Corps de l’article

1. Introduction et problématique

Comment enseigner efficacement dans les cours de français ? Cette question de l’efficacité de l’intervention éducative, prise sous l’angle de l’enseignant de français, devient fondamentale en cette période où l’on démontre que le rapport à l’écrit est un facteur de réussite scolaire primordial (Organisation de coopération et de développement économiques, 2000). Depuis longtemps, des études successives visant à répertorier les pratiques en classe confirment que l’enseignement des contenus grammaticaux est l’activité à laquelle les enseignants consacrent le plus de temps (Chartrand et Lord, 2013 ; Patrice, 1978 ; Bibeau, Lessard, Paret et Therrien, 1987). Les programmes de formation du ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport (MELS) actuellement en vigueur (ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport 2001 ; 2004 ; 2007) reconnaissent l’importance de l’enseignement des contenus grammaticaux pour le développement des compétences disciplinaires à l’étude (lire et apprécier des textes variés, écrire des textes variés, communiquer oralement selon des modalités variées), en particulier lorsque cet enseignement est intégré aux situations de développement de compétences. À la lumière des résultats publiés par le ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport aux épreuves uniques de deuxième et cinquième secondaire (ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport, 2010), il apparaît que les résultats aux critères syntaxiques et orthographiques sont ceux qui causent encore le plus de difficultés aux élèves québécois. Il est alors pertinent de se poser la question de l’efficacité de l’enseignement des savoirs grammaticaux.

Une des dichotomies fréquemment utilisées pour qualifier les méthodes pédagogiques employées par les enseignants, par le ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport et par les formateurs, entre autres en didactique de la grammaire, oppose les méthodes inductives et déductives. Les termes font d’ailleurs partie des programmes officiels (ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport, 2001 ; 2004 ; 2008). Dans plusieurs articles en didactique du français langue première (L1), (Chartrand, 1995 ; Paret, 2000 ; Nadeau et Fisher, 2006), on suggère l’utilisation de méthodes inductives, reconnaissant l’efficience accrue de ses pratiques qui permettraient une plus grande rétention des apprentissages. À l’opposé, plusieurs auteurs s’intéressant à l’apprentissage de l’anglais langue première ou langue seconde (Erlam, 2003 ; Mohammed et Jaber, 2008) proposent, quant à eux, des méthodes pédagogiques déductives, en utilisant également l’argument de l’efficience des pratiques pour justifier leur recommandation. Il semble y avoir parallèlement un retour à l’intérêt de recherche pour la dichotomie explicite/implicite (Gauthier, Bissonnette et Richard, 2013 ; Hollingsworth, Demers et Ybarra, 2012), qui peut ajouter à la confusion, ces dernières faisant appel à un construit différent. Il nous semble donc important de bien définir les méthodes inductives et déductives dans ce cadre, pour éviter les rapprochements malheureux.

Nous nous inscrivons dans un paradigme pragmatique qui évalue l’efficience des interventions. Après avoir défini les méthodes déductives et inductives, nous nous intéresserons, dans le cadre de cet article, à leurs effets mesurés et comparés sur l’apprentissage des objets de savoir grammaticaux. Nous ne nous intéresserons pas ici aux autres aspects de l’intervention éducative, comme la relation psychopédagogique, la relation didactique, la motivation, les attitudes ou les compétences transversales (Lenoir, Larose, Deaudelin, Kalubi et Roy, 2002), qui, nous le reconnaissons, peuvent tous également entrer en ligne de compte lorsque l’enseignant doit choisir une méthode pédagogique. Nous cherchons plutôt ici à déterminer quelle est la méthode pédagogique la plus efficiente pour enseigner la grammaire, sous l’angle précis de l’acquisition des savoirs.

2. Contexte théorique

En sciences de la gestion, le concept d’efficacité (efficiency) est scindé en deux éléments : l’efficacité et l’efficience (Calmé, Hamelin, Lafontaine, Ducroux et Gerbaud, 2013). L’efficacité, c’est l’idée de produire l’effet qu’on attend, alors que l’efficience, c’est la capacité à produire les résultats escomptés selon les ressources disponibles. De nombreux auteurs insistent sur la nécessité de recourir à des pratiques d’enseignement efficientes (American Council of Education, 1999 ; Raymond et Lenoir, 1998 ; Tardif et Lessard, 1999). L’efficience, c’est la préoccupation d’être efficace (inculquer les savoirs et savoir-faire, développer les compétences) selon une ressource limitée (le temps de classe/le temps hors classe, les ressources matérielles, etc.). Nous préconiserons le terme efficience, vu la préoccupation constante des enseignants concernant la limite des ressources, principalement de temps. En effet, une pratique qui aurait des effets concrets, mais qui demanderait un temps trop considérable – ou des coûts trop élevés − s’avérerait efficace, mais pas efficiente, et serait alors considérée comme irréaliste ou utopique.

