Corps de l’article

Depuis le début des années 1980, de grandes enquêtes longitudinales sur les valeurs permettent d’en observer l’évolution dans les populations du monde[1]. En France, les travaux de Galland et Roudet (2001; 2005; 2012), issus de l’European Value Study (EVS), ont tout particulièrement contribué à documenter les valeurs chez les jeunes. Dans la foulée, d’autres travaux sur les valeurs des jeunes ont été réalisés au Québec (Pronovost, 2007; Pronovost et Royer, 2004; Roy, 2008), en Ontario (Molgat, 2008) et au Canada (Bibby et Posterski, 1986). Parmi les grandes tendances que ces enquêtes révèlent, les valeurs les plus importantes chez les jeunes sont celles qui touchent la famille, les amis, l’amour, le travail et le respect. Plus loin derrière se trouvent les loisirs, de même que la religion, la politique et l’environnement. Ainsi, alors qu’ils accordent une grande importance à des dimensions centrales de leur vie, on entend moins les jeunes se prononcer sur l’importance qu’ils accordent à l’environnement. Qu’en est-il? La protection de l’environnement est-elle une valeur pour les jeunes? Dans cet article, nous avons voulu explorer cette question.

L’environnement dans le contexte de l’étude des valeurs

L’étude des valeurs renvoie à un univers large, composé de différents types de valeurs qui peuvent être déclinées selon leur statut et leur fonction. En regard du statut, on parlera de valeurs sociales, de valeurs publiques, ou privées. Les valeurs sociales, pour prendre celles-là, représentent de grands idéaux collectifs partagés par les membres d’une société. La famille, le travail, l’éducation, la santé, en sont des exemples. Les valeurs se définissent aussi selon leurs fonctions dans un système de valeurs où elles peuvent être centrales, structurantes, globales, instrumentales, morales, pour ne donner que ces exemples (Rezsohazy, 2006; Royer, 2009a). À la suite de Bréchon (2000), on reconnait que les valeurs s’acquièrent progressivement, qu’elles évoluent lentement, et que le fait de les étudier permet de comprendre les tendances d’évolution des sociétés.

Dans le contexte de l’enquête mondiale sur les valeurs (World Value Survey – WVS), l’environnement fait partie de la catégorie des valeurs expressives (self-expressive values), une catégorie qui regroupe des valeurs fortement axées sur la protection de l’environnement, la tolérance des étrangers, l’égalité entre les sexes, la participation aux décisions économiques et politiques. Dans la WVS, ces valeurs se situent à l’opposé des valeurs de survivance (survival values), une catégorie qui témoigne de préoccupations pour la sécurité physique et économique. En d’autres termes, selon cette perspective, moins une société se préoccupe de sécurité, plus elle est susceptible de développer des valeurs expressives et, a fortiori, un intérêt marqué à l’égard de l’environnement. L’enquête mondiale sur les valeurs ne compile pas de données spécifiques pour le Québec, mais on peut néanmoins y voir que le Canada se situe parmi les pays dont la population manifeste un niveau élevé de valeurs expressives, à l’instar de pays scandinaves tels que le Danemark, la Suède, la Norvège et l’Islande (voir la carte culturelle proposée par Inglehart et Welzel dans la World Values Survey, 2015[1]).

Dans la tradition européenne des enquêtes sur les valeurs, celles-ci sont définies comme des principes généraux qui se trouvent au fondement des opinions, des pensées et des représentations. On considère qu’elles orientent les actions et les comportements (Bréchon, 2000). Or, si l’influence potentielle des valeurs sur les comportements est généralement reconnue, ce lien ne survient toutefois pas de manière systématique (Bréchon, 2000; Galland et Roudet, 2001). Un individu peut en effet agir dans un sens différent de celui que lui dicteraient ses valeurs. En matière d’environnement, par exemple, une personne peut considérer qu’il s’agit d’une préoccupation pour elle et lui accorder une très grande importance, sans pour autant utiliser les transports en commun ou trier ses déchets. C’est en ce sens que l’on considère que les valeurs prédisposent « seulement » à l’action. On retiendra alors que plus une valeur est consensuelle dans une société, plus elle a de chance d’être intégrée par les individus et d’induire des comportements (Bréchon, 2000), ce qui lui donnerait ainsi un statut de valeur sociale.

Les valeurs associées au respect de la nature et à la protection de l’environnement sont relativement récentes (Rezsohazy, 2006) au sein des sociétés occidentales en comparaison à d’autres valeurs telles que la famille ou le travail, par exemple. Prenant racine dans les mouvements sociaux de la fin des années soixante, les valeurs écologistes se sont assez rapidement installées si l’on en juge par les résultats obtenus dans les enquêtes européennes sur les valeurs (EVS). Dès 2008, l’enquête montre en effet la prédominance d’une conception « écocentrique » du monde, c’est-à-dire qui reconnaît la fragilité du milieu naturel, l’incapacité de l’homme à remédier à la dégradation, la possibilité d’une crise écologique ou d’une catastrophe prochaine (73,5 % des Français interrogés adhèrent à des degrés divers à ces propositions[2]), faisant basculer les valeurs traditionnelles « théocentriques » et « anthropocentriques » (où Dieu et l’homme sont le centre du monde), valeurs vraisemblablement dominantes jusqu’aux années soixante-dix (Bozonnet, 2010).

