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Les périodes de transition qui marquent les itinéraires professionnels suscitent, depuis plusieurs années, intérêts et investigations dans le champ des recherches en psychologie du travail et des organisations. Ces périodes sont variables dans leur durée et leur contenu ; elles peuvent être objectivées aux niveaux social et évènementiel. Elles supposent, du côté des sujets, un travail d’élaboration psychique sur les changements qu’ils instaurent.

La transition psychosociale (Parkes, 1971) que constitue l’accès à un statut et à des fonctions d’encadrement mobilise des processus sociaux et subjectifs complexes. Comment s’opère le « devenir cadre » ? Quelles sont les modalités d’intégration des sujets dans un rôle managérial, dans de nouveaux rapports fonctionnels et hiérarchiques à autrui ? Comment, au cours de la transition, les nouveaux cadres organisent-ils leurs activités, cherchent-ils à participer à la transformation de leurs rôles et de l’organisation ?

Problématique de la recherche

À de telles questions, sous la thématique générale de la socialisation organisationnelle, les recherches du domaine livrent des réponses différentes. Cet article veut contribuer à étoffer ces réponses.

Ainsi, dans les perspectives fonctionnalistes, la socialisation est analysée comme un processus par lequel un individu acquiert les connaissances, les attitudes et les conduites congruentes avec l’organisation d’accueil (van Maanen et Schein, 1979). Les stratégies et tactiques organisationnelles ont pour fonction « d’assurer la continuité des valeurs centrales de l’organisation et permettre au sujet de s’aligner sur ces valeurs » (Cable et Parsons, 2001 : 1). Les indicateurs de la socialisation « effective » des individus (Anakwe et Greenhaus, 1999; Hau Siu Chow, 2002; Thomas et Anderson, 2002; Cooper-Thomas, van Vianen et Anderson, 2004) sont la maîtrise de la tâche, le fonctionnement dans le groupe de travail, la connaissance et l’acceptation de la culture organisationnelle, la connaissance de soi et l’achèvement dans le processus de clarification du rôle. Sous ces perspectives, les sujets se développent par apprentissage culturel jusqu’à « percevoir, penser, évaluer comme des managers » (Hill, 1992) s’ajustant ainsi aux attentes du rôle.

D’autres modèles mettent l’accent sur les capacités des sujets à agir sur leur environnement de travail pour le transformer et s’y transformer corrélativement. Selon ces modèles de la « pro-activité » (Morrison, 1993 ; Ashforth, 2001), la socialisation ne s’impose pas à un professionnel passif. La reconnaissance d’une latitude du sujet à se positionner dans cet environnement et à diriger ses activités se trouve à l’origine du concept « d’orientation de rôle » (role orientation). Il désigne « la façon dont les sujets accomplissent (perform) leur rôle et s’adaptent aux exigences de la tâche » (Jones, 1986 : 263). Conçue sur un continuum, ses extrémités correspondent, pour l’une, à la conformité aux attentes de rôle, pour l’autre, au développement de conduites innovantes.

Dans ce champ de recherche, les « théories des transitions de rôle au travail » (W.R.T : Work Role Transitions) ont bénéficié notamment des travaux empiriques de Nicholson (1984) et d’auteurs tels Ashforth et Saks (1995), Feij et al. (1995), Ostroff et Koslowski (1992). Leurs apports ont permis de rendre intelligibles, lors de ces transitions, les processus à l’oeuvre dans les échanges sujet-environnement, c’est-à-dire d’expliquer les modalités d’adaptation aux nouveaux rôles professionnels et les modifications réciproques du sujet et de son environnement de travail. Pour Nicholson, les stratégies d’orientation sont « fonction des contraintes et opportunités du rôle, ainsi que des besoins et des attentes de la personne » (1984 : 175). Selon la perspective de cet auteur, les stratégies d’adaptation des nouveaux entrants dans une organisation sont le développement personnel au cours duquel le sujet modifie ses cadres de référence et ses valeurs pour répondre aux exigences externes et le développement de rôle. Celui-ci désigne la stratégie proactive par laquelle le sujet manipule et modifie les exigences et les différents secteurs du rôle dans le sens de ses capacités. De la sorte, les changements qu’il introduit affectent les objectifs assignés à la tâche, les méthodes et la planification du travail, ses relations interpersonnelles.

