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Ce collectif est un compte rendu des textes présentés lors des Rencontres Champlain-Montaigne tenues à Bordeaux en octobre 2002. La conférence réunissait des chercheurs et praticiens provenant de la région Aquitaine en France et de la région de Québec autour de la thématique de la contribution des universités au développement de ces deux régions. Une trentaine de textes, pour la plupart assez courts, alimentent cette réflexion. Un simple regard sur les thèmes regroupant ces textes (« nouvelles actions envers les publics fragiles », « l’intégration de l’innovation dans le développement urbain : les innovations technologiques », « les innovations managériales dans le gouvernement territorial : quel avenir pour la gouvernance locale ? », « quels acteurs pour quels projets ? » et « les nouvelles orientations de la recherche ») permet de voir que ce livre ratisse très large en abordant des aspects fort distincts des rapports entre université et pratique régionale. Cette grande diversité a quelque chose de réjouissant en ce sens qu’elle reflète la vivacité des deux régions en plus de témoigner d’une diversification profonde des rapports des universités régionales avec leurs milieux. Une des grandes contributions de ce livre et des RencontresChamplain-Montaigne est de montrer que la figure de l’université comme une tour d’ivoire semble de moins en moins actuelle à mesure qu’elle devient un acteur régional appelé à collaborer dans moult projets chers aux régions.

Cependant, ce livre a aussi en quelque sorte les défauts de ses qualités. En voulant aborder de façon très large la problématique des rapports universités-régions, il réussit plus difficilement à se donner une cohérence d’ensemble. Le grand nombre de thèmes et de textes réunis met le lecteur devant une certaine difficulté de voir les liens qui les unissent entre eux. Cette impression d’un certain éclatement est renforcée par le fait que bon nombre de textes sont plutôt courts et très peu explicites sur leur contribution à la réflexion d’ensemble sur les liens entre l’université et son milieu régional. Plusieurs textes sont plutôt enclins à présenter les dimensions techniques de tel ou tel projet soutenu par les universités régionales sans nécessairement en dégager une réflexion plus large sur la thématique commune. Ceux qui voudraient voir dans ce livre une réflexion nouvelle sur les rapports entre universités et régions risquent de trouver que la contribution des différents textes à ce sujet est fort inégale.

Ces quelques remarques sur la difficulté de dégager une problématique d’ensemble de ce livre ne devraient d’aucune façon jeter une ombre sur la qualité d’un bon nombre de contributions qui y sont réunies. Plusieurs de ces textes abordent des questions à la fine pointe de notre compréhension du développement régional et local. Pris ensemble, ces textes permettent également de voir comment l’ancrage des universités se fait par rapport à des échelles territoriales multiples. Tant dans le cas des universités bordelaises que dans celui de l’Université Laval, les chercheurs et les institutions elles-mêmes sont interpellés pour intervenir dans des enjeux locaux de nature plutôt urbaine comme l’étalement urbain (voir le texte de Fayet, Cloutier et Quesnel et celui d’Aucouturier) mais également dans des enjeux portés par les acteurs régionaux qui ne touchent pas exclusivement les villes centrales (Letarte ; Delfaud).

Les deux régions sur lesquelles portent les textes se ressemblent d’un certain point de vue. Dans les deux cas, il s’agit de régions dominées par des villes assez importantes (Bordeaux et Québec) sans pouvoir aspirer au titre de métropole internationale. En quoi ces situations régionales orientent-elles les rapports des universités avec leurs régions ? Aurait-on observé d’autres types de rapports dans le cadre d’universités situées dans des régions plus périphériques, l’Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue par exemple, ou encore dans le cadre de régions métropolitaines ? Ce livre ne tente pas vraiment de situer la spécificité des dynamiques régionales auxquelles il fait face et ne propose pas non plus de comparaison entre les régions française et québécoise. Il me semble que l’amorce d’une telle comparaison aurait été un bon moyen pour mieux dégager des conclusions d’ensemble sur les rapports université-région qui seraient sensibles à la singularité des cas observés.