Corps de l’article

Introduction et problématique

L’école d’aujourd’hui évolue dans un environnement où se manifestent différentes réalités auxquelles doivent faire face les futurs enseignants. Qu’ils en soient conscients ou non, les composantes de ces différentes réalités incluent en outre leur propre personnalité, leurs valeurs religieuses, morales, sociales et économiques ainsi que la diversité culturelle. Quels sont les éléments qui jouent un rôle dans l’idée que les futurs enseignants se font de l’école et dans l’attraction pour la profession? L’adéquation avec leurs croyances, leurs valeurs, et leurs expériences est à prendre en considération, de même leurs attentes face à la société et à leur formation pour devenir un bon enseignant. Pour comprendre les comportements et les attitudes des futurs enseignants face à l’école, une approche de clarification pourrait être de nature à faire émerger des éléments explicatifs. Il y a donc lieu de se questionner sur la représentation que les futurs enseignants se font d’une bonne école et des facteurs qui l’influencent. L’intérêt d’une telle démarche réside dans le fait d’une part de faire ressortir ce que vivent les étudiants-maîtres et qui est de nature à orienter leurs faits et gestes dans leur futur lieu de travail et d’autre part de mettre à profit tout cela dans l’actualisation et l’opérationnalisation de leur formation pour mieux répondre à leurs attentes de façon à consolider l’attraction pour la profession et en accroître la rétention.

La connaissance d’une telle représentation et des facteurs qui l’influencent, la conscientisation qu’ils en ont pourront donc être utiles pour cerner le réel des étudiants-maîtres à l’aide de différents éléments liés tant à l’objet (l’école) qu’au sujet (le futur enseignant). L’objet et le sujet sont intimement liés aux interactions, aux notions d’identité, d’estime de soi et aux notions de valeurs. Malgré que celles-ci soient rarement exprimées de façon explicite, elles sont pourtant omniprésentes à l’école (Jeffrey, 2005). De plus, tout individu tout comme chaque étudiant-maître a un système de valeurs qu’il a acquis et qui continue encore d’évoluer lors de son histoire de vie qu’elle soit personnelle, familiale, sociale, institutionnelle. Les futurs enseignants sont donc porteurs de différentes valeurs. Les institutions scolaires leur en apportent d’autres. Ils seront demain en position d’assurer le relais et d’être des médiateurs de ce qu’ils ont reçu à l’occasion de leur parcours de vie, de leurs apprentissages et de leur formation professionnelle. Ils exercent une responsabilité partagée avec la société à l’égard de l’élève (Deslandes, 2006; Deslandes et Bertrand, 2001). L’enseignement dans le cadre du programme de formation de l’école québécoise fait face à un défi de transformation des valeurs (Rivard, Deslandes, Lebel, et Ouellet, 2007). En tant qu’acteurs intervenant dans l’éducation des élèves, les valeurs des enseignants et enseignantes constituent un élément majeur de tout changement important. Avant que les étudiants-maîtres ne prennent place comme acteurs à part entière, il peut s’avérer intéressant de connaître leur représentation d’une bonne école ainsi que les facteurs qui l’influencent.

Le but de cette recherche est de mettre sur pied un modèle de la représentation d’une bonne école chez les étudiants-maîtres et d’étudier l’impact de plusieurs facteurs sur cette représentation à partir de leur propre système de références. Cette représentation appelée à se transformer au fil du temps se façonnera à partir d’expériences de vie, de relations humaines, de valeurs, de normes, de croyances ou de convictions. Elle pourra constituer une modalité de connaissance de l’idée qu’ils se font d’une bonne école. Dans une situation où une représentation est déjà constituée, les « jeux sont faits », c’est-à-dire que l’individu va agir en fonction des éléments qui constituent cette représentation (Abric, 2003; Deschamps et Beauvois, 1996; Roussiau et Bonardi, 2001). Ainsi, la notion de représentation peut être pertinente et constitue une bonne stratégie pour comprendre les valeurs sous-jacentes à leur représentation et pour permettre d’intervenir dans leur réalité professionnelle de façon à assurer une bonne transition dans le milieu professionnel et un certain niveau de confort souhaité destiné à les garder davantage dans leur école et dans la profession enseignante.

1. Contexte théorique

Les éléments qui suivent permettront d’aborder les concepts majeurs et les facteurs susceptibles de mettre sur pied le modèle. La représentation d’une bonne école passera par la définition du concept de représentation, des différentes attentes des jeunes par rapport à l’école et de leurs valeurs, un maillon important dans le processus. Parmi les facteurs susceptibles d’alimenter le modèle, deux sources d’influence dans le processus de représentation seront mises en évidence soit le contact avec la diversité culturelle comme source externe et l’estime de soi qui est d’ordre affectif comme source interne.

1.1 La notion de représentation

Les histoires et les cultures, les attitudes et les croyances, les valeurs, les normes et les comportements, les opinons et les idées sont de nature à permettre de cerner le processus de représentation d’une bonne école. Cette représentation est construite et mobilisée par les individus pour penser, comprendre et s’exprimer (Abric, 2003). Elle fait partie d’une démarche d’appropriation et d’interprétation de la réalité. Elle donne un sens à nos conduites en orientant par la suite un bon nombre de comportements. Elle permet de comprendre la réalité à travers notre propre système de référence, c’est-à-dire notre histoire, nos différents parcours, nos rencontres, notre identité, le sentiment d’être valable à nos yeux impliquant nos forces et nos limites soit l’estime de soi etc. Ce système de référence fait appel à la culture. Tout comme un iceberg, la culture peut être définie en distinguant le niveau observable de la culture explicite soit 10 % (exemple : la langue, les pratiques et comportements usuels dans tous les compartiments des activités humaines, les institutions) de celui non observable de la culture implicite soit 90 % (exemple : les normes, valeurs et représentations) (Prime, 2001). Ainsi, hormis les façons d’agir qui sont observables dans cet iceberg culturel, on y trouve un ensemble de valeurs enfouies dans les profondeurs ainsi que les représentations.

Selon Abric (2003), la représentation est le produit et le processus d’une activité mentale par laquelle un individu ou un groupe reconstitue le réel auquel il est confronté et lui attribue une signification spécifique. Elle tient compte à la fois de la réalité de l’objet et de la subjectivité de celui qui la véhicule. Elle est le lien, nécessaire à l’action, entre l’objet et l’opinion qui lui est attachée. Toute représentation produit une vision globale et unitaire de l’objet et du sujet. Elle restructure la réalité pour permettre une intégration à la fois des caractéristiques de l’objet, des expériences antérieures du sujet et de son système d’attitudes et de normes.

1.2 Éléments de représentation d’une bonne école

La réalité de l’école est à la fois le lieu physique et le milieu où se dérouleront les interactions avec les élèves, les parents, les gestionnaires et les autres intervenants dans le cadre du système éducatif et de la formation à dispenser. L’étudiant-maître en a un vécu et s’en forge une opinion. Cette démarche passe par la subjectivité de l’individu en lien avec son système de références.

Les attentes des jeunes face à l’école font ressortir le respect de ce qu’ils sont, la reconnaissance de leurs valeurs et de leurs différents styles d’apprentissage (Paquette, 1982, 2002). Du côté de l’école, plusieurs attentes sont formulées : l’institution scolaire ne doit pas seulement transmettre des connaissances, mais aussi certaines valeurs comme le respect des autres, la tolérance, les valeurs morales, la diversité (Lagarrigue, 2000); d’autres valeurs sont soulignées comme le fait d’être un modèle, l’autonomie, la justice, la solidarité, la justice et la solidarité. Du côté des enseignants, en plus des valeurs du curriculum, ils ont à faire passer des valeurs en tant qu’individu et leurs qualités personnelles semblent jouer un rôle significatif dans leur conduite professionnelle (Carr, 2006).