Pour estimer la prégnance des valeurs liées à l’environnement dans le contexte québécois, le Baromètre de la consommation responsable (Observatoire de la Consommation Responsable, 2014) fournit des données éclairantes, tirées d’une enquête réalisée annuellement depuis 2010 auprès de plus de 30 000 citoyens. Ce baromètre indique notamment que la protection de l’environnement est la principale motivation qui joue en faveur de la consommation responsable chez les Québécois. Or, pour 2014, le baromètre révèle un indice de consommation responsable jugé tout juste passable (65,1 points)[3], de même qu’il affiche une faible progression de ces pratiques de consommation pour la période 2010-2014 (+1,1 point).

Par ailleurs, à l’instar d’autres enquêtes (Fielding et Head, 2012; Pronovost, Payeur et Robitaille, 2009; Pronovost, 2013), le baromètre indique que les femmes consomment de manière plus responsable que les hommes. De plus, ce sont les 45-64 ans qui s’avèrent être les consommateurs les plus responsables (indice de 66,7 points en 2014) au détriment des jeunes (18-24 ans), qui présentent un indice de 62,4 points. En cinq ans, l’indice de consommation responsable chez les jeunes a gagné à peine 0,3 point, passant de 62,1 en 2010 à 62,4 en 2014. Le coût demeure le principal frein à ce type de consommation, les produits et services éco-responsables étant considérés trop onéreux en regard du budget personnel disponible. Le recyclage est le comportement le plus fréquent, même s’il affiche un indice de décroissance pour la période 2010 à 2014 (-1,7 points). Aussi, le baromètre révèle que le scepticisme atteint un niveau record au Québec en 2014, le niveau de confiance envers les acteurs du développement durable (organismes de certification, entreprises, agences de publicité et politiciens) n’ayant cessé de chuter depuis 2010.

Cette situation plutôt morose ne semble pas particulière au contexte québécois. D’autres travaux, dont ceux de Jean-Paul Bozonnet (2005; 2010; 2012), réalisés à partir des données de l’enquête européenne sur les valeurs, révèlent une stagnation des valeurs environnementales en France tant dans la population générale que chez les jeunes (défense de la nature, protection de l’environnement, combat politique). De même, les jeunes Australiens seraient particulièrement cyniques à l’égard du gouvernement et des entreprises qu’ils jugent apathiques en matière d’environnement (Threadgold, 2012), et les jeunes qui pensent que la responsabilité de protéger l’environnement revient aux gouvernements ont moins tendance à s’engager dans des actions environnementales (Fielding et Head, 2012). Les données de l’enquête mondiale sur les valeurs de 2010 (World value survey online analysis) indiquent que 18 % des jeunes Américains (15-29 ans) déclarent que faire attention à l’environnement et prendre soin de la nature sont importants pour eux, et 13 % que ces deux mêmes facteurs représentent un problème sérieux. Des proportions similaires peuvent être observées chez les jeunes Australiens et chez les jeunes Néo-zélandais, des sociétés qui présentent des attitudes semblables à celles des Canadiens en matière d’environnement, selon cette même enquête. Au Québec, les résultats d’une enquête réalisée auprès de 1890 jeunes âgés de 10 à 17 ans (Pronovost, Pailleur et Robitaille, 2009) révèle que la majorité d’entre eux, conscients des problèmes environnementaux, sont pessimistes en ce qui concerne l’avenir de l’environnement (pollutions diverses, changements climatiques, épuisement des ressources, etc.). Bien qu’ils pensent que la société peut fonctionner sans détruire l’environnement, les adolescents interrogés ne savent pas trop quoi faire pour le protéger et ils ont l’impression qu’ils ne font pas suffisamment de gestes concrets dans ce sens. Les jeunes déclarent par ailleurs avoir d’autres préoccupations que les questions environnementales (Pronovost, Pailleur et Robitaille, 2009).

Parmi ces préoccupations, les jeunes veulent voyager, voir le monde. Ils en rêvent, l’incluent dans leurs projets d’études, de carrière, d’avenir (Royer, 2009b; 2012). Or, si le voyage contribue au développement personnel et à la connaissance du monde, tourisme et environnement ne font pas nécessairement bon ménage. Même si de nombreuses politiques, stratégies de gestion et de marketing cherchent à les rapprocher, la recherche sur la relation entre tourisme et environnement met en lumière les impacts négatifs du tourisme sur l’environnement naturel (transports, fréquentation de sites naturels sensibles, capacité de charge, etc.), tout comme le montrent plusieurs travaux récents réalisés dans les secteurs du tourisme et des sciences de l’environnement (Holden et Fennel, 2013).

