Corps de l’article

Si la littérature scientifique sur la problématique des technologies de l’information et de la communication (TIC) comme vecteur de développement socio-économique en Afrique (Gabas, 2005 ; Molo Thioune, 2003 ; Ossama, 2011), et en particulier en République démocratique du Congo (Mova Sakanyi, 2010), abonde de plus en plus, rares sont les écrits qui se sont consacrés à l’émergence du gouvernement électronique comme levier de modernisation de l’appareil gouvernemental. Aussi cet article, tout en analysant le rôle des TIC qui constituent « un outil puissant de transformation de l’État » (Boudreau, 2011, p. 339), se propose-t-il d’analyser les innovations qu’elles apportent dans la gestion et la conduite des affaires publiques en République démocratique du Congo, les problèmes engendrés par la publication numérique des résultats des examens d’État, les défis à surmonter ainsi que les stratégies à mettre en oeuvre pour que les TIC deviennent un instrument efficace au service de l’administration publique congolaise.

Pour mener à bien cette analyse, nous l’avons subdivisée en cinq parties. Ainsi, nous traiterons successivement : du gouvernement électronique (précision terminologique, objectifs et mise en place), de l’organisation des enseignements en République démocratique du Congo, de l’administration publique congolaise face aux nouvelles technologies, de la publication des examens d’État par voie électronique (innovations et défis) et du gouvernement électronique au Congo.

Le gouvernement électronique : précision terminologique, objectifs et mise en place

Depuis la fin des années 1990, les TIC sont de plus en plus utilisées par les administrations publiques, particulièrement dans les pays de l’OCDE. C’est ce que l’on désigne par l’expression anglaise « e-government », traduite en français soit par « administration électronique » soit par « gouvernement électronique », que nous utiliserons dans le cadre de cet article.

Précision terminologique et objectifs

Selon Boudreau (2011, p. 340) : « Par gouvernement électronique, nous entendons l’utilisation des nouvelles technologies de l’information par des organisations publiques afin de les soutenir dans leur fonctionnement interne ainsi que dans leurs relations avec diverses clientèles et avec d’autres organisations. » En ce qui concerne la prestation électronique des services publics, Internet constitue sans aucun doute le mode de communication, ou le support, privilégié entre les administrations publiques et leurs usagers.

Le gouvernement électronique suppose, dans un premier temps, de rendre l’information publique accessible sur Internet, par exemple les lois, des données sur la santé, l’éducation ou l’économie. Dans un deuxième temps, il vise à dématérialiser les procédures publiques en permettant aux usagers de les effectuer sur Internet (les téléprocédures) (Ossama, 2001, p. 51). Les usagers pourront de ce fait remplir des formulaires en ligne, faire leur déclaration de revenus, obtenir un registre de commerce ou même demander une aide sociale à l’État. Les TIC constituent donc un outil efficace pour mettre en oeuvre une administration de meilleure qualité pour les citoyens usagers, à même de satisfaire aussi bien leurs besoins (explicites et implicites) que leurs attentes (Roux, 2010, p. 21). Abondant dans le même sens, Boudreau estime que « l’utilisation des TIC par l’État […] permet d’améliorer l’efficience des processus administratifs, la qualité des services publics et l’efficacité des politiques et des programmes » (Boudreau, 2011, p. 339).

Pour sa part, la Commission européenne estime que le gouvernement électronique n’a pas seulement pour but d’améliorer le fonctionnement interne des institutions publiques ainsi que leurs relations avec les usagers, il implique beaucoup plus que cela : « Il vise fondamentalement à transformer le processus de production par lequel les services publics sont générés et délivrés » (Benyekhlef, 2004, p. 271). Pour l’OCDE, loin d’être vu comme une question purement technique, le gouvernement électronique est considéré comme « un outil éminemment stratégique pour améliorer le service rendu aux citoyens » (Roux, 2010, p. 27).

Il ressort de ce qui précède qu’en intégrant les TIC dans leur stratégie de gestion, les organisations publiques souhaitent améliorer :

  • la communication tant interne (entre les administrations) qu’externe (avec les usagers) ;

  • l’efficacité de l’administration en termes de délais, d’accessibilité, de qualité de services ou de productivité ;

  • les processus de production des politiques et d’autres programmes publics.

La mise en place du gouvernement électronique

S’il est vrai que le gouvernement électronique offre de multiples avantages tant pour l’administration que pour les usagers, il convient néanmoins de reconnaître que sa mise en place n’est pas toujours aisée. En effet, les modalités de sa mise en oeuvre dépendent non seulement des objectifs, mais aussi, et surtout, du niveau de développement des TIC à l’échelle nationale ainsi que du degré de leur appropriation par les administrations et les usagers concernés. Ainsi, plusieurs facteurs risquent de constituer des obstacles pour l’avènement d’un gouvernement électronique. C’est le cas notamment du manque d’infrastructures adaptées (connexion Internet à haut débit, ordinateur personnel aussi bien pour les usagers que pour les administrations, permanence d’électricité), du manque de compétences informatiques (aussi bien de la part des agents de l’État que des usagers) et de barrières culturelles (un nouvel outil peut être rejeté par les utilisateurs non pas en raison de ses éventuels défauts, mais parce qu’ils ne sont pas prêts à changer).

