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Les chercheurs de l’INRS-Urbanisation, culture et société ont réalisé pour la Société d’habitation du Québec (SHQ) une analyse comparative des politiques et des programmes d’intervention récents en matière de logement en Amérique du Nord (Canada et États-Unis) et en Europe (France et Grande-Bretagne, principalement). L’étude vise à dégager les principales problématiques et tendances qui déterminent, dans leurs grandes lignes, les politiques occidentales en matière d’habitation au tournant du XXIe siècle, de manière à éclairer la prise de décision des intervenants québécois.

La structure de l’ouvrage, relativement compact, est simple et clairement organisée en deux parties : la recension des différentes politiques par continent et par pays, suivie d’une analyse comparative à partir de thèmes transversaux. La conclusion tire des leçons pragmatiques en identifiant les tendances lourdes qui se traduisent en défis pour le Québec.

L’étude est particulièrement utile en ce qu’elle identifie quatre thèmes transnationaux qui déterminent les choix politiques et l’élaboration de stratégies en matière d’habitation : les dynamiques et les mutations sociodémographiques, l’accessibilité financière au logement abordable, la fourniture et la gestion du logement social et l’amélioration des milieux résidentiels. Les chapitres sur les États-Unis et la Grande-Bretagne sont particulièrement intéressants car ils réussissent à faire la difficile synthèse de programmes historiquement complexes et stratifiés. Dans le cas de la Grande-Bretagne, les auteurs brossent un portrait évolutif à partir du début de l’ère Thatcher jusqu’à la période du New Labour pour expliquer les impacts d’une réforme marquée par la démunicipalisation, la déréglementation et la décentralisation. Pour chaque pays, des fiches synthèses résument le contenu des politiques les plus marquantes en termes de mission et de contexte, d’objectifs et de clientèles visés, de modalités et de mise en oeuvre.

Dans la première partie, les auteurs reconnaissent d’emblée le caractère fragile des généralisations à partir de contextes culturels et sociopolitiques extrêmement diversifiés et qui restent à peine esquissés. Cela dit, la recension est rigoureuse et appuyée par des études et des rapports qui jettent un éclairage critique sur les philosophies qui sous-tendent les politiques et les normes. La deuxième partie de l’ouvrage présente les résultats de l’analyse comparative en faisant émerger certaines convergences. Premièrement, bien qu’elles misent sur la mixité sociale, les politiques en matière de logement abordable et social sont de plus en plus décentralisées et orientées sur l’accès à la propriété. Deuxièmement, les programmes d’allocation logement priment désormais sur les programmes d’aide à la pierre et ce, dans l’ensemble des pays recensés. Enfin, les politiques d’habitation comportent des volets de requalification des milieux dégradés qui vont bien au-delà des programmes de rénovation urbaine (urban renewal) en incluant des mesures liées à l’emploi, à l’éducation, à la sécurité et au développement d’équipements publics.

Ce type d’analyse comparative synthétique s’avère très utile pour les chercheurs et les étudiants en aménagement, en architecture ou en sociologie, entre autres, qui portent sur l’habitat et le logement un regard multidisciplinaire orienté sur l’intervention. Cet ouvrage est un outil complémentaire aux nombreux travaux sur l’histoire des politiques d’habitation, sur les qualités, les pratiques, les usages et les représentations du logement, ainsi qu’aux données quantitatives issues des rapports des différentes instances gouvernementales.