Il semble qu’en enseignement des langues premières, bien qu’il y ait des études théoriques traitant des approches pédagogiques à privilégier, on ne mène pas d’études empiriques permettant de comparer des pratiques inductives et déductives. On remarque alors l’efficacité de certaines pratiques, habituellement classées parmi les pratiques inductives, sans pour autant vérifier leur efficience en les comparant avec des méthodes déductives portant sur les mêmes objets de savoir.

Par ailleurs, une importante revue quantitative d’écrits de recherche (Norris et Ortega, 2000) s’est intéressée à l’efficacité des méthodes pédagogiques en langue seconde. Les auteurs ont constaté six angles d’analyse différents : la présence ou non d’enseignement formel de l’écriture (1), l’impact de l’enseignement du métalangage (2), la contextualisation ou non des apprentissages grammaticaux (3), les effets de la rétroaction négative (4), les effets de l’enseignement selon les avancées en psycholinguistique (5) et les effets comparés des pratiques de compréhension et de production (6). En fait, sur les 77 études recensées (publiées entre 1980 et 1998), seules trois (Herron et Tomassello, 1992 ; Robinson, 1996 ; Shaffer, 1989) comparent l’efficience de méthodes inductives et déductives, et ce, uniquement pour l’enseignement d’une notion grammaticale et non pour les autres aspects du développement de la compétence scripturale. Or, aucune des trois études n’arrive à la même conclusion.

En effet, Herron et Tomasello (1992) concluent à un avantage des méthodes inductives ; Robinson (1996), à un avantage des méthodes déductives, alors que Shaffer (1989) conclut qu’on ne peut prétendre à une différence significative entre l’efficience des deux méthodes. Ces conclusions différentes s’expliqueraient-elles par les cadres théoriques variables d’une étude à l’autre ? Herron et Tomassello (1992) utilisent, pour leur part, une définition des méthodes inductives qui rappelle la démarche active de découverte (Chartrand, 1995), alors que Robinson (1996) et Shaffer (1989) comparent une méthode déductive avec une méthode inductive où le contenu grammatical n’est jamais explicité. Nous tiendrons compte de cet aspect lorsque nous établirons une définition des méthodes inductive et déductive.

En outre, ces études concernent exclusivement des contenus grammaticaux, alors que l’approche par compétences (ministère de l’Éducation, des Loisirs et du Sport, 2004) s’intéresse à la mobilisation de ces connaissances dans une perspective de compétence scripturale que nous définissons, à l’instar du groupe Description internationale des enseignements et des performances en matière d’écrits (1995), comme l’adéquation des connaissances, des savoir-faire et des attitudes nécessaires pour produire une communication écrite. L’acquisition des savoirs grammaticaux, devenant connaissances sous l’angle du scripteur, est donc une ressource à la disposition de ce dernier. Par contre, il faut reconnaître que l’acquisition de ces savoirs n’implique pas nécessairement une amélioration de la compétence scripturale, étant donné qu’il faut encore que le scripteur soit capable de les mobiliser en situation d’écriture. D’un autre côté, l’acquisition du savoir est préalable et donc indispensable à son éventuelle mobilisation lors d’une situation de compétence.

En ce qui nous concerne, nous tenterons de clarifier le champ de recherche de la didactique de la grammaire, à la lumière d’une revue actualisée des articles scientifiques. Nous chercherons, d’une part, à définir les méthodes déductives et inductives, telles qu’opérationnalisées en recherche, et d’autre part, à comparer les effets sur l’acquisition des savoirs des méthodes pédagogiques inductives et déductives.

3. Méthodologie

Afin d’atteindre nos objectifs, nous avons puisé dans les écrits de recherche scientifique les études comparatives traitant de l’enseignement de savoirs grammaticaux. Nous présenterons nos choix de textes, notre instrumentation et notre méthode d’analyse des données.

4.1 Choix des textes

Nous avons parcouru les écrits de recherche scientifique concernant l’efficience des interventions pédagogiques en enseignement de l’écriture et avons procédé à une triple recherche bibliographique. Nous avons en premier lieu commencé par une recherche dans les banques de données informatisées. En deuxième lieu, compte tenu de la présence non exhaustive des articles en langue française dans les banques de données, nous avons exploré manuellement les principales revues scientifiques francophones dans le domaine de la didactique du français. En troisième lieu, nous avons parcouru les principaux ouvrages de référence en didactique de l’écriture et de la grammaire.

