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Ce livre paraît dans la collection « Paradoxe » des Éditions de Minuit où il rejoint les nombreux livres de Pierre Bayard et de William Marx, et il se nourrit du premier. Il est subventionné par l’équipe de recherche Alithila de l’Université de Lille 3 : la provocation est donc mise sous l’égide de l’université, et la gratuité invoquée est relative ; l’auteur s’est en effet qualifié par ses recherches sur les écrivains juifs de langue française du XXe siècle. Le mot paradoxe figure aussi dans le sous-titre de l’ouvrage et le titre lui-même le résume : alors que la mauvaise foi a un sens négatif, désigne une attitude où la tromperie de l’autre passe par la tromperie de soi, une conscience donc obscure et nuisible, Maxime Decout a décidé d’en faire l’essence de la littérature, ce qui la distingue éminemment des autres types d’énoncés, et qui en ferait tout le prix. Le paradoxe qui s’oppose au sens commun entend éclairer ce que celui-ci cacherait par paresse, comme en proie aux fausses évidences, et il entend aussi, en ébranlant les certitudes, agir comme le levain des idées nouvelles célébré par Diderot.

Après une introduction qui laisse s’épanouir la provocation, le livre définit dans les deux premiers chapitres le propos général, en retenant dans le premier ce qu’elle représente (« la littérature : une machine à fabriquer des mauvaises fois »), et dans le second ce qu’elle est elle-même (« de la littérature considérée comme un art de la mauvaise foi ») ; puis il dénonce la volonté de rechercher la vérité et de la dire (« la sincéromanie »). Le chapitre suivant montre la nécessité de l’insincérité ; le dernier chapitre utilise le paradoxe du menteur pour enchanter le mensonge (qui avait pourtant été soigneusement distingué de la mauvaise foi) ; un épilogue propose de lire l’histoire de la littérature française (XVIIe-XXe siècles) dans la perspective de la mauvaise foi.

Maxime Decout s’appuie sur la définition que Sartre a élaborée de la mauvaise foi, pour la combattre dans une théorie de la liberté et de l’engagement, qui vaut dans le champ littéraire, dans le champ politique et pour chacun dans son existence. Maxime Decout en adopte parfois la teneur métaphysique dans ses analyses, mais s’en tient parfois à un sens plus simple et plus commun. La difficulté et l’intérêt d’une telle proposition tient à sa nature paradoxale, à la difficulté de saisir, donc, un fonctionnement contradictoire de l’esprit. L’auteur éprouve une grande difficulté à respecter sa distinction entre mauvaise foi et mensonge.

Maxime Decout entend considérer les quatre siècles de la littérature française à l’aune de ce concept et en offre à son tour une défense contre les exigences de vérité propres aux sciences ou d’informations utiles propres à la vie courante. Le discours de la littérature n’est pas franc – car ce qu’elle dit est complexe –, n’est pas suspendu à une vérification ou une décision (c’est le domaine de l’éloquence) et vaut par les réflexions qu’il fait naître en incitant à des démarches herméneutiques : le texte littéraire vaut par cette démarche. Toujours en porte-à-faux, toujours indirect, toujours dérivant.

Le propos de Maxime Decout est général, mais il est assez attentif à la singularité des textes et des expériences littéraires pour ne pas considérer spécifiquement des moments, des auteurs, des genres : la mauvaise foi universelle de la littérature se monnaie en cas particuliers, appréhendés par des lectures et des exemples. Ils dépendent de la bibliothèque particulière de l’auteur et donc certains titres rapidement évoqués peuvent ne rien dire à un autre lecteur, mais les analyses les plus longues portent sur des textes assez familiers. Maxime Decout cherche à intégrer la littérature des siècles passés (surtout ceux de la première modernité) aux mouvements de la littérature la plus contemporaine (on le verra, le XIXe siècle est curieusement écarté). Il invite à les lire, il veut les rendre intéressants. L’entreprise est donc pleine de bonne volonté, même si passionnément anachronique.