Dans le prolongement de ces travaux importants nous proposons une approche théorique des processus de socialisation organisationnelle et de l’orientation de rôle (ici, de cadres de l’Action Sociale) qui s’appuie sur l’hypothèse de proactivité et qui veut la compléter. Si les nouveaux entrants dans une organisation sont capables de s’adapter à des normes, de les infléchir et de les ajuster à leurs propres visées de développement personnel et d’actions au travail, c’est aussi en fonction d’activités et de tâches qui tiennent à leur insertion dans différents milieux d’existence. Nous estimons, sous ce jour, que l’investigation des processus de socialisation organisationnelle et d’orientation de rôle doit appréhender la pluralité des comportements de rôle professionnel dont le sens se construit dans le jeu des relations des nouveaux entrants à l’organisation, à leurs pairs ou supérieurs hiérarchiques (Graen, 1976 ; Settoon et Adkins, 1997 ; Bauer et Green, 1998). Elle suppose aussi la prise en compte des ancrages sociaux et relationnels des sujets dans d’autres milieux d’existence. Car ceux-ci sont, dans les trajectoires et les engagements professionnels des sujets, aussi bien pourvoyeurs de ressources et de soutiens (matériels, informationnels, psychologiques) que générateurs de contraintes (Baubion-Broye et Hajjar, 1998 ; Almudever, Croity-Belz et Hajjar, 1999 ; Dupuy et le Blanc, 2001 ; Depolo, Fraccaroli et Sarchielli, 2000 ; Martin-Canizarès, 2005 ; Martin-Canizarès et Baubion-Broye, 2006). Ainsi présumons-nous que si, dans une phase de transition de la carrière professionnelle des sujets, l’orientation qu’ils impriment à leurs rôles présente des variabilités interindividuelles, c’est parce qu’elle dépend, au-delà de facteurs organisationnels, des significations qu’ils prêtent à leurs multiples activités (au travail, familiales, personnelles…) et de leurs efforts pour les rendre compatibles ou les séparer, pour se prémunir des conflits ou des tensions qui peuvent naître entre elles.

Population et méthode

La population étudiée

La population étudiée est constituée de quinze cadres de l’Action Sociale, choisis à partir des critères suivants. Ce sont des personnes qui ont exercé initialement des fonctions classiques du travail social (éducateur spécialisé, assistant de service social, animateur socioculturel) et qui occupent, depuis sept à dix mois, un statut de cadre intermédiaire et des fonctions managériales pour la première fois dans le parcours professionnel. C’est en accord avec les travaux sur la socialisation organisationnelle que cette période a été retenue (Bauer, Morrison et Callister, 1998 ; Ashforth et Saks, 1996 ; Sutton et Griffin, 2004 ; Barge et Schlueter, 2004). La relative sévérité des critères de choix explique pour une part essentielle le faible échantillon des « répondants » (recrutés dans une zone géographique pourtant étendue : celle du Grand Sud de la France).

Les cadres rencontrés (onze femmes et quatre hommes) sont âgés de 35 à 53 ans. Ils exercent leurs fonctions auprès d’établissements publics, de collectivités territoriales, d’associations. L’Action Sociale territorialisée et les champs institutionnels de l’insertion, de l’accompagnement ou de la rééducation représentent les secteurs d’activité où ils interviennent. Les publics destinataires de ces services d’aide sont divers : familles, femmes en difficulté, jeunes adolescents ou majeurs bénéficiaires de mesures de protection judiciaire, adultes handicapés, personnes âgées…

Il convient de remarquer que les attributions des cadres de notre étude dans les organisations où ils exercent sont très proches puisqu’elles concernent pour l’essentiel l’application, la gestion, l’évaluation de mesures d’aide à des catégories de personnes en difficulté et l’animation d’équipes de professionnels du travail social.

Procédure de recueil et de traitement des données

Des entretiens semi-directifs

L’enquête a été réalisée à base d’entretiens semi-directifs approfondis (d’une durée de deux heures trente environ) conduits en dehors du lieu de travail des sujets. Le guide d’entretien, construit a priori, est constitué de questions ouvertes sur la trajectoire professionnelle, la définition et la formalisation des fonctions du cadre, les missions de l’organisation… De façon opérationnelle, l’orientation de rôle est approchée par les thèmes inducteurs suivants : la valorisation des fonctions (celles qui revêtent pour le sujet un intérêt majeur), l’auto-assignation d’objectifs de travail (c’est-à-dire ceux que le cadre se donne à lui-même, indépendamment des prescriptions de l’organisation), les opérations de réalisation des activités (« ce que le sujet fait ») ou leur non réalisation (ce qu’il « ne fait pas »), les visées professionnelles et personnelles, la gestion pratique et temporelle des activités de travail, les relations aux autres dans et hors de l’organisation.

Le traitement des données textuelles

Les entretiens ont été enregistrés puis intégralement retranscrits. Le corpus obtenu (d’un total de 400 pages) a été soumis à deux types de traitement : une analyse de discours informatisée assistée du logiciel ALCESTE (Analyse de Lexèmes Co-occurrents dans les Énoncés Simples d’un Texte) et une analyse de contenu thématique.

