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Si les jeux et les sports sont le théâtre de visions du monde qui met en scène des constructions identitaires, nous sommes étonnés de constater le relatif « désintérêt intellectuel » (Wendling, 2002 : 31) à leur endroit, et notamment dans la revue Ethnologies. Dans toute l’histoire de cette revue, uniquement trois articles traitent du « jouer », i.e. l’acte de se re- et ré-créer dans une activité ludique et/ou sportive. Le premier est la contribution du folkloriste canadien Delf Maria Hohmann qui, dans le cadre d’un numéro régulier de Canadian Folklore Canadien de 1985, s’est appliqué à analyser un jeu de poupées. En s’appuyant sur l’oeuvre de Roger Caillois, il a retrouvé dans ce jeu des modèles comportementaux qui reproduisaient ou plus justement reflétaient la réalité familiale de la jeune joueuse. Ce jeu d’enfant s’est alors présenté comme une construction culturelle visant d’une part l’apprentissage des normes sociales et d’autre part l’expressivité. Douze ans plus tard, notre collègue, Michael Robidoux, professeur en sciences de l’activité physique à l’Université d’Ottawa, répondait à la thématique de la construction sociale des masculinités en proposant une réflexion sur les nuances entre le masculin et le non-masculin au sein d’une équipe de hockey. La joute est ainsi dépeinte comme vecteur de sociabilité, ou plus précisément comme ciment social normatif. Cette fonctionnalité implique nécessairement des rapports de pouvoir, à l’intérieur comme à l’extérieur du jeu (1997). Enfin, Christine Dallaire, aussi professeure en sciences de l’activité physique à l’Université d’Ottawa, a contribué dans le numéro « Langue et culture » à mieux comprendre le paradoxe qui se tisse entre le concept de compétitivité inhérent aux Jeux francophones de l’Alberta et la question de la récréativité justifiant la rencontre de la francophonie et ultimement les Jeux (2003). Notre collègue participe ainsi à tracer les limites de l’expérience ludique, expérience lourde en complexité étant donné sa nature contresensée.

Jouer, grâce aux possibles qu’il ouvre, constitue un observatoire de qualité pour comprendre l’identitaire, mais son potentiel interprétatif demeure, en ethnologie, méconnu, ou plus justement négligé, tant dans la littérature anglophone que francophone. Pourtant, les trois articles donnés en exemple montrent bien que l’expérience ludique ou sportive devient un moment fort d’expressivité de l’individuel et du collectif. Cette préoccupation a nourri les premiers travaux de folkloristes qui ont défriché la discipline. Par exemple, Madeleine Doyon-Ferland, dans sa thèse (déposée en 1948) et dans ses travaux (Paradis 1980), a fait des monographies sur les jeux traditionnels pour tenter de mettre en valeur ce mode d’expression de la culture. Et cette célébration s’est actualisée. Les jeux et les sports, nous pensons notamment au combat de coqs balinais de Clifford Geertz (1983), ou à la boxe commentée à la radio telle qu’analysée par André Rauch (1994), ne cessent de marquer la discipline. Le vingt-cinquième numéro de Terrain (1995) se consacrait dans cette perspective aux sports et plus précisément aux transformations des jeux et des sports selon les changements dans les interactions sociales qui encadrent et génèrent ces pratiques sportives et ludiques. En 2006, Ethnologie française se consacrait aux sports à risque où la passion et le danger poussent plus loin encore les limites de l’identitaire. Il y avait matière, tant pour la revue que pour la discipline, à réfléchir sur le jouer d’une part pour renouer avec un thème fondateur et d’autre part pour réaffirmer la pertinence de celui-ci pour comprendre le culturel.

Comprendre le jouer

Comprendre la part de culturel dans le jouer a « d’abord » été la mission de l’historien néerlandais Johan Huizinga qui a présenté dans son livre Homo ludens (1951) le jeu comme un acte sensé et profondément culturel. Cette lecture divorçait avec la conception du jeu comme acte mécanique. Jouer devient alors un acte « supraculturel ». Producteur de culture, jouer permet la naissance et la vie de celle-ci en instituant des codes et des règles. En imposant ces derniers, se créent des désirs, des inventions, des fantaisies, des joies et des libertés qui sont (aussi) créateurs de culturel. Il demeure également un produit culturel, car il est réinventé constamment par les humains pour témoigner de leur manière d’être eux-mêmes et en groupe. Roger Caillois, dans son livre Les jeux et les hommes (1967), se présentera comme héritier de cette perspective. Son approche cherchera à relever ce que l’on pourrait appeler la « grammaire ludique ». Cette dernière vise à classifier les jeux selon leur nature, soit agôn (adresse), aléa (chance), mimicry (simulacre) et ilinx (vertige), et son degré de liberté, qui se répartit entre paidia (turbulence) et ludus (discipline) afin d’analyser la logique interne des jeux et de dégager leurs différents caractères (liberté, séparation du jeu de l’espace-temps, incertitude, improductivité, imposition de règles et fiction) et leurs diverses formes (culturelles, institutionnelles et transgressives).