C’est donc dans un contexte global manifestant un certain état de conscience en matière d’environnement, mais manifestement assez peu engagé, que s’inscrivent les jeunes auxquels nous nous intéressons. Dans le cadre de nos travaux sur les valeurs, entre autres dimensions, nous avons cherché à cerner l’importance que les jeunes accordent à l’environnement, c’est-à-dire la manière dont ils le voient, ce qu’ils en pensent, ce qu’ils en disent.

Méthode

Les données sur lesquelles la présente analyse repose proviennent de trois enquêtes qualitatives portant sur les valeurs des jeunes (deux enquêtes sur les valeurs et une sur les aspirations au voyage), réalisées dans la période qui va de 2003 à 2012[4]. Les trois enquêtes ont été réalisées par entretiens qualitatifs menés auprès de 91 jeunes Québécois (nés au Québec ou immigrants reçus) âgés de 14 à 25 ans (Tableau 1). Pour les trois enquêtes, les échantillons ont été construits de manière intentionnelle, en recrutant des jeunes dans des écoles (secondaires, cégeps, universités), ainsi que par la technique des réseaux, c’est-à-dire en sollicitant l’aide de parents, d’enseignants, de jeunes, et en utilisant Facebook. En plus d’être Québécois, un intérêt marqué pour le voyage était nécessaire pour participer à l’enquête sur les aspirations au voyage. L’échantillon total compte 91 participants répartis dans deux groupes d’âge : 45 sont âgés de 14 à 19 ans; 46 sont âgés de 20 à 25 ans. Dans chacune des enquêtes, l’échantillon comporte un nombre un peu plus élevé de filles pour une proportion générale de 57 % de filles et 43 % de garçons[5] – ces derniers se montrant plus difficiles à recruter. Les jeunes qui composent ces échantillons proviennent majoritairement de la région de Montréal, de Trois-Rivières et de Québec; quelques-uns vivaient dans d’autres régions au moment des enquêtes.

Tableau 1

Profil de l’échantillon pour les trois enquêtes selon l’âge et le genre

Profil de l’échantillon pour les trois enquêtes selon l’âge et le genre

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Dans les deux enquêtes sur les valeurs, les entretiens visaient à mieux connaître les valeurs des jeunes, c’est-à-dire les identifier et les décrire sous l’angle de leurs significations et de leurs représentations. Les valeurs étant considérées comme des idéaux (Bréchon, 2000), les entretiens ont été organisés de manière à permettre à la personne interviewée de parler d’abord de ce qui est important pour elle à partir de la question suivante : « Pour commencer, pourrais-tu me parler de ce qui est important pour toi dans la vie ». Les valeurs les plus importantes rapportées à cette étape des entretiens sont la famille, les amis, les études, l’amour, le travail. Par la suite, il s’agissait de reprendre chacune des « valeurs » identifiées en réponse à cette question en vue de les expliciter, pour finalement aborder d’autres grands domaines de la vie non spontanément nommés, mais présents dans les enquêtes sur les valeurs, tels que la politique, la religion, l’engagement social, l’environnement, etc. En ce qui a trait à l’environnement, nous avons utilisé une question large pour lancer le thème, suivie de relances plus spécifiques : « Qu’est-ce que tu penses de l’environnement? »; « Est-ce important pour toi? »; « Qu’est-ce que tu fais, concrètement? ». Les entretiens devaient ainsi permettre d’identifier les valeurs et d’explorer leurs significations pour chacun des participants.

Pour ce qui concerne l’enquête voyage – un aspect de la vie des jeunes qui s’est fortement imposé dans les deux enquêtes précédentes sur les valeurs –, les entretiens visaient à explorer l’univers des significations que revêt le voyage chez les jeunes, c’est-à-dire principalement ce qu’il représente pour eux, leurs désirs de voyager et leurs projets de voyage. Dans cette enquête, nous avons abordé des thèmes complémentaires, dont un visait à cerner la sensibilité des jeunes à l’égard de l’environnement en termes d’importance accordée et de gestes posés pour contribuer à le protéger.

Dans les trois enquêtes, les entretiens ont été menés par des assistantes de recherche préalablement formées à l’entretien qualitatif dans le cadre d’un cours de méthodes qualitatives et supervisées par la chercheuse responsable des enquêtes[6]. D’une durée variant de 40 à 90 minutes, les entretiens ont tous été enregistrés et transcrits. Rendus anonymes, ils ont été insérés dans une base de données exploitée avec le logiciel d’aide à l’analyse NVivo[7].