Il commence même par considérer deux romans traditionnels, La Princesse de Clèves et Les Liaisons dangereuses, comme deux ouvrages à dimension autobiographique, les Essais de Montaigne et les Confessions de Rousseau. Il reconnaît que la mauvaise foi intéresse désormais les deux genres dominants actuellement du roman et de l’autobiographie (il ignore la poésie et le théâtre comme les essais). Qu’il puisse retrouver des textes anciens (mais sans remonter à l’Antiquité), est bien normal : en effet, la pensée classique a observé de son côté les phénomènes de mauvaise foi qui reviennent, dit Marivaux, à parvenir à ne pas voir ce qu’on voit. La tradition catholique offre de son côté tous les moyens de repérer et d’analyser la mauvaise foi, en faisant intervenir le mal et Satan certes, les corruptions du coeur humain au moins : elle sait dire l’obscurité de la conscience à elle-même, les ruses du coeur, les égarements de la raison. Elle l’envisage dans une perspective de la responsabilité morale et elle s’attaque ainsi à la question du mal.

Les moralistes (Montaigne, Pascal, Malebranche, Nicole, La Rochefoucauld, Rousseau, Marivaux, Diderot, Sade) ont accueilli et souvent transposé dans un langage plus profane ces analyses qui pouvaient aussi s’appuyer sur saint Augustin. Ils en ont fait une matière littéraire, en particulier dans des essais. Ceux de Montaigne explorent la mobilité, les contradictions du sujet et la manière en particulier dont le rôle adopté (pour des raisons variables) finit par devenir sérieux et par s’intégrer au moi. Pascal, après Corneille et Rotrou, suggère même que les actes de dévotion pourraient conduire à la foi. Contradictions, incohérences, mutations de l’être et du paraître nourrissent l’écriture essayiste et autobiographique mais aussi le théâtre (chez Marivaux par exemple : les Sincères sont entièrement consacrées à la mauvaise foi), et le roman. L’essai de Maxime Decout néglige l’attention classique à la mauvaise foi et les catégories, le vocabulaire, l’économie de leurs analyses et de leurs descriptions : n’est-ce pas au contraire ce qui fait la richesse des textes littéraires ?

Maxime Decout donne une grande place, au contraire, au projet des écrivains du XXe siècle de considérer la mauvaise foi, d’en faire leur propos privilégié (du moins pour certains, il n’est pas sûr que cela vaille pour Malraux et pour Claude Simon ou pour le théâtre de Beckett, il n’est pas sûr que les illusions mises en scène par Sarraute lui soient redevables), il invoque en particulier Maurice Blanchot qui fonde sur la singularité énonciative du roman l’assimilation de toute littérature à la mauvaise foi : il introduit ce théoricien dans un second temps pour corriger Sartre (qui serait en quelque sorte lui-même infidèle à ses bonnes idées, qui refuserait lui aussi de voir ce qu’il voit). La mauvaise foi se présente ainsi sous deux jours antithétiques : soit l’auteur en est parfaitement conscient et en décrit toutes les ruses (comme Montaigne ou Sarraute, Pérec ou Laclos), soit il prétend y échapper dans des revendications outrées de transparence et de sincérité : ridicules !

