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Quelle est la problématique de recherche derrière le travail du chercheur et les objectifs visés ?

Les potentialités, dont regorge le secteur agricole dans la plupart des pays, notamment les pays en voie de développement, ne sont plus à démontrer. Il est depuis longtemps soutenu que l’agriculture offre plusieurs possibilités de création d’emplois et de richesses. En réalité, ce secteur ne bat toujours pas son plein et ces opportunités sont loin d’être exploitées. En Afrique par exemple, seuls 6 % des terres cultivées sont irriguées et c’est là que se trouve la plus grande part des terres non cultivées à fort potentiel de culture pluviale dans le monde[1]. En plus, 60 % des terres arables non cultivées de la planète y sont détenues[2]. Ce fossé remarquable entre réalité et potentiels agricoles pose les jalons d’un problème double : la pleine exploitation et la valorisation des ressources agricoles. Dès lors, venir à bout de ce problème constitue un enjeu important pour les dirigeants qui cherchent toujours à régler la question de l’employabilité dans un contexte africain où les populations sont généralement jeunes.

Fort de ce constat, le gouvernement sénégalais insère dans ses priorités d’action la promotion de l’entrepreneuriat agricole, dont il fait un levier puissant de création d’emplois pour les jeunes diplômés et de relance de l’économie nationale. De même, il entend positionner le pays dans le marché mondial par la valorisation des compétences et des ressources agricoles. Ce qui explique l’éclosion de jeunes diplômés universitaires formés dans le domaine agricole.

Toutefois, il y a lieu de lever l’équivoque entre les objectifs de formation visés et les barrières à l’employabilité de ces jeunes. Dès lors, la problématique de l’entrepreneuriat agricole des sortants de l’université nous interpelle. En effet, l’UFR[3] des Sciences agronomiques, de l’Aquaculture et des Technologies alimentaires (S2ATA) de l’UGB, à travers son projet SACACID[4], a fait appel à notre équipe de recherche ERRHO pour évaluer les offres de formation et le processus entrepreneurial des diplômés des domaines de l’agriculture de l’UGB, et apporter éventuellement des mesures correctives. Il va sans dire que la réalisation de ce travail exige la collaboration de plusieurs parties prenantes et à différents stades. Nous nous sommes donc associés effectivement aux parties prenantes intéressées ou concernées par ces questions : représentant du projet SASACID, étudiants diplômés, formations agricoles de l’UGB, organisations publiques et privées.

Comment s’est opéré le rapprochement avec les praticiens (avant le début du travail de recherche, pendant ou après ?) et pourquoi celui-ci a-t-il été réalisé ?

Un an après la sortie de ses deux premières cohortes (DUT et Licence), l’UFR S2ATA qui est l’une des dernières UFR de l’UGB, a initié le projet SACACID pour étudier, en 2014, le suivi, l’insertion et l’entrepreneuriat de l’ensemble des diplômés des domaines agricoles de l’UGB. C’est là que notre équipe ERRHO a été contactée par la voie du coordonnateur qui fut en même temps le chef de section « Gestion » de l’UFR de Sciences économiques et de gestion. Ainsi après plusieurs rencontres, nous nous sommes entendus sur les modalités, la démarche et les objectifs de l’intervention.

Trois catégories de praticiens sont concernées dans cette étude : les administrateurs universitaires de formation agricole, les professionnels d’organisations publiques agricoles, et les entrepreneurs d’entreprises agricoles. Nous avons gardé le contact avec eux durant toute la durée de notre intervention et donc les rapprochements se sont faits avant, pendant et après. Cette approche a permis de mieux évaluer les trajectoires empruntées par les diplômés sortants en identifiant l’ensemble des facteurs qui empêchent leur insertion dans le domaine de l’agrobusiness avant de proposer des solutions adéquates pour la promotion de l’entrepreneuriat agricole. Pour leur part, les parties prenantes ont différemment manifesté la pleine satisfaction des fruits de cette collaboration en ayant des indicateurs réels pour apprécier l’efficacité des formations agricoles, les profils des sortants, le rapport offre et demande d’emploi, les contraintes et les possibilités de relance des activités agricoles.