Comme nous le verrons par la suite, dans le contexte actuel de l’administration publique congolaise, la conjugaison de ces trois facteurs explique pourquoi les TIC ont encore du mal à s’implanter et à progresser. Par conséquent, les actions et les autres initiatives entreprises dans les organisations publiques en République démocratique du Congo se limitent pour l’instant à quelques expériences timides et disparates qui ne permettent pas de conclure à l’existence d’un projet formel de gouvernement électronique. L’une de ces initiatives, qui compte parmi les plus importantes du point de vue de son incidence sur la population, est sans doute la publication des résultats des examens d’État par voie électronique (Internet et téléphone portable). Avant d’aborder les innovations ainsi que les défis de cette politique publique, il nous semble opportun de décrire succinctement l’organisation de l’enseignement et des examens d’État.

L’organisation de l’enseignement en République démocratique du Congo

Bref aperçu

À quelques exceptions près, l’organisation de l’enseignement au Congo est héritée de la Belgique, ancienne puissance coloniale. Nous nous limiterons, dans cet article, à parler de l’enseignement primaire et secondaire qui est géré par le ministère de l’Enseignement primaire, secondaire et professionnel (EPSP), du fait que l’enseignement postsecondaire relève du ministère de l’Enseignement supérieur et universitaire.

Le cycle primaire comprend six années d’études, sanctionnées par un certificat d’études primaires. Quant au cycle secondaire, bien que comptant également six années d’études, il se divise en deux parties : deux années du secondaire général (autrefois appelé Cycle d’orientation) et quatre années des Humanités. De manière concrète, à l’issue des deux années du secondaire général, chaque élève s’oriente dans un champ d’études bien déterminé appelé Section. Certaines sections sont elles-mêmes divisées en options. Parmi les sections les plus connues, nous pouvons citer :

  • les humanités pédagogiques (psychologie-pédagogie) ;

  • les humanités littéraires (avec comme options : latin-philosophie, latin-mathématiques, latin-grec) ;

  • les humanités scientifiques (avec comme options : biologie-chimie, mathématiques-physique) ;

  • les humanités commerciales (avec comme options : commercial-administratif, commercial-informatique) ;

  • les humanités techniques (qui comprennent plusieurs options dont : électricité générale, électronique générale, mécanique générale, coupe et couture, agriculture, vétérinaire, météorologie, chaudronnerie).

La fin des six années du cycle secondaire est sanctionnée par l’obtention d’un diplôme d’État, lequel ouvre la voie soit vers des études supérieures ou universitaires soit vers le marché de l’emploi. Ce diplôme est globalement l’équivalent du baccalauréat français ou du diplôme d’études secondaires dans le système québécois et il est délivré après la réussite des examens d’État.

Les examens d’État

Les examens d’État sont des épreuves qui évaluent les connaissances des élèves à la fin des six années du cycle secondaire. Dans le système de l’éducation nationale congolais, tous les candidats passent les mêmes épreuves, aux mêmes dates et dans tout le territoire national. Les sujets d’examen sont composés à l’Inspection générale de l’EPSP à Kinshasa (la capitale du pays), et les corrections des copies se font aussi exclusivement à Kinshasa.

Ces examens contiennent différentes épreuves. La première partie des épreuves a lieu généralement vers la fin du mois de mars ou au début du mois d’avril et comprend la dissertation française (l’épreuve de composition), l’épreuve de français oral et le jury pratique. La seconde et la plus importante partie des épreuves s’échelonne sur quatre jours et est généralement organisée vers la fin du mois de juin ou au début du mois de juillet. Ce sont des épreuves avec questions à choix multiples. À chacun de ces jours correspond une épreuve bien particulière, soit la culture générale, les langues, les sciences et les cours d’option.

Au fil des ans, des difficultés financières et logistiques ont nui à l’organisation de ces épreuves. C’est l’année 1993 qui a connu le plus grand retard en termes d’organisation, car les examens d’État se sont tenus au mois de décembre, soit cinq mois après la clôture officielle de l’année scolaire qui a lieu en République démocratique du Congo tous les 2 juillet.

La publication des résultats

Depuis sa première édition organisée en 1968, les résultats des examens d’État étaient publiés dans les palmarès du journal officiel de l’EPSP. Les copies du journal étaient ensuite acheminées dans tout le pays où les élèves et les parents pouvaient les consulter.

Si durant les premières années les résultats étaient publiés dans un délai raisonnable, avec le temps cet exercice est devenu un véritable défi pour les autorités de l’EPSP. Plusieurs raisons expliqueraient le retard dans la livraison des résultats, dont :

  • l’augmentation sensible du nombre des candidats : depuis 1990 en moyenne 300 000 élèves participent aux épreuves chaque année ;

  • l’état des infrastructures routières et d’autres voies de communication : dans un pays où les voies de communication sont en piteux état, la centralisation de la correction des copies à Kinshasa ne pouvait qu’aggraver le retard dans la livraison des résultats ;

  • la correction manuelle des copies : jusqu’en 2007 la correction des copies se faisait manuellement, ce qui n’était pas de nature à accélérer la publication.

