable au critère de juridicité, la démarche proposée par Bergé s’inscrira-t-elle dans un autre courant théorique ? Le format imposé par le commentaire a exigé de son auteur un effort considérable de concision et de synthèse, ce qui mérite d’être salué. Nous regrettons cependant que certaines idées n’aient pas été plus amplement traitées. Dans quelques cas, la lecture des passages clés de l’ouvrage de Romano, en seconde partie du commentaire, suffit à permettre une compréhension satisfaisante. Dans d’autres cas, le lecteur doit puiser dans les publications de l’auteur pour comprendre certaines notions, tel le fait de circulation internationale. De plus, les multiples niveaux de lecture offerts dans l’ouvrage (le commentaire du professeur Bergé et les extraits choisis de l’ouvrage de Romano, qui incluent les notes de l’auteur issues de la deuxième édition de l’ouvrage ainsi que les notes des traducteurs) peuvent parfois créer certaines lourdeurs. Si c’est là une stratégie d’écriture ou d’édition, elle a toutefois le mérite de piquer suffisamment la curiosité du lecteur pour que celui-ci souhaite non seulement lire l’oeuvre porteuse de Romano, mais également les travaux du professeur Bergé susceptibles d’apporter des réponses à des questions demeurées ouvertes dans le commentaire.