En effet, les administrateurs universitaires concernés constituent l’ensemble des responsables administratifs ayant eu à piloter, au moins une fois, les programmes de formations agricoles de l’UGB. Les objectifs de travail partagés avec eux étaient, en général, d’identifier les causes de non-insertion dans le secteur agricole, de calculer le pourcentage des diplômés devenus entrepreneurs dans les métiers de l’agriculture, et d’estimer les besoins du marché de l’emploi en agrobusiness. Notre collaboration a permis de créer un répertoire unique de toutes les promotions avec les identifiants et adresses de tous les bénéficiaires de ces formations. Étant membres affiliés de cette université, le rapprochement avec les différents responsables s’est fait à travers le réseautage en interne. Particulièrement à l’administration de l’UFR S2ATA qui a suscité dès le départ l’engouement de cette étude avec le projet SASACID[5], elle cherchait à connaître le niveau d’insertion professionnelle et d’entrepreneuriat des diplômés des formations agricoles de l’UGB (courtes et longues).

Concernant les organisations publiques agricoles, les objectifs étaient d’avoir, à travers ce projet, de nouveaux indicateurs sur les tenants et aboutissants de l’entrepreneuriat agricole des diplômés pour mieux maîtriser et orienter leurs politiques d’assistance, de suivi et d’accompagnement agricole. Le rapprochement avec elles s’est fait d’une part, par le biais de connaissances personnelles et d’autre, par ciblage des partenaires de l’UGB dans le domaine agricole. Elles ont bien accueilli le projet et ont accepté la collaboration en nous ouvrant toutes leurs portes, car selon elles, ce projet répondait bien à leur mission de promotion de l’agriculture et de l’agrobusiness. Les données sont ainsi collectées auprès d’elles à travers des entretiens semi-directifs.

Ce sont ces mêmes techniques de collecte que nous avons appliquées dans le champ des entreprises agricoles. Celles-ci sont répertoriées dans les registres de la chambre de commerce locale de la ville de Saint-Louis, la région nord du Sénégal, ce qui a facilité les prises de contact et le rapprochement avec les entrepreneurs agricoles. Nous cherchons à ce niveau à comprendre réellement la chaîne de valeur de l’agrobusiness et à pouvoir estimer les besoins du marché en termes de profils et de compétences. Quant à eux, ils étaient enthousiasmés par le fait que le projet porte sur les diplômés agricoles donc des employés clés potentiels, et par l’idée de découvrir et de retrouver en eux les profils et les compétences, dont ils s’attendaient.

Quels ont été les défis rencontrés au cours de la réalisation du projet ?

  • Sur le plan scientifique : les échanges obtenus avec les praticiens sur l’entrepreneuriat agricole mettent en avant les facteurs qui empêchent son développement. Il s’agit principalement des questions de financement et d’accompagnement. Le manque de financement représente 51 % des freins à l’entrepreneuriat au Sénégal, à côté de l’accès à des informations pertinentes (13 %)[6]. Ces freins constituent des difficultés réelles au développement de l’entrepreneuriat et justifient en effet, la précarité de l’emploi ou le chômage des diplômés. Ces deux derniers facteurs occupent une place centrale dans le processus entrepreneurial des diplômés que nous avons édifié dans le but d’apporter de nouvelles connaissances scientifiques sur l’entrepreneuriat agricole. Il se caractérise par cinq étapes comme indiqué dans l’image ci-après.

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En fait, la formation reçue par le diplômé est riche en enseignement et pourvue de pratiques réelles plus ou moins suffisantes, et le programme offert est généralement identique aux programmes d’autres universités. Les participants ont alors toutes les connaissances et pratiques requises pour trouver leur premier poste de travail ou s’autoemployer. Cependant, la qualité de la formation reste polluée par des facteurs structurels tels que les effectifs pléthoriques d’étudiants qui surchargent les classes, le faible recrutement des enseignants, les perturbations de l’année scolaire avec des grèves et tumultes cycliques, et l’insuffisance des infrastructures adaptées aux formations. En outre, l’analyse du processus entrepreneurial montre que les emplois précaires ou le temps de chômage constituent un tremplin déterminant, dans la mesure où ils suscitent l’esprit d’entreprise, de l’émergence de l’idée au développement d’affaires agricoles plus ou moins formelles. Toutefois, le faible niveau d’insertion des diplômés s’explique surtout par les problèmes de l’employabilité et de faibles demandes d’emploi du marché, de l’accès aux fonciers et aux financements, d’administration fiscale lourde qui n’encourage pas la création d’entreprise, etc.