Lebrun (2006) a exploré l’étendue et l’organisation des représentations que de futurs enseignants ont à l’égard de la notion de démocratie et l’importance qu’ils y accordent. L’auteure les a interpellés incidemment à l’égard de leurs pratiques pédagogiques en les référant à une démocratie réflexive et proactive. D’une part, les étudiants-maîtres sont conscients du rôle d’agents de changement via leurs pratiques pédagogiques qu’ils ont à jouer pour améliorer la démocratie. D’autre part, ils sont attentifs aux défis que représente l’élimination des menaces auxquelles fait face la démocratie dans la société actuelle. Il n’est question ici que d’une seule valeur. Elle peut être utile dans l’approche de la notion de représentation d’une bonne école.

De plus, les valeurs perçues par les futurs enseignants ont également été abordées en les comparant à celles de leurs parents comme membres de la génération Y (Deslandes, Paré et Parent, 2006). Il ressort une similitude et une continuité dans les valeurs des jeunes et celles de leurs parents. Parmi l’ensemble des valeurs importantes ressorties dans cette recherche, nous en avons retenu certaines qui semblent appropriées dans cette recherche comme le changement d’un emploi non satisfaisant, la réorientation de carrière, et la remise en cause du rapport à l’autorité. Ces dernières valeurs sont de nature à faire partie des éléments de représentation que les étudiants-maîtres se font d’une bonne école.

1.3 Les valeurs : définitions et catégorisation

Le terme de valeur a fait l’objet de définitions variées selon les auteurs. Il a été défini comme « une croyance durable selon laquelle un mode de conduite ou un état final d’existence est personnellement ou socialement préférable à un mode de conduite ou un état d’existence opposé ou contraire » (Rokeach, 1973 : 5). C’est une manière d’être ou d’agir qu’une personne ou une collectivité reconnait comme idéale et qui rend désirables ou estimables les êtres ou les conduites auxquels elle est attribuée (Rocher, 1969). Les valeurs sont dites de préférence et de référence (Paquette, 1982, 2002). Les premières sont celles que l’on proclame avoir (notre idéal), c’est-à-dire celles auxquelles on aspire; elles sont théoriques. Les secondes sont celles que l’on assume dans la réalité quotidienne, celles vécues dans la pratique. Et il y a parfois clivage entre les deux. Ainsi les différents acteurs que sont les membres de la société, les parents et les enseignants sont appelés à vivre différemment ces valeurs. Celles-ci sont des notions abstraites exprimant des désirs organisés de façon hiérarchique selon leur importance pour chaque individu (Bardi et Schwartz, 2003; Schwartz et Bilsky, 1987, 1990).

D’autres travaux de recherche ont traité des valeurs des individus (Bréchon, 2000; Buidin, Petit, Galand, Philippot et Born, 2000; Gecas, 2000; Hitlin et Piliavin, 2004; Kasser et Ryan, 1996; Knafo et Schwartz, 2004; Raynal et Rieunier, 1997; Valade, 1990). Dans le contexte de ces recherches, les valeurs sont plutôt conçues comme des principes à partir desquels la société ou les individus procèdent à des choix comme l’expression de principes généraux, d’orientations fondamentales et d’abord de préférences et de croyances collectives ou encore comme des orientations profondes qui structurent dans la durée les représentations et les actions des individus. L’iceberg culturel en fournit une bonne localisation enfouie dans les profondeurs d’une culture. Les valeurs comme amitié, amour, bonheur, coopération, égalité, famille, honnêteté, intégration, justice, liberté, paix, persévérance, respect, responsabilité, réussite, santé et solidarité ont fait l’objet de références dans de nombreuses formations ou activités de recherche. Elles font partie des valeurs dites universelles de l’UNESCO (Tillman et Hsu, 2000). Elles peuvent être aidantes dans la constitution de la notion de représentation d’une bonne école.

Verplanken et Holland (2002) ont constaté que l’activation des valeurs découle de la cohérence entre la valeur et le comportement si la valeur est importante pour l’individu. Celui-ci a tendance à penser momentanément de manière concrète ou abstraite, à se concentrer soit sur les aspects abstraits soit sur les aspects concrets d’une situation (Freitas, Gollwitzer et Trope, 2004; Freitas, Salovey et Liberman, 2001; Fujita, Trope, Liberman et Levin-Sagi, 2006). Toutefois, les valeurs s’illustrent mieux grâce à l’analyse des faits et des gestes des individus lorsqu’ils réfléchissent ou formulent des jugements que lorsqu’ils sont en pleine action (Rohan, 2000; Torelli et Kaikati, 2009). Enfin, certains auteurs suggèrent des regroupements de valeurs par catégories. On peut citer Buidin et al. (2000) avec des valeurs intimes, matérialistes et prosociales, puis Royer, Pronovost et Charbonneau (2004) qui parlent plutôt de valeurs de légitimité, de valeurs d’action et de valeurs personnelles. Greenbank (2003) a analysé comment différentes valeurs influencent la recherche en éducation. Pour ce faire, il a adopté une approche de terrain utilisant une triangulation de méthodes rigoureuses pour mettre en évidence les valeurs dans la recherche en éducation. Il a regroupé les valeurs selon la catégorisation de Rokeach, soit les valeurs personnelles, sociales et collectives, éthiques et morales, et leur importante influence dans la recherche en éducation. Il distingue : les valeurs instrumentales qui comprennent à la fois les valeurs morales (qu’est-ce qu’une une personne identifie comme la bonne chose à faire) et les valeurs de compétences (qu’est-ce qu’un individu croit qui est la chose juste à faire); les valeurs terminales qui comprennent les valeurs personnelles (qu’est-ce qu’une personne voudrait réaliser pour lui-même) et les valeurs sociales (comment les individus souhaitent que la société fonctionne). Ce dernier regroupement comprend les croyances et les objectifs politiques et éducationnels. Les individus ont un système de valeurs qui comprend un petit groupe de valeurs de compétences, de valeurs morales, qui influencent les attitudes et comportements. Les problèmes peuvent apparaître dans le cas de conflit de valeurs, ce qui force les individus à les prioriser (Glen, 2000).

Les recherches ont fait ressortir que l’approche qualitative a fait l’objet de critiques, car les méthodes quantitatives sont plus avantageuses dans la reconnaissance de l’impact des valeurs (Boyd, 2000; Carr, 2000; Greenbank, 2003; Humphries, 1997; Nisbet, 2000). Greenbank (2003) souligne l’interaction complexe des valeurs qui exercent un réel impact sur la recherche en éducation. Selon lui, la compétence et les valeurs personnelles influencent la position épistémologique et ontologique adoptée par le chercheur. Les valeurs sociales ou politiques ont un rôle polarisé qui oscille entre une influence neutre et une influence partisane de ces valeurs. Les valeurs morales exercent un rôle important, mais les autres valeurs ont un impact sur les décisions éthiques qui sont prises. Les enseignements tirés de cette étude en ce qui a trait aux avantages d’une approche quantitative, à la catégorisation des valeurs et leur impact ont permis de mettre sur pied l’outil de recherche.