Pour réaliser notre recherche informatisée, nous avons utilisé les banques de données suivantes : Academic search complete, DAF, ERIC, FRANCIS, Education research complete, ERUDIT, Proquest, PsycINFO et Repère. Nos mots-clés – language,writing,grammar, teaching methods, pedagogical approaches, inductive, deductive, comparative, efficiency, pragmatism − ont été traduits en français, pour les banques de données francophones, par langue, écriture, grammaire, méthodes d’enseignement, approches pédagogiques, inductif, déductif, comparatif, efficacité, efficience, pragmatisme. Pendant la recension, nous avons remarqué qu’en didactique des langues secondes, les termes instructed et rule search étaient parfois utilisés en lieu et place de deductive et inductive. Nous les avons donc ajoutés à nos mots-clés, mais n’avons pas trouvé d’équivalents sémantiques en français, autres que déductif et inductif. Notre recherche a été effectuée sur des textes datant de 1995 à aujourd’hui. À la suite de notre consultation des bibliographies des articles recensés, nous avons cru bon d’ajouter trois articles antérieurs à cette date, considérant ces articles comme fondateurs en ce qui concerne les études comparatives de méthodes inductives et déductives. Quant aux articles des revues scientifiques francophones en didactique du français, ils ont été recensés à partir de leurs index respectifs, de 1995 à aujourd’hui. Les revues scientifiques (Études de linguistique appliquée, Pratiques, Recherches, Repères, Enjeux) et professionnelles (Québec Français, Le français aujourd’hui, Le français dans le monde) proviennent du Québec, de la France, de la Belgique et de la Suisse.

À notre connaissance, jamais aucune recherche comparative concernant les méthodes inductives et déductives en enseignement de la grammaire en français langue première n’a été menée. Cela dit, le champ de l’enseignement des langues secondes a produit un certain nombre d’articles traitant de la question. En effet, la recension que nous avons produite met en évidence 13 études en didactique des langues, qui portent sur la comparaison de méthodes déductives et inductives, pour mesurer l’incidence de chacune quant à l’apprentissage de notions et concepts syntaxiques et grammaticaux. Aucun autre aspect de l’écriture n’a été mesuré dans ces études, cela étant probablement dû aux contextes quasi-expérimentaux qui impliquent une rigidité du devis et une mesure des connaissances, difficiles à appliquer avec l’enseignement du résumé ou du schéma narratif, par exemple. Nos conclusions ne concerneront donc pas le développement de la compétence scripturale, mais bien seulement un de ses aspects (Reuter, 1996), celui de l’acquisition de savoirs grammaticaux qui pourront éventuellement être sollicités en contexte d’écriture. Tous les auteurs ont fait appel à un dispositif quantitatif ou mixte.

Nous n’avons pas considéré les études comparatives s’intéressant à la question de l’enseignement explicite ou implicite de la grammaire (Focus on Form, Focus on Forms), cette question ayant déjà été traitée par d’autres (Graham et Perin, 2007 ; Spada et Tomita, 2010), bien que nous réinvestissions la question de l’enseignement explicite et implicite dans notre cadre de référence sur les méthodes inductive et déductive.

4.2 Instrumentation

Pour répondre à nos objectifs de recherche, nous avons élaboré une grille d’analyse thématique, suivant la démarche de thématisation séquenciée de Paillé et Mucchielli (2012). Cette dernière procède d’une logique hypothético-déductive où nous avons tiré au hasard un échantillon de notre corpus de textes afin d’établir une liste de thèmes et de variables à prendre en considération pour l’analyse. Pour chacune des 13 études, nous avons, dans un fichier Excel, rempli différentes rubriques d’une matrice à groupements conceptuels (Huberman et Miles, 1991).

4.3 Méthode d’analyse retenue

Une fois notre grille d’analyse remplie, nous en avons sélectionné les rubriques pertinentespour chacun de nos objectifs de recherche : définition de l’approche inductive, définition de l’approche déductive, groupes, groupe contrôle, instruments de mesure, traitement des données, langue d’origine, langue apprise, population, échantillon, résultats, interprétation. Ensuite, nous avons synthétisé les éléments qui nous permettaient de répondre à ces objectifs : définitions des approches, méthodologie, langues, résultats. C’est ce que nous présenterons dans les sections suivantes.

5. Résultats

La dichotomie épistémologique ne date pas d’hier. Dès l’Antiquité, Aristote, en se dissociant de Platon, a provoqué cette distinction épistémologique qui perdure depuis. En effet, Platon défend la supériorité du monde des Idées sur celui des Sens et privilégie une construction de la vérité par l’observation du monde. Aristote, quant à lui, dans une analyse rhétorique, affirme que le syllogisme (dialectique ou apodictique) part de prémisses, dans le premier cas probables, dans le second irréfutables (Bodéüs, 2002). Il utilise l’argumentation pour arriver à l’explication des réalités observables en nous mettant en garde contre nos sens.

Évidemment, il faut pardonner le raccourci, Platon et Aristote n’étant cités que pour illustrer l’ancienneté du débat, de même que l’influence directe de ces penseurs sur les philosophes et chercheurs subséquents. Comme le mentionne Decoo (1996), il faut être prudent quant à l’amalgame trop souvent fait entre l’utilisation des termes inductif et déductif pour qualifier les méthodes du discours philosophique, l’épistémologie scientifique ou les méthodes pédagogiques. En d’autres mots, bien que les méthodes pédagogiques découlent d’une épistémologie, qui elle-même est influencée par la philosophie, elles s’en distinguent par leurs finalités (l’apprentissage).