À la première ligne du paragraphe précédent, « d’abord » doit être mis entre guillemets, car l’ethnologie s’intéressait aussi de son côté au culturel dans le jouer par des exemples empiriques comme les travaux de Marcel Griaule chez les Dogons ou d’Elsdon Best chez les Maoris (cités dans Mauss, 1967). Dans le treizième numéro de Socio-Anthropologie, on rendait publiques des notes de cours de Marcel Mauss datant de 1937[1], éclairant d’une autre manière les propos qu’il a formulés sur les jeux, notamment dans son Manuel d’ethnographie. Pour ce sociologue français, jouer, c’est embrasser les mythes et les rites. De fait, tout jeu, agnostique comme divinatoire, s’inscrit dans un système de sens où il a pour fonction l’idéation du social. Par conséquent, le jeu se trouve au coeur de la société, proposant à chaque acteur un rôle dans chacune de ses parties (Bouvier 2003). On reconnait dans cette idée la préoccupation de Lévy-Bruhl pour la participation (1949). Le jeu devient ainsi, et contrairement à la théorie de Huizinga, une sorte de mécanisme culturel où le pratiquant devient un participant. L’héritage maussien demeure néanmoins imprécis ; il est difficile de prétendre que Claude Lévi-Strauss ait repris le flambeau, n’ayant pour ainsi dire que traité du jeu sous le couvert de la métaphore. Il écrira cependant dans La Pensée sauvage que « tout jeu se définit par l’ensemble de ses règles » (1962 : 44), autorisant de cette manière le structuralisme à s’intéresser au jouer.

Pour élucider ce flou plutôt gênant, Thierry Wendling, ethnologue au CNRS, s’est penché dans sa contribution à ce numéro sur la rivalité entre Claude Lévi-Strauss et Roger Caillois, notamment en ce qui a trait au relativisme culturel, pour éclairer un angle mort de l’historiographie des études sur les jeux en France. La (célèbre) querelle aurait bien influencé les préoccupations des ethnologues. C’est comme si, chez les lévi-straussiens, s’intéresser aux jeux autrement que par le biais de la métaphore équivalait à un acte de traitrise. Citer Huizinga, traditionnellement associé à Roger Caillois (qui se réclame héritier), devient pour ainsi dire un tabou. Entrer dans le jeu, c’était par conséquent entrer dans le clan des cailloisiens. Cet éclairage particulier sur l’ethnologie des jeux soulève quelques rumeurs de critique, dont la principale demeure celle-ci : le désintérêt des ethnologues pour les jeux ne serait-il que le résultat d’un simple climat d’adversité ?

En invitant les ethnologues à reconsidérer la filiation, il est à se demander si Wendling n’ouvre pas parallèlement la porte à une remise en question de l’héritage, notamment, de Huizinga. Dans Ethnologie des joueurs d’échecs, l’ethnologue cite le « lumineux » compte-rendu que Jean Pouillon a fait de Homo ludens pour rapatrier l’historien néerlandais dans le projet interprétatif de Lévi-Strauss (2002 : 46). Caillois serait-il un héritier illégitime de la pensée de Huizinga ? Il est à se le demander en effet, car on peut aisément découvrir des distorsions entre les projets interprétatifs des deux auteurs. Par exemple, et l’exemple est lourd de conséquences, Caillois affirme relire Huizinga quand il insiste sur le fait que « […] le jeu est essentiellement une occupation séparée, soigneusement isolée du reste de l’existence […] » (1967 : 37). Pourtant, Huizinga a été clair sur cette question :

Élément indépendant de « la vie courante », [jouer] se situe en dehors du mécanisme de satisfaction immédiate des besoins et des désirs. Bien mieux, elle interrompt ce mécanisme. Elle s’y insinue, comme une action temporaire, pourvue d’une fin en soi, et s’accomplissant en vue de la satisfaction qui réside dans cet accomplissement même. Ainsi du moins, le jeu nous apparaît, considéré en soi et en première instance, comme un intermède dans la vie quotidienne, comme une occupation de détente. Mais déjà à ce titre d’alternance régulière, il constitue un accompagnement, un complément, voire une partie de la vie en général (1951 : 25-26).

Ce fragment de texte introduit l’idée que même si le jeu est en marge des activités régulières, il fait malgré tout partie intégrante du monde du joueur. Ce dernier ne le quitte donc pas, au contraire. Il s’agit d’une nuance importante, car dans la conception cailloisienne, le joueur et l’individu semblent deux êtres qui ne se connaissent pas. Le joueur « expérimente » une autre vie, celle-ci fictionnelle, sinon une double vie. C’est comme si quelqu’un d’autre, comme une schizophrénie ludique, s’emparait de l’humain en état de jouer. Caillois annonce ce sursaut dans la réalité à la toute première page de Les jeux et les hommes[2] : « les joueurs se retrouvent à zéro et dans les mêmes conditions qu’au premier début » (1967 : 12). Il demeure qu’il est difficile de comprendre comment cette éternelle régression à l’inexistentiel permet aux individus de se construire l’identitaire.