En résumé, on peut tirer différents enseignements quand on considère les valeurs. Toutes les personnes possèdent les mêmes valeurs universelles à des degrés différents. Les valeurs structurent dans la durée nos représentations et nos actions. Elles remplissent plusieurs fonctions. Elles servent de critères de choix de comportements et de jugement de soi, des autres et des situations. Elles peuvent prédire les comportements et s’illustrent davantage à travers des analyses et réflexions. Elles sont ordonnées, hiérarchisées par importance relative. L’individu utiliserait cette hiérarchie comme critère lors d’un jugement et lors d’une prise de décision. Elles sont organisées en systèmes de valeurs qui peuvent être personnelles, sociales et collectives, morales et éthiques : les valeurs personnelles sont acquises ou adoptées, consciemment ou non, par chacun d’entre nous et influent sur notre façon de penser, de ressentir et sur notre comportement; les valeurs sociales et collectives sont celles généralement acceptées par une société. Elles se retrouvent dans les traditions culturelles, les structures, les coutumes et les lois; les valeurs morales confèrent une valeur particulière à des règles et à des principes qui s’imposent à nous dans le cadre d’une attitude envers autrui, qui serait désintéressée et selon une exigence de justice; les valeurs éthiques sont de l’ordre de la conscientisation, de la responsabilisation, des actes bons (Deckeyser, 2006), actes que nous qualifierons de prosociaux.

Les catégories de valeurs semblent être influencées par des sources externe et interne à titre de critères guidant le jugement et le comportement. Or, la notion de représentation qui reconstitue le réel, tient compte de deux éléments : la réalité de l’objet (l’école) et la subjectivité du sujet (l’étudiant-maître). Dans la restructuration de la réalité, une des caractéristiques importantes de la réalité des classes reflétant ainsi la société plurielle dans sa composition est la diversité culturelle.

1.4 Le contact avec la diversité culturelle : une source externe d’influence

La société canadienne et québécoise est de plus en plus diversifiée culturellement. C’est une tendance lourde dont on se doit de tenir compte. Les médias, les voyages, la mondialisation entraînent un mouvement chez les jeunes à s’ouvrir de plus en plus vers d’autres cultures. Dans leur quotidienneté, ils sont appelés à rencontrer, à échanger, à fréquenter des personnes de différentes origines et à faire l’expérience de la différence culturelle. Ces rencontres se font par l’intermédiaire de camarades de classe, de professeurs qui leur enseignent, de voisins ou d’amis proches ou très proches.

Le contact a été longtemps considéré comme une des stratégies les plus efficaces en psychologie pour améliorer des relations intergroupes. Pettigrew et Tropp (2000) ont fait état des conditions exigées pour entraîner un contact réussi (par exemple : la coopération), pour rechercher les processus psychologiques fondamentaux à travers lesquelles passent les effets qui en découlent (par exemple : diminution de l’anxiété d’intergroupe, l’accroissement des représentations communes de groupe) et pour explorer des facteurs qui peuvent faciliter la généralisation des avantages de contacts intergroupes du point de vue des attitudes plus positives vers l’exogroupe dans son ensemble (exemple : l’accroissement de la proéminence du groupe).

Allant davantage en profondeur qu’Allport (1979) dans les affirmations sur le contact optimal, Van Dick et al. (2004) ont présenté un nouveau construit : le rôle de l’importance perçue du contact. Ils avancent que celle-ci est le facteur de prédiction le plus proche de la diminution des préjugés par le contact. Si les individus ont des occasions de contacts au travail ou dans le voisinage, leurs chances s’accroissent d’avoir des relations intergroupes et des amis. Le contact endogroupe parmi les relations et les amis peut être perçu comme plus ou moins important, ce qui à son tour détermine les évaluations à l’intérieur des groupes. Cette mesure de l’importance perçue est effectivement distincte de l’établissement d’indicateurs de qualité et de quantité. Dans leurs résultats ces auteurs ont mis l’emphase sur le sens de cette importance et les analyses ont confirmé ces hypothèses.

Les attitudes raciales diminuent selon l’augmentation du nombre d’interactions avec d’autres individus issus de milieux diversifiés culturellement, et de la qualité de ces interactions (Shelton et Richeson, 2006). Les interactions multiculturelles semblent renforcer le niveau d’identité ethnique, et les individus à identité renforcée perçoivent moins la discrimination (Lee, Noh, Yoo, et Doh, 2007).

Plus récemment, différents autres auteurs ont travaillé sur l’importance du contact pour réduire le préjugé envers les groupes différents, pour améliorer les nouvelles expériences des groupes identiques en exerçant un impact sur le moi de l’individu, pour réduire la peur, la menace et l’anxiété dans les relations intergroupes. Thurner et Crisp (2010) ont démontré que prendre en considération les contacts endogroupes est suffisant pour réduire le préjugé explicite dirigé envers les exogroupes. L’impact de l’image mentale liée au contact sur le préjugé implicite mesuré par le test d’association implicite a été étudié. Quand, dans la condition de contrôle, de jeunes participants s’imaginent en train de parler à un étranger assez âgé, ceux-ci ont par la suite montré des attitudes implicites plus positives envers les gens assez âgés en général. De plus, quand dans une condition de contrôle, les participants non-musulmans s’imaginent en train de parler à un étranger musulman, ils ont par la suite montré des attitudes implicites plus positives envers les musulmans en général. Ces résultats ont abouti à des implications permettant d’augmenter l’application de ces stratégies indirectes de contacts dans l’amélioration des relations intergroupes.

De plus, l’amitié entre groupes différents améliore les nouvelles expériences des groupes identiques quant au degré que les groupes différents deviennent associés à leur moi (Page-Gould, Mendoza-Denton, Alegre et Siy, 2010). Ainsi, ces auteurs ont examiné les processus cognitifs que pourrait représenter l’impact de l’amitié exogroupe sur de nouvelles situations endogroupes. La proximité avec les membres exogroupes prédit une association de l’exogroupe avec le moi, tant du point de vue du groupe lui-même que des traits de personnalité stéréotypés associés au groupe. Puis, ils ont manipulé l’accessibilité d’une amitié à l’intérieur d’un même groupe) ou d’une amitié entre groupes différents. Les participants qui ont décrit un ami de groupe différent ont fait ressortir une plus grande association de l’ethnicité de l’ami avec eux, et ce lien a exercé des effets d’amitié sur les attentes positives du contact endogroupe et sur les réponses hormonales adaptables lors d’une interaction réelle avec un nouveau membre de l’exogroupe.

Enfin, le contact intergroupe joue un important rôle dans la réduction de la peur, la menace et l’anxiété dans les relations intergroupes (Page-Gould, Mendes et Major, 2010). Ces auteurs ont fait ressortir les avantages de régulation du contact intergroupe. L’hypothèse de départ est qu’un contact intergroupe antérieur faciliterait le redressement d’une évaluation intergroupe stressante. Les participants blancs et noirs ont accompli une tâche stressante d’évaluation en présence de deux blancs ou de deux interviewers noirs pendant que le système nerveux autonome et les réponses hormonales ont été évalués. En examinant comment les participants se sont comportés après la tâche stressante, le contact intergroupe a abouti à un redressement physiologique plus rapide tant pour la réactivité du système nerveux autonome que pour la réactivité neuroendocrinienne.

En résumé, la diversité culturelle s’enrichit par les contacts et le rôle de ces derniers est indéniable qu’ils soient perçus ou réels. La quantité de contacts et la qualité des interactions entraînent une diminution des attitudes raciales et des préjugés, une baisse des préjugés envers les groupes différents, une réduction de la peur, de la menace et de l’anxiété dans les relations intergroupes, un impact positif sur le moi de l’individu et un renforcement du niveau d’identité ethnique, une amélioration des nouvelles expériences dans l’endogroupe. Toutes ces expériences de contacts avec la diversité culturelle peuvent exercer un impact sur le système de références de l’individu.

