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Introduction

L’urgence de déterminer les étapes qui doivent faire partie d’une séquence didactique pour l’exploitation des contes et des comptines en développement langagier, au niveau de la prématernelle, provient d’un double problème. En premier lieu, il existe présentement peu de recherches pour guider les éducatrices quant aux étapes à suivre en développement langagier des jeunes enfants, particulièrement en milieu minoritaire francophone (Lazure, 1995; Florin, 1989). Il en résulte souvent qu’en développement langagier, les contes et les comptines sont utilisés comme matériel didactique mais sans véritable souci d’une approche systématique. En second lieu, nous constatons de sérieuses difficultés langagières chez les jeunes enfants qui demeurent en milieu minoritaire. Au Nouveau-Brunswick francophone, par exemple, des études telles que celles de Duguay (1989, 2002), de Vienneau et LeBlanc (2000) et de Willms (2000) indiquent qu’il y a de nombreux enfants inscrits dans des prématernelles qui éprouvent des difficultés majeures aussi bien à comprendre qu’à utiliser un langage propre à leur âge. En réalité, ces enfants ne sont pas des enfants à risque d’insuccès scolaire mais, parce que le langage constitue la base sur laquelle se greffent les autres apprentissages scolaires (Lazure, 1994), nombre d’entre eux sont désavantagés dès leur entrée à l’école primaire.

Ce double problème en milieu minoritaire montre l’urgence de déterminer les étapes d’une séquence didactique pour l’exploitation des contes et des comptines utilisés en développement langagier dès la prématernelle. Une telle séquence présente toutefois un intérêt plus large, au-delà du contexte minoritaire.

Cadre conceptuel

Une séquence didactique est « un ensemble continu ou discontinu de séances d’enseignement ou d’apprentissage articulées entre elles dans le temps et organisées autour d’une ou de plusieurs activités en vue d’atteindre des objectifs fixés par les programmes d’enseignement » (Legendre, 1993, p. 1152). Lorsque les éducatrices présentent des activités langagières aux enfants à partir d’un conte ou d’une comptine et que ces activités se déroulent dans une suite ordonnée, cette suite forme donc une séquence didactique (Langlade, 1992).

Le cadre conceptuel de notre recherche comprend trois principaux volets : un bref aperçu du conte et de la comptine, les étapes d’une séquence didactique à inclure dans un travail de systématisation à partir des contes ou des comptines et les interventions éducatives favorables en développement langagier des jeunes enfants. Ces trois volets constituent les concepts fondateurs de la systématisation d’une séquence didactique en développement langagier des jeunes enfants, en situation de groupe, que nous présentons dans le présent article.

1. Bref aperçu du conte et de la comptine

En prématernelle, les contes et les comptines se situent souvent au coeur des séances d’enseignement prévues en développement langagier. Les contes se rapportent à « une série d’événements intégrés dans l’unité d’une même action, ou une succession d’événements faisant partie d’une même action » (Dumortier et Plazanet, 1980, p. 36). Ces actions en succession sont « assumées par un même acteur et reliées entre elles par des connecteurs temporels, spatiaux et logiques » (Noël-Gaudreault, 1985, p. 25). Pour les jeunes enfants, le conte représente « un court récit, situé dans un temps et dans un lieu très éloignés et généralement non définis, dont les personnages, au nombre limité, sont très typés » (Gervais, Noël-Gaudreault et Lemoyne, 2001). Quant aux comptines, elles constituent traditionnellement des formulettes enfantines, récitées ou chantées (Quentin-Maurer, 1997). On trouve plusieurs catégories de comptines, notamment des comptines numériques, des comptines narratives et des comptines contenant des jeux phonétiques ou des allitérations. Souvent, les comptines mettent en scène des animaux « qui deviennent tout naïvement fantastiques, comme…ces araignées qui chantent le dimanche » (Quentin-Maurer, 1997, p. 142). Il est donc facile d’imaginer l’intérêt suscité chez les enfants d’âge préscolaire autant par les comptines que par les contes. C’est la raison principale qui a motivé notre choix de ce matériel didactique comme élément central d’une séquence didactique en développement langagier.

2. Étapes d’une séquence didactique

Lorsque les contes ou les comptines constituent l’élément central d’une séquence didactique, les étapes se regroupent en trois temps : la présentation du conte ou de la comptine; la réalisation d’activités pour apprendre les comptines ou pour comprendre le conte; l’intégration, c’est-à-dire des activités de prolongement qui assurent la compréhension et la rétention des concepts et du vocabulaire (Duguay, 1999a). Chacun de ces trois temps comprend des étapes déterminantes en développement langagier. Nous y reviendrons.