La méthodologie ALCESTE. La méthodologie informatique que nous résumons ici a été élaborée par Reinert (1983, 1990). Avec l’objectif de déterminer comment sont organisés les éléments constitutifs des textes, elle consiste principalement à définir les lois de distribution du vocabulaire d’un corpus. Un tableau à double entrée permet le croisement des unités de contexte élémentaire (uce : segment de texte de petite dimension) et le vocabulaire retenu. Reinert (1990 : 26) distingue deux aspects dans la notion de contexte : « l’un en rapport avec l’environnement d’un mot dans un texte que nous avons cherché à opérationnaliser avec la notion d’unité de contexte; l’autre en rapport avec celle d’usage qui, dans un corpus particulier, pourrait être opérationnalisé par la recherche de régularités dans la distribution du vocabulaire dans ces unités de contexte. Nous appellerons contexte-type, ce type de régularités ». 

Une classification hiérarchique descendante (C.H.D.) établit une différenciation des classes d’énoncés, des « mondes lexicaux » caractérisés par la spécificité des formes lexicales regroupées (significatives au sens du test du chi carré). À l’issue de l’analyse, le logiciel produit un ensemble de fichiers à l’aide desquels l’interprétation peut être conduite :

  • l’arbre d’agrégation (dendogramme) qui révèle le mode de séparation des classes et leurs proportions respectives par rapport à la totalité du corpus ;

  • la liste des vocables significatifs (chi carré, à un degré de liberté supérieur à 2,7) des différentes classes ou profils; à cette liste, le programme permet d’opposer un « anti-profil » (vocables significativement absents de la classe) ;

  • les uce significatives pour l’ensemble de la classe ;

  • la classification ascendante hiérarchique qui représente les relations locales entre formes d’un même contexte.

Le traitement des énoncés a porté sur l’ensemble des réponses de chaque sujet, sans distinction des sous-questions constitutives de la grille d’entretien.

Le texte est par ailleurs décomposé en uci (unité de contexte initiale) correspondant pour nous à chacun des entretiens. Ces derniers sont systématiquement introduits par une « ligne étoilée » constituée de variables extratextuelles (numéro d’entretien, genre, qualification initiale, formation supérieure en travail social, enfants mineurs à charge).

L’analyse de contenu thématique. L’ensemble du corpus a été soumis à des procédures analytiques dans le respect des règles de représentativité, d’homogénéité et de pertinence telles qu’elles sont définies par Bardin (2001). Les unités d’enregistrement pour le codage ont été circonscrites au thème et au « personnage ». L’inventaire des éléments a consisté à isoler les « noyaux de sens » après un repérage de leur présence ou de leur absence dans les énoncés et de leur apparition dans des discours semblables. La mesure fréquentielle et la cooccurrence n’ont pas été retenues, puisqu’elles sont traitées statistiquement et structurellement par le logiciel ALCESTE.

Par classification analogique et progressive, les contenus sémantiques ont ensuite été regroupés en catégories et sous-catégories. L’analyse thématique du corpus permet l’approfondissement des résultats de l’analyse ALCESTE, notamment par la mise en relief de dimensions délaissées ou occultées dans les profils définis par le logiciel et grâce à des données qui aident à mieux saisir le sens des variables discriminantes.

Résultats

L’analyse lexicale des données

Figure 1

Dendogramme des classes stables

Dendogramme des classes stables

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Les classes (désignées aussi par le terme « profil ») représentent respectivement 61 %, 18,17 %, 12,50 % et 7,54 % des énoncés traités du corpus. Dans le descriptif ci-après de ces classes, tous les mots figurant en italiques correspondent à des vocables statistiquement significatifs de la classe. Pour chaque profil, un encadré regroupe quelques exemples d’uce significatives du « monde lexical » considéré. Il est impossible ici de multiplier ces exemples et de présenter toutes les informations qui ont servi à l’interprétation des mondes lexicaux classés par le logiciel.

Classe 1 : Le rôle comme construction positionnelle

Dans cette classe, domine un discours orienté vers la personne même du locuteur, ainsi que l’indique les pronoms (je, me, moi). Cette auto-centration se réfère principalement à « l’éprouvé » de difficultés (avec des connotations affectives) et à la nécessité pour le cadre, d’une part, de bénéficier d’un soutien (il doit encore « apprendre »), d’autre part, de trouver un sens dans l’exercice de ses nouvelles fonctions. Il s’agit pour lui, de circonscrire sa place de responsable et de construire cette position. L’ensemble des mots outils de la classe suggère une activité réflexive et délibérative (il faut comprendre, réfléchir, se poser des questions). C’est aussi par l’instauration de communications avec d’autres professionnels (en particulier avec les membres de l’équipe) que des éléments de débat prennent forme. Hormis la présence de ces acteurs professionnels, on note que la structure organisationnelle et les publics (selon l’anti-profil) « s’effacent » des discours tandis que se révèle un monde indéfini, avec des gens, des choses, des impressions. Le rôle professionnel se condense surtout dans une logique du « faire », conjugué à l’ordre de la nécessité, à ce qu’il faut, à ce qui est comme ça. L’exécution, confrontée aux limites de la compétence, semble l’emporter sur la conception (les vocables « projet » et « développer » sont significativement absents de cette classe). Et la résignation paraît gagner sur la détermination. Ce qui, cependant, n’invalide pas chez nos cadres la volonté d’apporter des idées (comme d’en recueillir), ni leur intérêt à réaliser des possibles, à introduire du changement. Ils s’affirment dans « la tentative de », difficile et coûteuse qui peut les conduire à envisager de passer à autre chose.