La combinaison de ces facteurs a fait en sorte que les résultats étaient livrés avec un sérieux retard, souvent trois ou quatre mois après l’organisation des épreuves, et cette publication était elle-même échelonnée sur plusieurs mois à la suite d’une publication partielle et progressive en fonction des provinces et des sections. À titre illustratif, les examens d’État de l’édition 1994 se sont déroulés du 26 au 29 septembre, les premiers résultats ont été livrés le 1er janvier 1995 et les derniers le 26 avril 1995, soit sept mois après la tenue des examens.

S’il est vrai que depuis l’édition 1998 un effort considérable a été déployé par les autorités de l’EPSP pour normaliser l’année scolaire et éviter des années « élastiques », il n’en demeure pas moins que jusqu’à l’édition 2007, les résultats des examens d’État étaient toujours publiés avec un grand retard sur le calendrier scolaire.

C’est pour sortir de cette situation des plus calamiteuses que depuis l’édition 2008, les résultats des examens d’État sont publiés et consultés par voie électronique sur le site de l’EPSP ainsi que par message texte. Nous reviendrons largement sur cette publication numérique des résultats à la quatrième section de notre article. Mais avant cela, voyons d’abord la place qu’occupent les TIC dans l’administration publique congolaise de façon générale.

L’administration publique congolaise et les technologies de l’information et de la communication

Les crises multiformes qui ont secoué la République démocratique du Congo pendant plus d’une décennie ont eu des répercussions sensibles sur le fonctionnement des institutions publiques (PNUD, 2007). Dans le cadre de la reconstruction nationale post-conflit, la mise en oeuvre d’une nouvelle réforme de l’administration publique congolaise s’est révélée être une exigence, conviction partagée aussi bien par le gouvernement congolais que par les partenaires au développement, le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) et la Banque mondiale notamment.

De la réforme de l’administration

Pour matérialiser cette idée, le gouvernement congolais a sollicité le concours des partenaires au développement dans le but d’entreprendre des études pour une réforme en profondeur de l’appareil étatique, qu’il s’agisse de l’administration centrale ou des administrations provinciales et locales.

Les quatre objectifs majeurs visés par ladite réforme (PNUD, 2007) étaient notamment de :

  • mettre sur pied une administration saine, moderne et performante capable d’assurer les missions de l’État et de contribuer au développement du pays ;

  • susciter l’émergence d’un nouveau type d’agents de l’État, bien formés, efficaces et revalorisés ;

  • rendre cette administration capable d’offrir un service public de qualité ;

  • promouvoir la bonne gouvernance et l’éthique au sein des services de l’État.

Pour atteindre ces objectifs, plusieurs stratégies ont été envisagées, entre autres, l’élaboration et la mise en oeuvre d’une politique nationale des TIC afin que celles-ci servent d’outils de modernisation de l’administration, à travers l’émergence d’un gouvernement électronique.

De la mise en place d’un gouvernement électronique

Conscient du rôle important que peuvent jouer les TIC dans la mise en place d’une administration saine, moderne, performante et capable de rendre un service de qualité aux citoyens, le gouvernement congolais a organisé, en collaboration avec le Bureau régional de la Commission économique des Nations Unies pour l’Afrique de l’Est, un séminaire gouvernemental sur les TIC (Tshibambe, 2007).

Ce séminaire, qui avait pour thème « TIC, croissance, pauvreté et atteinte des Objectifs du Millénaire pour le développement », a réuni tous les ministres du gouvernement central avec pour objectif de les amener à comprendre et à intérioriser l’importance de l’utilisation des TIC dans le développement économique du pays et de les sensibiliser à l’importance de la mise en place d’un projet électronique.

Selon le ministre des Postes, des Téléphones et des Télécommunications et celui du Plan, tous deux responsables de la réalisation de ce projet, eu égard à l’état des infrastructures existantes, il faudrait une période de cinq ans pour arriver à mettre en place une nouvelle infrastructure nationale de l’information et de la communication (Tshibambe, 2007). Dans l’entretemps, il avait été suggéré à chaque ministre d’envisager et de mettre en place des initiatives ministérielles en lien avec les TIC. C’est dans ce contexte que le ministre de l’EPSP a décidé de livrer les résultats des examens d’État de l’édition 2008 par voie électronique.

Un état des lieux des technologies de l’information et de la communication dans l’administration publique congolaise

S’il est vrai que quelques applications informatiques sont opérationnelles du côté de l’administration congolaise, elles sont essentiellement liées à la bureautique, en rapport notamment avec la chaîne des dépenses, la paie des fonctionnaires, les impôts. Aucun programme national d’informatisation de l’ensemble des services de l’État n’existe (Adam et autres, 2007, p. 36).

