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Contexte

Dans presque toutes les sphères d’intervention sociale, la course à la productivité inspirée de l’entreprise privée se propage dans la vie collective, renforçant ainsi l’idéologie individualiste et accentuant, par conséquent, la responsabilité individuelle des problèmes sociaux. Cette tendance dévalorise les pratiques démocratiques dans la mesure où elles ne garantissent pas l’atteinte rapide de résultats observables et quantifiables, l’évaluation étant devenue l’instrument de mesure de la valeur politique des pratiques.

Par exemple, dans le secteur des services sociaux et de la santé au Québec, on peut repérer les conséquences de ces transformations qui fragilisent l’appropriation de l’acte d’intervention. Le recours aux pratiques fondées sur des « données probantes », que l’on désigne aussi par l’expression de « best practices », tend à dévaloriser l’autonomie et le jugement professionnel des intervenants et intervenantes tout en négligeant les points de vue et particularités culturelles ou identitaires des populations visées par ces programmes d’intervention. Dans cette logique verticale d’intervention, la contribution des intervenants sociaux se limite plus souvent qu’autrement à l’application sur le terrain d’un programme conçu essentiellement par des experts de la recherche et de la gestion.

Ce contexte ne questionne pas seulement le rôle des intervenants, des militants et des populations visées, mais aussi celui des chercheurs et des gestionnaires. Ces groupes sont invités, d’une part, à contribuer à l’amélioration de cette « productivité sociale » et, d’autre part, à y faire participer l’ensemble des acteurs concernés.

Objectifs de l’événement

Par la tenue de ce colloque, nous proposons de créer un lieu de débat, d’échanges de savoirs et de partage d’expertises entre chercheurs, étudiants, intervenants et gestionnaires sur le thème global du « renouvellement démocratique » des pratiques d’action et d’intervention sociales.

En qualifiant de « démocratique » le renouvellement lui-même, nous voulons attirer l’attention sur les conditions politiques du processus de renouvellement des pratiques et par le fait même sur les changements sociaux qu’elles peuvent ou non entraîner. Tout en nous interrogeant sur le rôle des rapports de pouvoir dans le renouvellement démocratique des pratiques d’intervention sociale, nous voulons réfléchir sur les repères démocratiques des pratiques qui guident l’ensemble de ces acteurs.

Plus précisément, le colloque vise à :

  • réfléchir de façon critique sur le contexte global et les conditions spécifiques des pratiques démocratiques de l’action et de l’intervention sociales, les problèmes, les pistes d’explication et les avenues de solution ;

  • inviter les participants et participantes (provenant des milieux universitaires, de la recherche, de l’intervention et de la gestion de même que les populations visées par l’intervention) à partager leurs repères normatifs de la visée démocratique des pratiques qu’ils mettent en oeuvre ;

  • prendre en compte des perspectives culturelles et politiques différentes en ce qui regarde les enjeux du renouvellement démocratique des pratiques d’action et d’intervention sociales ;

  • diffuser les connaissances scientifiques et les savoirs issus des milieux de pratiques résultant du colloque.

Le renouvellement démocratique des pratiques

Souligner l’attribut « démocratique » du renouvellement des pratiques permet d’éclairer la diversité des dynamiques et des processus mis en oeuvre lorsqu’il s’agit de penser de façon démocratique le sens pratique de l’intervention sociale. En fait, il s’agit de cerner les problèmes de conception et d’application qui y sont associés. À l’occasion de cet événement, nous invitons les participants et participantes à examiner de façon critique les repères normatifs associés à la visée démocratique de pratiques d’intervention sociale. Sur quels repères s’appuient les processus d’appropriation de l’intervention qui visent un renouvellement démocratique des pratiques ? Dans quels cadres organisationnels ces processus peuvent-ils émerger ? Comment réagit-on aux inégalités de pouvoir dans une organisation ? Comment susciter le désir d’implication collective dans un contexte où l’individualisme privatisé est survalorisé ? Comment sortir du carcan de la recherche de consensus et de la fusion groupale ? Voilà le type d’interrogations qui pourraient être abordées lors de cette rencontre collective.

Il importe non seulement de confronter les idéaux démocratiques de l’intervention sociale aux pratiques qui les incarnent et de prendre connaissance des contradictions que cela peut révéler, mais aussi d’en comprendre le sens et la direction.

Les dimensions du renouvellement démocratique des pratiques

Afin de délimiter le cadre des débats souhaités lors du colloque, nous retenons trois grandes dimensions liées au renouvellement démocratique des pratiques qui traverseraient les trois thèmes du colloque et l’ensemble des champs de pratiques.

Premièrement, pour tenter de se dégager de l’utilisation faussement consensuelle du qualificatif « démocratique » lorsque confronté aux réalités de la pratique, il est primordial d’échanger sur les conceptions qui définissent le caractère démocratique du renouvellement de l’action et de l’intervention sociales.

Deuxièmement, il convient de mieux connaître les problèmes auxquels se heurtent les intervenants et intervenantes lorsqu’ils tentent de mettre en oeuvre une pratique d’intervention sociale de manière démocratique afin d’identifier les obstacles et les impasses de leur renouvellement.

Et, enfin, il serait pertinent de prendre connaissance de certaines pratiques novatrices visant le renouvellement démocratique des pratiques d’action et d’intervention sociales comme celles qu’ont mises sur pied nombre d’intervenants et d’intervenantes de différents pays. Ce colloque proposera donc des réflexions collectives sur les logiques démocratiques de leurs pratiques ainsi que sur la façon dont elles s’incarnent dans l’action à travers une grande diversité de dispositifs et de projets.