Certains auteurs seraient donc victimes de leur mauvaise foi, d’autres l’assumeraient et la représenteraient. Parmi les premiers, outre Sartre, Mme de La Fayette et Rousseau, parmi les seconds Montaigne, Laclos et une belle brochette de contemporains. La mauvaise foi nourrit le texte littéraire classique parce que c’est un thème privilégié de la pensée de l’époque et parce que cela fournit un matériau adéquat à l’implication herméneutique du lecteur : cela permet de dire les contradictions des situations et des consciences en amenant le lecteur à prendre parti, du moins à se repérer, à juger, à évaluer. Explorer les zones de la mauvaise foi, en exploiter les effets déconcertants jusqu’aux apories, regarder l’ombre et l’impossibilité de voir clair, n’est-ce pas le propos conjoint de Montaigne et de Mme de La Fayette, de Marivaux et de Laclos ? Montaigne comme Rousseau vont jusqu’à envisager que cette mauvaise foi pourrait les atteindre puisqu’ils se regardent eux-mêmes et pourraient ainsi ne pas voir ce qu’ils voient. Mme de La Fayette ne se contente pas d’opposer vertu à passion, c’est une évidence, elle montre combien, dans les conditions de la société de cour et dans les rôles différents impartis aux deux sexes, dans la situation d’un mariage arrangé et d’une lutte des ambitions et des galanteries, dans les conflits de l’honneur et du pouvoir, ces deux termes de vertu et de passion sont eux-mêmes si confus, si contradictoires, si incohérents même, que chacun ne peut faire que des choix obscurs et insatisfaisants et doit compter sur lui-même, dans le désarroi et la solitude, pour prendre une décision nécessairement malheureuse. Son personnage ne maîtrise aucun des paramètres des deux termes, faut-il pour cela accuser l’auteur de mauvaise foi parce qu’elle ne prétend pas ramener la complexité à des alternatives rassurantes et claires ? Qu’elle n’ait pas revendiqué son oeuvre tient aux conditions sociales de l’époque.

Le roman de Marivaux (Le Paysan parvenu) est constitué du texte rédigé par un personnage séducteur qui tire parti des équivoques : il ne prétend pas s’analyser lui-même et décrire son être intérieur. Le romancier présente au lecteur le portrait d’un personnage séducteur et équivoque : fait-il différemment de Laclos ? Celui-ci ne laisse pas le lecteur hésiter sur la violence et la méchanceté des libertins, ni sur le sort fait aux femmes, mais il présente la séduction du libertinage, il laisse le lecteur y être sensible : le libertin peut tirer parti du naturalisme des sens et sur les raffinements de la société curiale. Ce sont des valeurs de l’époque : le roman renvoie donc à son temps une image troublante de ses choix et des problèmes qu’ils soulèvent. Les deux préfaces contradictoires cherchent à impliquer le lecteur dans cette affaire : il doit en être atteint et touché.

De façon plus générale, on peut se demander si ces romans gagnent à être lus en attribuant à leurs auteurs de la mauvaise foi : est-ce un instrument heuristique assez fin et assez pertinent ?

Maxime Decout est fidèle à Sartre et à Blanchot (contradictoirement) en ce que ces deux auteurs mettent en question la bonne foi de l’auteur (et désignent tous les artifices, toutes les conventions qui les en empêcheraient). On peut d’ailleurs se demander si la description que fait Sartre du roman est si juste, du moins si l’on considère ceux qu’il attaque (tous les plus grands) et ses propres mises en oeuvre ! Une représentation poétique peut-elle être de bonne ou de mauvaise foi ? Du moins les positions morales et intellectuelles que cette représentation soutient (ou qui la soutiennent) peuvent-elles être jugées pauvres, incohérentes, malhonnêtes.

La question se pose un peu différemment pour l’autobiographie (Maxime Decout associe des essais à des autobiographies contemporaines et à des fictions qui imitent l’autobiographie, qui sont donc des feintises selon les analyses éclairantes de Kate Hamburger : elles ne sont donc pas du même ordre). On peut certes les lire sans s’obnubiler sur la question de la sincérité et de l’honnêteté de l’auteur et les considérer comme des représentations à l’instar de celles proposées par la fiction (elles permettent souvent d’explorer d’autres zones et de construire autrement des récits différents) ; mais il est vrai que les auteurs affirment leur bonne foi, leur volonté d’être vrai et parfois de tout dire, de ne rien cacher. C’est là où ils se tromperaient, il faudrait donc les lire avec méfiance. Traquer leurs mensonges, leurs cachoteries, leurs jouissances secrètes et immorales.