Ce problème dans l’architecture conceptuelle de cette approche est soulevé dans l’article de Maude Bonenfant, docteure en sémiologie. Elle réfléchira aux rapports de filiation entre le jeu et la culture dans les différents débats théoriques. Pour ce faire, elle propose de distinguer la fonction et la notion de jeu. Le projet interprétatif de Huizinga, et parallèlement d’autres approches dites classiques, tenterait, selon l’auteure, de théoriser le jeu en qualité de notion. Celle-ci octroie au jeu un sens produit par un contexte historique et culturel donné. De fait, le jeu n’apparaît pas non plus à l’analyste comme une activité créatrice, notamment de libertés, mais comme un produit servant à fixer le sens. L’auteure réussit ainsi à synthétiser nombre de limites de l’approche classique, limites qui ont été soulevées par des auteurs issus d’une tout autre filiation tels que Jacques Henriot, Eugen Fink, Colas Duflo et Thomas M. Malaby. Cette nouvelle perspective, qui s’interroge sur la fonction du jeu, cherche à redonner aux joueurs l’autorité de leur parole sur le sens qu’ils octroient à leur propre jeu. Redonner le jeu aux joueurs permet d’une part d’ouvrir la porte à une sémiotique des jeux, approche nouvelle, pour ainsi dire vierge et recelant un fort potentiel, et d’autre part de réaffirmer implicitement la pertinence de l’ethnologie au sein des Play Studies.

Sur ce dernier point, Jacques Henriot a affirmé dans Sous couleur de jouer (1989) que sa perspective s’harmonisait bien avec l’anthropologie sociale et culturelle ; toutes deux cherchent un sens au jouer et militent solidairement pour une conception à la fois socialisée et globale de cet acte. Encore plus, jouer est compris comme reflet et fille de tout un système conceptuel. Ici, il serait aisé d’établir une filiation avec Marcel Mauss. Pourtant, Henriot se dissocie des réflexions de cet auteur en arguant qu’il décrit dans Essai sur le don le potlatch comme un jeu soumettant les acteurs à des contraintes auxquelles ils ne peuvent se soustraire. Henriot déplore alors l’absence de considérations pour le jeu des joueurs. Problème de sens cependant, Mauss (et par extension ses héritiers) s’appuie bel et bien sur l’expérience des joueurs pour dégager le sens de leur jeu ; pour faire un clin d’oeil à la deuxième note de Bonenfant, il semble y avoir mésentente sur la fonction de jeu et celle du jeu. La tradition ethnologique française se tiendrait peut-être de l’autre côté de cette fine ligne. Elle pourrait néanmoins se situer du côté de l’approche dite classique, parce que Huizinga lui-même insiste sur le fait que l’analyste doit saisir le jeu, sinon son intensité, « dans sa totalité » (1951 : 18). Or, l’auteur parle ici d’une totalité non strictement culturelle, et une totalité qui laisse en fin de compte peu de place au mécanisme interne. C’est ainsi dire que les débats autour du jeu et du culturel sont encore vifs, car plusieurs flous résistent à l’interprétation.

Jouer le réel en ligne

Pour éclaircir ces mystères, nous avons retenu des études plus spécifiques sur des jeux, et plus justement sur des jeux en ligne. L’écran, entre planche de jeu placée à la verticale, bouclier et fenêtre sur un autre monde, devient, une fois branché à un ordinateur, un terrain de jeux ; jeux solitaires, en réseau ou encore contre un adversaire inhumain. Mais certains diront que l’écran peut aussi agir en qualité d’écran protecteur, de cachette ultime, assurant au joueur un certain « anonymat », voire une certaine négation du corps et par extension, du corps social. On pourrait alors constater l’absence, voire la négation de l’autre, de son corps, laissant le joueur seul, avec son jeu, avec lui-même.

Les jeux en ligne ne pourraient être que des espaces fictionnels encourageant la fabulation, qui limiteraient l’action à des mouvements de doigts et qui hypnotiserait les joueurs. Le but du jeu deviendrait la fuite de la réalité et la communauté de joueurs resterait illusoire. Cette lecture du jeu en ligne n’est pas sans rappeler celle des psychiatres Marc Valleur et Jean-Claude Matysiak qui affirment dans Les nouvelles formes d’addiction : « Les jeux d’action, les jeux de rôle et les forums de discussion peuvent […] devenir un succédané de socialisation dans une réalité de grande solitude » (2004 : 204). Bien sûr, il est question ici de la dépendance au jeu et non spécifiquement du rapport au culturel. Cependant, pour arriver à cette conclusion, ces mêmes auteurs se sont appuyés sur la conception de Roger Caillois en insistant sur cette opposition entre jeu et réalité et leur « exclusion réciproque » (2005 : 177). De fait, et ici le culturel est concerné, jouer doit être compris comme fracture de l’identité.

Le projet interprétatif de Roger Caillois semble par conséquent échouer à la tâche de réfléchir au jeu identitaire et à l’identité jouée dans l’expérience vécue des joueurs en ligne. Car en se penchant sur ce que racontent les communautés électroniques de joueurs sur leurs propres activités de jeu, on découvre qu’Internet permet une mise en jeu de liens de sociabilité et encore plus, un espace d’affirmation et de reconnaissance. C’est du moins l’angle d’approche des deux prochaines contributions à ce numéro qui ont toutes deux porté une attention particulière aux discours de joueurs en ligne sur des forums de discussion.