C’est pourquoi nous utilisons comme cadre de référence les méthodes inductives et déductives, telles que définies et opérationnalisées par des chercheurs en didactique des langues, et ainsi évitons toute ambiguïté avec l’usage philosophique ou épistémologique de la terminologie.

Dans un premier temps, nous utilisons les treize articles de cette recension pour définir les termes de méthodes déductives et inductives. Dans un deuxième temps, les mêmes articles servent à notre analyse de l’efficience des méthodes.

5.1 Analyse des définitions des méthodes inductives et déductives des études recensées

Mohammed et Jaber (2008) rappellent qu’un certain nombre de critères peuvent entrer en ligne de compte pour distinguer les deux types, comme nous le verrons un peu plus loin. Ces critères influencent les modalités qui en découlent. En effet, une approche peut se traduire dans la salle de classe en modalités − ou pratiques − différentes.

En général, le terme déduction concerne les méthodes partant du général pour aller vers le particulier (de la règle aux exemples), alors que le terme induction concerne les méthodes partant du particulier pour aller vers le général (des exemples à la règle).

Nous avons choisi le cadre conceptuel de Decoo (1996), dont l’analyse des définitions des méthodes dans les études comparatives en didactique de l’écrit montre que les termes induction et déduction renvoient à des réalités différentes selon les études, ce qui rend la mise en relation des conclusions de celles-ci difficile.

Tableau 1

Les méthodes pédagogiques inductives et déductives selon leurs modalités (adaptation de Decoo, 1996)

Les méthodes pédagogiques inductives et déductives selon leurs modalités (adaptation de Decoo, 1996)

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On remarque que l’approche déductive se traduit en un seul type de modalité (modalité A). Dans les études recensées, la méthode déductive est toujours définie comme une séquence où l’enseignant, soit oralement, soit par écrit, soit par le biais d’une ressource informatisée, explicite lors d’une première étape le contenu d’apprentissage. Certains dispositifs méthodologiques permettent que les élèves posent des questions lors de l’explication. Dans toutes les études, les élèves travaillent ensuite d’une manière individuelle ou en équipe, en réutilisant la notion enseignée lors de pratiques décontextualisées. Le peu de variance dans l’opérationnalisation des méthodes déductives nous amène à toutes les considérer comme une seule modalité de méthodes.

À l’opposé, la multiplicité des méthodes est plus évidente pour les méthodes inductives, définies − et surtout opérationnalisées − par les auteurs selon quatre modalités (B, C, D et E, du tableau 1).

Avec la modalité B, appelée approche inductive consciente par découverte guidée, que Lenoir et ses collaborateurs (2002) appellent la pédagogie du dévoilement, les élèves coconstruisent une règle avec l’enseignant. Par une série de questions dirigées par ce dernier, les élèves découvrent la règle illustrée par un certain nombre d’exemples. S’il est tentant de faire un rapprochement entre épistémologie constructiviste et méthodes inductives, d’une part, et entre épistémologie béhavioriste et méthodes déductives, d’autre part, il faut ici nuancer l’analyse en mentionnant que cette modalité, bien que faisant appel à des méthodes inductives, est centrée sur l’enseignant qui contrôle l’orientation des apprentissages de savoirs considérés comme immuables. C’est cette modalité qui a été privilégiée dans 4 des 13 études recensées (Haight, Herron et Cole, 2007 ; Rosa et O’Neill, 1999 ; Vogel, Herron, Cole et York, 2011).

Dans la modalité C, appelée approche inductive suivie d’une explication résumée explicite, utilisée par Takimoto (2008), Kim (2007), Herron et Tomasello (1992), et Seliger (1975), les élèves sont placés face à une tâche déterminée par l’enseignant (analyse de phrases, construction d’un puzzle grammatical, analyse de textes), à partir de laquelle ils doivent extraire et construire une règle d’ensemble. Cette règle est ensuite proposée à l’enseignant, qui la confirme ou l’infirme, et qui la complète ou la résume. La différence majeure entre cette méthode et la précédente est la nature du support de guidage de la réflexion qui, avec la modalité B, s’orchestre autour d’un questionnement oral ou écrit, alors qu’avec la modalité C, cette même guidance est plus subtile. Les questionnements sont alors moins orientés et il peut émerger de la phase d’observation une orientation des réflexions qui n’est pas celle prévue par l’enseignant. La règle est aussi explicitée, cette fois après l’hypothèse.