Le choix de ces dimensions repose sur le désir de mettre en place des conditions favorables à l’apprentissage collectif à travers l’analyse de nos expériences respectives qui résultent de nos efforts d’appropriation des actes d’intervention ayant une visée démocratique.

Dans cette optique, nous vous invitons à considérer ces grandes dimensions pour chacun des thèmes proposés ci-dessous.

Le comité organisateur vous invite à soumettre des propositions de communication qui s’articuleraient autour des thèmes suivants.

  1. Paradoxes et contradictions de l’intervention

    Réflexions autour des tensions paradoxales qui peuvent exister dans les rapports entre les gestionnaires, les chercheurs, les intervenants et intervenantes, et les populations visées par l’intervention lorsqu’il s’agit par exemple de développer ou de favoriser l’autonomie sociale. La confrontation entre les désirs des gestionnaires et des intervenants et intervenantes ainsi qu’entre ceux des intervenants et intervenantes et des populations visées, etc. Les rapports contradictoires entre les trois grands principes éthiques de la pratique démocratique dans l’action et l’intervention, soit la liberté, l’égalité et la solidarité.

  2. Cadres organisationnels et processus d’appropriation de l’intervention

    Réflexions autour des structures d’encadrement et d’animation des pratiques d’intervention au sein des organisations (tables de concertation, management inspiré de l’entreprise privée, contrats de services, cogestion, travail en collectif, recherche en partenariat, etc.), d’une part, et, d’autre part, l’analyse des processus d’appropriation que ces cadres peuvent susciter. En structurant de façon particulière les cadres de l’action, ces modes de gestion du travail social orientent ou influencent la dynamique organisationnelle de l’intervention, en accroissant ou en réduisant les possibilités de renouvellement démocratique des pratiques d’intervention.

  3. Rapports de pouvoir des figures d’autorité dans l’action et l’intervention

    Réflexions autour des obstacles à l’établissement de relations visant l’égalité entre les membres et qui résultent de rapports d’autorité (p. ex. : paternalisme) ou de figures de pouvoir (p. ex. : l’expert). Ces types de rapports peuvent, souvent de façon inconsciente, produire des relations de domination, d’oppression, de colonisation, d’aliénation, de fusion, etc. Comment, par exemple, se définissent les enjeux de pouvoir associés au rôle que l’on tend à faire jouer à la recherche sur l’intervention actuellement ?

Veuillez noter que le comité organisateur est ouvert à recevoir des propositions sur des thèmes autres que ceux indiqués, pourvu qu’ils soient en lien avec le thème du renouvellement démocratique des pratiques d’intervention.

Renseignements pratiques pour soumettre vos propositions de communication

Les propositions de communications doivent parvenir au comité organisateur du colloque avant le 1erjanvier 2008 et doivent comprendre :

  • le titre de la communication ;

  • le nom et prénom du ou des auteurs et présentateurs ;

  • leur statut de participant (professeur, étudiant, intervenant, etc.) ;

  • la langue de communication (français ou anglais) ;

  • le thème dans lequel s’insère la communication ;

  • un résumé entre 300 et 500 mots de la communication (en format Word, police Arial de taille 12) ;

  • une adresse de référence (électronique, de préférence, ou postale).

Les propositions seront évaluées selon leur pertinence en fonction des thèmes proposés par un sous-comité d’évaluation formé à même le comité organisateur de l’événement.

Par voie électronique :
colloquenps@gmail.com
 Par la poste :
Revue Nouvelles pratiques sociales
École de travail social
Université du Québec à Montréal
Case postale 8888, succ. Centre-Ville
Montréal (Québec), Canada
H3C 3P8
 Par télécopieur : (514) 987-8795

Comité organisateur de l’événement

  • Jacques Rhéaume : Directeur de Nouvelles pratiques sociales, professeur au Département de communication sociale et publique, Université du Québec à Montréal.

  • Michel Parazelli : Rédacteur en chef de Nouvelles pratiques sociales, professeur à l’École de travail social, Université du Québec à Montréal.

  • Évelyne Baillergeau : chercheure postdoctorale au Centre de recherche de Montréal sur les inégalités sociales et les discriminations (CREMIS).

  • Jules Duchastel : professeur au Département de sociologie, Université du Québec à Montréal, titulaire de la Chaire de recherche du Canada en Mondialisation, citoyenneté et démocratie.

  • Jean Gagné : organisateur communautaire et chercheur-praticien au CSSS Jeanne-Mance, étudiant de 3e cycle au Département de sociologie, Université du Québec à Montréal.

  • Lise Gervais : coordonnatrice générale à Relais-femmes.

  • Elisabeth Harper : professeure à l’École de travail social, Université du Québec à Montréal.

  • François Huot : professeur à l’École de travail social, Université du Québec à Montréal.

  • Christian Jetté : professeur à l’École de service social, Université de Montréal.

  • Annie Larouche : secrétaire de rédaction de Nouvelles pratiques sociales, étudiante de 2e cycle à l’École de travail social, Université du Québec à Montréal.

  • Christopher McAll : professeur au Département de sociologie, Université de Montréal, directeur scientifique du CREMIS.

  • Paule McNicoll : professeure, School of Social Work and Family Studies, University of British Columbia.

  • Maria Nengeh Mensah : professeure à l’École de travail social, Université du Québec à Montréal.

  • Olivier René : coordonnateur à l’organisation, étudiant de 2e cycle à l’École de travail social, Université du Québec à Montréal.

  • Jacob Amnon Suissa : professeur à l’École de travail social, Université du Québec à Montréal.

Pour de plus amples informations

Visitez notre site Web à <www.nps.uqam.ca/colloques> ou écrivez-nous à <colloquenps@gmail.com>.