Karim Chibout et Martial Martin, maîtres de conférences en sciences de l’information à l’Université de Reims se sont intéressés aux fanfictions de MMORPG, c’est-à-dire les fictions créées par les adeptes de jeu de rôle en ligne massivement multijoueur, pour en dégager l’affirmation identitaire de ces joueurs. Les récits, issus de braconnages, se comprennent dans un jeu de mise à distance : distances entre le joueur et sa réalité sociale, entre le joueur et le jeu et entre le jeu et la réalité. Or, au lieu de présenter cette distanciation comme une preuve de fracture, les auteurs osent penser les fanfictions comme un entre-deux, pour ne pas dire un entre-lieu de la réalité et de la fiction. Ce rôle les soumet à diverses tensions et notamment celle de l’individuel contre le collectif. Cet entre-lieu est révélateur de la position même du joueur tant dans le jeu que dans sa réalité : celui-ci doit « composer » avec le désir de s’affirmer et celui de s’intégrer. La fanfiction n’est donc aucunement un simple « produit dérivé » du jeu, mais au contraire un producteur de jeux et de réalités.

De leur côté, Madeleine Pastinelli, professeure au Département de sociologie de l’Université Laval, Simon Côté-Bouchard, étudiant à la maîtrise en sociologie et Élizabeth Papineau, anthropologue de l’Institut national de santé publique du Québec, ont cherché à comprendre comment des aspirants joueurs de poker professionnel développent sur un forum une norme alternative en matière de jeu. Ils nous font ainsi découvrir, de l’intérieur, un univers de représentations où les aspirations des joueurs guident leur pratique. Ils révèlent, entre autres, que le poker est perçu comme une discipline outrepassant le terrain du jeu. Cette discipline impose un programme et des objectifs que les joueurs disent suivre rigoureusement pour mériter leur identité de bons joueurs (qui ne s’acquiert qu’à long terme). Au coeur de ces représentations du jeu se dresse le forum qui devient un véritable espace de reconnaissance et de socialisation.

Sport et discipline

Le processus de socialisation par le jouer peut donc être compris comme une normalisation et encore plus justement comme une disciplinarisation du joueur. Disciplinarisation à outrance, les médias se plairont par exemple, et nous débordons du propos de Pastinelli et al., à ajouter des commentaires quasi sportifs sur les performances des joueurs de Texas Hold’em durant les diffusions de tournois d’importance, à faire des reportages sur la préparation physique des participants, à expliquer comment les parieurs travaillent sur eux pour qu’aucune émotion ne transparaisse dans leur corps et dans leur visage, etc. S’il est difficile de parler ici de « sportification » (Parlebas 1999), l’exemple illustre bien que jouer, c’est intérioriser les règles et les représentations sociales et peut-être encore plus justement, les incorporer. En ce sens, les sports aussi recèlent une toile complexe de significations qui se tisse entre le sujet et sa pratique sportive. À l’instar des jeux, les sports doivent composer avec nombre de contraintes : celles du corps, du social, des règlements, etc. Il est à se demander comment s’articulent ces contraintes, incorporées, avec l’expressivité et comment un tel contexte permet la projection, l’édification et la reconnaissance du soi.

Pour y répondre, Marie Level (doctorante), Éric Dugas (maître de conférences) et Thierry Lesage (chercheur statutaire) du GEPECS (Groupe d’étude pour l’Europe de la culture et de la solidarité) de l’Université Paris Descartes proposent une synthèse des principaux débats en sociologie (notamment française) des sports qui mettent en exergue cette dialectique. Cette lecture du champ d’études permettra de faire ressortir « les conditions d’expression et d’émancipation du joueur agissant » qui émergent dans l’entre-lieu des règles explicites et implicites. Le but avoué de la démonstration est de soutenir le concept d’intelligence motrice comme participante de l’identité individuelle. On retourne alors à une conception mécanique du jouer : l’incorporation des règles et par extension, du culturel, se traduit dans le geste, dans les conduites motrices et ultimement dans la construction identitaire grâce à la production de subjectivité.

Cette interprétation du jouer n’est pas sans rappeler, et les auteurs l’annoncent eux-mêmes en conclusion, les techniques de soi de Foucault. Pour affirmer ce lien, la contribution de Bonita Gracey, doctorante en sciences de l’activité physique, se penche sur le sport récréatif chez les enfants organisé par les adultes comme une technologie disciplinaire. Le modèle pouvoir/performance jouerait un rôle d’importance au sein des ligues d’enfants, à un point tel que le jeu basculerait du côté de la normalisation, contraignant la créativité, l’expérimentation et la découverte de soi. Pour appuyer cette lecture critique, l’auteure a fait de l’observation participante auprès d’une ligue de basketball d’un YMCA du sud de l’Ontario. Ses observations l’amènent à réfléchir sur la présence de l’adulte et de son contrôle sur le jeu, soit celui d’imposer aux jeunes des standards de compétition, de comportement et d’organisation.

Si le sport impose des standards, Vicky Paraschak, professeure agrégée au département de kinésiologie de la University of Windsor, et Janice Forsyth, professeure adjointe à la Western University, se préoccupent, dans leur contribution, des dimensions du genre. Elles s’interrogent alors sur l’expérience de femmes autochtones au sein du sport canadien et dégagent des réflexions sur le rôle, invisible, qu’elles occupent et disent occuper dans le système, tant sportif que communautaire. Pour le rendre visible, elles proposent d’approcher la question avec le concept mi’kmaq « two-eyed seeing », c’est-à-dire un regard métis intégrant deux visions du monde, deux yeux, soit celui de l’Autochtone et de l’Occidental. Ce point de vue particulier leur permet de considérer le travail de la femme et particulièrement celui de prendre soin de la santé et du bien-être tant des individus que de la communauté.