La troisième interprétation de la méthode inductive, soit la modalité D, appelée approche inductive implicite à l’aide de matériel structuré, est utilisée par Mohammed et Jaber (2008), Erlam (2003), Rose et Ng (2001), Rosa et O’Neill (1999), Robinson (1996), Shaffer (1989) et Abraham (1985). Ceux-ci, pour définir la méthode inductive, utilisent également la notion d’enseignement explicite et implicite. Pour ces auteurs, une véritable méthode inductive ne peut pas impliquer un retour sur la règle de la part de l’enseignant. Selon cette définition, seules les modalités D et E seraient alors considérées comme inductives, alors synonymes d’enseignement implicite. Ces modalités impliquent une vision plus subconsciente de l’induction dont font preuve les élèves. Au contact d’un corpus (de phrases ou de textes) construit pour traiter de la notion à l’étude, l’élève assimile la règle par une série d’exemples et de contre-exemples. Il peut parfois être invité à construire cette règle (qui deviendrait, alors, explicite). En aucun cas dans le processus, la règle n’est confirmée ou infirmée par l’enseignant.

La dernière modalité (modalité E), selon Decoo (1996), consiste en l’induction implicite provoquée par le contact de corpus de textes qui ne sont pas choisis en fonction d’un concept scriptural à acquérir. Cette modalité n’a pas été traitée dans les études recensées, probablement à cause de la difficulté à l’opérationnaliser. De toute façon, il semble qu’un consensus soit apparu depuis, en enseignement des langues secondes, quant à la pertinence d’enseigner explicitement l’écriture (Andrews, R., Torgerson, C., Beverton, S., Freeman, A., Locke, T., Low, G., Robinson, A. et Zhu, D. 2006 ; Ellis, 2006), bien que l’on reconnaisse la valeur ajoutée des apprentissages implicites (Perruchet et Pacton, 2004). On pourrait, par contre, considérer cette modalité pour l’enseignement des structures de textes, par exemple, au contact de ceux d’autres auteurs, en visant un transfert des connaissances par modélisation.

Finalement, il nous semble important de souligner un autre facteur, mentionné par Mohammed et Jaber (2008) et Shaffer (1989), qui est à considérer pour la comparaison des interventions inductives et déductives : le temps. En effet, pour ces auteurs, les méthodes déductives demandent moins de temps que les méthodes inductives. Ce facteur est également mentionné par les auteurs s’intéressant aux méthodes inductives en enseignement des langues premières (Chartrand, 1995 ; Nadeau et Fisher, 2006 ; Paret, 2000). Dans les études ici mentionnées, les devis des études comparatives recensées impliquent une durée semblable des périodes d’apprentissage des méthodes déductives et inductives. Ces comparaisons en sont donc d’efficience, étant donné que les modalités comparées impliquent des ressources semblables, du moins en ce qui concerne le temps. Les résultats auraient certainement été différents si l’approche inductive avait été menée sur une plus longue période.

Dans le tableau 2, nous listons les 13 études faisant appel à la comparaison déductive-inductive, en mentionnant pour chacune la modalité inductive privilégiée. Cela permet de mette en lumière l’absence d’homogénéité des comparaisons et, par conséquent, la prudence dont il faut faire preuve lors de l’analyse de ces résultats : la méthode déductive n’est pas comparée à la méthode inductive, mais à des méthodes inductives variées.

Pour chacun des articles, nous avons également mentionné, au tableau 2, les conclusions des chercheurs quant à l’efficience comparée des deux méthodes choisies. Dans la section suivante, nous analyserons en détail cette comparaison d’efficience.

Tableau 2

Définitions des méthodes pédagogiques comparées et conclusions des comparaisons

Définitions des méthodes pédagogiques comparées et conclusions des comparaisons

A – réelle déduction

B – Approche inductive consciente par découverte guidée

C – Approche inductive suivie d’une explication résumée explicite

D – Approche inductive implicite à l’aide de matériel structuré

E – Approche inductive implicite sans l’aide de matériel structuré

Id : inductif

Dd : déductif

= : aucun avantage significatif

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5.2 L’efficience des méthodes inductives et déductives

Nous avons ciblé les études comparatives afin de permettre de mesurer et de comparer l’efficience. Évidemment, l’apprentissage est un objet complexe, et le niveau de rétention ne peut se limiter à un seul élément de mesure. Nous analyserons donc également les autres aspects des études pris en considération par leurs auteurs : les objets d’enseignement, les caractéristiques des apprenants et les choix méthodologiques.

5.2.1 Les constats bruts des recherches comparatives des méthodes déductives et inductives

En observant les 13 études, nous constatons des résultats distincts : cinq études (Erlam, 2003 ; Mohammed et Jaber, 2008 ; Robinson, 1996 ; Rose et Ng, 2001 ; Seliger, 1975) accordent un avantage aux méthodes déductives ; quatre études (Haight et al., 2007 ; Herron et Tomasello, 1992 ; Kim, 2007 ; Vogel et al., 2011), un avantage aux méthodes inductives ; enfin, quatre études (Abraham, 1985 ; Rosa et O’Neill, 1999 ; Shaffer, 1989 ; Takimoto, 2008) ne peuvent départager les efficiences.