  • Sur le plan managérial : s’il est donc admis que le financement des porteurs de projets agricoles est problématique, il n’en demeure pas moins que la formation et l’accompagnement constituent des défis à relever du point de vue managérial. La formation à l’esprit d’entreprise des diplômés reste moins développée au Sénégal et se traduit par la faiblesse du taux d’entrepreneuriat, malgré les nombreux efforts menés par l’État en faveur de la promotion de l’entrepreneuriat. Nkakleu et al. (2013)[7] ont d’ailleurs souligné la faiblesse de l’esprit d’entreprise au Sénégal dans leurs travaux qui avaient pour ambition d’identifier les pratiques d’accompagnement les plus appropriées. Quant à la faiblesse de l’entrepreneuriat des diplômés universitaires au Sénégal, il faut remonter aux travaux de Dia (2011)[8] pour en comprendre les raisons. En effet, mettant en avant l’analyse de la relation Université/Entrepreneuriat jugée un peu trop négligée, ce dernier liste un certain nombre d’activités que les universités devraient, selon lui, favoriser. Il s’agit de visites d’entreprises, de diffusion de cas à succès de jeunes entrepreneurs comme modèle de réussite, d’organisation régulière de conférences, de forums ou de tables rondes sur l’entrepreneuriat, d’organisation de camps d’entrepreneuriat et de concours de création d’entreprise, d’initiation à des jeux de simulation en création d’entreprise, etc. C’est ainsi que la mise en oeuvre et l’amélioration des politiques d’accompagnement et de promotion de l’entrepreneuriat agricole s’imposent aux autorités universitaires et à leurs partenaires. L’accompagnement entrepreneurial s’inscrit dans un processus d’apprentissage individualisé et favorise la longévité des jeunes entreprises en suggérant le recours à des soutiens financiers, commerciaux et stratégiques[9]. Dans cette optique, la création des incubateurs au sein de l’université pourrait favoriser la promotion de l’entrepreneuriat des jeunes diplômés agricoles.

  • Sur le plan technique : au vu des objectifs fixés, il a été jugé nécessaire d’étudier les faisabilités techniques. Ainsi, pour l’identification des différentes offres de formation dans le domaine agricole à l’UGB, les informations sont recueillies auprès de toutes les personnes qui ont eu à les piloter au moins une fois. Ce sont les chefs de services pédagogiques, les chefs de sections, et les coordonnateurs. Les unités concernées sont l’UFR des Sciences agronomiques, d’aquaculture et des Technologies alimentaires (S2ATA), l’UFR des Sciences économiques et de gestion et l’École Atelier qui est le fruit d’un partenariat entre l’UGB et la Fondation Mon-3[10]. Cette approche consiste à collecter des informations sur les contenus des formations, les niveaux d’études et les diplômes obtenus, pour chaque étudiant. Par la même occasion, une base de données qui répertorie tous les sortants des formations agricoles a été créée pour les besoins de l’étude. Nous les avons joints pour avoir le suivi de leurs parcours professionnels et étudier leurs caractéristiques entrepreneuriales. L’enquête réalisée auprès d’eux est faite sur la base d’un questionnaire élaboré en format papier et électronique. Il est principalement composé de quatre rubriques, dont les deux premières consistent à revérifier auprès d’eux, les identifiants et les formations suivies. Les deux dernières portent sur les caractéristiques de leur employabilité et les contraintes auxquelles ils font face. Le questionnaire a d’abord été prétesté avant de le soumettre par courrier électronique et de l’administrer par téléphone pour certains, dont les adresses courriel n’étaient plus à jour. Le recours aux analyses statistiques descriptives s’est également imposé. Elles ont permis de décrire statistiquement l’employabilité des diplômés sortants et de distinguer les taux d’insertion professionnelle et d’autoemploi.

Qui sont les praticiens qui ont pu profiter du travail des chercheurs, quels bénéfices ont-ils pu en retirer et quels ont été les impacts sur leurs pratiques ?

Les praticiens avec qui nous avons collaboré évoluent dans le secteur public et dans le privé. Les organisations publiques concernées sont : la Société d’aménagement et d’exploitation du Delta (SAED), l’Agence nationale de conseil agricole et rural (ANCAR), et le Projet d’appui pour le développement rural en Casamance (PADERCA). Dans le secteur privé, la collaboration s’est faite avec la société Coumba Nor Thiam, qui évolue dans l’exploitation agricole, dans le domaine de la riziculture.