Classe 2 : Le rôle en « hyperactivité »

À l’instar de la classe 1, les énoncés sont rapportés à la personne même du sujet (l’anti-profil souligne l’absence significative du « on »). L’utilisation du « je » en est l’indicateur. Dans cette classe, la fréquence des substantifs et des marqueurs temporels se lie à des séquences d’activités et d’évènements qui se succèdent selon des temporalités ordonnées aux rythmes organisationnels et familiaux. En effet, l’espace de travail comme celui du domicile sont l’un et l’autre désignés par les lieux, le matériel, les documents (papier, table…) qui les constituent. Les temps de passage, de déplacement de l’un à l’autre sont de même évoqués (route, voiture), comme le sont les moments d’arrêt (café, repas). Ils sont désignés aussi par les personnes qui les « habitent » (employé, mari, enfant). Les découpages de l’action, de minutes en heures, de journées en semaines, traduisent une intensité d’occupations qui peuvent dépasser les sujets et signer leur difficulté à une prise de distance à l’égard des multiples activités qu’ils réalisent dans leurs milieux d’existence et dans l’exercice de la fonction managériale. La contrainte se présente sous les modalités de l’impératif, de l’urgent, de ce qui est censé être. Mais ils dénotent aussi, chez les cadres, une visée de maîtrise et des tentatives pour faire tenir ensemble les engagements requis par leur fonction (arranger, organiser, accorder…).

Classe 3 : Le rôle innovant au service des publics de l’Action Sociale

Dans cette classe les discours font une référence prégnante aux publics et aux actions d’aide dont ils sont destinataires et se qualifient par une opposition tranchée au « je » (selon l’anti-profil). Ils mettent en scène les « autres » (ces publics et aussi les acteurs divers de l’organisation, en interne et en externe). Comme en témoigne le « nous », c’est un collectif de travail qui est évoqué par les énonciateurs.

L’accent est mis explicitement sur l’ancrage organisationnel (structure, établissement…) et institutionnel (loi, droit…). Dans ce profil, le rôle managérial est centré sur le développement de projet, sur la volonté d’instituer de nouvelles pratiques, de proposer et de participer à l’élaboration du changement. Références sont faites par les cadres à des prises (et des appels) d’initiative, à des confrontations et à la nécessité de négocier. C’est sur la base de ce qu’ils estiment devoir être le respect de l’autonomie des personnes (usagers et professionnels) qu’ils décident ou exercent leur autorité ou leur influence pour emporter une décision au niveau organisationnel. Cela est important pour ces cadres qui déclarent par ailleurs leur implication professionnelle. Par différence avec les discours de la classe 1, leurs tentatives d’innovation sont assorties de persévérance (de consistance diachronique) et de pragmatisme jusqu’à transformer l’essai en résultats positifs.

Ici, les changements que les sujets poursuivent dans leur environnement de travail s’accomplissent par la mise en place de procédures, la recherche d’outils et de pratiques adaptées (projet individualisé, dispositif, contrat…). Les paramètres qu’ils prennent en compte pour l’action sont : le contexte, le milieu, le budget. L’orientation de rôle épouse les moyens de l’analyse, exprime une forme de vigilance, traduit un exercice managérial réfléchi, ouvert à l’interaction avec les autres et sous « contrôle ».

Classe 4 : Le rôle innovant sur les territoires

Le vocabulaire attaché à ce profil se différencie des trois autres bien que par plusieurs aspects, la classe 4 présente des similitudes avec la classe 3.

Dans les discours de cette classe, l’accent est porté sur la création, le développement de projet et d’actions qui ont un caractère innovant, expérimental. Les cadres se réfèrent aux missions assignées à l’organisation – en particulier à l’aide aux publics – ainsi qu’à celles des partenaires institutionnels (protection, soin, Aide Sociale àl’Enfance…). L’ancrage sur les territoires (secteur, canton, département…) est une caractéristique de l’exercice de rôle. C’est à partir du rôle managérial que la socialisation organisationnelle se développe et qu’elle s’inscrit dans les rapports avec les professionnels et acteurs locaux. La présence des marqueurs de la personne « nous » et « ils », associée à l’absence significative des pronoms personnels (je, me, ma) suggèrent cette entreprise collective ou du moins une représentation subjective de celle-ci. Les verbes d’action en traduisent aussi le dynamisme. Les moyens diversifiés coordonnés aux fins poursuivies selon la « ligne » retenue et les compétences demandées par l’action apparaissent explicitement dans les propos.