Les auteurs conscients de la difficulté de se dire, comme Montaigne et Stendhal, prépareraient au contraire la littérature contemporaine, et Maxime Decout recense les fictions qui proposent des personnages de mauvaise foi : mais on peut lui opposer que la représentation de tels personnages de fiction ne préjuge en rien de la mauvaise foi de l’auteur. Beckett l’est-il ? Sarraute l’est-elle ? Maxime Decout ajoute à son dossier les romanciers qui reprennent les schémas du roman policier pour les parodier, les détourner, les vider de leur ambition d’accéder à la vérité. Il s’appuie sur le livre paradoxal de P. Bayard analysant un roman marginal d’Agatha Christie pour suggérer que le roman policier lui-même serait de mauvaise foi, pas au service du vrai et du bon, et il recense les faux indices qui égarent le lecteur et le conduisent à interpréter à mauvais escient. C’est retrouver la question du roman. Mais est-ce que cela a un sens de faire l’hypothèse que Mme Bovary n’a jamais trompé son mari, que le narrateur est peu fiable et égare le lecteur ? Les moteurs d’un très grand nombre de romans policiers sont le suspens, la dénonciation des désordres et l’héroïsme qui permet sinon de les vaincre du moins de les exposer. Il n’y a donc là nulle mauvaise foi. Que des écrivains de haut vol s’amusent à détourner cette ambition, pourquoi pas. Ils visent peut être la croyance naïve dans la possibilité d’être héroïque au service de l’ordre et souvent d’une rédemption morale (par exemple chez P. D. James ou Ruth Rendell). Ils sont méfiants, ils sont sceptiques, ils voient le mal triompher.

Ces auteurs soupçonnent et dénoncent ; c’est ce que fait Dante dans La Divine Comédie, comme Rousseau dans ses Confessions : il dénonce un certain état de la société de son temps et décrit comment il en a été la victime. Il offre ainsi une interprétation, un modèle de compréhension de l’homme à partir de son expérience. Mais avant d’en discuter la pertinence ou la justesse, avant de considérer la valeur de ce qu’il représente (ce que fait P. Lejeune), encore faut-il examiner ce qu’il représente et déclare, les modèles, les registres, les images, les arguments, le choix des épisodes, leur traitement. Et pour le faire, ne faut-il pas accepter de le lire avec confiance, de voir ce qu’il propose, d’entrer sensiblement dans son point de vue, de reconnaître ses concepts et ses modèles, d’épouser ses émotions ? Cette confiance, assez vite nous refusons de la poursuivre avec certains auteurs que nous trouvons vides et médiocres (chacun aura bien des exemples en tête) : ils n’ont rien à dire ! rien à penser ! rien à faire éprouver ! Mais ce n’est pas qu’ils sont de mauvaise foi ! Cette bienveillance à l’égard du propos de l’auteur, de sa vision du monde, est du même ordre que celle que demande le roman : acceptez de lire une histoire inventée ! Vous pouvez être ému par une telle histoire, qui se présente en effet comme ayant lieu (plus qu’ayant eu lieu) : acceptez en la possibilité. Et voyez ce que vous éprouvez, apprenez ce qui vous éclaire ou vous choque.

Leo Strauss proposait que la lecture des textes philosophiques procède en deux temps. En tentant d’abord de retrouver comment l’auteur se comprenait lui-même (donc en restant dans les termes de sa pensée), il appelle cela l’interprétation. Puis il proposait que le critique regagne toute sa liberté pour comprendre le texte, évaluer ses enjeux, ses propositions, sa situation, l’opposer à d’autres propositions antérieures ou ultérieures sur des questions similaires, repérer des changements historiques, l’effet des présupposés, les faiblesses du raisonnement, etc. Le texte littéraire peut demander les mêmes étapes (en particulier pour les essais et les autobiographies, les textes où l’auteur s’énonce sérieusement : à prendre au sérieux), mais la première peut être un peu différente : accueillez avec bienveillance le monde représenté, acceptez d’en être partie prenante. Dans bien des cas la tentative va tourner court : ce monde représenté ne m’intéresse vraiment pas, je le trouve sans intérêt. D’autres oeuvres posent des problèmes un peu différents : ce monde représenté est certes fascinant, mais il m’engage dans des dispositions qui me mettent mal à l’aise, que je réprouve, que je rejette : ainsi de l’oeuvre de Sade ou de Céline. Chaque lecteur, comme le proclame Breton dans le Manifeste, est libre de fermer ce livre et d’en prendre un autre.