1.5 L’estime de soi : une source interne d’influence

L’estime de soi, un élément majeur du système de référence de l’individu est d’ordre affectif, est une évaluation subjective de soi. Heatherton et Polivy (1991) ont souligné son effet sur les attitudes et les comportements des individus. Ceux-ci sont portés à défendre, à maintenir et à améliorer leur image de soi (Baumeister, 1998; Crocker et Park, 2004). L’estime de soi peut être nécessaire dans le signalement de l’acceptation sociale (Baumeister et Leary, 1995; Leary et Baumeister, 2000). Elle facilite la recherche de la compétence (Deci et Ryan, 2000; Ryan et Brown, 2003). Pourquoi les individus ont besoin d’une bonne estime de soi? Ceux-ci sont motivés à maintenir ou à accroître leurs sentiments d’estime de soi, de cohérence, de singularité, d’appartenance, de succès et de quête identitaire (Vignoles, Regalia, Manzi, Golledge, et Scabini, 2006). Ces éléments d’identité fournissent une plus grande idée de l’estime de soi des individus, de leur cohérence, de leur singularité et de leur quête de sens. Ceci semble valable aux niveaux de l’identité individuelle, relationnelle et de groupe de différentes populations. Le processus de maintien de l’image de soi joue un rôle important dans les stéréotypes et les préjugés dans le contexte des approches motivationnelles, socioculturelles et cognitives (Fein et Spencer, 1997). L’utilisation des stéréotypes et des préjugés peuvent être un moyen commun pour maintenir son image de soi. Selon Chin (1993), les individus s’engagent dans la discrimination intergroupe pour augmenter ou maintenir l’identité sociale positive et un haut niveau d’estime de soi.

Dans une logique transculturelle portant sur le bonheur et le bien-être, Uchida, Norasakkunkit et Kitayama (2004) ont identifié les variations culturelles substantielles dans la signification culturelle du bonheur, les motivations sous-jacentes au bonheur et les prédicteurs du bonheur. Le bonheur a tendance à être défini du point de vue de la réalisation personnelle en Amérique du Nord. Les individus appartenant à ces cultures sont enclins à maximiser l’expérience des affects positifs et le meilleur prédicteur en est l’estime de soi. En Asie de l’Est au contraire, le bonheur est vécu du point de vue des relations interpersonnelles. Les individus vivant dans ces cultures sont motivées par le maintien d’un équilibre entre les affects positifs et négatifs et le meilleur indicateur en est le fait de percevoir le moi dans un rapport social.

Cast et Burke (2002) s’appuient sur la théorie de l’identité pour fournir un cadre théorique à l’intégration de différentes approches conceptuelles de l’estime de soi. Celle-ci serait un aboutissement et un moteur nécessaires dans le processus d’identification de soi qui se produit dans les groupes, en consolidant tant l’individu que le groupe. La recherche du rôle identitaire augmente l’estime de soi basée sur ce que vaut l’individu et sur ses réalisations. L’estime de soi est construite par les mécanismes de contrôle des émotions négatives qui se produisent quand l’identification de soi est problématique, en permettant ainsi une interaction soutenue et une cohérence dans les adaptations structurelles lors des périodes de crises et de changement.

Dans une étude (Hugues, Witherspoon, Rivas-Drake et West-Bey, 2009) portant sur 805 jeunes blancs et noirs américains sur les rapports entre la socialisation culturelle et l’impact sur leurs comportements, cette socialisation a influencé positivement et leurs comportements et leurs résultats académiques. Cette relation a été partiellement médiatisée par l’affirmation de l’identité ethnique et de l’estime de soi. De plus, chez des femmes portoricaines parlant anglais, l’identité ethnique montre une relation à l’estime de soi (Lopez, 2008). Plus elle est élevée, plus l’estime de soi est grande. Enfin, la force de cette relation entre l’identité ethnique et l’estime de soi varie selon l’adhésion à son groupe culturel (Umaña-Taylor et Shin, 2007).

En résumé, les recherches précédentes font état que les gens ont besoin de maintenir une image positive d’eux-mêmes. Leur estime de soi semble se renforcer et s’accroître suite aux interactions avec des individus d’origines culturelles différentes et ces interactions semblent consolider le niveau de l’identité ethnique. L’estime de soi a un effet sur les attitudes, les valeurs et les comportements. Ce concept pourra être utile comme source interne du système de référence pour alimenter le modèle de représentation d’une bonne école.

Les différents concepts développés ci-dessus ont permis une amorce des éléments du modèle. La représentation d’une bonne école selon les jeunes inclut plusieurs points : accueil et ouverture quant à l’orientation sexuelle, aux valeurs de tous, au respect des cultures et des différences individuelles, à la mondialisation; s’y sentir à l’aise en y transmettre leurs valeurs et s’y identifier; politesse et respect; réussite et équité pour les deux sexes; efficacité pour les systèmes public et privé; langue française; professionnalisme des enseignants. Ainsi, pour connaître cette représentation d’une bonne école et les facteurs qui y jouent un rôle, la représentation est un concept qui fait état de la réalité de l’école et de la subjectivité des futurs enseignants et qui agit en fonction de leur système de référence (Abric, 2003).

Ce système met en évidence l’importance des valeurs qui sont des orientations profondes et fondamentales qui structurent dans la durée les représentations, un paramètre essentiel pour comprendre l’idée que les futurs enseignants se font d’une bonne école (Bréchon, 2000; Valade, 1990). Ces valeurs permettent de prédire des comportements particulièrement lorsque les individus réfléchissent ou formulent des jugements (Rohan, 2000; Torelli et Kaikati, 2009). Les différentes valeurs adoptées par les futurs maîtres forment des ensembles cohérents et hiérarchisés en catégories comme des valeurs personnelles, sociales et collectives, morales et éthiques (Bréchon, 2000; Greenbank, 2003; Rocher, 1969; Rokeach, 1979; Royer et al., 2004). Elles sont un maillon d’influence qui exerce un impact dans le processus de représentation. À leur tour, les valeurs subissent des modifications pouvant être influencées par des sources variées.

Tout d’abord, comme source interne l’estime de soi est un moteur susceptible d’éclairer le processus de représentation d’une bonne école par l’influence exercée sur les individus et ses valeurs (Baumeister et Leary, 1995; Heatherton et Polivy, 1991; Leary et Baumeister, 2000; Van Dick et al., 2004). Ensuite, le contact avec la diversité culturelle comme source externe a un effet positif sur le système de références de l’individu et son environnement (Lee et al., 2007; Page-Gould, Mendes et Major, 2010; Pettigrew et Tropp, 2000; Shelton et Richeson, 2006; Thurner et Crisp, 2010). Plusieurs variables entrent donc en lice et agissent dans le mécanisme de représentation d’une bonne école.

Ainsi, sur la base de ces différents concepts, nous nous proposons de tester un modèle de représentation d’une bonne école (voir figure 1) et d’établir l’influence de différents facteurs sur cette représentation d’une bonne école. Le contact avec la diversité culturelle associée à l’estime de soi exerce un impact sur les catégories de valeurs qu’elles soient personnelles, sociales et collectives, morales et éthiques, ces dernières seraient déterminantes dans la constitution de la représentation d’une bonne école chez les futurs enseignants.

La présente recherche vise les objectifs suivants :

  • tester le modèle de représentation des étudiants-maîtres d’une bonne école;

  • établir l’influence de différents facteurs sur cette représentation soit le contact avec la diversité culturelle, l’estime de soi, les valeurs (personnelles, sociales/collectives, morales/éthiques);

Figure 1

Modèle théorique de la représentation d’une bonne école chez les étudiants-maîtres

Modèle théorique de la représentation d’une bonne école chez les étudiants-maîtres

-> Voir la liste des figures

Nous faisons l’hypothèse que le contact avec la diversité culturelle associée à l’estime de soi a un effet sur les valeurs personnelles. Puisque celles-ci sont reliées aux valeurs sociales/collectives et aux valeurs morales/éthiques associées entre elles, elles vont influencer le processus de la représentation d’une bonne école chez les étudiants-maîtres. Cet éclairage permettra : a) de contribuer au processus de conceptualisation de la représentation que les étudiants-maîtres d’une bonne école; b) de prendre conscience de cette représentation et des facteurs qui y agissent et de voir les implications qui en découlent dans leur rôle d’acteurs et de médiateurs significatifs dans la transmission de valeurs auprès des élèves. En ce sens, ce modèle de représentation d’une bonne école pourra servir de guide pour l’action en permettant de confirmer différentes pratiques et de suggérer différents projets ou activités avec leurs élèves, les gestionnaires, les parents et autres intervenants.