L’analyse met en évidence que :

  • les classes 1 et 4 renvoient à des discours de sujets ayant suivi une formation supérieure en travail social ;

  • les classes 1, 2 et 4 sont associées de façon significative à une population féminine ;

  • les classes 1 et 4 correspondent à des discours d’assistants sociaux, la classe 3 est corrélée aux éducateurs spécialisés ;

  • la classe 1 est composée essentiellement d’énoncés de sujets ayant des enfants au foyer, à l’inverse de la classe 4.

L’analyse thématique des discours

Trois directions principales de l’activité de travail ont pu être mises en évidence par l’analyse thématique des discours produits sur les orientations de rôle dans la transition des cadres : les rapports à la tâche, les rapports aux autres et les rapports à soi (Clot, 1997, 2000).

Les rapports à la tâche

Tous les sujets identifient aisément les fonctions qu’ils privilégient dans leur travail, celles qui revêtent plus d’importance et plus de sens pour eux : « Moi, j’ai mis l’accent sur certains pôles de ma fonction volontairement, le partenariat par exemple… je mets l’accent de mon propre chef et pour le moment, ça fait pas souci, la direction suit là-dessus… ». Toutefois pour certains sujets, l’expression de cette valorisation demande une réflexion accompagnée (l’orientation de rôle et ses composantes ne procèdent pas toujours d’une claire conscience des sujets).

Opérer une centration sur des fonctions spécifiques suppose de s’interdire d’autres actions et occupations (« Je medisais, je ne dois plus me préoccuper de la réservation du camion »). Les fonctions valorisées peuvent aussi ne pas correspondre aux prescriptions de rôle. Plusieurs cadres ne sont pas dupes de leur auto-attribution et s’écartent de ces prescriptions. L’un d’eux, à propos de la mise en place de groupes de réflexion entre professionnels de différentes organisations déclare : « Si vous voulez, moi, ça m’intéresse, mais j’ai aucun mandat là-dessus, faut être clair… ».

Si, par définition, les fonctions managériales s’organisent en direction et au sein de l’équipe dont les cadres assurent la responsabilité, ils en fournissent des traductions différentes. Il s’agit d’optimiser le travail de l’équipe, d’améliorer les conditions de travail des professionnels, de favoriser leur autonomie ou de leur apporter un soutien…

L’intérêt des cadres pour d’autres aspects de leur poste est mis en relation avec les actions menées et les objectifs qu’ils s’assignent. La catégorisation établie par l’analyse thématique montre de façon discriminante des objectifs qui concernent :

  • l’environnement extérieur de l’organisation : Les objectifs des nouveaux cadres à l’intérieur de l’organisation sont essentiellement rapportés à l’environnement, à la nécessité pour eux de développer des actions partenariales, de travailler en réseau, de constituer des groupes de réflexion de professionnels issus de différents champs institutionnels.

  • le sujet lui-même : Par contraste avec la précédente est affirmé la primauté d’objectifs propres à la personne même du cadre et à ses valeurs. Ces objectifs se réfèrent soit au mode d’exercice managérial (« exercer cette place avec beaucoup de sagesse. C’est ça ma quête, être trèsauthentique… ») soit aux menaces d’une détérioration de leur santé dues aux surcharges d’activités : « En fait, l’objectif, là, c’est de tenir, de tenir moi-même nerveusement, moralement… Tenir la route et ne pas me planter en voiture… m’économiser un peu pour mieux être avec moi ».

Les rapports aux autres

Au sein de l’organisation, ce sont principalement les rapports à la direction et aux équipes de travail qu’abordent les sujets. Les rapports avec les pairs, autres cadres de l’organisation sont peu fréquents dans les discours.

Les rapports à la direction s’expriment selon deux modes :

  • celui de la confiance et de la coopération : Les cadres expriment une satisfaction quant aux relations établies avec les responsables de la structure. Soit qu’ils en apprécient le style communicationnel, soit qu’ils y trouvent soutien ou alliance : « On fonctionne avec le directeur en binôme et c’est une dimension qui me plaît beaucoup. Je vais y chercherde l’appui, ou de la contradiction ou de l’affirmation ». De façon plus nuancée, une distance confiante est quelquefois invoquée et l’autonomie semble alors réciproquement et sereinement vécue.

  • celui de l’insatisfaction : Les cadres décrivent les rapports à la direction comme insatisfaisants. Les motifs sont divers : ils vont de la personnalité du directeur à l’absence de soutien ou de définition d’une ligne politique; du sentiment d’être floué à celui d’être pris en otage pour une mission impossible à tenir. Les sujets perçoivent un écart entre l’attendu et le réalisable, expriment un sentiment de défiance traduit par de la déception, de la résistance ou de l’affrontement.