Selon plusieurs chercheurs (Hohmann, Weikart, Bourgon et Proulx, 2001; Doherty, 1997), certaines situations de communication sont à privilégier dans une séquence didactique en développement langagier chez les jeunes enfants. Entre autres, notons l’exposition au langage, la description d’expériences vécues, le partage de sentiments et d’idées, la description d’objets ou d’événements, la capacité d’établir des liens entre des événements et des objets et de les verbaliser, l’occasion de jouer avec les mots (inventer ou raconter des histoires, faire des rimes), d’écrire de diverses façons (dessiner, gribouiller, inventer des lettres ou des symboles) ou de dicter une histoire à un adulte. Cependant, les chercheurs ne précisent ni comment ni dans quel ordre ces situations doivent être présentées aux enfants. En matière de développement langagier, ces situations de communication auront avantage à être stratégiquement ordonnées dans une séquence didactique. C’est alors que les enfants apprendront, par la pratique et par l’objectivation, à exprimer leurs sentiments, leurs connaissances et leurs idées (Dulude, 1994). Une situation de communication est réussie lorsque « l’enfant peut réellement chercher, avec ses mots, à exprimer ce qu’il a vécu, ce qu’il ressent, ce qu’il désire » (Defrenne, Hennequin, Bac et Zakhaartchouk, 1991, p. 28). Dans un tel contexte, la séquence didactique assurera une progression vers la compétence langagière, tandis que les interventions éducatives ou les reformulations des éducatrices auront pour but d’aider les enfants à effectuer les transferts langagiers et, ainsi, de les faire progresser dans leur découverte de la langue.

Le réinvestissement des mots ou des expressions qui proviennent des contes ou des comptines et la consolidation de ces nouvelles acquisitions langagières à l’occasion des activités de prolongement font partie intégrante d’une séquence didactique. En effet, si on veut que les enfants maîtrisent le sens des mots et des expressions et les utilisent correctement, ils ont besoin de les réutiliser souvent dans de nouvelles situations de communication. Il en résultera alors de nouveaux apprentissages langagiers pour l’enfant. Plus l’enfant sera appelé à réinvestir le nouveau vocabulaire et plus il possédera un répertoire langagier étendu pour comprendre et pour s’exprimer, plus facilement il établira des liens entre ses apprentissages et plus aisément s’effectueront les transferts de ses compétences langagières à d’autres situations. Bref, le temps de l’intégration repose sur deux types de connaissances complémentaires : les connaissances lexicales et les connaissances sémantiques, ces dernières étant conçues comme un réseau organisé de concepts connus par l’enfant (Lieury, 2000). Une séquence didactique doit donc prévoir des moments pour développer ces deux types de connaissances.

Il est à noter, qu’à l’occasion, toutes les étapes d’une séquence didactique ne peuvent être vécues dans une même séance langagière (période de temps déterminée communément appelée une leçon de langage), particulièrement lorsqu’il s’agit de jeunes enfants. Par exemple, certaines étapes peuvent prendre plus de temps qu’on ne l’avait prévu. Dans une telle situation, elles sont reportées à une séance langagière subséquente.

3. Interventions éducatives en développement langagier des jeunes enfants en situation de groupe

L’intervention éducative en développement langagier se définit souvent comme une action pédagogique consciente et ponctuelle entreprise par l’éducatrice dans le but d’atteindre un objectif langagier. Elle se « caractérise par l’association qu’elle établit entre les dimensions didactiques (rapport au savoir, aux savoirs et rapport de savoirs), les dimensions psychopédagogiques (rapport au sujet), les dimensions organisationnelles (gestion de la classe) et les dimensions institutionnelles et sociales (rapport au contexte) » (Lenoir et al., 2002).

De son côté, Thériault (1995) apparente l’intervention éducative au concept d’étayage de Bruner. Dans ce sens, l’intervention éducative vise à soutenir le développement langagier des enfants par un appui au besoin. En prématernelle, les interventions éducatives requièrent une mobilisation tant physique qu’intellectuelle de la part de l’éducatrice. Entre autres, celle-ci répond aux questions des enfants, accueille leurs essais langagiers avec enthousiasme, leur propose des modèles de langage (par exemple, des mots et des expressions plus explicites) lorsqu’elle réagit à leurs propos et facilite le transfert de leurs connaissances langagières à d’autres situations de communication (Plessis-Bélair, 1994). Parallèlement, l’éducatrice jauge ses interventions d’après le niveau de développement langagier de son groupe d’enfants et d’après les objectifs qu’elle désire leur faire atteindre.