De ce corpus comportant 91 entretiens, nous avons codé l’ensemble des propos associés au thème de l’environnement et, à l’aide du logiciel, nous avons extrait d’autres passages repérés automatiquement à partir de mots clés tels que : eau, nature, planète, pollution, récupération, recyclage, terre, transport, voiture, etc. Les données ainsi constituées ont par la suite été analysées de manière inductive (Thomas, 2006; Blais et Martineau, 2006) en partant du postulat qu’elles reflètent la manière dont les jeunes pensaient l’environnement au moment de notre rencontre avec eux. Les procédures inhérentes à l’analyse inductive s’appliquent particulièrement bien à l’analyse de données qualitatives portant sur des objets de recherche à caractère exploratoire et pour lesquelles il n’existe pas ou peu de catégories préalablement établies dans les écrits. L’objectif de ce type d’analyse est de faire émerger des catégories de sens à partir des données brutes, de manière à générer de nouvelles idées (Thomas, 2006; Blais et Martineau, 2006). L’analyse a révélé un gradient de trois positions autour desquelles les données se sont regroupées :

  • Les détachés-inquiets : cette position se caractérise par la manifestation d’une grande inquiétude face à l’avenir de l’environnement et de la vie sur terre, sans toutefois que ces personnes se sentent personnellement concernées ou interpellées par les questions relatives à la protection de l’environnement.

  • Les conscients-passifs : cette position se caractérise par la manifestation d’une sensibilité à l’égard de l’environnement sans toutefois que ces personnes ne s’impliquent personnellement, ne sachant quoi faire ou comment le faire.

  • Les actifs : cette position se caractérise par la manifestation d’un intérêt à l’égard de l’environnement. Ces personnes sont à la fois conscientisées et actives en matière de protection de l’environnement.

Il est important de mentionner que les catégories que nous avons pu construire ne sont pas saturées, ni exhaustives. Elles permettent néanmoins de dégager certaines idées en regard du rapport que les jeunes entretiennent avec l’environnement.

Pour le présent article, nous avons opté pour une mise à plat des dimensions observées dans ces données de manière à refléter ce qui s’en dégage. Il ne s’agit pas d’une analyse prenant en compte le genre, ni réalisée dans une perspective longitudinale, mais d’une exploration organisée essentiellement autour de trois catégories qui mettent en lumière divers types de rapport à l’environnement. Bien que cela ne soit pas un objectif visé, nous faisons ressortir certains aspects ayant trait à l’âge ou au genre lorsque l’analyse le permet. Les participants dont nous rapportons les propos dans la section des résultats sont identifiés en mentionnant l’enquête à laquelle ils ont participé, ce qui fournit un repère temporel.

Résultats

En première analyse, nous avons voulu examiner ce qui préoccupe les jeunes en matière d’environnement – ce à quoi ils pensent lorsqu’il est question d’environnement. Dans le cadre des deux enquêtes que nous avons menées sur les valeurs, mentionnons d’emblée que les jeunes qui pensent spontanément à l’environnement quand on les questionne sur ce qui est important pour eux dans la vie sont rares. Tout comme les jeunes interrogés dans l’enquête de Pronovost, Pailleur et Robitaille (2009), ils ont en fait beaucoup d’autres préoccupations, dont les études, le travail, l’argent, leurs relations avec les autres, leur avenir.

Parmi les observations générales que nous avons pu tirer des données utilisées dans la présente analyse, il se trouve que le rapport des jeunes à l’environnement ne forme pas un ensemble homogène d’attitudes, de conceptions et de comportements. Les regards sont multiples, laissant entrevoir un éventail de positions à travers lesquelles des jeunes se montrent peu préoccupés par la protection de l’environnement, d’autres accordent de l’importance à cette question mais demeurent passifs face à la cause, et d’autres encore accordent une grande importance à l’environnement et font des gestes concrets pour contribuer à sa protection. Il ressort aussi de cette analyse que ce que l’on pourrait désigner comme une conscience relative à l’environnement semble se développer à mesure que les jeunes vieillissent. Plus diffuse à l’adolescence, elle se précise petit à petit, sous l’influence vraisemblablement de la famille, de l’école et des études, de l’actualité sociale et politique, des événements climatiques, des médias. C’est ainsi que ceux qui manifestent le plus grand intérêt pour la protection de l’environnement et l’engagement le plus tangible à son égard sont aussi les plus âgés de l’échantillon.

Les sections qui suivent présentent un gradient de positions autour desquelles les données se regroupent. En décrivant ces positions, nous mettrons aussi en lumière les tensions qui fragilisent la relation à l’environnement notamment dans le contexte du voyage, une activité très prisée par les jeunes (Royer, 2012).

Entre inquiétude et indifférence : des jeunes à la fois inquiets pour l’avenir de la planète et détachés des questions environnementales

C’est en parlant de leur vision de l’avenir que les jeunes, des adolescents surtout (14-19 ans), manifestent leur inquiétude à l’égard de l’environnement. Optimistes en regard de leur propre vie, ils sont toutefois pessimistes lorsqu’ils songent à ce que l’avenir réserve à leurs enfants et aux générations futures. Lorsque nous leur demandons comment ils voient l’avenir, ces jeunes parlent spontanément d’environnement. Inquiets, ils prévoient que la dégradation de l’environnement va s’accentuer avec le temps : « l’environnement, ça va être encore pire » (Katie, 14 ans, enquête valeurs 2), « ça va aller de plus en plus mal » (Mathilde, 14 ans, enquête valeurs 2). Certains évoquent la détérioration de la qualité de l’eau et une pénurie éventuelle de cette ressource; d’autres parlent de la pollution de l’air; d’autres encore de la disparition des forêts et des espèces animales.