En ce qui concerne la mise en place d’une nouvelle infrastructure nationale de l’information et de la communication préconisée en 2007 lors du séminaire ministériel, elle reste encore à ce jour, soit cinq ans après, un voeu pieux et l’avènement d’un gouvernement électronique, un rêve lointain. À titre d’exemple, sur les trente-sept ministères que compte actuellement le pays (février 2012), seuls neuf ont développé des sites Internet officiels, soit moins de 25 %. À ce chiffre s’ajoutent le site de la Présidence de la République et celui de la Primature. Malheureusement, l’accès à ce dernier site est interdit au grand public ; il faut se faire identifier avant de le consulter.

Les portails de ces quelques sites existants laissent à désirer, tant du point de vue de la présentation que du contenu. En effet, il n’est pas toujours aisé de trouver sur ces portails de l’information fiable sur les activités et les services qu’offrent les administrations ; ils se limitent le plus souvent à donner des renseignements d’ordre général sur le pays et l’agenda du ministre, quand ils ne font pas l’apologie du chef de l’État.

Un autre problème sérieux est celui de la mise à jour des quelques données disponibles sur ces sites. Mis à part les noms des lauréats des examens d’État, les dernières statistiques affichées sur le site de l’EPSP sont celles de l’année scolaire 2008-2009, alors même que ce site est, sans doute, l’un des meilleurs pour tout le gouvernement.

Selon les statistiques 2009 de l’Union internationale des télécommunications (UIT), le faible niveau de l’indice Web et de l’indice des infrastructures de télécommunications serait la cause principale du retard criant que connaît le pays en matière de développement d’une gouvernance électronique [1] par rapport aux autres pays de la région. Il disputerait d’ailleurs la dernière place au Tchad et à la République centrafricaine (UIT, 2009).

Tout compte fait, l’administration publique congolaise utilise peu ou pas les TIC pour améliorer l’offre de services publics à la fois au niveau national et interministériel. Par ailleurs, le traitement manuel des dossiers prédomine encore à l’heure actuelle avec comme conséquences (La Conscience, 2011) :

  • la lenteur dans le traitement des données et la facilité de leur falsification ;

  • la conservation toute relative des données et des archives ;

  • la difficulté de consulter des documents et la perte de temps dans le traitement des dossiers ;

  • les délais importants pour l’obtention de documents administratifs ;

  • la difficulté de transmission et de communication de l’information entre les différentes administrations et au sein même de chacune.

En somme, le pays a encore un long chemin à parcourir avant de pouvoir mettre en oeuvre les services publics dans le cadre d’un gouvernement électronique, spécialement dans ses phases interactionnelle et transactionnelle.

La publication des résultats des examens d’état par voie électronique : innovations et défis

À la surprise générale, le ministre de l’EPSP, en sa qualité de président du Comité national des examens d’État, a annoncé en juillet 2008 que la publication des résultats se ferait dorénavant par voie électronique, sur le site Internet du ministère ainsi que par message texte.

Des innovations dans la correction et la livraison des résultats

L’année 2008 a marqué un tournant décisif dans l’histoire des examens d’État en République démocratique du Congo. Alors que jusque-là les copies d’examens étaient corrigées manuellement, les autorités ministérielles ont décidé de mettre en place un nouveau système de correction, à savoir la correction informatisée. Afin d’éviter toutes collusions, les copies sont corrigées par des inspecteurs de manière « aveugle », c’est-à-dire que les copies des candidats sont codées et que, par conséquent, les correcteurs ne connaissent pas l’identité des candidats dont ils corrigent les copies par lecture numérique.

En ce qui concerne la publication des résultats, l’EPSP a signé un partenariat avec Vodacom (l’un de deux plus grands opérateurs de téléphonie mobile au pays), au terme duquel les élèves peuvent connaître leur sort avant même que les résultats intégraux ne soient accessibles sur le site du ministère [2]. Il suffit pour ce faire que l’élève saisisse, à l’aide de son téléphone portable à clavier alphanumérique, son nom, sa province, le code du centre dans lequel il a passé ses épreuves et le nom de son école, et ses résultats (en pourcentage) lui sont envoyés instantanément. Toutefois, le site Internet de l’EPSP demeure la principale voie de communication des résultats. L’adresse de ce site est communiquée à tous les candidats lors des épreuves et est rappelée constamment dans les médias à l’approche de la date de publication des résultats. C’est donc depuis cette édition de 2008 que les TIC, Internet et téléphonie mobile, sont devenues la voie obligée par laquelle l’EPSP publie les résultats des examens d’État, abandonnant ainsi la voie traditionnelle, à savoir les palmarès de l’EPSP (version imprimée).

Les avantages de la publication électronique

Des gains évidents sont à mettre à l’actif de la publication électronique des résultats. Nous pouvons citer, entre autres, la publication accélérée, la minimisation du risque de fraude et de tricherie, l’économie d’argent et la conservation des archives.

La publication accélérée des résultats (gain de temps)

Le 31 juillet 2008, les différentes villes du pays ont connu une effervescence. S’il est vrai que la publication des résultats des examens d’État a toujours suscité de l’engouement, compte tenu du caractère réputé difficile de la composition des épreuves, mais aussi et surtout de la façon théâtrale dont ces résultats étaient publiés dans les journaux à travers le pays, celle de l’édition 2008 l’a été d’une manière inhabituelle. En effet, les premiers résultats ont été livrés par voie électronique moins de trois semaines après la fin des épreuves (organisées du 7 au 10 juillet), établissant ainsi le record de rapidité depuis trente ans.