Les rapports à l’équipe se qualifient pour les sujets au travers :

  • soit d’une attente de reconnaissance : Pour les uns, il s’agit d’une attente de reconnaissance de la part de l’équipe. C’est un sentiment de solitude face au groupe qui s’exprime, associé à un désir d’intégration : « Bon, alors, du coup effectivement, je représente celle que eux (la direction) ont mis là. Il faut du temps avant d’être dedans, d’être acceptée, d’être alliée… voilà ».

  • soit d’un exercice d’influence : Pour les autres, le projet est de participer à la transformation, à l’évolution des équipes de travail. En l’occurrence, l’influence[1] dont ces cadres usent vise à rallier les personnels à leur point de vue, à favoriser leur « responsabilisation » ou la transformation de leurs pratiques professionnelles sur la base des dysfonctionnements perçus dans l’organisation. Pour eux, l’exercice de l’encadrement hiérarchique, la nécessité de « poser un cadre » semblent pleinement assumés.

Les rapports à soi et les temporalités de l’action

Dans les discours des sujets, nous avons pu distinguer des catégories différentes relatives aux temporalités de leur socialisation : celles auxquelles s’attachent le travail et celles de la vie hors travail. Si, unanimement, les nouveaux cadres insistent sur la densité de leur travail et sur l’impression d’un temps « comprimé », ils signifient diversement ces temporalités.

Le contrôle dans la gestion du temps :

  • Activités de contrôle : Plusieurs sujets, malgré des sollicitations nombreuses et l’obligation de mettre en oeuvre leurs fonctions nouvelles, font état d’une maîtrise des situations auxquelles ils sont confrontés : soit qu’ils parviennent à une planification efficace, soit qu’ils hiérarchisent leurs activités ou qu’ils procèdent à une sélection des tâches pour en réaliser certaines au détriment d’autres. En ce cas, le choix est assumé personnellement : « Y a des manques, des choses que je vois pas, j’ai fait des priorités… Oui, j’ai fait des priorités que j’ai dit aussi, des choses que j’ai énoncées, des choses hein, les emplois du temps du personnel par exemple, quelque chose de très compliqué… ».

  • Difficultés de contrôle : Pour d’autres sujets, la gestion temporelle de leurs activités de travail s’avère problématique. Ils mettent l’accent sur l’accumulation des tâches et des pressions, sur le temps « compté » ainsi que sur les difficultés qu’ils en font découler (difficulté à se concentrer, difficulté à hiérarchiser, difficulté à s’organiser) : « J’ai plein de rendez-vous, plein d’instances,les instances elles mêmes sont minutées effectivement. Donc jesuis beaucoup avec le chronomètre à la main… oui, c’est insupportable, je m’énerve intérieurement… j’ai pas le temps, c’est ingérable ».

Les rapports entre temps de travail et temps hors travail :

La gestion des activités de travail ne se limite pas aux horaires formels de travail. Tous les sujets déclarent effectuer un nombre d’heures supérieur à celui qui est prescrit. Toutefois, en face de la question relative à la frontière « temps de travail / temps hors travail », ils adoptent des positions radicalement opposées.

  • La séparation (ou le cloisonnement) des temps et activités de domaines différents : Pour certains, le respect de la frontière « temps de travail / temps hors travail » est vital ou gage d’efficacité. Il y va pour ces sujets de ne pas exposer leurs espaces de vie et de socialisation familiaux et personnels aux influences de leur travail. Se manifeste leur crainte d’être dévoré par les exigences professionnelles (« se faire bouffer par le boulot ») et de ne plus pouvoir accorder de temps et d’énergie à leurs autres engagements. Devant cette menace perçue, ils élaborent des stratégies de séparation (ou de cloisonnement) : « Je n’emmène pas de travail à la maison, ça je m’y refuse… Je considère que la vie, c’est pas uniquement le travail, j’ai autre chose à faire… ».

  • L’absence de séparation : Chez d’autres sujets, la séparation des temps et activités de domaines différents n’est pas recherchée. Les rapports du travail et des activités hors travail ne sont vécus ni comme contraignants, ni comme sources de menace. Au contraire, la possibilité de pouvoir « au calme », poursuivre la réflexion professionnelle est appréciée. Les sujets aménagent alors, à domicile, des temps et un environnement plus favorables à la réalisation d’activités professionnelles qu’ils estiment complexes (rédaction de documents, élaboration de projet).

Bien que notre questionnement initial et notre grille n’ait pas conduit à explorer les dimensions émotionnelles de l’orientation de rôle, nous observons que les cadres interviewés réagissent différemment à cette période professionnelle de transition. En effet l’orientation de rôle telle qu’elle se révèle dans les rapports à la tâche, aux autres et à soi se conjugue pour certains à des émotions positives, pour d’autres à des affects à tonalité négative.