Les articles portant sur le sport retenus dans ce numéro réussissent à montrer l’intérêt de comprendre la tension dialectique entre règles et expressivité en s’intéressant notamment aux lignes de force, aux influences, qui traversent la sphère sportive pour s’incorporer dans l’individuel et le social. Jouer ne semble pas, pour le joueur ou le sportif, une manière de s’affranchir, mais au contraire d’exposer sa docilité. L’ethnologie doit-elle s’en inquiéter ? Christian Bromberger (1995), en collaboration avec Alain Hayot et Jean-Marc Mariottini, rassure sur cette « passivité » du participant en interrogeant le concept de passion[3] collective à travers le football. Ce dernier se voit comme un rite collectif, avec ses leaders, son langage, voire son style qui lui est spécifique, mais qui se développe à l’intérieur d’une matrice symbolique. Cette matrice explique le processus d’identification chez les spectateurs, ainsi que sa codification. Jouer demeure une célébration (de l’)identitaire, un moment fort de réjouissances du social et par conséquent une manière toute spécifique de s’exprimer.

Pour souligner la spécificité culturelle du jouer, Laurent Sébastien Fournier, maître de conférences en sociologie du sport et des loisirs à l’Université de Nantes, place le « folk-football » au Royaume-Uni sous l’ethnoscope. Il s’intéressera notamment au cas du « ba’game » de Kirkwall qui divise, durant les fêtes de fin d’année, la localité en deux clans (« Uppies » et « Downies »). qui chercheront à rapatrier le ballon dans leur camp. Il examine alors le jeu et ses mythes d’origine afin de comprendre les revendications identitaires locales. Sous cette perspective, les joutes traditionnelles font identité et participent à inscrire le local dans son contexte national et historique. Pour pousser davantage la discussion sur le processus identificatoire, ou plutôt pour insister sur sa multidimensionnalité, l’auteur interrogera l’expérience vécue des joueurs. L’identité, dans le sport, revêt dès lors des caractères sociaux, physiques, psychologiques, et corporels, qui donnent au jeu un grand air de fête.

Ponctuant la thématique sur le mot « fête », l’article conclusif semble inviter la discipline d’une part à renouer avec ses préoccupations qui l’ont fait naître et d’autre part à dénouer une nouvelle préoccupation au sein des Play Studies : le patrimoine culturel immatériel. Or, il ne s’agit seulement d’une avenue possible ; le culturel est un immense terrain de jeux, identitaires comme disciplinaires. Mécanique de la culture ou mode d’expression, d’affranchissement et de franchissement de l’identité, jouer, c’est, en un mot, être.

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If games and sports are theatres of worldviews that bring identity construction into play, it is surprising to notice the relative “intellectual disinterest” they inspire (Wendling 2002: 31), especially in Ethnologies. Throughout the journal’s entire history, only three articles on play (i.e. re-creation of self and recreation in the form of a leisure or sports activity) have been published. The first article was by the Canadian specialist of folklore, Delf Maria Hohmann, who, in a 1985 regular issue of Canadian Folklore Canadien, analysed a game involving dolls. Basing his ideas on Roger Caillois’ work, he highlighted the behavioural models in the game that reproduced or, more accurately, reflected the young player’s family experience. The child’s game was here described as a cultural construction that participated in the learning of both social norms and self-expression. Twelve years later, our colleague Michael Robidoux, Professor in the School of Human Kinetics at the University of Ottawa, explored the theme of masculine social construction by discussing nuances between the masculine and non-masculine in a hockey team. He described hockey competitions as vectors of sociability, or, more precisely, as forms of normative social glue. This functionality necessarily involves power relations, both inside and outside the game (1997). Finally, Christine Dallaire, who is also a Professor in the School of Human Kinetics at the University of Ottawa, contributed to the “Language and Culture” 2003 issue. The goal of her article was to gain a better understanding of the paradox between the concept of competitiveness inherent to the Alberta Francophone Games and the recreational aspect justifying the Francophone meeting and, ultimately, the Games themselves. She thus tried to identify the limits of the experience of play which is highly complex owing to its contradictory nature.

Thanks to its creation of possibles, play is a highly promising area for field research on identity, but its interpretative potential remains misunderstood, or, more precisely, neglected, in both English- and French-language ethnological research. Yet, the three articles mentioned above show clearly that play and sports are focal points for individual and collective expression. This was a main issue in the work of the early folklore specialists who prepared the ground in this area. For example, Madeleine Doyon-Ferland, in her 1948 PhD thesis and later work (Paradis 1980), produced monographs on traditional games in an attempt to show the usefulness of studying that form of cultural expression. She was successful. Games and sports are now accepted subjects of study, as for example in Clifford Geertz’s study of Balinese cock fighting (1983) and André Rauch’s (1994) analysis of radio commentary on boxing. Their work continues to mark the field. The twenty-fifth issue of Terrain (1995) was devoted to games and sports in relation to changes in the social interactions that provide the framework and generate sporting and leisure activities. In 2006, a special issue of Ethnologie française focussed on extreme sports, in which feeling of enthusiasm and danger push the limits of identity construction even further. For both the journal and the discipline, there has been food for thought on the topic of play as a founding theme, on one hand, and, on the other hand, in order to reaffirm the relevance of play in understanding culture.