Par contre, on peut voir que les modalités de la méthode inductive ont un impact direct sur les conclusions de l’étude. En effet, toutes les études dont les modalités de la méthode inductive sont de catégories B ou C, c’est-à-dire qu’elles prévoient, dans l’intervention, une participation explicite de l’enseignant, montrent une meilleure efficience des méthodes inductives. Inversement, les études comparant la modalité D, implicite, mettent presque toujours en évidence un avantage aux méthodes déductives, ce qui confirme les conclusions de Spada et Tomita (2010).

Nous pourrions donc conclure, après analyse des 13 études, à une efficience plus marquée pour les modalités inductives-explicites B et C, suivies de la modalité déductive-explicite A, pour terminer avec les modalités inductives-implicites (modalité D). Aussi, les quatre études après vérification de leurs résultats à long terme − 7 à 14 semaines − présentent une meilleure efficience des méthodes inductives.

5.2.2 Autres variables à considérer pour mesurer l’efficience

Il faut reconnaître que le regroupement d’écrits recensés est plutôt hétérogène et que plusieurs autres aspects que les modalités de la méthode inductive entrent en ligne de compte et pourraient influencer nos conclusions tirées, comme l’illustre le tableau 3.

Tableau 3

Les caractéristiques des études recensées

Les caractéristiques des études recensées

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En effet, on doit considérer plusieurs éléments, qui peuvent être regroupés en trois catégories : 1) les objets d’enseignement (langue apprise, objet de savoir) ; 2) les caractéristiques des apprenants (niveau scolaire, langue première), et 3) les choix méthodologiques lors des études (outils d’évaluation, durée de l’intervention, nombre de sujets).

5.2.2.1 Objet d’enseignement

Une première constante que nous avons déjà mentionnée concernant l’objet d’enseignement relève du fait que seuls des contenus grammaticaux et syntaxiques sont considérés pour comparer les méthodes inductives et déductives. Les autres composantes de la compétence scripturale ne sont jamais utilisées lors de ces comparaisons. L’autre constante que l’on peut observer est que toutes ces interventions éducatives concernent l’enseignement d’une langue seconde. Au-delà du problème de taxonomie dichotomique que nous avons préalablement relevé, la transférabilité des conclusions concernant l’enseignement des langues secondes à l’enseignement des langues premières n’est évidemment pas automatique. En effet, le processus d’apprentissage axé sur un référentiel langue première n’est pas possible en enseignement de cette langue première. Aussi, les objectifs et la motivation sont souvent différents : l’apprentissage des langues secondes est autant, sinon plus souvent, motivé par la communication orale que par la communication écrite. Cela explique que les objets d’enseignement choisis concernent surtout des aspects syntaxiques, fondamentaux à l’oral, plutôt que des aspects morphologiques, fréquents en français (Jaffré, 2004) et concernant davantage l’écrit.

Finalement, l’apprentissage de toutes les langues n’implique pas nécessairement les mêmes difficultés. Or, 5 études sur les 13 concernent l’apprentissage du français, les autres étant centrées sur l’enseignement de l’anglais et de l’espagnol. Si on ne regarde que les conclusions des études concernant l’apprentissage du français, les résultats sont aussi contradictoires, trois montrant l’efficience supérieure des méthodes inductives (Haight et al., 2007 ; Herron et Tomassello, 1992 ; Vogel et al., 2011), une, celle des méthodes déductives (Erlam, 2003) et une ne démontrant pas de différences significatives (Shaffer, 1989).

5.2.2.2 Caractéristiques des apprenants

Lorsque les langues apprises varient (anglais, français, espagnol), de même que la langue d’origine des apprenants (anglais, coréen, arabe, cantonais, etc.), on conçoit que la proximité linguistique de la langue première à la langue apprise peut expliquer les divergences de résultats des études. Par ailleurs, plusieurs études ont été menées auprès d’étudiants universitaires (Abraham, 1985 ; Herron et Tomassello, 1992 ; Kim, 2007 ; Rosa et O’Neill, 1999 ; Rose et Ng, 2001 ; Mohammed et Jaber, 2008 ; Seliger, 1975 ; Takimoto, 2008 ; Vogel et al., 2011), mais peu auprès d’une clientèle de niveau secondaire (Erlam, 2003 ; Haight et al., 2007 ; Shaffer, 1989). Les caractéristiques d’un apprenant, que ce soit sa langue, son âge ou son degré scolaire, peuvent aussi jouer sur l’efficience des méthodes.