Ainsi, les premiers expriment de la satisfaction à partir d’une expérience « plutôt réussie ». Optimisme, sérénité, prise de recul face aux situations, plaisir, voire enthousiasme caractérisent leurs discours. Les seconds, en revanche, évoquent le retentissement émotionnel négatif de leur expérience. C’est à des circonstances diverses qu’ils rapportent leurs affects : le sentiment « de ne pas être à la hauteur » de la tâche, la perception d’une impuissance à affronter une réalité peu ou prou hostile en raison de la charge de travail, de pressions organisationnelles, des positions de la direction qu’ils critiquent…

Liens entre « profils lexicaux » et dimensions de l’analyse thématique

Dans le tableau 1, on relève que les sujets appartenant aux classes constituées par la procédure informatique ALCESTE sont, en tendance forte[2], ceux qui se répartissent sur les dimensions de l’analyse thématique. Nous rappelons que la classe 1 correspond au rôle comme construction positionnelle, la classe 2 au rôle en hyperactivité, la classe 3 au rôle innovant au service de l’Action Sociale et la classe 4 au rôle innovant sur les territoires. Dans le tableau, nous avons voulu permettre de visualiser les correspondances entre les classes dégagées par ALCESTE et les catégories de l’analyse thématique. Les carrés blancs et noirs associés aux sujets (numérotés de 1 à 15) symbolisent leurs positions sur les catégories (indiquées en ligne) de l’analyse thématique. Le signe « – » marque que les énoncés des sujets ne les placent pas dans ces catégories.

Ainsi, on peut observer que les cadres du groupe de la classe 1 ont pour caractéristiques saillantes :

  • d’exprimer des visées de développement personnel ;

  • de vivre leurs rapports avec les membres de la direction sur un mode d’insatisfaction ;

  • d’être vis-à-vis de leurs équipes en situation d’attente de reconnaissance et d’intégration dans le groupe ;

  • de connaître des difficultés dans la gestion du temps ;

  • d’instaurer des cloisonnements entre temps de travail et hors travail et d’inhiber du même coup les interférences entre leurs milieux de vie ;

  • d’exprimer des manifestations émotionnelles à tonalité négative.

Tableau 1

Liens entre classes lexicales et indicateurs de l’analyse thématique

 

Visées

Rapport à la direction

Rapports à l’équipe

Gestion temporelle

Séparation des temps

Affects

Classe 1

 

 

 

 

 

 

Sujet 1

Sujet 2

Sujet 3

Sujet 4

Sujet 5

Sujet 6

Sujet 7

Sujet 8

Classe 3 et 4

 

 

 

 

 

 

Sujet 9

Sujet 10

Sujet 11

Sujet 12

Sujet 13

Sujet 14

Classe 2

 

 

 

 

 

 

Sujet 1

Sujet 14

Sujet 13

Sujet 15

Légende :

Visées : □ Développement personnel ; ■ Relations avec l’environnement de l’organisation

Rapports à la direction : □ Tension / Insatisfaction ; ■ Confiance / Coopération

Rapports à l’équipe : □ Attente d’intégration ; ■ Exercice d’influence

Gestion temporelle : □ Difficulté de contrôle ; ■ Présence de contrôle

Séparation des temps : □ Effort de séparation (temps de travail / temps hors travail) ; ■ Absence de séparation (temps de travail / temps hors travail)

Affects : □ Tonalité négative ; ■ Tonalité positive

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L’orientation de rôle qui privilégie la construction positionnelle et l’auto-centration des discours, au delà des problèmes qu’elle suscite renvoie, d’une part, aux finalités de l’exercice managérial qui ne s’épuisent pas dans l’intention et l’activité professionnelles mais qui touchent aux aspirations de développement personnel de l’individu, d’autre part aux relations avec le groupe des subordonnés ramenées à la personne même du cadre et à sa volonté d’être associé au collectif de travail.

Les sujets des classes 3 et 4 :

  • témoignent de liens de coopération avec leurs supérieurs hiérarchiques ;

  • tendent à infléchir les pratiques professionnelles de leurs subordonnés tout autant que le fonctionnement de leurs équipes ;

  • parviennent sans obstacle majeur à une gestion contrôlée de leur temps de travail ;

  • introduisent des occupations professionnelles dans leur temps et leurs espaces personnels, familiaux ;

  • expriment, bien que sous des formes différentes, une distance à l’égard de leurs affects et une satisfaction à l’égard de leur nouvelle expérience professionnelle ;

  • orientent leurs actions managériales vers l’extérieur de l’organisation et prônent un développement des liens partenariaux.

L’orientation de ce rôle caractérisée par l’innovation (selon l’analyse ALCESTE) est à mettre en relation avec ce dernier point. L’organisation, chez ces cadres, est en effet appréhendée comme un système ouvert dont ils saisissent (au sens cognitif du terme) les potentialités dans la perspective d’un changement organisationnel auquel ils aspirent. C’est ailleurs dans les limites mêmes de leur organisation et en concertation avec d’autres, que des pratiques, procédures et dispositifs innovants peuvent être conçus et institués. Les cadres de ces classes ne sont pas expectatifs par rapport à ces potentialités. Selon la formule de Clot, « ils ne font pas qu’appartenir » à un réseau de professionnels, « ils s’appartiennent ».