Comme nous pouvons le constater, parce qu’elles touchent aux trois temps d’une séquence didactique en développement langagier, les interventions des éducatrices en font partie intégrante (Lazure, 1994). D’où l’importance d’une approche systématique de réflexion et de verbalisation, où l’enfant est appelé à expliquer ou à justifier sa pensée ou ses idées. Ce discours explicatif fait appel à des « chaînes de reformulation et de paraphrase » (Laparra, 1991, p.22) et constitue ainsi un tremplin à partir duquel s’effectuent des transferts à d’autres situations de communication. De telles interventions ne se limitent pas à la simple construction d’un lexique. Elles situent plutôt l’enfant dans une perspective d’intégration des nouveaux mots ou des nouvelles expressions à son bagage langagier (Gervais, 1994; Losardo et Bricker, 1994). Les interventions éducatives ont aussi un effet dynamique sur les apprentissages ultérieurs car, selon Tarrab (1994), un lexique élargi et des connaissances linguistiques plus diversifiées fournissent à l’enfant les outils nécessaires pour continuer à parfaire ses compétences langagières.

Par ailleurs, en matière de développement langagier au moyen des contes et des comptines, l’éducatrice peut s’inspirer des communications entre parents et enfants pour guider ses propres interventions. Par exemple, des expériences familiales où l’on aura valorisé la lecture, où l’on aura lu des histoires aux enfants et où on leur aura donné l’occasion de réagir aux histoires lues et de réinvestir leurs nouvelles connaissances dans des activités connexes, représentent des expériences pouvant inspirer les interventions des éducatrices. Lorsque les parents ou d’autres intervenants lisent des histoires, plusieurs d’entre eux attirent l’attention des enfants sur les mots nouveaux, sur les nouvelles expressions, sur les allitérations ou encore sur les ritournelles. Ils n’hésitent pas à fournir des explications aux enfants, à les répéter, à les reformuler ou à les expliciter. Ils invitent souvent les enfants à répéter les mots et les expressions avec eux pour le simple plaisir de jouer avec les sons. S’inspirant de ces expériences familiales, l’éducatrice peut « ajuster la complexité lexicale, syntaxique et sémantique, progresser dans la complexité, instaurer des situations de communication équilibrées, négocier de partenaire à partenaire, ayant à tour de rôle le droit à l’initiative et apprendre les règles habituelles de la communication » (Florin, 1989, p. 91).

L’éducatrice aura également le souci d’intervenir de manière à créer un climat dans lequel les enfants seront heureux et à l’aise de prendre la parole, et dans lequel ils se sentiront confiants et respectés comme membres d’un groupe. Progressivement, les enfants se rendront compte que prendre la parole entraîne des conséquences, comme celles d’attendre leur tour et d’écouter leurs compagnons. Plus les enfants participeront, plus ils seront motivés et plus ils voudront participer (Duguay, 2003). Or, la motivation est un facteur important dans le développement langagier des jeunes enfants en milieu minoritaire. Elle favorise simultanément le développement d’attitudes positives et la curiosité pour les mots nouveaux et les expressions nouvelles. L’éducatrice assurera donc la participation par une approche ludique appropriée aux enfants de quatre ans. Cette approche servira de toile de fond à toute intervention, de même qu’au déroulement des tâches prévues à chacun des trois temps de la séquence didactique.

À l’instar de Dulude (1994), résumons les objectifs visés par les interventions éducatives lors d’une séquence didactique en développement langagier :

  • aider les enfants à maîtriser les habiletés langagières qui leur sont nécessaires pour continuer à apprendre la langue de même que d’autres disciplines;

  • faire découvrir le pouvoir de la parole aux enfants en leur apprenant à exprimer leurs pensées, leurs sentiments et leurs idées de façon à être compris par les autres membres du groupe;

  • enseigner aux enfants comment communiquer et comprendre ce qui leur est communiqué dans des situations de groupe;

  • donner aux enfants un plus grand accès à la culture et à la tradition orale, entre autres au moyen des contes et des comptines.

Comme nous pouvons le constater, les nombreuses interventions éducatives en développement langagier supposent des choix judicieux de la part de l’éducatrice quant au moment de l’intervention. Pour intervenir de façon appropriée, l’éducatrice doit savoir gérer systématiquement les activités et les apprentissages en situation de groupe. Le modèle intégrateur des activités et des interventions éducatives que suppose une séquence didactique en développement langagier fournira un cadre stratégique pour la gestion systématique des interventions éducatives.

Objectif de la recherche

L’objectif de la recherche visait principalement à vérifier la pertinence de la systématisation des principales étapes d’une séquence didactique en développement langagier des jeunes enfants en prématernelle. L’objectif a été formulé à partir des trois concepts fondateurs de notre cadre conceptuel : un bref aperçu du conte et de la comptine, les étapes d’une séquence didactique et les interventions éducatives en développement langagier des jeunes enfants en situation de groupe.