L’informatisation de la correction ainsi que la publication des résultats par voie électronique étaient la réponse appropriée pour accélérer le processus de publication et éviter les longues périodes d’attente vécues les années précédentes. Le tableau 1 permet de comparer les périodes d’attente pour la publication des résultats au cours des dernières années.

Tableau 1

Comparaison des périodes d’attente des résultats

Comparaison des périodes d’attente des résultats
Source : D’après des données recueillies sur les sites Internet de l’EPSP, de Radio Okapi et de Digital Congo

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Ce tableau montre que l’usage des TIC a sensiblement réduit le délai d’attente de publication, passant de trois mois en moyenne (éditions 2006 et 2007) à dix-neuf jours en 2008 (année d’introduction des TIC), pour se stabiliser à deux semaines pour les années suivantes.

Cette publication électronique procure un avantage certain aux candidats qui vivent loin des grands centres urbains. Grâce au message texte, ils peuvent connaître leurs résultats en même temps que ceux qui vivent dans la capitale (circulation instantanée de l’information).

Avant 2008, en raison des longues périodes d’attente, certains établissements d’enseignement universitaire admettaient les candidats en attente de leurs résultats. Ces derniers pouvaient ainsi suivre les enseignements, mais leur inscription ne devenait définitive que si leurs résultats étaient positifs. Les candidats en situation d’échec, pour leur part, étaient obligés d’arrêter les cours afin de se réinscrire dans une école secondaire pour repasser les examens, à moins de se présenter à ces épreuves comme élève autodidacte [3]. Mais il n’était pas toujours facile pour ces candidats redoublants de trouver une école qui puisse les accepter avec un retard de trois mois, voire plus. Le plus souvent, les chefs d’établissement scolaire étaient réticents à inscrire ces candidats en situation d’échec ; à la limite certains ne reprenaient que leurs propres élèves redoublants. Pour d’autres, en revanche, c’était une occasion de rançonner ces élèves, dont le seul tort était de n’avoir pas réussi les examens d’État, en leur exigeant des sommes exorbitantes à titre de frais d’inscription ou de réinscription, selon le cas. Par conséquent, certains élèves redoublants n’avaient de choix que d’attendre l’année suivante pour se réinscrire en bonne et due forme au début d’année, perdant de ce fait une année scolaire.

La publication accélérée des résultats par voie électronique a résolu ce problème, car depuis 2008 les récipiendaires sont en possession de leurs résultats à peine deux ou trois semaines après les épreuves, ce qui leur laisse amplement de temps pour se trouver soit une université (en cas de réussite) soit une école où ils peuvent s’inscrire pour se présenter de nouveau aux épreuves d’examens d’État (en cas d’échec). Ceci confirme les propos de Sauret pour qui les TIC agissent sur le facteur temps en faisant coïncider les capacités de l’administration avec les attentes des citoyens (Sauret, 2004, p. 281).

La minimisation du risque de fraude et de tricherie

« Avec le nouveau système, le risque de fraude est minimisé. Les responsables des universités […] ont maintenant la facilité de connaître tous les étudiants inscrits » (Massikini, 2008). Cette déclaration d’un inspecteur de l’EPSP atteste que le risque de fraude était, à côté de la publication tardive des résultats, un autre grand fléau avant la livraison des résultats par voie électronique.

Dans l’ancien système, il se passait bien des choses entre le centre de correction des copies et le centre d’impression qui ne sont pas logés dans le même édifice, notamment l’impression frauduleuse des palmarès offrant la possibilité d’insertion d’autres noms. Des réseaux mafieux s’étaient ainsi constitués autour de cette activité très lucrative, impliquant à la fois des inspecteurs de l’EPSP sous-rémunérés et avides de gain malhonnête, des intermédiaires véreux et des chefs d’établissement scolaire sans scrupules. Des cas de corruption, de tricherie ou de trafic des palmarès étaient ainsi dénoncés pour presque chaque édition. En outre, comme nous l’avons signalé précédemment, le simple fait que le nom d’un élève apparaisse sur un palmarès était la preuve suffisante pour qu’il soit inscrit dans un établissement d’enseignement universitaire. C’est aussi avec le même palmarès qu’il pouvait revendiquer son diplôme d’État à l’EPSP ou l’attestation de réussite tenant lieu du diplôme (dans le cas de nouveaux diplômés).

Les TIC, en supprimant les palmarès facilement manipulables, ont sensiblement réduit le risque de fraude et de tricherie. L’attestation de réussite tenant lieu du diplôme est devenue le seul document officiel avec lequel un candidat peut être admis à l’université.