Curieusement, en dépit d’une vision apocalyptique de l’avenir de la planète, ces jeunes se sentent peu concernés par la question environnementale. Ainsi, dans cette catégorie, on relève des propos du type : « l’environnement, le recyclage, ce n’est pas ma priorité » (Mélanie, 14 ans, enquête voyage), « la nature, l’environnement, ce n’est pas quelque chose qui me tient vraiment à coeur » (Daphnée, 15 ans, enquête voyage), ou « plus tard, les problèmes de l’environnement, peut-être que ça va me toucher, mais en ce moment, pas vraiment là » (Mathilde, 14 ans, enquête valeurs 2). Dans ce même ordre d’idée, les propos alarmistes de Mélodie (17 ans, enquête valeurs 2) sont éloquents en regard de cette attitude. Lorsque l’intervieweuse lui demande comment elle voit l’avenir, Mélodie explique son inquiétude en même temps qu’elle avoue son détachement :

Mélodie : C’est sûr qu’il va manquer [d’eau], tu sais, dans beaucoup d’ans, il va manquer d’eau, tu sais. Il y a plein de trucs comme ça [qui vont arriver]. La couche [d’ozone], l’atmosphère dans le fond, ça va être encore plus pollué, mais j’ai de la misère à voir vraiment là, tu sais. […] J’ai vraiment de la misère à voir ça, qu’il n’y aura plus d’eau, puis je ne sais pas comment on va faire là.
Intervieweuse: Est-ce que tu trouves ça inquiétant?
Mélodie : Ouais, mais [silence] c’est inquiétant, mais pas vraiment pour moi là, tu sais. J’ai comme d’autres trucs à penser que me soucier de ça.
Intervieweuse : Donc tu ne te sens pas personnellement touchée par ça?
Mélodie : Non.

En somme, ces jeunes envisagent une détérioration importante de l’environnement dans l’avenir et s’en inquiètent, mais il s’agit d’un futur lointain qui les interpelle assez peu. Ils envisagent que cet héritage sera plutôt celui des générations à venir, une vision qui contribue sans doute à leur détachement.

Des jeunes conscients, mais passifs : l’émergence d’une valeur

Sans manifester d’inquiétudes particulières pour l’avenir, les conscients-passifs se distinguent des inquiets en ce qu’ils manifestent une sensibilité environnementale, reconnaissant que la question environnementale est importante dans le monde actuel. Cet état de conscience ne fait toutefois pas de l’environnement une préoccupation particulière pour eux, personnellement, mais ils sont à même de percevoir et d’apprécier les efforts des autres. Les propos d’Amanda (23 ans, enquête valeurs 2) de même que ceux d’Emmanuel (22 ans, enquête valeurs 2), tous deux étudiants, reflètent globalement cet univers de pensée qui montre la conscience côtoyant la passivité, tout en révélant une disposition à faire quelque chose :

Intervieweuse : Et puis si je te parlais d’environnement : est-ce que c’est une préoccupation pour toi?
Amanda : Pas une préoccupation, mais ça devrait le devenir parce que je pense que, de plus en plus, je suis conscientisée. Puis juste à [nom de l’entreprise où elle travaille] je suis bien contente quand quelqu’un arrive avec son sac en tissu pour que je mette [la marchandise] dedans. Je trouve ça important parce que ça a un impact pour plus tard, pour mes enfants, pour les enfants de mes enfants, puis ouais va falloir que ça devienne intégré dans mon mode de vie. Même que ça, je te dirais que c’est quelque chose dont je ne suis pas très fière, de ne pas avoir intégré encore. Mais je ne serai jamais bio-énergie-environnement. Ça c’est sûr que non, pas au point de devenir folle avec ça là.

Emmanuel (22 ans, enquête valeurs 2) est un cas un peu différent. Préoccupé sans être engagé, il a de lui-même abordé le thème de l’environnement pendant l’entretien. Alors que l’intervieweuse le relance en lui demandant si d’autres choses sont importantes pour lui dans la vie, il soutient que l’environnement est important. Il dit faire attention, mais il n’arrive pas à faire des gestes concrets en ce sens :

Bien moi je te dirais que l’affaire qui me dérange beaucoup, c’est l’aspect environnemental. J’ai beaucoup de misère avec ça. Puis pourtant, c’est des choses que je réalise, comment c’est important, mais j’ai beaucoup de misère avec ça. Le recyclage puis tout ça, c’est une notion que j’ai beaucoup de misère encore [long silence]. J’ai pas d’autres exemples. Je fais attention le plus que je peux quand même, tu sais, je fais attention à la base, sauf que je trouve que je ne fais pas assez attention. Tu sais, je vais pas aller jeter de la peinture dans les égouts mais, tu sais, je ne vais pas prendre la peine de prendre une bouteille d’eau puis de chercher la place où je vais pouvoir la recycler [silence]. Mais heureusement, mes amis sont le contraire de moi là-dessus. C’est important.