Understanding play

Understanding the cultural component of play was “first” the mission of the Dutch historian, Johan Huizinga, who described play as a meaningful and profoundly cultural action in his book, Homo ludens (1951). This reading abandoned the conception of play as a mechanical action. Play thus became a “supracultural” action. As a producer of culture, play generates and breathes life into culture by instituting codes and rules. When rules and codes are imposed, they create desires, inventions, fantasies, joy and freedoms, which (also) create culture. Play also remains a product of culture because it is constantly reinvented by humans in order to express their ways of being themselves and in groups. In Les jeux et les hommes (1967), Roger Caillois claimed to be the heir of this perspective. His intent was to identify what can be called the “grammar of play,” a tool for the classification of games according to their nature, for example, as agôn (skill), aléa (luck), mimicry (pretending) or ilinx (vertigo or thrill-seeking), and to their degree of freedom, which ranges from paidia (turbulence) to ludus (discipline). Caillois used the grammar to analyse the internal logic of games and pick out their various features (freedom, separation from space-time, uncertainty, unproductiveness, imposition of rules and fiction) and forms (cultural, institutional and transgressive).

At the beginning of the preceding paragraph, “first” has to be in scare quotes because at this time, ethnologists had also been studying empirical examples of the cultural aspect of play. Examples are Marcel Griaule in his work among the Dogons and Elsdon Best in his work among the Maori (cited in Mauss 1967). In the thirteenth issue of Socio-Anthropologie, Marcel Mauss’ course notes from 1937[4] were made public. They shed new light on what he said about games, particularly in his Manuel d’ethnographie. For Mauss, to play is to embrace myths and rites. In fact, according to him, all games, whether agnostic or divinatory, are part of a system of meaning in which their function is the ideation of the social. Consequently, play is at the heart of society, and all participants have roles in every match (in Bouvier 2003). Here, we can see echoes of Lévy-Bruhl’s (1949) concern with participation. Thus, play becomes, in contradiction with Huizinga’s theory, a kind of cultural mechanism in which players are participants. Yet, Mauss’ heritage remains unclear. It is difficult to claim that Claude Lévi-Strauss continued to carry the baton since he really discussed play only under the cover of metaphor. Nonetheless, in The Savage Mind, he wrote that “All games are defined by a set of rules…” (1996: 30), thus authorizing structuralism to look at play.

In order to clarify this rather irritating lack of clarity and to point out a blind spot in historical studies on play in France, Thierry Wendling, ethnologist at the CNRS, devotes his contribution in this issue to the rivalry between Claude Lévi-Strauss and Roger Caillois, with respect to cultural relativism in particular. This (famous) quarrel seems to have influenced the interests of ethnologists. It is as if the followers of Lévi-Strauss thought that looking at games other than through metaphor was equivalent to treason. Quoting Huizinga, who was traditionally associated with Roger Caillois (who claimed to be his disciple), thus came to be more or less taboo. Investigating games meant joining Caillois’ team. This special aspect of the ethnology of games raises a number of critical questions, in particular: is ethnologists’ lack of interest in games simply the result of an adversarial atmosphere?

By inviting ethnologists to read the debate in this context, Wendling might also be opening the door to challenging perception of intellectual posterities, especially that of Huizinga. In Ethnologie des joueurs d’échecs, Wendling refers to Jean Pouillon’s “brilliant” review of Homo ludens. In it, Pouillon provides a view of Huizinga position that is in line with Lévi-Strauss’ interpretive undertaking (2002: 46). Could Caillois be an illegitimate heir of Huizinga’s thought? This is a question that might indeed be asked because it is easy to point out contradictions between the two authors’ theories. One example, which is heavy with consequences, is that Caillois said he had reread Huizinga when he insisted that “play is essentially a separate occupation, carefully isolated from the rest of life” (1967: 37 [Our translation]). Yet, Huizinga was clear on this:

An independent component of “everyday life,” [play] is located outside of the mechanism of immediate satisfaction of needs and desires. Much better, it interrupts the mechanism. It insinuates itself into it, like a temporary action, with an end in itself, performed with a view to the satisfaction that lies in the performance itself. This is at least how games look to us when considered in themselves and at first sight, as intermissions in daily life, as leisure activities. However, already as something that regularly alternates, it is an accompaniment, complement, even part of life in general. (1951: 25-26 [Our translation.]).

This fragment of text introduces the idea that even when a game is on the fringe of regular activities, it is nonetheless an integral part of the player’s world. Thus, the player does not abandon it; on the contrary. This is an important nuance because, in Caillois’ theory, players and individuals seem not to know each other. Players “experience” another life, which is fictional, or else a double life. It is as if humans were “mind controlled” when they play, as if there were a kind of schizophrenia of play. Caillois describes this rupture in reality on the very first page of Les jeux et les hommes[5]: “the players find themselves back at zero and in the same conditions as at the start.” (1967: 12 [Our translation.]) Nonetheless, it is difficult to understand how this eternal return to the inexistential enables individuals to construct their identity.