L’économie d’argent

Au dire des autorités de l’EPSP, la publication des résultats par voie électronique permet d’économiser de l’argent chaque année. Mais à notre connaissance, il n’existe à ce jour aucune étude qui permet d’évaluer le véritable impact financier de cette politique publique sur le budget de l’EPSP. À ce sujet, Kalonji (2008) s’interroge : « Par besoin d’évolution ou par souci d’économiser l’argent jadis destiné à l’impression ? Personne ne le sait si ce n’est que l’initiative […] a rassuré sur le dynamisme des autorités de l’EPSP à suivre le train de l’évolution déjà en marche à défaut de le rattraper. »

La conservation des archives

Un dernier avantage, et non des moindres, qu’apporte la publication électronique des résultats est la conservation des archives. En effet, il était fréquent, dans l’ancien système, de faire plusieurs demandes à l’Inspection générale de l’EPSP sans pour autant mettre la main sur un seul exemplaire du palmarès pour une option en particulier. Or, en attendant la livraison des diplômes d’État, ce palmarès faisait office du diplôme. Comble de l’ironie, même l’Inspection générale de l’EPSP exigeait de certains élèves qui formulaient une demande pour une attestation de réussite tenant lieu du diplôme de fournir à l’Inspection un exemplaire du palmarès de son option, alors que c’est elle qui imprimait les palmarès et était censé les archiver.

Aujourd’hui, grâce à l’apport des TIC, ceux qui le désirent peuvent à tout moment consulter les archives des trois dernières éditions des résultats des examens d’État sur le site Internet de l’EPSP.

Les défis et les contraintes de la publication électronique

Si les autorités de l’EPSP ont remporté leur pari de publier les résultats moins de trois semaines après la fin des épreuves, réduisant ainsi les délais d’attente ainsi que le risque de tricherie, il faut aussi reconnaître que cette initiative a affronté des défis majeurs.

La maîtrise de la technologie

Analysant les deux premières éditions de publication des résultats par voie électronique, Kankole (2009) signale qu’elles ont connu beaucoup de ratés et d’erreurs qui ont provoqué l’indignation et la frustration aussi bien chez les candidats et leurs proches que chez les responsables d’établissements scolaires. Sur le site Internet de l’EPSP, certains candidats ont trouvé leur nom sur la liste d’une école autre que la leur et parfois même le nom d’une école se trouvait dans un autre centre [4], dans une autre province ou même sur aucune liste. Ces erreurs laissaient les internautes perplexes et semaient parfois des doutes quant à l’objectivité des résultats, et par ricochet à l’efficacité du système lui-même [5].

Par ailleurs, la situation n’a pas été facile pour les candidats qui ont choisi le canal du téléphone portable pour s’informer de leurs résultats. Certains élèves avaient reçu des messages textes de la part de l’opérateur Vodacom, partenaire de l’EPSP, confirmant leur réussite avec la note obtenue (exprimée en pourcentage), mais ils se sont rendu compte par la suite que leur nom ne figurait sur aucune liste du site Internet de l’EPSP. D’où cette conclusion de Kalonji : « Acquérir la technologie est une chose, savoir bien la gérer et l’apprivoiser en est une autre » (Kalonji, 2008).

La disparité, voire la contradiction, entre les résultats publiés sur le site de l’EPSP et ceux de Vodacom a jeté le discrédit sur les résultats de Vodacom et a suscité de nombreuses critiques sur ce partenariat [6]. Située dans son contexte, cette interrogation nous paraît très pertinente : « Les SMS sont-ils un moyen sûr de délivrer les résultats en sachant que dans certaines provinces, il n’existe aucun point d’accès au réseau [Internet] et que les candidats devront s’en contenter ? » (Kalonji, 2008).

De l’avis de nombreux observateurs, ce n’est pas l’outil qui était en cause, mais plutôt les personnes censées l’utiliser. À ce propos, Kankole (2009) note : « […] un bon outil de travail permet à l’homme de gagner en temps, en quantité et en qualité. Mais, encore faut-il que l’ouvrier soit capable de manier l’outil à sa disposition. […] Les personnes commises à cette tâche n’en sont pas à la hauteur. » C’est pour pallier ces critiques et améliorer l’offre de leur service que l’EPSP et Vodacom ont beaucoup misé sur la formation technologique aussi bien des inspecteurs commis à la correction que du personnel chargé d’enregistrer les résultats sur le site Internet.

La situation a par ailleurs beaucoup évolué depuis. Les deux dernières éditions (2010 et 2011) ont connu une nette amélioration. Des erreurs liées à la maîtrise de l’outil technologique sont de moins en moins rapportées, ce qui nous laisse croire que les failles susmentionnées, observées lors des deux premières éditions, entrent dans le cadre des douleurs de l’enfantement [7].

L’accessibilité à Internet

Dans un pays où les TIC ont encore du mal à s’implanter, il n’est pas toujours facile d’avoir accès à Internet, particulièrement en milieu rural. Mais même dans les grandes villes, tout le monde n’a pas le privilège d’accéder à Internet. En 2009, soit une année après le lancement de la publication électronique, la télédensité Internet se situait à 0,37 utilisateur pour 100 habitants, la proportion des ménages disposant d’un ordinateur était de 0,3 % et celle des ménages ayant accès à Internet de 0,2 %. Dans un tel environnement, les cybercafés se sont imposés comme de nouveaux canaux de publication des résultats (UIT, 2009).