2. Méthode

2.1 Participants

Les jeunes adultes qui font partie de la collecte de données sont des étudiants en sciences de l’éducation d’une université au Québec (Canada). C’est un groupe monoculturel d’origine québécoise de souche, donc homogène. Ils sont inscrits aux programmes de baccalauréat en enseignement préscolaire et primaire et en enseignement en adaptation scolaire (profil primaire). Il s’agit d’un échantillon de convenance recruté dans différents groupes-cours dispensés en éducation. Les participants à la recherche sont au nombre de 195 : 133 femmes (68,2 %) et 62 hommes (31,8 %). Ils sont âgés de 18 ans à 25 ans et la moyenne d’âge est de 20,92 ans. La très grande majorité d’entre eux (84.6 %) a complété la première année d’étude et le reste (15.3 %) a terminé deux années et plus. On y décompte 49 % en éducation préscolaire et enseignement primaire, 16,4 % en adaptation scolaire, 28,5 % en enseignement secondaire et 5 % en enseignement des arts.

2.2 Mesures

Le questionnaire qui a été utilisé pour la recherche est un ensemble de mesures des différentes dimensions du modèle. Il comprend un regroupement de différents items pour chacune des variables. Certains de ces items sont issus de recherches antérieures, d’autres sont créés pour les fins de cette étude. De plus, l’instrument comprend des questions sociodémographiques, comme l’âge, le sexe, l’année d’étude, le programme d’appartenance etc. Les variables sont : contact avec la diversité culturelle, estime de soi, valeurs personnelles, valeurs sociales et collectives, valeurs morales et éthiques, la représentation d’une bonne école. Pour assurer la qualité de l’instrument, son élaboration a nécessité une démarche psychométrique. Les items de chaque variable ont été analysés en effectuant une analyse factorielle afin de ne garder que les facteurs significatifs. Puis, les items regroupés pour former un score global pour chaque facteur ont fait l’objet d’une évaluation de la consistance interne en calculant le coefficient alpha de Cronbach. Cette démarche a permis d’aboutir pour chacune des échelles à un haut niveau de consistance interne (ces indices, alpha de Cronbach, sont rapportés au tableau 1 avec les statistiques descriptives de chaque échelle).

2.2.1 Le contact avec la diversité culturelle

Pour mesurer cette variable, un préambule précise dans cette section que le but des énoncés qui suivent est de connaître dans quelle mesure les répondants ont ou ont eu des contacts avec une ou des personnes d’origines culturelles diverses qui sont porteurs de différentes valeurs. Une échelle de 1 à 7 allant de pas du tout à extrêmement a permis aux participants d’indiquer si les items correspondent à leur vécu. Les libellés des 5 items retenus parmi 5 portent sur l’intérêt à connaître ces personnes, le fait d’avoir été en contact avec des camarades de classe appartenant à ces cultures, le fait d’avoir été en contact avec ces personnes dans son entourage proche (famille, école, quartier), le fait d’avoir des activités (sport ou autres) avec elles, et le fait d’avoir ces personnes dans son cercle d’amis. L’alpha de Cronbach calculé pour ce sous-ensemble dans le cadre de la présente recherche est de ,82 et montre une fiabilité élevée de l’échelle.

2.2.2 L’estime de soi

Ce sous-ensemble d’items est issu de l’étude de Heatherton et Polivy (1991). Le préambule annoncé aux répondants demande d’indiquer leur sentiment à l’égard d’eux-mêmes le plus franchement possible en se servant de l’échelle de 1 à 7 soit presque jamais à presque toujours. Les 8 items retenus parmi 8 sont : j’ai généralement confiance en moi; en comparaison avec les autres, je me sens une personne de valeur; j’ai un sentiment de contrôle sur ma vie en général; je suis confiant dans mes habiletés; j’ai une attitude positive envers moi-même; je possède un certain nombre de bonnes qualités; je suis capable de faire les choses aussi bien que la plupart des autres; je me remets facilement de mes échecs. La fiabilité de l’échelle montre un alpha de ,83, un score considéré élevé à très élevé.

2.2.3 Les catégories de valeurs

Pour cette recherche, les catégories de valeurs ainsi que les items qui les constituent sont inspirées de recherches portant sur le rôle des valeurs dans la recherche en éducation à partir d’un échantillon comparable d’étudiants-maîtres (Greenbank, 2003; Meglino et Ravlin, 1998) et d’une étude traitant des valeurs sociales fondamentales qui comptent pour les jeunes québécois et québécoises (Pronovost et Royer, 2004). Le préambule de cette partie demande aux participants de fournir leur niveau d’adhésion à chacune des valeurs en répondant selon une échelle variant de 1 à 7 soit faible à élevée.

Les valeurs personnelles

Cette dimension compte 14 valeurs parmi 18 : le respect de soi; être passionné-e; la persévérance; le développement personnel; la réussite personnelle; l’autonomie; l’amélioration personnelle; la disponibilité (temps, personne…); se surpasser; la qualité du travail; la liberté; améliorer les choses; l’intelligence; l’indépendance. L’alpha de Cronbach de ,80 montre une fiabilité de l’échelle qui bénéficie d’une valeur élevée à très élevée.

Les valeurs sociales et collectives

Ce sous-ensemble contient 11 items retenus sur 16 : la responsabilité environnementale; l’honnêteté dans les relations; la collaboration (entraide, coopération); la responsabilité; l’égalité des chances; la valorisation des autres; l’intégrité dans les relations; l’ouverture au changement; l’esprit d’équipe; la diversité culturelle; la mixité. La valeur de l’alpha de Cronbach est élevée à très élevée soit ,81.

Les valeurs morales et éthiques

Huit valeurs retenues parmi 9 se retrouvent dans cette dimension : la justice; l’équité; l’éthique; l’intégration de la diversité; le sens des valeurs; la loyauté; la tolérance; l’impartialité. L’alpha de Cronbach calculé montre une valeur élevée à très élevée de ,80.

2.2.4 La représentation d’une bonne école

Les énoncés servant à établir la représentation d’une bonne école sont des items originaux inspirés de plusieurs recherches qui traitent des qualités d’une école démocratique et sociale, d’une école dotée de moyens pour combattre l’échec et débouchant sur le succès (Apple et Beane, 2007a, 2007b; Bourgeois, 2004; Guillot, 2000; Mukamurera, Lacourse et Lambert, 2006; Thompson, 2004; Westheimer, 2003). Cela a permis de formuler différents énoncés dont 16 ont été retenus sur 18. Le préambule de cette section requiert de chaque participant d’inscrire le niveau d’importance qu’il accorde à chacun des énoncés dans la représentation qu’il se fait d’une bonne école en répondant selon une échelle variant de 1 à 7 soit faible à élevée. Les 16 items sont une école où on est accueillant pour la personne peu importe son orientation sexuelle, où les enseignants participent des mêmes valeurs à tous peu importe qu’on soit un homme ou une femme, où on pratique le respect des différentes cultures, qui tient compte des différences individuelles, qui donne aux élèves et aux enseignant-e-s le goût d’y rester, où la langue française est de qualité, où les deux sexes réussissent autant les uns que les autres, où les enseignant-e-s montrent beaucoup de professionnalisme, où la politesse et les bonnes manières sont présentes, où l’efficacité est autant l’affaire d’une institution publique que privée, où la communication est l’affaire des filles autant que les garçons, où je peux transmettre les valeurs auxquelles je souscris, où on est citoyen-ne du monde, où les valeurs masculines sont autant présentes que celles féminines, où je retrouve toutes les valeurs auxquelles je souscris. L’alpha de Cronbach calculé de ,80 est une valeur élevée à très élevée.

