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Jean-Claude Cosset a marqué les milieux de la recherche en finance au Canada au cours d’une longue et fructueuse carrière académique. Titulaire d’une licence ès sciences économiques et d’un diplôme de l’Institut d’études politiques de l’Université de Toulouse, d’un Master of Science de la State University of New York at Binghamton, il termine un doctorat en finance à la Columbia University en 1980. C’est en 1975 qu’il se joint au Département de finance et assurance de l’Université Laval. Il y passe de nombreuses années et y devient l’un des pionniers et des meilleurs défenseurs de la recherche à la Faculté des sciences de l’administration (FSA).

Son passage à la FSA est marqué par son implication tant dans le développement d’un cursus exemplaire en finance et en gestion internationale que dans la recherche ou encore dans les fonctions administratives. Il est directeur du Département de finance et assurance à deux reprises, cumulant huit années à la tête du Département. Il s’implique également dans le développement d’un centre de recherche en finance et en économie appelé initialement le Centre de recherche en économie et finance appliquées (CRÉFA), puis le Centre interuniversitaire sur le risque, les politiques économiques et l’emploi (CIRPÉE) et assure la direction du Centre de recherche en gestion internationale de la FSA. Il compte nombre d’étudiants de maîtrise et de doctorat qu’il a su encadrer en leur inculquant un sens aigu de la rigueur mais également un intérêt toujours renouvelé pour la recherche.

Jean-Claude Cosset s’est démarqué sur la scène provinciale et nationale en devenant, entre 2003 et 2006, directeur scientifique de l’Institut de finance mathématique de Montréal et membre de l’Académie des sciences sociales de la Société royale du Canada en 2006. En 2004, il quitte l’Université Laval pour se joindre au Département d’affaires internationales de l’École des Hautes Études Commerciales (HEC) de Montréal. En mars 2007, il est nommé directeur de la recherche de HEC Montréal, fonction qu’il occupe jusqu’en mai 2013. Visionnaire et chercheur accompli, il travaille à la reconnaissance de la recherche à HEC Montréal. Au cours de ses deux mandats, il pilote deux révisions majeures de la politique de la recherche à HEC Montréal. Il participe à la mise en place d’une politique de gestion administrative et financière des subventions. Il préside, également, des comités pour mettre en place des politiques de gestion de la recherche au niveau éthique et pour que l’École puisse garder ses accréditations auprès du Conseil subventionnaire fédéral. Il siège aussi au Comité de direction de HEC Montréal pendant plusieurs années. Finalement, en 2008, il encourage la création du Groupe de recherche en affaires internationales (GRAI) au Département d’affaires internationales de HEC Montréal.

La carrière de chercheur de Jean-Claude débute avec sa thèse de doctorat qui porte sur la structure internationale des taux d’intérêt et son jury de thèse est composé de Michael Adler, Enrique Arzac, Frederick Grauer, Maurice Obstfeld et de Buckner Wallingford. Elle donne lieu à un article dans le Journal of International Economics en 1984. Jean-Claude Cosset s’intéresse par la suite à plusieurs questions reliées à la finance internationale dont le risque politique, qui est un thème récurrent dans ses travaux de recherche, mais aussi aux titres interlistés dont les ADRs, la gestion du risque à l’international ainsi que la structure financière des firmes internationales. Tout au long de sa carrière, plusieurs des articles découlant de ses travaux seront publiés dans d’excellents journaux scientifiques dont le Journal of International Business Studies, le Journal of Banking and Finance ou encore le Journal of Financial Research.

Sa recherche prend cependant un tout nouvel essor lorsqu’il reçoit une importante subvention de recherche du projet ACDI-PARADI parrainé par Bernard Decaluwé et André Martens. Ce financement lui permet de constituer une base de données remarquable laquelle permettra d’évaluer la performance des firmes nouvellement privatisées dans plusieurs pays en émergence. Les résultats qui montrent de clairs bénéfices en termes de profitabilité, d’efficience opérationnelle, de dépenses en capital investi, de production, d’emploi ainsi que des dividendes sont si importants que l’article sera publié en 1998 dans le très prestigieux Journal of Finance et s’est mérité à ce jour plus de 900 citations. Il s’agissait alors du premier article mesurant les bénéfices de la privatisation dans des pays en émergence.

Son intérêt pour la finance internationale et les questions liées à la privatisation se déploient davantage dans les années qui suivent en finance d’entreprise et en gouvernance, et donnent lieu à plusieurs articles majeurs. En 2012, il publie dans le Journal of Accounting Research, une suite sur les firmes nouvellement privatisées en évaluant les déterminants politiques du coût du capital sur ces firmes. Les résultats démontrent clairement que le coût du capital des firmes nouvellement privatisées est négativement affecté par le contrôle gouvernemental. En 2013, il s’intéresse à ces mêmes firmes dans un article publié dans le Journal of Financial Economics où l’évidence présentée montre que le contrôle étatique est négativement lié à la prise de risque corporative des firmes nouvellement privatisées et que l’importance de cette prise de risque en présence de contrôle étranger dépend de la force des institutions de gouvernance dans chaque pays.

L’ensemble de cette expertise lui vaut, en 2011, d’être le conférencier d’honneur en finance à la 54e Conférence annuelle de l’Association des sciences administratives du Canada. Il présente alors « Qu’avons-nous appris et qu’est-ce qui importe en gouvernance corporative internationale? »

Ses intérêts de recherche le mènent aussi à étudier des questions pertinentes pour le Québec et le Canada. Il a travaillé sur le potentiel de diversification des banques à charte canadienne et la classification du risque pays appliqué à la Société de développement des exportations du Canada (EDC). Il s’est aussi intéressé au risque politique canadien. D’ailleurs, lors de la dernière campagne électorale québécoise entre le 5 mars et le 7 avril 2014, deux de ses articles portant sur le risque politique au Canada ont été cités par le National Post pour conseiller les investisseurs dans leurs choix de titres étant donné le risque politique posé par la campagne électorale.

Jean-Claude était un collègue hors du commun. Toujours à l’affût des derniers développements en recherche, animé d’une forte envie de se dépasser et de faire avancer la recherche, il n’a jamais compté ses heures. Son souci de l’excellence lui faisait s’imposer des standards des plus exigeants. Il nous manquera.