Alors même que le site Internet de l’EPSP est connu de tous les élèves et de leurs proches, à l’annonce du début de la période de publication des résultats par le ministre, les responsables de cybercafés interdisent à tout client de consulter ce site. Ils en ont le monopole et communiquent les résultats aux seuls récipiendaires obligés de payer jusqu’à l’équivalent de 0,50 $ US chacun [8]. La période de publication devient donc un moment propice pour ces responsables de cybercafés, à l’instar des vendeurs de journaux dans l’ancien système, de faire de bonnes affaires sur le dos d’élèves qui ne demandent qu’à connaître leurs résultats.

Or l’accessibilité à Internet n’est pas uniquement une question de point de consultation, mais aussi et surtout de fourniture en électricité. Si les milieux ruraux en sont quasiment dépourvus, les milieux urbains connaissent le délestage en fourniture d’énergie électrique et autres coupures intempestives, ce qui n’est pas de nature à faciliter la consultation dans les quelques cybercafés existants.

Pendant la période de publication, il n’est pas rare de rencontrer des foules courir dans tous les sens à la recherche des quartiers où il y a du courant électrique ou d’un cybercafé alimenté par un groupe électrogène. Cet attrait fait davantage monter les enchères pour les propriétaires des cybercafés. Mais comment la population congolaise dans son ensemble perçoit-elle cette réforme ?

La perception de la population

En dépit des critiques formulées relativement aux failles observées lors des deux premières éditions, la population congolaise est globalement satisfaite de la livraison des résultats par voie électronique. Nous reproduisons dans les lignes qui suivent quelques témoignages recueillis par un journal paraissant à Kinshasa (Ndongala, 2008) :

Ce nouveau mode de publication est avantageux, bien que tout le monde n’ait pas la facilité de se connecter à l’Internet. Il faut également noter que plusieurs citoyens congolais n’ont pas encore la culture de l’Internet. Le mérite de la publication des résultats de l’Examen d’État sur un site est qu’il réduit le risque de la fraude et de la tricherie. Les résultats ne peuvent pas être falsifiés comme cela se fait quand ils sont publiés dans des revues qui peuvent être dupliquées à la cité.

un ajusteur

Cette nouvelle façon de publier les résultats de l’Exetat nous a beaucoup plu. En le faisant moins de trois semaines après la fin des épreuves, il faut reconnaître que le ministère de l’EPSP a battu un record. Il est temps que le gouvernement s’investisse dans la réhabilitation du courant électrique afin de permettre à tout le monde de pouvoir naviguer sur Internet pour chercher, sans trop de difficultés, les résultats affichés. Le manque de connexion dans la plupart de cybercafés de la ville de Kinshasa constitue aussi un handicap.

une vendeuse

Coup de chapeau pour le ministre de l’Enseignement primaire, secondaire et professionnel (EPSP). Il a fait preuve de volonté et d’efficacité. […] Il reste aux autres ministères du gouvernement central de lui emboîter le pas pour enclencher le développement du pays. Les vendeurs de journaux ne doivent pas critiquer le ministre qui veut que le pays évolue avec la nouvelle technologie de l’information en publiant les résultats de l’Examen d’État sur Internet.

un agent de sécurité

Nous louons les prouesses du ministre de l’EPSP qui a fait la différence. Cependant, le problème devrait se poser dans des villes du pays où la population n’a pas accès à l’Internet. En ce qui concerne les vendeurs des journaux qui se plaignent, ils doivent comprendre que la technologie évolue chaque jour. Ils doivent faire preuve d’imagination pour ne pas perdre.

une ménagère

Le ministre de l’EPSP a bien fait. Ce mode de publication permet aux candidats malheureux de se réinscrire et recommencer à temps. Ils ont toutes les possibilités de s’organiser et de préparer l’année scolaire prochaine. Les vendeurs des journaux doivent peaufiner d’autres stratégies. Ils peuvent tirer des photocopies des résultats publiés sur Internet et aller vendre dans des coins où il n’y a pas d’électricité. Ils ne sont pas obligés de ne vendre leurs journaux qu’à Kinshasa. Ils aideront les candidats à connaître leurs résultats sans beaucoup de tracasseries.

un enseignant

Il ressort de ces témoignages que dans leur ensemble les Congolais jugent favorablement cette initiative ministérielle, tout en reconnaissant les défis auxquels elle fait face. Cela tient au fait qu’en termes comparés, la publication numérique offre plus d’avantages que la version imprimée. En effet, les deux avantages qui sont repris par presque tous les interviewés sont ceux que nous avons relevés précédemment : la publication accélérée des résultats (gain de temps) et la minimisation du risque de fraude, de tricherie ou de corruption. C’est d’ailleurs ces gains évidents qui expliquent la pérennisation de cette initiative en dépit du fait qu’elle ait fait l’objet de nombreuses critiques et provoqué beaucoup d’indignation à ses débuts.

Vers un gouvernement électronique ?