Emmanuel, 22 ans, enquête valeurs 2

Ne pas avoir « intégré », ne pas savoir « quoi faire » ou « comment faire », avoir « de la misère » avec la question environnementale sont des expressions récurrentes dans les données. Elles contribuent à l’expression de cette tension, évoquée plus haut, qui se tisse entre la conscience de l’existence d’un problème, la valeur accordée à la protection de l’environnement et l’inaction. Le pas à franchir pour mettre en action des préoccupations environnementales exige vraisemblablement un effort pour ces jeunes. L’analyse des données révèle qu’ils n’arrivent pas à mettre leurs connaissances en pratique, même s’ils se considèrent informés et même s’ils accordent une grande importance à l’environnement. Le cas de Michel (étudiant, 24 ans, enquête voyage) est éclairant sur ce plan. Il explique avec précision les principes du tourisme durable, un concept qu’il a eu l’occasion d’étudier plus d’une fois au cours de son parcours universitaire. Puis, alors que l’intervieweuse lui demande s’il tient compte de l’environnement et des principes de tourisme durable dans ses voyages, il explique sa difficulté :

Intervieweuse : D’accord, est-ce qu’il est important pour toi? Est-ce que tu participes à cet aspect du tourisme? [il est question ici de tourisme durable]
Michel : Il est important, je pense, mais je le pratique pas assez, j’ai pas encore la… comment dire, j’ai pas le truc qui me fait dire : « je vais mettre en avant la population locale, prendre des transports qui vont être plus écolos », non, c’est vrai, je pense pour le moment pas comme ça. C’est pas des aspects que j’intègre forcément à mes voyages. Mais je pense qu’inconsciemment je le sais parce qu’avec mes cours, j’ai beaucoup travaillé sur ça, sur le tourisme durable, sur l’environnement, mais c’est des choses que j’arrive pas à… que j’arrive pas à appliquer.

Michel, 24 ans, enquête voyage

Ainsi, même conscientisés, informés, et plutôt sensibles aux questions environnementales, il leur demeure difficile d’accomplir des actions écologistes. C’est la raison pour laquelle nous évoquons l’émergence d’une valeur qui se trouve à l’état de concept, de principe, sans vraiment influencer les actions.

De la conscience à l’action : la manifestation d’une valeur

Alors que les catégories précédentes regroupent des jeunes qui ne se sentent pas trop concernés, ni trop pressés d’agir, qui ne savent pas comment faire pour protéger l’environnement, ou qui savent comment faire mais qui n’arrivent pas à le faire, d’autres passent à l’action passent à l’action. Lorsqu’on leur parle d’environnement, ces jeunes pensent spontanément à la nature et à sa protection. Faire attention, faire son possible, recycler, récupérer, nettoyer, figurent parmi les expressions les plus récurrentes dans leur discours à propos de l’environnement : « je récupère », « je marche », « j’essaie de faire attention », « j’utilise les poubelles » en sont des exemples. Déjà, le propos témoigne d’une forme d’engagement personnel.

Cet engagement prend diverses formes. En plus de gestes simples et quotidiens qui sont le plus souvent liés à la propreté des espaces qu’ils fréquentent et à la gestion de leurs déchets, leur engagement englobe aussi un souci de consommer de manière plus responsable : éviter le gaspillage (Anaïs, 21 ans, enquête valeurs 2); contrôler le chauffage (Estelle, 23 ans, enquête valeurs 2); économiser l’eau (Jeffrey, 23 ans, enquête voyage); marcher (Rose, 23 ans, enquête valeurs 2); utiliser le transport en commun (Lilly, 24 ans, enquête valeurs 2). D’autres, plus engagés, en font un peu plus. Lorsque l’intervieweuse demande à Nathalie (21 ans, enquête valeurs 2) ce qu’elle fait en plus du recyclage, consciente de son engagement, la jeune professionnelle explique avoir installé la récupération dans son milieu de vie, fabriquer ses produits ménagers, consommer de façon responsable, appuyer des organismes qui agissent en matière de protection de l’environnement :

Bien, au niveau de la récupération, il n’y en avait pas dans mon bloc. Ça fait que là, j’ai instauré comme un système de récupération, puis le bloc essaye de faire ça. C’est beaucoup aussi au niveau de tout ce qui est des produits ménagers. On [c’est-à-dire elle et son conjoint] essaye de pas acheter des [elle nomme un produit commercial] ou des choses comme ça. On essaye de faire des produits plus naturels avec du vinaigre, du bicarbonate de soude, des choses comme ça, [acheter] des lumières éconolight ou fluocompacte. Ce que j’essaye beaucoup, c’est de sensibiliser l’entourage. J’ai envoyé à ma mère des produits naturels. Même si elle le fait pas, au moins je me suis dit : bon, elle le sait. J’essaye un peu plus de sensibiliser. Je donne des dons à [elle nomme un organisme] chaque mois. Ça c’est un peu granola, mais moi ça me fait du bien [rire]. Je me dis : si moi je ne peux pas changer le monde, en tout cas je vais encourager un organisme qui est capable de le faire. C’est des p’tites choses comme ça.