Abraham (1985) et Rivers (1975 : cités dans Mohammed et Jaber, 2008), considèrent que les méthodes déductives sont à privilégier auprès des populations plus âgées, tandis que les méthodes inductives sont à privilégier pour les populations plus jeunes, ou moins avancées. Cependant, Mohammed et Jaber (2008) leur reprochent de ne pas avoir mentionné l’âge charnière entre les deux populations. Mohamed (2004) a comparé les perceptions qu’avait une population d’apprenants universitaires des méthodes inductives et déductives, quant à l’enseignement de notions grammaticales, et en a conclu que les étudiants n’avaient pas de préférence significative quant à la méthode préconisée par le professeur. Haight et al. (2007) ont, quant à eux, noté que dans leur expérimentation, une majorité d’étudiants avaient mentionné préférer les méthodes déductives pour l’enseignement des notions grammaticales. Par contre, l’étude ne montre pas de relations entre la perception des méthodes pédagogiques et l’efficacité de ces méthodes sur l’apprentissage des notions grammaticales. Vogel et al. (2011) concluent que les étudiants préférant l’explication préalable des règles (et donc les méthodes déductives) réussissent mieux, paradoxalement, à l’aide des méthodes inductives. La perception de l’apprenant peut donc venir influencer l’efficience des modèles d’intervention privilégiés, mais sa préférence ne correspond pas à la méthode la plus efficiente.

5.2.2.3 L’effet des choix méthodologiques

Le choix des dispositifs d’évaluation mis en place par les différents chercheurs peut aussi avoir un lien avec les conclusions des différentes études.

En premier lieu, les instruments de mesure choisis, pour la plupart des questionnaires à choix multiples, des exercices troués ou des transformations de phrases, ne vérifient pas la sollicitation des savoirs en situation de compétence scripturale.

Tableau 4

Coefficients d’effet des pratiques efficientes de développement de la compétence scripturale

Coefficients d’effet des pratiques efficientes de développement de la compétence scripturale

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En second lieu, les moments de l’évaluation entrent aussi en ligne de compte. La plupart des études vérifient l’apprentissage tout de suite après la leçon. Seulement quatre (Haight et al., 2007 ; Herron et Tomassello, 1992 ; Kim, 2007 ; Vogel et al., 2011) s’intéressent à la rétention à long terme (entre 7 et 14 semaines plus tard).

En troisième lieu, le nombre restreint de participants à ces études (n = 26 à 93) est une autre limite à considérer pour la généralisation des résultats.

6. Discussion

Classer les interventions en didactique de la grammaire d’une manière dichotomique (déductive/inductive) est une simplification dont nous sommes conscients. mais qui est présente dans les milieux scolaires, entre autres parce que cette vision dichotomique se trouve dans les programmes officiels définissant, depuis le programme-cadre (1969), leur prescription de l’enseignement pour remédier à un avant différent et inefficace (Chartrand, 2011).

D’autres dichotomies pourraient être mises de l’avant. Chall (2000) distingue deux grands courants de pensée : les méthodes centrées sur l’enseignant (teacher-centered approaches) et celles centrées sur l’élève (student-centered approaches). D’un côté, toujours selon Chall (2000), les méthodes centrées sur l’enseignant sont associées aux méthodes béhavioristes, au modèle traditionnel, à l’enseignement explicite et aux méthodes déductives. Au contraire, les méthodes centrées sur l’élève sont associées aux méthodes constructivistes ou socioconstructivistes, aux pédagogies nouvelles, à l’enseignement implicite et aux méthodes inductives. Elles mettent l’accent sur le processus d’apprentissage et sur la motivation, plutôt que sur le contenu, favorisent l’éclatement du carcan des disciplines et évaluent selon la progression de l’élève qui, d’ailleurs, participe à l’appréciation de son travail.

Les deux portraits peuvent sembler caricaturaux et, pourtant, des raccourcis sont parfois empruntés et associent systématiquement les aspects de l’un ou l’autre des portraits. Associer les méthodes inductives au socioconstructivisme et les méthodes déductives au béhaviorisme est un de ces raccourcis, alors que, comme l’illustre la modalité B des méthodes inductives (dévoilement), celles-ci peuvent puiser leurs fondements épistémologiques dans le béhaviorisme et, de surcroît, faire appel à un enseignement explicite. Inversement, un modèle traditionnel d’enseignement peut s’intéresser au processus d’apprentissage, à la motivation, etc. En d’autres mots, l’utilisation des appellations méthodes inductives et déductives ne correspond pas à toute la famille paradigmatique illustrée par Chall (2000). De plus, les concepts de méthodes déductives et inductives ne font appel qu’à un élément principal : l’ordre de présentation des règles (ou construits) par rapport au travail réflexif de l’élève, pourvu qu’on puisse présumer que l’organisation des étapes d’une séquence détermine le moment où l’élève fait ce travail réflexif.

Par conséquent, du moins pour l’acquisition des savoirs grammaticaux et syntaxiques, il semble que la distinction inductive/déductive soit peu significative et que d’autres aspects, comme l’enseignement implicite-explicite, soient en fait plus déterminants. C’est d’ailleurs une des raisons pour lesquelles les appellations en recherche semblent évoluer vers des paradigmes plus complexes, incluant à la fois des dimensions d’enseignement et d’apprentissage (form-focused instruction, code-focused instruction, acquisition of implicit knowledge, rule internalization, conscious hypothesis formation, cognitive processing, focused input processing). Il serait également utile de pouvoir davantage tenir compte de l’objet de savoir enseigné, pour pouvoir distinguer les effets des méthodes, en vérifiant l’acquisition de savoirs reliés aux stratégies d’écriture, aux structures de texte ou à la grammaire textuelle, par exemple, plutôt qu’uniquement aux savoirs orthographiques et syntaxiques. Enfin, afin de compléter le triangle éducatif, il faudrait aussi tenir compte des processus cognitifs individuels des élèves, qui réagissent chacun différemment à une méthode, qu’elle soit inductive ou déductive.