Créée en 1965, la SAED a pour vocation de contribuer de manière significative à la réduction de la pauvreté dans les régions de Saint-Louis, Matam, Tambacounda, riveraines du fleuve Sénégal et de la Falémé, en participant à l’aménagement de ces territoires, à la promotion et au développement agricole et à la préservation de l’environnement. Elle est partenaire de l’UGB où elle est longtemps intervenue dans le cadre de sa mission d’accompagnement et de développement de ses projets agricoles. C’est le cas par exemple lorsqu’elle intervient dans les activités de recherche de l’Université ou lorsqu’elle détache un technicien agricole pour superviser les opérations culturales qui se déroulent au niveau de sa ferme agricole.

L’ANCAR a été créée en 1997 par le Gouvernement du Sénégal. Elle a pour objectifs de promouvoir la grande production agricole, d’accompagner les petits agriculteurs pour une production bonne et rentable, et de développer l’agriculture, la pêche, l’élevage et l’agroforesterie. Le PADERCA est un projet créé en 2006 et financé par la Banque africaine de Développement (BAD) et l’État du Sénégal, dans le cadre du Programme de relance des activités économiques et sociales en Casamance (PRAESC). Dans le domaine agricole, ses interventions concernent six filières : riz, mangue, maraîchage, produits forestiers, banane et huître. La société Coumba Nor Thiam est une entreprise d’exploitation agricole, dont l’activité principale est la riziculture. C’est une société de propriété privée implantée dans la vallée du fleuve Sénégal, dans le village de Kassak Nord situé à moins d’une centaine de kilomètres de l’UGB. Ces organisations collaboratrices ont manifesté en fait l’intérêt de participer à la réalisation des objectifs de cette recherche cités précédemment.

Grâce à la collaboration avec ces praticiens, l’étude du cas de l’UGB a favorisé l’identification de la chaîne de valeur de l’agrobusiness en mettant en évidence les caractéristiques de l’offre de formation et des besoins du marché en termes de profils et de compétences agricoles. Elle est de nature informative pour la société Coumba Nor Thiam qui bénéficie d’une niche pour recruter des stagiaires ou contractuels ayant les niveaux d’études et qualifications recherchées en mécanique et technique agricoles pour la maîtrise et l’utilisation des matériels, des systèmes d’irrigation et des intrants, et en management des unités agricoles. Avec les organisations publiques, la collaboration est aussi mutuellement profitable. Étant dans le suivi, l’accompagnement et la promotion des activités agricoles, cette étude met à leur disposition un rapport permettant d’évaluer le niveau d’entrepreneuriat des diplômés sortants des formations agricoles, leurs orientations et les facteurs qui entravent la réalisation et le développement de leurs projets d’affaires. Cela constitue une opportunité pour l’État d’avoir les leviers sur lesquels s’appuyer pour mieux orienter ses politiques de promotion de l’entrepreneuriat agricole de ses diplômés.

L’étude montre en effet que les mesures d’accompagnement ne doivent pas se situer seulement à un niveau extrinsèque ou post-diplôme. Elles doivent porter sur tout le processus entrepreneurial, de la formation à l’Université à la création et au développement d’entreprise. Les pratiques d’accompagnement et de guidance occupent une place de plus en plus importante dans les politiques sociales d’insertion et dans le champ de la formation professionnelle tout au long de la vie[11]. Cette insertion doit être comprise comme « le processus par lequel des individus n’ayant jamais appartenu à la population active accèdent à une position stabilisée dans le système d’emploi »[12]. L’accompagnement est, d’autant plus, un levier de développement des entreprises puisqu’il met en « relation d’aide » l’accompagnant et l’accompagné[13]. Le premier apporte au second les informations utiles dans le déploiement du processus entrepreneurial, mais aussi transfère les connaissances et compétences indispensables pour favoriser la gestion efficace des petites entreprises en particulier en phase de démarrage. Ainsi, en amont du processus entrepreneurial, les porteurs de projets (entrepreneurs) bénéficient d’un appui dans la détection d’opportunités d’affaires et/ou le montage du plan d’action. Et en aval, l’accompagnement permet aux entrepreneurs d’assurer la gestion opérationnelle de l’entreprise créée.

Quelle a été la contribution aux connaissances des chercheurs (sur les plans théorique et managérial) ?

