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L’objectif de cet ouvrage volumineux (plus de 600 pages) est ambitieux : « […] proposer une mise au point terminologique très précise de l’analyse spatiale », exercice réalisé en 720 définitions illustrées de nombreux graphiques et figures.

Cet ouvrage vient combler un vide. Bien entendu, il existe de nombreux dictionnaires de géographie fort bien construits, et ce, tant en anglais (Mayhew, 2006 ; Gregory et al., 2011) qu’en français (Brunet et al., 1993). Plus récemment, plusieurs auteurs ont aussi proposé des dictionnaires plus spécialisés, notamment sur les systèmes d’information géographique – les ouvrages de Kemp (2008) et de Shekhar et Xiong en sont de très bons exemples –, ou encore sur la télédétection (Abrams et al., 2014). Par contre, à ma connaissance, Jean-Jacques Bavoux et Laurent Chapelon sont les premiers à proposer un dictionnaire d’analyse spatiale de langue française.

L’ouvrage est très bien structuré. Aux pages 11 à 13, les auteurs proposent un organigramme détaillé dans lequel les définitions sont regroupées en trois grandes catégories : concept et méthodologies, formes et structures, dynamiques. Cet organigramme sera fort utile aux lecteurs non familiers avec l’analyse spatiale, qui pourront ainsi aisément « naviguer » à travers le dictionnaire. En outre, en fin d’ouvrage, les auteurs ont pris soin de construire un index alphabétique ainsi qu’une liste des définitions présentes dans le livre.

Concernant le contenu, l’ouvrage est assez riche relativement aux entrées sur les fondements théoriques et les notions-clés dans le champ de l’analyse spatiale. Par exemple, les notions d’interaction, de contiguïté, de spécialisation et de distance sont bien discutées. Bien qu’il soit impossible de fournir une liste exhaustive, on aurait aimé aussi retrouver d’autres entrées comme la résolution spatiale, les externalités et l’économétrie spatiale.

L’ouvrage est par contre beaucoup plus pauvre du point de vue des méthodes et des mesures largement utilisées en analyse spatiale. D’une part, il est étonnant de retrouver plusieurs entrées qui relèvent de la « statistique classique » comme celles sur le Khi-deux, les coefficients de corrélation de Pearson et de Spearman, l’homoscédasticité, la médiane, le mode, etc. Ces entrées auraient pu être supprimées afin de libérer de la place pour plusieurs mesures ou méthodes qui ne sont pas abordées, comme : le krigeage, et ce, même s’il y a deux entrées sur l’interpolation et le variogramme ; l’autocorrélation spatiale locale et ses mesures (indice de LISA, indices locaux de Getis et Ord) ; l’indice du plus proche voisin ; les méthodes de détection des agrégats spatiaux (statistiques de balayage de Kulldorff par exemple) ; les méthodes d’échantillonnage spatial ; la microsimulation spatiale ; les modèles de localisation-affectation, etc. Finalement, certaines entrées sont incomplètes. Bien qu’il y ait une entrée sur la régression, les modèles d’économétrie spatiale (modèle avec variable dépendante spatialement décalée, modèle avec terme d’erreur spatialement décalé, modèle Durbin) et même la régression géographiquement pondérée ne sont pas discutés. Dans la même veine, bien qu’il y ait une entrée pour l’accessibilité, les différentes mesures d’accessibilité ne sont pas discutées non plus.

On regrettera aussi l’absence de bibliographie. En effet, des références bibliographiques sont présentes dans plusieurs définitions. Par exemple, dans l’entrée « ségrégation », les auteurs font judicieusement référence aux travaux de Duncan et Duncan et de Massey et Denton (1988) pour discuter des instruments de mesure de la ségrégation. L’inclusion d’une bibliographie permettrait d’inviter le lecteur à lire des références incontournables lui permettant d’explorer plus en détail la thématique, le courant théorique ou la méthode discutée dans la définition.

En résumé, l’exercice est fort intéressant et sera fort utile pour les non-initiés en analyse spatiale, qui pourront y retrouver des définitions claires des principales notions en analyse spatiale. Par contre, le lecteur souhaitant aussi y trouver de courtes explications sur les principales méthodes et mesures en analyse spatiale restera sur sa faim, ce qui laisse place à amélioration, on l’espère, dans une seconde édition de l’ouvrage.