7. Conclusion

L’efficience des méthodes inductives et déductives est difficile à démontrer ; le débat qui perdure n’est pas sur le point d’être réglé, et on doit reconnaître les limites de cette dichotomie comme modèle d’analyse. Une méthode inductive part de l’observation d’un corpus pour se rendre à la règle, alors qu’une méthode déductive part de la règle pour se rendre au corpus. La multiplicité des définitions et des modes d’opérationnalisation des méthodes déductives et inductives, de même que la prise en considération d’enjeux didactiques, épistémologiques, pédagogiques et psychologiques, rendent toutefois impossible toute généralisation d’efficience globale, à la suite de la méta-analyse de ces études. À cela s’ajoutent les autres aspects de l’intervention pédagogique (type d’élèves, langue apprise, objet de savoir, etc.) qui peuvent entrer en ligne de compte lorsqu’on mesure l’efficience des méthodes.

Nous avons fait appel aux grandes familles paradigmatiques de Chall (2000) pour montrer que les méthodes déductives et inductives sont associées à des épistémologies, des pratiques d’enseignement, des théories de l’apprentissage. Or, si ces parentés ne sont pas discutables, de par leurs caractéristiques inhérentes et leurs évolutions historiques, nous ne pouvons faire d’adéquations systématiques. De plus, des raccourcis sont parfois utilisés pour justifier la valeur d’une méthode. Par exemple, pour justifier l’utilisation d’une méthode inductive, on se réclamera d’une approche rendant l’élève plus actif dans ses apprentissages, tout en mentionnant l’apport motivationnel d’une approche impliquant davantage l’élève. Or, le lien entre l’activité cognitive et les méthodes inductives n’est qu’un souhait, un élève pouvant très bien éviter la tâche et inscrire des observations qui n’ont pas demandé de véritables efforts cognitifs, sans parler du travail entre pairs où un membre de l’équipe peut avoir une participation limitée à la démarche.

Les mêmes raccourcis argumentatifs existent chez certains défenseurs des méthodes déductives qui les privilégient, considérant qu’avec elles, l’enseignant est plus au fait de vérifier constamment le raisonnement de l’élève. Or, cette capacité à vérifier l’activité cognitive serait envisageable en enseignement individuel, mais s’avère difficile pour une classe, où certains élèves écoutent et sont actifs cognitivement, alors que d’autres peuvent avoir l’esprit ailleurs. Aussi, en intervenant à chaque étape du processus, afin de rendre l’enseignement plus efficient en évitant tout écueil, on ne peut s’assurer de la capacité de l’élève à transférer son raisonnement à d’autres contextes. Enfin, il est à rappeler que les savoirs grammaticaux et syntaxiques n’ont d’intérêt, dans une approche par compétences, que lorsqu’ils sont au service de l’oral, de la lecture ou de l’écriture.

Il est à souhaiter que des chercheurs, en particulier en enseignement du français langue première, s’intéressent à la comparaison des méthodes déductives et inductives, tout en spécifiant les définitions choisies, qui ont des incidences quant à leur opérationnalisation et aux conclusions qui peuvent en être tirées. Nous espérons que cette comparaison pourra se faire de façon nuancée, en tenant compte de la prémisse exprimée par Parisi et Grosmann (2009), voulant que nous évitions le débat caricatural entre tenants des deux méthodes didactiques. Les enseignants peuvent être amenés, selon les éléments de contexte de l’intervention éducative (classe, élève, matériel, objet de savoir, etc.) à créer une situation-problème, à susciter un questionnement, à faire acquérir des automatismes, ce qui implique parfois une méthode pédagogique inductive, parfois une méthode déductive.

Le débat entre les partisans des méthodes déductives et inductives est donc plus théorique que pratique, une méthode n’étant certainement pas, de par sa nature, supérieure à l’autre. Cela ne devrait, par contre, pas décourager la recherche dans le domaine. En effet il reste encore beaucoup à découvrir quant aux effets comparés d’une méthode et de l’autre, en particulier en didactique de la grammaire, surtout si on s’intéresse à la mobilisation des savoirs grammaticaux en situation de compétence. Sans tomber dans le relativisme absolu, il faut s’assurer de prendre en considération les différents éléments de contexte de l’intervention pédagogique qui entrent en ligne de compte, lors d’une évaluation de l’efficience d’une méthode pédagogique. Il est tout aussi nécessaire d’éviter les rapprochements de concepts qui tiennent plus, pour citer de nouveau Aristote, du syllogisme dialectique que scientifique.