D’un point de vue pratique, cette étude s’est avérée fructueuse pour l’ensemble des collaborateurs. En tant que chercheurs et universitaires, le travail collaboratif avec les acteurs publics et privés a permis de comprendre leurs missions « socioagricoles », attentes et préoccupations quotidiennes. Ce qui a constitué pour nous, en plus de la mise en place avec les administrateurs universitaires d’une base de données et d’indicateurs sur l’entrepreneuriat agricole à l’UGB, une opportunité de cerner de nouvelles problématiques de recherche agricoles qui préoccupent le gouvernement sénégalais (plein emploi, entrepreneuriat féminin, valorisation, marchés, domaines agricoles communautaires, investissements…) et les entrepreneurs (dualité entre besoins et offres d’emplois, fiscalités, espaces ou fermes agricoles…).

En retour, pour ces différents praticiens, l’étude a permis d’atteindre leurs objectifs. Du côté du gouvernement, elle renseigne sur la situation de l’entrepreneuriat agricole des diplômés universitaires et sert de viseur pour mieux orienter ses politiques de promotion de l’entrepreneuriat agricole. Pour la société Coumba Nor Thiam, l’étude met à sa disposition les informations nécessaires sur les différents et riches profils des diplômés agricoles de l’UGB et les possibilités de revaloriser ses ressources et compétences humaines.

Par ailleurs, l’étude du cas de l’UGB contribue particulièrement au développement des connaissances scientifiques dans le domaine de l’entrepreneuriat agricole, en mettant en évidence les caractéristiques du processus entrepreneurial de ses diplômés de formation agricole. Partant de la définition de l’entrepreneuriat en tant qu’une « étude scientifique du comment, par qui et avec quels effets, les opportunités de création de nouveaux produits et services sont détectées, évaluées et exploitées »[14], nous marquons l’attention sur les compétences des diplômés de formation agricole et leurs capacités à atteindre leurs objectifs d’entrepreneuriat. Ainsi, les résultats de cette étude montrent qu’à l’issue des formations agricoles, ces diplômés deviennent faiblement entreprenants avec un taux d’entrepreneuriat global de 8 %. Cependant, en fonction des différentes formations existantes, ce taux se répartit relativement de façon inégale. En d’autres termes, il est largement dominant pour la formation professionnelle de l’École Atelier (27 %), très faible pour le DUT S2ATA (4 %) et le Master DRC (3 %), et inexistant pour la Licence S2ATA et la Maîtrise en Gestion des entreprises agricoles (GEA). Ces deux dernières formations sont non professionnelles et les diplômés ont la vocation de s’insérer dans l’écosystème des affaires plutôt que de créer des entreprises.

La faiblesse de l’esprit d’entreprise est essentiellement redevable à une orientation générale des enseignements dispensés et à un manque criant de préparation des futurs diplômés dans les métiers de l’entrepreneuriat vu qu’il n’existe presque pas de formations spécialisées en entrepreneuriat. L’analyse profonde des causes de non-insertion a permis d’identifier cinq raisons majeures de la faiblesse du taux d’entrepreneuriat énumérées comme suit :

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Du point de vue pratique donc, il faut accorder plus d’importance à la promotion des diplômés entrepreneurs. En fait, l’entrepreneuriat agricole des diplômés de l’UGB révèle l’importance de l’accompagnement sur le plan technique, financier, partenarial et de l’acquisition du foncier exploitable.

L’État, l’Université et les partenaires au développement agricole et rural doivent jouer davantage ce rôle de facilitateur pour promouvoir l’entrepreneuriat agricole. Il a été démontré par Sagodira (2011) que la mise en cohérence des savoirs et des réalités du terrain s’appuie sur un dispositif d’accompagnement. Dans le cadre de la formation, l’enseignement de l’Entrepreneuriat en tant que discipline est nécessaire. Ainsi, comme dans les écoles d’entrepreneuriat agricole (EEA)[15], les objectifs et éléments de l’approche entrepreneuriale doivent décrire un processus mettant en jeu le savoir entrepreneurial (andragogie, exercices, économie), le savoir-faire entrepreneurial (jeux de rôles et expériences), les attitudes entrepreneuriales (autodécouverte, opportunités, émotion) et les changements effectifs (estime de soi-même, enthousiasme, décisions de changement). De même, la professionnalisation des formations agricoles apparaît fondamentale dans le processus entrepreneurial, car la privatisation totale ou partielle permet de concourir à plus de capitaux financiers, techniques, relationnels et d’agir en toute autonomie pour mettre les étudiants dans des conditions ad hoc.