This problem in the conceptual architecture of this approach is raised in the article of Maude Bonenfant, PhD in Semiology. She reflects on the relationships between play and culture in various theoretical debates. In order to do this, she suggests a distinction between the function of play and the notion of play. According to Bonenfant, Huizinga’s interpretative approach, and, similarly, other so-called classical approaches, try to theorize play as a notion. Bonenfant, however, sees games as productions of specific historical contexts and cultures. To her, games no longer appear as creative activities, especially not of freedoms, but as products that are used to establish meaning. She succeeds in identifying a number of limitations in the classical approach, limitations that have also been pointed out by authors with completely different backgrounds, such as Jacques Henriot, Eugen Fink, Colas Duflo and Thomas M. Malaby. This new perspective, which explores the function of play, seeks to give players back authority over the meaning they give to their own play. Giving play back to players makes it possible both to open the door to a semiotics of games, a new virgin approach full of potential, and to implicitly affirm the relevance of ethnology in Play Studies.

With respect to the last point, Jacques Henriot said in Sous couleur de jouer that his perspective is well in accordance with social and cultural anthropology: both seek meaning in games and assert a conception of play that is simultaneously social and global. Moreover, play is seen as the reflection and offspring of an entire conceptual system (1989). Here, it seems easy to discern a filiation with Marcel Mauss. Yet, Henriot dissociates himself from Mauss’ thought, and argues that in his essay, The Gift, Mauss describes the potlatch as a game that subjects its players to constraints they cannot escape. Henriot thus deplores the lack of reflection on the players’ play (1989). However, there seems to be a problem of meaning. Mauss (and by extension his heirs), does indeed base his analysis on players’ experiences to identify the meaning of their game. To hark back to Bonenfant’s second point, there seems to be a misunderstanding concerning the function of play and the notion of play. The French ethnological tradition may perhaps be on the other side of this fine line. Yet it could also be on the classical side because Huizinga himself insists on the fact that analysts have to grasp play not in its intensity, but “in its totality.” (1951: 18 [Our translation.]) However, in this case the author is speaking about a totality that is not strictly cultural; it is a totality that in the end leaves very little room for internal mechanisms. In other words, the debate around play and culture is still very much alive because a number of issues have still not been resolved.

Playing reality online

In order to shed light on these mysteries, we have chosen some studies that focus more specifically on games, namely, online games. Once hooked up to a computer, the screen, which is somewhere between a vertical game board, a shield and a window to another world becomes a playground: there are solitary games, networked games and games against inhuman adversaries. However, some also say that the screen can be used as a cloak, an ultimate hiding place, providing the player with a degree of anonymity, even a certain negation of the body and, by extension, of the social body. We may then find an absence or even negation of the Other, of the Other’s body, thus leaving the player alone with the game, alone with himself or herself.

Online games may be purely fictional spaces that encourage the creation of fables and limit action to apparently hypnotic finger movements. The purpose of such games might be to escape reality, and the community of players might remain illusory. This reading of games has some similarities with that of the psychiatrists Marc Valleur and Jean-Claude Matysiak, who say in Les nouvelles formes d’addiction: “Action games, role-playing games and discussion forums can […] become substitutes for socialization in a world of great solitude.” (2004: 204 [Our translation.]) Of course, what is in question here is addiction to games and not their specific relation to culture. However, in order to come to their conclusion, these authors base their work on Roger Caillois’ conception, insisting on the opposition between games and reality, and their “reciprocal exclusion.” (2005: 177 [Our translation.]) Indeed, and in this case culture is concerned, play has to be understood as a break in identity.

Roger Caillois’ interpretative program thus seems to fail to conceptualize the play of identities and the identities played by online players. By focussing on what electronic communities of players say about their own game-playing, we find that the Internet makes it possible to establish social ties online and, moreover, creates a space for affirmation and self-recognition. At least, this is the angle of attack of the next two contributions to this issue, which both give special attention to the discourse of online players in discussion forums.

Karim Chibout and Martial Martin, Maîtres de Conférences in Information Sciences at the Université de Reims have studied MMORPG fan fiction, in other words, fictional stories created by fans of massively multiplayer online role-playing games. Chibout and Martin’s goal was to see how players assert their identities. The narratives, which result from a kind of appropriation of other people’s stories, are understood in an interplay of distancing: distance between the player and his or her social reality, between the player and the game, and between the game and reality. Instead of presenting the distancing as proof of a fracture, Chibout and Martin dare to think of fan fiction as something that is in-between, as a place betwixt reality and fiction. This role submits the players to various forms of tension, in particular that of the individual against the collective. This between place is revealing of the player’s position both in the game and in his or her reality: the player has to cope with the desire to assert himself or herself, and the wish to integrate into the community. Fan fiction is thus in no way a simple “by-product” of a game, but, on the contrary, a producer of games and realities.