Le manque d’enthousiasme pour les administrations de développer des programmes qui tendent à encourager l’émergence d’un gouvernement électronique se situe à deux niveaux. D’abord, et comme nous l’avons déjà souligné, c’est la conséquence de l’absence d’une infrastructure nationale de télécommunications et d’un équipement adéquat du côté de l’administration publique. Selon Trefon (2010, p. 748) : « […] la majorité des services publics en RDC sont dépourvus d’ordinateurs, de photocopieuses, de fax et de téléphones fixes ». Il est presque illusoire dans de telle conditions de mettre en oeuvre des initiatives en rapport avec le gouvernement électronique.

C’est ensuite une question de manque de volonté politique de la part des dirigeants et de résistance, ou du moins de réticence, de la part de nombreux fonctionnaires qui tirent profit de l’opacité du système ; ils n’ont donc pas intérêt à initier des actions qui les priveraient des « commissions » et d’autres formes de corruption. Faisant allusion à l’échec de différentes réformes administratives en République démocratique du Congo, Trefon (2010, p. 750) affirme en termes imagés, et non sans raison : « Ils [les politiques et les fonctionnaires] jouent le jeu en oeuvrant en faveur de la réforme tout en veillant à ne pas couper la branche sur laquelle ils sont assis. »

La publication des résultats des examens d’État par voie électronique constitue de ce fait l’une des rares initiatives d’envergure engagées dans le sens de la préparation du pays à l’avènement de la société de l’information. Ces quelques expériences, qui du reste sont timides et disparates, ne permettent pas de conclure à l’existence d’un projet formel de gouvernement électronique qui demeure à ce jour une perspective lointaine pour la République démocratique du Congo.

Certes, la mise en place d’un gouvernement électronique est un processus de longue haleine et ne peut donc pas se réaliser en un seul jour. Elle exige néanmoins des gouvernants congolais une réelle volonté afin de doter le pays d’une politique publique des TIC et d’une vraie « culture numérique » (Caron, 2011, p. 323), qui ne se limiterait pas, comme c’est le cas aujourd’hui, à l’organisation d’ateliers et autres séminaires d’experts très médiatisés, mais sans lendemain.

Cette politique nationale, à la fois globale et intégrée, devrait se concrétiser entre autres en dotant le pays d’une infrastructure nationale de l’information et des communications et l’administration publique des équipements informatiques adéquats, en électrifiant les milieux ruraux et en résolvant l’épineux problème de délestage et de coupures intempestives du courant électrique dans les centres urbains. Le déploiement d’un gouvernement électronique est subordonné à l’avènement de cette société de l’information et de son déterminant la « culture numérique ».

Par ailleurs, les initiatives jusque-là disparates devraient être envisagées dans un cadre global, car si ces différents projets ministériels ne s’appuient pas sur un cadre commun et n’intègrent pas la nécessaire interopérabilité, le paysage administratif peut se complexifier pour l’usager. D’où cette conclusion de Roux : « Une vraie administration électronique ne peut voir le jour que si l’on passe d’une administration en “silos” à une administration en “réseau” […] pour permettre une mise en relation des services administratifs décloisonnés » (Roux, 2010, p. 28).

Bien que les différentes applications du gouvernement électronique ne soient qu’un instrument dans la recherche de solutions à la problématique réelle de la réforme de l’État et du renforcement de l’efficience et des capacités de l’administration, elles peuvent se révéler un puissant outil au service d’une gouvernance évolutive, efficace, transparente et participative (OCDE, 2003, p. 165). En ce sens, les autorités congolaises devraient sérieusement considérer les TIC comme un levier de la modernisation de l’administration publique congolaise et l’un des moyens de sortir le pays de la sous-administration territoriale, chronique et pathologique, qui le caractérise depuis plusieurs années (Kombo Yetilo, 2010, p. 115-116).

Conclusion

Sur la base des observations critiques portées ci-dessus, nous pouvons soutenir que les TIC ont généré des gains évidents dans la livraison des résultats des examens d’État, notamment la publication accélérée (le gain du temps), la minimisation de la fraude et de la tricherie ainsi que la conservation des archives.

En dépit des problèmes qu’elle a générés et des défis qu’elle a affrontés, cette initiative est louable. Néanmoins, elle ne s’inscrit pas encore dans une dynamique nationale et globale tendant à doter le pays d’un gouvernement électronique. Comme l’affirme Mova Sakanyi (2010, p. 10) : « Il manque […] une synergie et une intégration nationale de ces isolats quelque peu exotiques. » Les quelques actions entreprises par les organisations publiques restent donc à ce jour disparates et ne sont pas intégrées. Les infrastructures de télécommunications, peu développées, ne sont pas non plus de nature à contribuer à l’émergence d’un vrai gouvernement électronique.

En définitive, comme l’illustre bien le cas de la publication des résultats des examens d’État par voie électronique, les TIC peuvent jouer un rôle important dans l’amélioration de l’offre des services publics en République démocratique du Congo, en termes d’accessibilité, de rapidité et d’efficacité. Bien qu’elles ne soient pas en elles-mêmes une panacée aux maux qui rongent l’administration publique congolaise, utilisées à bon escient les TIC peuvent constituer l’une des solutions à la sous-administration territoriale que connaît le pays, rendre l’administration publique congolaise capable d’offrir un service de qualité et promouvoir la transparence au sein des services de l’État.