2.3 Procédure de passation du questionnaire

Les étudiants ont été soumis à un questionnaire durant leur session régulière de cours. La passation s’est déroulée en classe en début de séance et a duré 20 minutes. Les consignes de départ ont été lues par un assistant de recherche. Les éléments éthiques de confidentialité, d’acceptation et de refus de répondre en tout ou en partie, d’absence d’incidence sur leurs résultats au cours ont été soulignés. La base des données est strictement anonyme et aucune information nominative ne permettait d’identifier les participants et participantes.

2.4 Analyse des données

Le logiciel SPSS pour Windows a été utilisé pour mener les analyses descriptives, l’analyse des composantes principales, les corrélations et l’analyse des postulats de base. Afin de mettre le modèle à l’épreuve, une analyse des cheminements est effectuée à l’aide du logiciel Amos (Arbukle, 1999). Celui-ci permet de spécifier et d’évaluer les relations directes et indirectes des variables mesurées.

L’adéquation du modèle est évaluée en fonction de différents indices d’ajustement et de la valeur du chi carré (Byrne, 1998; Kline, 1998; Maruyama, 1997; Roussel et Wacheux, 2005). Pour cela, quatre indices d’ajustement seront utilisés, soit l’indice de GOF (Goodness of Fit Index, GFI) parcimonieux; (La Du et Tanaka,1989), l’indice d’ajustement comparatif (Comparative Fit Index, CFI; Bentler, 1990), l’indice d’ajustement normé de comparaison relative du modèle spécifié et du modèle d’indépendance (Normed Fit Index, NFI; Marsh et al., 1988; Tucker et Lewis, 1973), l’indice d’ajustement absolu (Root Mean Squared Error of Approximation, RMSEA; Browne et Cudeck, 1993).

Le chi carré ne doit pas être significatif afin de démontrer que la matrice de corrélation prédite n’est pas différente de celle de l’échantillon; le chi carré est plus fiable quand la taille de l’échantillon est comprise entre 100 et 200. Les indices GFI, CFI et NFI doivent être supérieurs à 0,90. L’indice RMSEA montre un bon ajustement s’il est inférieur à 0,10, un très bon ajustement s’il est inférieur à 0,05, un excellent ajustement s’il est inférieur à 0,01. Il corrige la tendance du chi carré à rejeter n’importe quel modèle si la taille de l’échantillon est suffisamment grande. Enfin les tests de Lagrange et Wald du maximum de vraisemblance servent à identifier les modifications à apporter au modèle proposé. Ces tests permettent d’identifier la source d’erreur au niveau des liens spécifiés entre les variables du modèle. Les changements au modèle respectent les critères de pertinence théorique des paramètres à ajouter, de taux d’amélioration qui découle du changement proposé, évalué en fonction de la valeur du changement au chi carré (ΔΧ2). Les paramètres sont tout d’abord ajoutés en fonction du résultat du test de Lagrange. Puis, ceux qui ne rencontrent pas le taux de signification, selon le test de Wald, sont éliminés (MacCallum, 1986). Il n’y avait pas de données manquantes.

3. Résultats

Cette section relate les analyses en fonction de l’objectif de recherche. Les techniques utilisées ont permis d’évaluer le modèle théorique de la représentation chez les étudiants-maîtres d’une bonne école (voir figure 1) et de voir l’impact des différents facteurs, soit le contact avec la diversité culturelle, l’estime de soi, les valeurs (personnelles, sociales/collectives, morales/éthiques sur cette représentation des futurs enseignants. Selon le modèle, la satisfaction des conditions de l’hypothèse influence la représentation d’une bonne école chez les étudiants-maîtres. Les hypothèses proposent que le contact avec la diversité culturelle associé à l’estime de soi influencent les valeurs personnelles; celles-ci reliées aux valeurs sociales/collectives et aux valeurs morales/éthiques associées entre elles ont un impact sur la représentation des futurs étudiants d’une bonne école.

3.1 Analyse préliminaire des données

Afin de vérifier les postulats de base pour voir si des tests statistiques paramétriques peuvent être utilisés, des analyses préalables ont été entamées avant de faire les analyses principales des données. Pour s’assurer de l’homogénéité de l’échantillon, des tests sont effectués afin de vérifier la présence de différences significatives en fonction de variables sociodémographiques telles que le sexe, le programme d’étude et l’âge. Les conclusions sont tirées en fonction du critère de Bonferroni. Il n’y a aucune différence significative selon le sexe (tests t indépendants), le programme d’enseignement (analyse de variance à 1 critère de classification) ni l’âge des sujets (test de Bartlett).

Les statistiques descriptives (la moyenne, l’écart-type, l’asymétrie et l’aplatissement) sont examinées afin de vérifier la distribution des variables à l’étude. Les résultats sont présentés au tableau 1. La normalité de chacune des variables est mesurée par son niveau d’asymétrie et d’aplatissement. Lorsqu’une variable se distribue de façon normale, ses valeurs d’asymétrie et d’aplatissement se situent entre -1 et +1 (Tabachnick et Fidell, 2001). Les données du tableau 1 révèlent que les variables sont distribuées normalement.

Tableau 1

Moyenne (M), écart-type (ET), asymétrie et aplatissement, alpha de Cronbach (α) et nombre d’items pour les variables de l’étude (n=195)

Moyenne (M), écart-type (ET), asymétrie et aplatissement, alpha de Cronbach (α) et nombre d’items pour les variables de l’étude (n=195)

Les scores possibles aux variables sont basées sur une échelle continue s’étendant de 1 à 7 (1 correspond à « faible » et 7 à « élevée ».

-> Voir la liste des tableaux

L’examen de la relation linéaire entre les variables résiduelles a été effectué grâce à une régression multiple. Les résultats appuient le postulat de la fonction linéaire entre les variables à l’étude. Les résultats appuient l’homoscédasticté des données quant aux erreurs de prédiction qui sont les mêmes (Tabachnick et Fidell, 2001).

Enfin, la multicolinéarité a été vérifiée en effectuant une corrélation de Pearson entre les variables. Un coefficient égal ou supérieur à ,70 peut suggérer la présence de redondance entre deux variables (Tabachnick et Fidell, 2001). Selon le tableau 2, les résultats ne révèlent aucune corrélation supérieure à ,70. L’ensemble de ces résultats portant sur le sexe, les programmes d’étude et l’âge des sujets, suggère qu’il est possible de procéder à la vérification du modèle.

Tableau 2

Corrélations entre les variables à l’étude (n=195)

Corrélations entre les variables à l’étude (n=195)

** p <,01

-> Voir la liste des tableaux

3.2 Vérification empirique du modèle

Le modèle postulé a été évalué selon l’analyse acheminatoire. Les résultats révèlent que le modèle proposé ne rend pas bien compte des données empiriques même si les liens entre les variables sont significatifs : contact avec la diversité culturelle vs estime de soi, ß=,12, p<,001, estime de soi vs valeurs personnelles, ß=,19, p<,001, valeurs personnelles vs valeurs morales et éthiques, ß=,75, p<,001, valeurs sociales/collectives vs valeurs morales/éthiques, ß=,39, p<,001, valeurs sociales/collectives vs la représentation d’une bonne école, ß=,39, p <,001, valeurs morales/éthiques vs la représentation d’une bonne école, ß= ,25; p<,002. Le modèle théorique explique 41,1 % de la variance, mais un seul parmi les indices d’adéquation des données est acceptable, GFI=,962, et les autres ne le sont pas : le chi carré est significatif, χ2(8, N=195)=24,521, p<,002, et les autres indices sont trop élevés : RMSEA=,098, CFI=,761, NFI=,709.