Nathalie, 21 ans, enquête valeurs 2

On relève aussi que des jeunes sont plus enclins à faire preuve d’attention à l’égard de l’environnement lorsque cela entraine des économies d’argent. Albert (21 ans, enquête voyage) est franc à cet égard : « ce que je fais de mieux pour l’environnement, c’est quand je pense à mon portefeuille. Je roule moins vite […], je fais du covoiturage, pour la simple raison que ça coûte moins cher et que, dans un sens, ça affecte l’écologie ». D’autres pensent comme lui : « on utilise moins d’eau et en même temps on paye moins d’électricité » (Aline, 22 ans, enquête valeurs 2); « j’utilise le transport en commun, parce que ça coûte moins cher » (Lilly, 24 ans, enquête valeurs 2).

La sensibilité à l’environnement : un lien fragile

Bien que certains jeunes soient conscients, sensibles, informés et actifs en matière d’environnement, les extraits que nous avons analysés révèlent que le lien qu’ils entretiennent avec l’environnement se montre fragile. Il peut se rompre aisément, au moindre obstacle. Les propos d’Aline (22 ans, enquête valeurs 2), par exemple, montrent que même pour une personne qui accorde une grande importance à l’environnement, l’engagement à la cause est loin d’être constant.

Intervieweuse : Est-ce que tu fais le maximum que tu peux faire pour l’environnement?
Aline : Pas tout le temps. Je recycle pas tout le temps ce que je pourrais recycler. Souvent, mon contenant est plein puis j’ai pas le temps d’aller le porter dans le conteneur, là-bas [elle explique que le conteneur est un peu éloigné], ça fait que je recycle pas tout le temps.

Passer à l’action en matière d’environnement exige du temps, des efforts, de la volonté. Le compostage en est un autre exemple. Thomas (22 ans, enquête valeurs 2) explique qu’il n’est lui-même pas très engagé, au contraire de sa soeur : « elle voulait commencer un pot de compostage avec du gazon, des feuilles, puis… en tout cas, elle a commencé ça. Finalement, elle s’est rendue compte que c’était de la job [beaucoup de travail]. Ça fait qu’elle a lâché ».

L’enquête voyage révèle tout particulièrement ce type de tension qui suggère que des jeunes sensibilisés ne sont toutefois pas prêts à sacrifier certaines de leurs habitudes ou certains de leurs projets au profit de l’environnement. En ce qui concerne leurs déplacements, les jeunes qui possèdent une voiture y sont très attachés et adorent s’en servir pour effectuer de longs voyages (road trips). Ils ont tous des projets sérieux de voyage. Les destinations qu’ils préfèrent et celles où ils projettent de voyager sont lointaines : l’Europe et l’Australie notamment sont des destinations très prisées. Surtout, malgré une sensibilité environnementale évidente, aucun ne s’empêcherait de voyager pour des raisons liées à l’environnement. On relève des propos tels que : « je ne m’empêcherai pas de le faire » (Amanda, 20 ans, enquête voyage); « un jour, je sais que j’aurai envie d’aller à [elle nomme des iles] et que c’est pas du tout écolo, mais j’irai quand même » (Clara, 24 ans, enquête voyage); « je suis pas à une étape de ma vie à laquelle je dis : bon, voilà, tu dois arrêter d’utiliser l’avion qui est un moyen de transport polluant. J’en suis vraiment pas là » (Michel, 24 ans, enquête voyage). Plus encore, Annie (24 ans, enquête voyage) explique ne pas se soucier d’environnement dans ses déplacements : « jamais je me suis dit : je ferai pas quelque chose parce que je vais faire des GES [gaz à effet de serre] ». Pourtant, ces jeunes accordent de l’importance à l’environnement et, dans leur vie de tous les jours, ils disent faire des gestes concrets pour le protéger. Selon toute vraisemblance, le désir de voyager l’emporte, venant fragiliser ce rapport.