Puis-je lire Homère ou Dante sans accepter d’entrer dans un monde qui m’est si étranger, si lointain, si violent aussi ? Puis-je ne pas considérer les valeurs et les idées qu’ils défendent, ne pas m’attacher à ce qu’ils construisent et disent ? Cette sympathie initiale, ce crédit, cette bienveillance étaient autrefois accordés au nom de la poésie et de sa valeur. La rupture de l’époque moderne que constitue l’historicisation, l’extension même des champs de la littérature, leur accueil de textes si nombreux, amènent à lier cette sympathie moins à une essence reconnue (parce qu’elle a été contestée) qu’à une attention historiciste et culturaliste : Dante parle d’un autre monde avec des conceptions qui ne sont pas les nôtres, mais ne les fait-il pas vivre pour nous d’une manière qui nous touche et nous oblige à regarder autrement notre propre vision du monde, notre propre conception de l’art et de la littérature même ?

L’idée de mauvaise foi participe d’une telle vision du monde, les classiques l’ont conçue à leur manière, les modernes à la leur : il faut leur faire confiance pour les lire. C’est une autre question de savoir si elle entre dans l’essence de la littérature et est le préalable à toute justesse d’écriture et de lecture. Maxime Decout conclut son essai par un parcours historique qui envisage successivement trois siècles. Il met presque à l’écart le XIXe siècle (il regarde brièvement Stendhal autobiographe, mais pas ses romans). Pourtant, que d’exemples auraient pu être allégués ! Chez Musset, Perdican et Camille, dans On ne badine pas avec l’amour, ne se dissimulent-ils pas leur motif de soupçonner l’amour ? Marianne n’agit-elle pas de même avec ses Caprices ? Dans Cyrano de Bergerac, le héros, Roxane, Christian ne sont-ils pas tous amenés à ruiner leur propre sentiment amoureux par des exigences contradictoires ? Dans Madame Bovary, tous les personnages ne sont-ils pas attirés par un idéal romantique que contredit la réalité qui les entoure et leur propre égoïsme, leur cynisme sans coeur, leur motivation explicite ? Charles tombe sous le joug d’une femme qui incarne cette image, comme Rodolphe et Léon, mais chacun agit en suivant des motifs tout contraires de prosaïsme, d’utilitarisme sexuel, d’ambitions médiocres, sans parler d’Emma qui sacrifie son mari et sa fille, puis elle-même, à des satisfactions grotesques et vaines. Dans l’une des dernières pièces de Pirandello, Se trouver, les héros ne subissent-ils pas tous l’attrait de représentations stéréotypées de l’acteur, de l’artiste, de l’amour, de la liberté, qui les enferment et paralysent leurs élans et leur soif d’authenticité ? On peut donc facilement retrouver partout le modèle de la mauvaise foi : c’est qu’il est peut-être justement trop commode, trop large parce qu’il associe sous un jour psychologique – d’autant plus tentant que celui qui le manie s’arroge le bénéfice du soupçon utile et de la clarté victorieuse – les questions de la conscience et de la représentation de soi, de la responsabilité morale, de l’obscurité des motifs de l’action, et plus généralement de la méchanceté et du mal. Maxime Decout aurait pu invoquer la manière dont Freud et Marx et leurs thuriféraires expliquent, dans un vocabulaire spécifique, ces phénomènes et en proposent une explication universelle.

Cette extension de l’application de la notion de mauvaise foi explique que la thèse de Maxime Decout ne puisse être fausse, mais aussi les périls où elle s’expose. J’en retiendrai deux principaux : elle néglige de prendre en compte les modèles, les concepts, les termes propres à chaque période et même à chaque oeuvre ; elle tend à confondre la mauvaise foi représentée avec celle qui affecterait l’auteur.