Les indices de modification fournis en vertu du test de Lagrange autorisent à ajouter deux liens afin d’améliorer et d’ajuster le modèle aux données : a) entre les variables « contact avec la diversité culturelle et valeurs personnelles »; b) et entre les variables « valeurs personnelles et représentation d’une bonne école ». Le modèle théorique a donc besoin d’être modifié.

Cette stratégie de développement de modèles a permis d’obtenir un degré d’ajustement, soit un indice d’ajustement parcimonieux. Bien que ces liens ne fassent pas partie du modèle de départ, ils s’y intègrent bien. La solution standardisée du modèle final est présentée à la figure 2. Tous les coefficients d’acheminement sont significatifs. Les valeurs d’adéquation pour ce nouveau modèle permettent de conclure que ce dernier représente une solution plausible : le chi carré n’est pas significatif, χ2(6, N=195)=7,823, p<,251, les indices sont acceptables, RMSEA=,038, GFI=,988, CFI=,974, NFI=,907. La proportion de variance pour comprendre l’impact des variables étudiées sur la représentation d’une bonne école est de 43.3 %. Les résultats révèlent que ces deux modifications sont nécessaires. Elles améliorent grandement l’adéquation entre le modèle et les données. Le modèle ainsi modifié est réputé être le modèle final.

Figure 2

Modèle empirique de la représentation d’une bonne école chez les étudiants-maîtres

Modèle empirique de la représentation d’une bonne école chez les étudiants-maîtres

-> Voir la liste des figures

3.3 Impact des facteurs sur la représentation d’une bonne école

Les résultats suggèrent que la plupart des liens postulés dans les hypothèses sont confirmés: la variable « contact avec la diversité culturelle » exerce une impact sur la variable « estime de soi », ß= ,12, p<,001, laquelle montre une influence sur la variable « valeurs personnelles », ß=,19, p<,001, l’effet direct de cette dernière sur les valeurs morales/collectives, ,ß = ,74, p < ,001, et sur les valeurs morales/éthiques, ß=,47, p<,001, est confirmé; ces deux dernières variables associées entre elles, ß = ,42, p<,001, sont déterminantes dans la constitution de la représentation d’une bonne école, ß = ,29, p < ,001, ß =,18, p < ,002. De plus, il apparaît des effets directs entre les variables « contact avec la diversité culturelle » et « valeurs personnelles », ß=,08, p<,01, ainsi qu’entre ces dernières et la représentation d’une bonne école, ß=,27, p<,001.

Enfin, les valeurs personnelles influencent davantage les valeurs sociales/collectives, ß=.74, que les valeurs morales/éthiques, ß=.47. L’effet multiple des valeurs personnelles est à la fois compensateur par l’intermédiaire des deux autres catégories de valeurs et direct sur la représentation d’une bonne école. Les valeurs sociales/collectives influent les valeurs morales/éthiques et leur poids est plus élevé sur la représentation d’une bonne école. Ces résultats obtenus à partir d’un échantillon de n = 195 sont-ils de nature à s’appliquer à la représentation de l’ensemble des étudiants-maîtres?

Pour pallier le problème de la taille de l’échantillon qui est proche de 200 et vérifier si les résultats obtenus dans le modèle final sont généralisables, la méthode du Bootstrap avec le logiciel Amos a été utilisée (Arbukle, 1999). À l’aide de 1000 bootstraps, une moyenne des coefficients standardisés est comparée à l’estimation obtenue lors de l’analyse du modèle (estimation originale). Un biais est ensuite calculé qui fait état de l’écart entre la moyenne de l’estimation bootstrap et l’estimation originale. Les biais divisés par leur erreur type donnent un rapport critique du biais. Si ce rapport excède 2 en valeur absolue, on conclut qu’il y a un biais significatif de l’estimation originale et les résultats obtenus doivent être interprétés avec réserve. Les résultats présentés au Tableau 3 montrent qu’aucun de ces biais n’excède la valeur critique et donc qu’aucun n’est significatif. Le fait d’avoir un petit échantillon de participants ne semble donc pas avoir constitué un problème au niveau de l’estimation des liens. Le modèle est adéquat même si un nombre accru de participants et de variables aurait pu être avantageux.

Tableau 3

Intervalles de confiance des estimations des paramètres obtenus à l’aide de la méthode du Bootstrap (s=1000)

Intervalles de confiance des estimations des paramètres obtenus à l’aide de la méthode du Bootstrap (s=1000)

-> Voir la liste des tableaux

4. Discussion

Le but de cette recherche est de tester le modèle de représentation d’une bonne école chez les étudiants-maîtres et d’étudier l’impact de différents facteurs sur la représentation des étudiants-maîtres d’une bonne école à partir de leur propre système de références. L’ensemble des hypothèses a été confirmé.

Le modèle de représentation d’une bonne école a fait ressortir un profil de différents éléments : a) l’accueil et l’ouverture quant à l’orientation sexuelle, aux valeurs de tous, au respect des cultures et des différences individuelles, à la mondialisation; b) le fait de se sentir à l’aise dans cette école et qu’elle réponde à leurs attentes quant à la possibilité d’y transmettre leurs valeurs, mais aussi de les y retrouver; c) la politesse et le respect; d) la réussite et l’équité pour les deux sexes; e) l’efficacité pour les systèmes public et privé; f) la qualité de la langue française; g) le professionnalisme des enseignants.

Le modèle modifié de représentation d’une bonne école montre un bon niveau d’ajustement et explique 43,3 % de la variance. Dans cette représentation, les étudiants-maîtres montrent un bon niveau d’adhésion aux valeurs retenues dans cette étude et qui sont issues de la continuité des valeurs reçues de leurs parents, tout comme l’ont fait ressortir Deslandes et al. (2006). Il en est de même pour les valeurs démocratiques et sociales utilisées dans cette recherche, suite à différentes études (Apple et Beane, 2007a, 2007b; Bourgeois, 2004; Guillot, 2000; Lebrun, 2006; Mukamurera et al., 2006; Thompson, 2004; Westheimer, 2003). Cette représentation d’une bonne école par les étudiants-maîtres montre une cohérence entre leurs propres valeurs et la représentation qu’ils en ont.

Enfin, pour les futurs enseignants, les valeurs comme le professionnalisme à l’école, la réussite et l’importance de la qualité de la langue française sont essentielles. Il est important de faire ressortir également le niveau de confort recherché par les étudiants-maîtres dans leur représentation de l’école. Ils veulent s’y sentir confortables. En ce sens, cette génération recherche dans une carrière une qualité de vie, le cas échéant des conditions de travail insatisfaisantes les conduiraient à changer d’emploi ou de carrière, voire à défier la hiérarchie, tout comme établi par Deslandes et al. (2006).