À l’issue de cette analyse, que retenir? L’environnement est-il une valeur pour les jeunes? Il faut d’abord rappeler que les jeunes Québécois dont il est question dans cet article ont été interrogés dans le cadre de deux enquêtes sur les valeurs ainsi que d’une enquête sur les aspirations au voyage. Dans ces enquêtes, nous nous sommes intéressés de manière exploratoire à plusieurs dimensions de leur vie dont leur rapport à l’environnement, c’est-à-dire l’importance qu’ils lui accordent, leurs perceptions, leurs attitudes, de même que les gestes qu’ils sont prêts à faire pour le protéger. Une analyse qualitative, de type inductive, a été réalisée à partir d’extraits recensés dans l’ensemble des 91 entretiens constituant le corpus des trois enquêtes. Les données, bien qu’elles ne soient pas saturées, ouvrent des pistes intéressantes.

Les résultats indiquent que, par-delà l’attitude détachée et presqu’indifférente de certains jeunes, on observe une relative sensibilité à l’environnement chez d’autres, corroborant les observations de Pronovost et de ses collègues (2009) et de Bozonnet (2012). Cette sensibilité amène certains jeunes (les actifs) à s’engager en posant des gestes concrets pour protéger l’environnement. Le recyclage, la récupération, la propreté de leur environnement immédiat (qui renvoient surtout à la gestion des déchets) semblent être des habitudes acquises. Ces gestes sont, en tout cas, les plus mentionnés dans les données. Mais le lien tissé entre les jeunes et l’environnement est souvent mince et fragile, et il peut se rompre facilement. Il y a en effet un pas important à faire pour transformer leur sensibilité environnementale en comportements constants et durables, même chez des jeunes informés et conscientisés, et même chez des jeunes qui ont développé des connaissances sur des questions relatives à l’environnement. Entretenir un rapport fort à l’environnement et intégrer cette valeur dans la vie quotidienne exige non seulement des connaissances, mais aussi des efforts et de la volonté. Il faut en outre retenir à ce chapitre l’idée que des jeunes ne savent pas quoi faire pour protéger l’environnement ou comment le faire, ce qui n’est pas sans rappeler des résultats de Pronovost, Pailleur et Robitaille (2009) obtenus dans l’enquête qu’ils ont menée auprès d’adolescents (10-17 ans). Notre analyse suggère que ces sentiments d’impuissance ne concernent pas que les adolescents puisqu’on les observe aussi au début de la vingtaine.

De ces constats, il résulte que la protection de l’environnement, que nous avons d’entrée de jeu définie comme une valeur relativement nouvelle, ne rejoint pas les grandes valeurs sociales, consensuelles partagées par la jeunesse québécoise. C’est une valeur mitigée, à laquelle certains jeunes accordent une grande importance alors que d’autres y sont presqu’indifférents, comme c’est le cas chez les jeunes Français (Bozonnet, 2012) et comme c’est le cas également pour la politique et la religion (Royer, Pronovost et Charbonneau, 2004). Les résultats portent à penser que la protection de l’environnement a plutôt un statut de valeur latente chez les jeunes. Présente à l’état d’idéal ou de principe général, elle n’oriente que très peu leurs actions et leurs comportements, selon la définition proposée par Bréchon (2000). Selon Rezsohazy (2006), les valeurs latentes ne se manifestent pas nécessairement dans le cours normal de la vie – c’est ce que nous avons observé chez les conscients-passifs, notamment. Toutefois, toujours selon Rezsohazy (2006), ces valeurs ont une forte capacité de mobilisation lorsqu’elles sont interpellées, contredites ou bafouées. Dans ces circonstances particulières elles peuvent alors se hisser parmi les valeurs les plus importantes chez un individu. C’est peut-être le cas des valeurs relatives à l’environnement, difficiles à mettre en action dans la vie courante, mais susceptibles de prendre forme au besoin, à la suite d’une catastrophe par exemple, comme c’est le cas pour les valeurs de solidarité. Chez les jeunes, la santé a aussi à peu près le même statut : alors qu’ils s’en préoccupent et lui accordent une grande importance, ils ne posent que très peu de gestes pour se maintenir en bonne santé (Royer et Duchesne, 2008), ce qu’ils feront le temps venu.

Les jeunes ne sont sans doute pas à blâmer dans cette affaire. Plusieurs dimensions du contexte social, politique et économique, liées à l’émancipation des individus et à la croissance économique, concourent à défavoriser l’attention portée à l’environnement. L’apathie des gouvernements en matière d’environnement (Dion, 2013), le prix élevé des produits de consommation écoresponsable (Observatoire de la Consommation Responsable, 2014), les innombrables incitatifs à la consommation, la valorisation (voire le culte) des voyages à l’étranger par les médias, les écoles, les milieux de travail et les réseaux proches (famille et amis) sont autant de variables qui peuvent contribuer à expliquer les attitudes plus ou moins engagées des jeunes à l’égard de l’environnement et qu’il faudrait approfondir. Dans tous les cas, étant donné les limites de cette analyse exploratoire, il est nécessaire de poursuivre la recherche afin de mieux documenter et comprendre le rapport des jeunes à l’environnement, et d’observer l’évolution des valeurs qui lui sont associées, tant chez les jeunes que dans les autres groupes d’âges.