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L’ouvrage de 357 pages réunit les 20 contributions, organisées en autant de chapitres, de 38 chercheurs d’Amérique et d’Europe spécialisés dans les métropoles des deux sous-continents américains, ce qui en fait l’originalité revendiquée. Les comparaisons ordinaires se font en effet la plupart du temps entre métropoles ou pays du nord et du sud, procédant ainsi à un ancien découpage entre pays développés et pays en développement qui a perdu de sa pertinence avec l’apparition des pays émergents. L’ouvrage est une synthèse réussie des contributions réunies à la suite d’un colloque tenu en 2006 et d’une collaboration poursuivie entre des enseignants-chercheurs des écoles d’urbanisme, et plus spécifiquement celles qui ont le français comme langue d’échange. En dépit de la grande diversité des thèmes traités, les éditeurs sont parvenus à donner de la cohérence à l’ensemble dont les chapitres-contributions sont regroupés en cinq grandes parties. Les deux premières concernent l’évolution des systèmes urbains et des agglomérations urbaines, la troisième la question de la gouvernance et des mouvements sociaux, la quatrième celles des services et la cinquième celle des modèles d’urbanisme. Les échelles abordées varient des territoires nationaux, voire sous-continentaux, aux quartiers et concernent un panel intéressant de grandes métropoles américaines où l’on rencontre Buenos Aires, Belo Horizonte, Bogotá, Curitiba, Montréal, Mexico, La Nouvelle-Orléans, Rio de Janeiro, São Paulo, Seattle… Les textes à ambitions théoriques alternent avec les contributions plus volontiers appuyées sur des études de cas, sans que cette diversité nuise à l’intérêt de l’ouvrage, dans son aspect analytique, voire spéculatif et prospectif.

Pour qui rend compte d’un tel ouvrage, il est nécessaire de se départir de ses propres centres d’intérêt ou de ses choix théoriques pour se garder, à défaut de toutes les mentionner, de citer telle ou telle approche ou telle ou telle métropole. L’avantage de l’ouvrage est cette grande diversité d’approches et de cas qui, pour ces derniers, tant en ce qui concerne les villes que les objets (groupes sociaux, risques, transport, eau et assainissement, gouvernance, théories et modèles urbains…) ne prétendent pas faire preuve d’exhaustivité. Les éditeurs, dont on cerne assez bien les orientations respectives, entre observation du déplacement des « ellipses de dispersion » des systèmes urbains (Tellier) et appel à la « décolonisation » des savoirs au sujet des théories et modèles urbains (Vainer), ont tenu compte de cette diversité tout en proposant quelques clés de lecture qui prennent l’objet de leur attention en négatif : sont ainsi pointées sept idées reçues relatives aux métropoles des Amériques. Si les réponses apportées ne les infirment pas de manière systématique, elles donnent bien à comprendre les mutations, plus qualitatives que quantitatives, qui traversent ces métropoles apparemment saisies par le modèle urbain unique de l’économie néolibérale.

On notera aussi le grand intérêt d’une bibliographie regroupée pour l’ensemble des contributions et, en fonction des articles, un appareil riche et varié d’encadrés, de figures et de tableaux. On dispose ainsi d’un ouvrage pionnier dans le sens où, chose semble-t-il inédite, il couvre l’ensemble du continent américain, sous des angles d’approches disciplinaires complémentaires, et non sans quelques ponts vers le « vieux continent », ce qui en augmente encore l’intérêt.