Relevons que les résultats relatifs à la dimension affective des comportements sont comparables à ceux de West (1987) auprès d’une population de managers qui montrent que les « développeurs » de rôle sont plus satisfaits au travail que les sujets moins innovants.

La classe 2 ne présente pas la même homogénéité que les précédentes. Elle « emprunte » aux énoncés de 3 sujets qui participent à constituer la classe 1 (Sujet 1) et la classe 3 (Sujets 13 et 14)[3]. Pour les sujets de cette classe 2, on note des difficultés de contrôle dans la gestion du temps et un effort pour séparer temps de travail et temps hors travail.

Il y a la peur d’être submergés par les contraintes professionnelles avec le sentiment que les activités de travail peuvent menacer la réalisation de soi, dans les sphères personnelle ou familiale. Pour autant, « les salariés ne sont pas les jouets passifs des contraintes auxquelles ils sont confrontés : ils mettent en oeuvre avec plus ou moins de succès des régulations visant à réduire les effets négatifs de ces contraintes » (Gadbois et al., 2000 : 50) non sans courir le risque d’échouer. Le cloisonnement des temps est à inscrire au rang de ces régulations. Établir un tel cloisonnement, c’est se protéger soi-même et remplir le contrat (conjugal, familial…) de la protection de ses proches en d’autres milieux de sa socialisation. On constate ainsi, à travers les discours de ces cadres, que la valorisation de leurs activités passe par une évaluation du sens qu’elles ont pour leurs proches.

Conclusion

Dans la population de cadres de l’Action Sociale intégrés récemment dans de nouveaux postes nous avons montré que les orientations de leurs rôles et de leurs pratiques de management présentent des variabilités interindividuelles notables.

Les rôles qu’ils remplissent ne sont pas les résultats mécaniques d’impératifs et de normes qui les fondent dans l’ensemble du système des politiques sociales du pays et dans leurs organisations d’appartenance. Dans leur mise en oeuvre les sujets cherchent, certes, à s’adapter aux fonctionnements internes de ces organisations, aux missions ou aux mandats qu’ils doivent assurer, par la médiation de subordonnés, auprès de publics fragilisés. Mais ils cherchent tout autant à les expérimenter, à « se les adapter ». Ils les interprètent, les amendent, les critiquent, les reconstruisent dans le cours réel de leur activité de travail, en fonction des ressources et des contraintes de leurs relations aux autres (supérieurs hiérarchiques, pairs, subordonnés, usagers des services) et avec leur environnement.

Se trouve légitimée, à nos yeux, l’hypothèse d’une socialisation organisationnelle interactive dont rendent compte les stratégies proactives analysées. Nous avons pu également montrer que les sujets assument leurs rôles non seulement pour y faire reconnaître leurs compétences mais aussi pour s’y faire exister comme acteur : à partir d’images de soi, d’attentes et de représentations vis-à-vis de leur métier qu’ils ont forgées dans leurs expériences antérieures (personnelles et professionnelles). Non seulement nos cadres redéfinissent in situ leurs rôles mais ils les affectent aussi de significations différentes en fonction de l’accomplissement ou la non-réalisation d’autres rôles possibles, d’autres aspirations, d’autres buts au sein et à l’extérieur des milieux de leur socialisation organisationnelle.

De ce point de vue, comme en témoignent les discours des sujets, celle-ci est source d’interrogations et de réflexions qui portent sur la dynamique de leurs rôles, aussi bien sur ce qui en justifie les finalités que sur le sens et les valeurs qu’ils prennent pour eux. La socialisation organisationnelle, l’engagement en de nouveaux rôles et fonctions apparaissent alors indissociables d’un travail subjectif qui en est « le ressort intime » (Clot, 2000). Ce travail subjectif, mis à l’épreuve dans la transition mobilise des processus d’arbitrage, de délibération, de choix, de décision qui permettent de mieux comprendre les variabilités interindividuelles des actions en rôle mises en évidence par notre étude.

Ces variabilités, on l’a vu, se manifestent par exemple sur les dimensions « développement personnel versus développement de rôle / classe 3 et 4 », dans les modes contrastés de gestion et de contrôle du temps et activités de travail, dans les rapports que les sujets activent ou inhibent entre ces activités liées à leurs rôles professionnels et celles de leur vie hors travail. De même sont-elles observables à travers la diversité des valorisations dont sont objets leurs tâches managériales dans l’organisation et leurs engagements en d’autres champs de leur socialisation.

De nouvelles études pourraient assurément tirer des bénéfices de ces « résultats qualitatifs ». Elles pourraient être complétées avec l’appui d’un dispositif de « suivi longitudinal » qui permettrait d’analyser, sur un empan temporel plus ample, au-delà des périodes d’entrée et d’intégration, la dynamique de l’orientation et des transformations des rôles.