Madeleine Pastinelli, Sociology Professor at Laval University, Simon Côté-Bouchard, MA student in Sociology, and Élizabeth Papineau, Anthropologist at Québec’s Institut national de santé publique, have tried to see how aspiring professional poker players participating in a discussion forum develop alternative norms for the game. They thus reveal, from the inside, a universe of mental pictures in which players’ aspirations guide their practices. Among other things, we learn that poker is perceived as a discipline that goes beyond the poker table. It sets a program and objectives that players claim to follow strictly in order to merit a “good player” identity (which can be acquired only over the long term). At the heart of these ideas about the game, there is the forum, which becomes a veritable space for recognition and socialization.

Sports and discipline

The process of socialization through play can thus be understood as a form of standardization, and perhaps more accurately as a disciplining of the player. The media, for example, tend to fixate on excessive discipline (here we are going beyond Pastinelli et al.’s study), and add quasi-sports comments about the performances of Texas Hold’em players during broadcasts of major tournaments, report on participants’ physical preparation, explain how bettors train players so that no emotions show in their bodies or on their faces, etc. While it may be difficult in this case to speak of “sportification” (cf. Parlebas, 1999), this is a good example of the fact that to play is to interiorize rules and social images, and, perhaps more accurately, to incorporate them. In this sense, sports also harbour a complex web of meaning that is woven between the subject and the sport. Like games, sports have to cope with many constraints: those of the body, society, rules, etc. We have to ask how the constraints are structured and incorporated in relation to expressiveness, and how this context makes it possible to project, build and recognize oneself.

In order to answer these questions, Marie Level, PhD student, Éric Dugas, Maître de conferences, and Thierry Lesage, full-time researcher at the GEPECS (Groupe d’étude pour l’Europe de la culture et de la solidarité) at the Université Paris Descartes have produced a summary of the main debates in sociology of sport (in particular in France), which sheds light on this dialectic. This reading of the research identifies “the conditions of expression and emancipation of the acting player” that emerge between explicit and implicit rules. The claimed purpose of the demonstration is to support the concept of driving intelligence as a participant in individual identity. We are thus coming back to a mechanical conception of play: incorporation of rules and, by extension, of culture, is translated into action, motor behaviour and ultimately identity construction thanks to production of subjectivity.

As the authors note in their conclusion, this interpretation of play is reminiscent of Foucault’s technologies of the self. This link is confirmed in the contribution by Bonita Gracey, PhD student at the School of Human Kinetics, in which she looks at recreational children’s sports organized by adults, and analyses them as a disciplinary technology. The power/performance model seems to have an important role in children’s leagues, to such a point that play may shift into standardization, thereby constraining creativity, experimentation and self-discovery. Gracey supports this critical reading through a participant-observer study she did in a YMCA basketball league in southern Ontario. Her findings lead her to reflect on the presence of adults and their control over play, which imposes competitive, behavioural and organizational standards on young people.

While sports may impose standards, the contribution by Vicky Paraschak, Professor in the Department of Kinesiology at the University of Windsor, and Janice Forsyth, Assistant Professor at Western University, focuses on gender aspects. They examine the experience of Aboriginal women in Canadian sport, and reflect on the invisible role that they play and claim to have in the system, in terms of both sport and the community. In order to make the role visible, Paraschak and Forsyth propose approaching the issue through the Mi’kmaq concept of “two-eyed seeing,” in other words, a mixed perspective that integrates two visions of the world: that of Aboriginal people and that of Western people. This special point of view enables them to discuss the work women do, in particular with respect to taking care of the health and well-being of individuals in the community.

The articles on sport in this issue succeed in showing the need to understand the dialectical tension between rules and expressiveness, in particular with respect to power relations and influences that flow through sports and are incorporated in individuals and society. For players and those who engage in sports, playing does not seem to be a way of becoming free, but on the contrary a means of demonstrating docility. Should ethnologists be worried by this? Christian Bromberger, in collaboration with Alain Hayot and Jean-Marc Mariottini, allay fears about participants’ “passiveness” by examining the concept of collective passion[6] through soccer. Soccer is portrayed as a collective ritual, with leaders, a language and even a style that is specific to it, but that develops within a symbolic framework. The framework explains the spectators’ process of identification, as well as how it is codified. (1995) Play is a celebration of identity and an identification celebration, a high point in social rejoicing and consequently a very specific way of expressing oneself.

In order to highlight the cultural specificity of play, Laurent Sébastien Fournier, Maître de conférences in Sociology of Sport and Leisure Activities at the Université de Nantes, places “folk-football” in the United Kingdom under the ethnoscope. In particular, he examines the case of Kirkwall’s end-of-year “Ba’ Game” which divides the area into two clans (the “Uppies” and the “Downies”). Both clans try to get the ball into their goals. Fournier examines the game and its myths of origin in order to understand local identity claims. From this perspective, traditional jousting creates identity and help to establish the local in the national and historical context. To take the discussion on the identification process further, or rather to insist on its multidimensional nature, Fournier examines players’ experiences. In sport, identity has social, physical, psychological and corporal features, which make play a great celebration.

Marking the theme with the word “celebration,” the final article seems to invite the Play Studies to both re-establish ties with the concerns from which it emerged, and unravel a new issue: immaterial cultural heritage. This is not merely a possible avenue; culture is an immense playing field, with respect to both identity and discipline. Whether it is a mechanical aspect of culture or a form of expression, emancipation and overcoming of identity, to play is, in a word, to be.