Comme source externe d’influence, le contact avec la diversité culturelle confirme l’hypothèse de départ du lien avec l’estime de soi (Chin 1993; Fein et Spencer, 1997; Umaña-Taylor et Shin, 2007). Ces interactions ont un impact sur l’ouverture à la diversité, tout comme souligné par différents chercheurs (Page-Gould, Mendes et Major, 2010; Page-Gould, Mendoza-Denton et al., 2010; Pettigrew et Tropp, 2000; et Thurner et Crisp, 2010; Van Dick et al., 2004) ou sur les attitudes face aux différentes cultures (Lee et al., 2007; Shelton et Richeson, 2006). Dans le processus de représentation d’une bonne école des futurs enseignants, on retrouve l’esprit d’ouverture et d’accueil à l’orientation sexuelle, aux valeurs de tous, au respect des cultures et des différences individuelles, et à la mondialisation. Soulignons que cette variable montre également un effet direct sur les valeurs personnelles. Elle a donc sa place comme élément pertinent du modèle de représentation d’une bonne école.

Comme source interne d’influence, l’estime de soi a eu un effet sur les valeurs personnelles. La variable « estime de soi » a montré un bon niveau de pertinence dans le processus de représentation qui tient compte à la fois de la réalité de l’objet et de la subjectivité de celui qui la véhicule (Baumeister, 1998; Crocker et Park, 2004; Vignoles et al., 2006). Son impact sur la variable « valeurs personnelles » est significatif. Celles-ci exercent un effet direct sur la représentation d’une bonne école et un effet indirect par le biais des deux autres catégories de valeurs. L’effet direct des valeurs personnelles est très élevé sur les valeurs sociales/collectives. Ces dernières montrent une influence à la fois sur les valeurs morales/éthiques et sur le processus de représentation. Il faut souligner également le poids indéniable des catégories de valeurs personnelles et de valeurs sociales/collectives. Ces résultats confirment que les valeurs sont des orientations profondes qui structurent le processus de représentation de façon à influencer les actions des individus (Bréchon, 2000; Greenbank, 2003; Rocher, 1969; Rokeach, 1979; Royer et al., 2004).

4.1 Les deux liens additionnels

Il est important de souligner que deux liens imprévus ont été ajoutés afin d’améliorer le modèle : le contact avec la diversité culturelle exerce une certaine influence sur les valeurs personnelles; les valeurs personnelles ont un impact direct sur la représentation d’une bonne école. Quoique ces liens n’aient pas été anticipés, il est possible de suggérer quelques explications. D’abord, la société québécoise en est une qui se caractérise par la diversité culturelle, une richesse en soi selon la politique officielle qui s’inspire du modèle de l’interculturalisme où les cultures sont différentes certes, mais appelées à se transformer. Les jeunes de cette génération baignent dans ce contexte, développent des approches de par ces interactions sociales dans leur environnement, de par la mondialisation. Ils s’inscrivent dans une continuité, certes, mais aussi opèrent une certaine rupture avec les générations précédentes de par l’importance accordée à la satisfaction dans leur milieu professionnel (Deslandes et al., 2006), de par aussi les réalités contemporaines des nouvelles technologies, de l’internet, de leur utopie débouchant sur une certaine identité cosmopolite où les frontières sont, à leurs yeux, davantage ouvertes. Ensuite, la relation entre les valeurs personnelles et la représentation d’une bonne école suggère une question éthique au sens qu’on est libre de choisir comment on se conduira, qu’on a une volonté d’être plus autonome et un plus grand contrôle sur les agissements. Les étudiants-maîtres ne se laissent pas uniquement dicter par leurs aînés ou par la société leurs conduites (Deslandes et al., 2006). Ils veulent construire un certain monde reflétant leurs priorités et leurs choix.

5. Conclusion

Dans le modèle de représentation d’une bonne école, cette représentation est construite et mobilisée par les étudiants-maîtres. Elle s’inscrit dans le temps et dans l’espace avec tous les éléments de contenu précisés précédemment dans la discussion. C’est une image composite avec des éléments qui se complètent si on prend le temps d’y réfléchir et de les rendre opérationnels. De plus, le modèle a permis d’identifier des causes externes comme les contacts avec la diversité culturelle et des causes internes comme l’estime de soi et les valeurs dont les futurs enseignants ne sont généralement pas conscients. Les deux semblent agir sur la représentation d’une bonne école.

Ces résultats ont différentes implications pour la future carrière enseignante. Ainsi, l’école se doit de porter une attention spéciale à ce que les étudiants-maîtres considèrent d’une grande centralité (esprit d’ouverture et d’accueil à l’orientation sexuelle et aux valeurs de tous, respect des cultures et des différences individuelles, la mondialisation, professionnalisme à l’école, réussite et importance de la qualité de la langue française). Elle peut aussi développer avec les futurs enseignants une certaine complicité en travaillant sur les conditions de travail insatisfaisantes pour eux de façon à les garder davantage dans leur emploi ou dans la carrière. Il s’agit d’essayer de transformer des éléments tirés de ces représentations dans un esprit gagnant-gagnant, à savoir renforcer et garantir le sentiment de vouloir être à l’aise recherché par les étudiants-maîtres, et exploiter au maximum pour l’école les éléments perçus par eux comme essentiels. Le sentiment d’appartenance des individus pourrait s’y trouver renforcer.

Parmi l’ensemble des pistes déjà exploitées, cette étude du modèle de la représentation d’une bonne école offre un ensemble de réalités. Par exemple, l’attention spéciale mentionnée précédemment peut trouver dans les éléments représentées d’une bonne école une clarification des valeurs et une confirmation de différentes activités déjà opérationnelles dans leur formation qui utilisent déjà les rencontres exogroupes avec comme retombées un enrichissement des activités endogroupes, etc… De plus, il serait approprié d’asseoir ces activités en faisant valoir les justificatifs théoriques comme l’accroissement de l’estime de soi et du niveau d’identité ethnique, la consolidation des valeurs de tolérance, d’ouverture et d’acceptation des autres. La conscientisation du processus de la représentation d’une bonne école qui entraîne une identification des valeurs, pourrait à elle seule faire l’objet de différentes activités portant par exemple sur la description de l’école comme institution de son propre point de vue et du point de vue des autres qui viennent d’ailleurs (a), la description que les autres font de l’école (b), et enfin d’en apprécier le décalage (c). Un tel exercice pourrait s’élargir et porter sur la description de la culture d’ici et celle d’ailleurs.

6. Limites de la recherche

Si dans le modèle le noyau dur d’éléments représentés chez les étudiants-maîtres pour une bonne école est influencé par les facteurs dont la diversité culturelle qui est une richesse, l’estime de soi, les catégories de valeurs, il y a sans doute d’autres facteurs qui pourraient faire partie du modèle, même si la variance expliquée est élevée. La taille de l’échantillon est à considérer malgré que la technique du bootstrap laisse à penser que cela n’est pas préjudiciable au niveau de l’estimation des liens. Les étudiants-maîtres qui constituent l’échantillon sont majoritairement au niveau des programmes du primaire. Il serait intéressant de constituer un échantillon d’étudiants-maîtres admis uniquement dans des programmes d’enseignement au secondaire et ce, malgré le fait que l’échantillon de l’étude n’a pas fait ressortir de différence sur cet aspect. Ceci pourrait être intéressant quand on sait que généralement la prestation anticipée d’enseignement au niveau secondaire est vécue différemment de celle du niveau primaire. Une autre limite réside dans le fait que l’échantillon montre une grande homogénéité du fait qu’il est constitué de québécois de souche. Or, un des points qui posent problème est le manque de diversification culturelle des étudiants-maîtres particulièrement au niveau primaire. Une recherche future pourrait se pencher sur cette question, car elle refléterait davantage la société québécoise telle qu’elle est dans sa pluralité. Enfin, dans le but d’optimiser le sentiment de confort souhaité si important pour une bonne école, il pourrait être approprié d’entreprendre des recherches sur l’adéquation du contenu des projets éducatifs des écoles avec les attentes des futurs enseignants.