Méthodologie

Le type de recherche qui se prête le mieux à la systématisation des étapes d’une séquence didactique est la recherche-développement. La méthodologie de la recherche-développement utilisée ici s’inspire librement de Stolovitch et LaRocque (1983) et de Van der Maren et LeBossé (1995). Cette méthodologie tient compte, entre autres, des besoins de la population cible, du contexte de la recherche (le rôle des éducatrices et du chercheur, l’aménagement physique des lieux, le matériel ou les livres utilisés et les horaires), d’un modèle de séquence didactique que les éducatrices ou les expérimentatrices peuvent mettre à l’essai, d’un nombre d’essais déterminé et finalement, de l’analyse des données. Nous avons regroupé ces éléments de la façon suivante : le choix d’une population cible, la préparation d’un modèle de séquence didactique en développement langagier, la formation des éducatrices, les mises à l’essai et les outils de collecte des données. Ajoutons que la recherche a été réalisée pendant les mois de mars, avril et mai de 2002.

1. Population cible

La population cible était composée de 27 enfants inscrits dans trois garderies francophones du Nouveau-Brunswick (volet prématernelle). Ces garderies sont toutes situées dans la Péninsule acadienne, dans le nord-est de la province. La première est située en ville, la deuxième en banlieue et la troisième à la campagne. Dans ces trois garderies, les groupes d’enfants âgés de quatre ans comptaient respectivement quinze, huit et quatre enfants. Ces enfants devaient normalement s’inscrire en classe maternelle dès le mois de septembre suivant.

Pendant la plus grande partie des séances langagières, les enfants étaient disposés en demi-cercle devant l’éducatrice de façon à ce que celle-ci puisse bien voir chacun d’entre eux et s’assurer de leur participation verbale et de leur écoute active. Le reste du temps, ils étaient dans les centres d’activité, plus particulièrement le centre de lecture et d’écriture, le centre de bricolage et le centre de jeux dramatiques. Quant à l’horaire des séances langagières, chaque éducatrice décidait de l’heure qui convenait le mieux à son groupe d’enfants. Cependant, nous nous étions entendues sur un minimum de trois séances langagières par semaine afin d’assurer trois mises à l’essai complètes.

2. Modèle d’une séquence didactique en développement langagier pour de jeunes enfants en situation de groupe

Le modèle de la séquence didactique qui a fait l’objet de trois mises à l’essai a été présenté aux éducatrices dès le début de la recherche. Ce modèle comprend trois principaux temps : la planification, la réalisation et l’intégration.

La planification inclut la définition des objectifs langagiers et la mise en situation. Toute séquence didactique en développement langagier vise des objectifs particuliers. Le choix de ces objectifs se fait surtout en fonction du vocabulaire présent dans le conte ou la comptine car, au Nouveau-Brunswick francophone, les éducatrices en prématernelle ne disposent pas encore de programmes d’étude. Quant à la mise en situation, elle facilite la compréhension lorsqu’elle prépare les enfants mentalement et psychologiquement à l’écoute du conte ou de la comptine. Selon Giasson (1995), la mise en situation comprend deux parties essentielles : l’activation des connaissances antérieures des enfants par rapport à la thématique du conte ou de la comptine et la formulation d’une intention ou d’une hypothèse d’écoute.

Le temps de la réalisation sert surtout à l’explication des mots et des expressions et à la lecture interactive du conte ou de la comptine. En matière d’explication des mots et des expressions, Giasson (1995) distingue le vocabulaire cible (visé par les objectifs de la séquence didactique) du vocabulaire préalable (nécessaire à la compréhension du conte ou de la comptine). Par lecture interactive, on signifie que la lecture du conte ou la comptine se déroule en interaction, c’est-à-dire que, tour à tour, l’éducatrice ou les enfants posent des questions et y répondent ou font des commentaires à propos des personnages et des événements. Parce que la lecture interactive du conte ou de la comptine invite les enfants à participer et à formuler d’autres hypothèses à des moments stratégiques déterminés à l’avance par l’éducatrice, elle suscite et maintient l’intérêt des jeunes enfants.

Pendant l’intégration, l’enfant s’approprie, organise et structure ses nouvelles connaissances langagières. Le retour sur les objectifs langagiers fait partie de l’intégration et a pour but d’attirer davantage l’attention des enfants sur le nouveau vocabulaire. L’éducatrice peut faire le retour immédiatement après la lecture, lorsque les enfants sont encore assis autour d’elle. Elle utilise alors le matériel concret qu’elle a préparé ou les illustrations du conte ou de la comptine. Le retour peut aussi se faire plus tard et dans d’autres circonstances, par exemple lors des activités de prolongement. Les enfants ont alors l’occasion d’établir des liens entre les mots et les expressions du texte et les mêmes mots ou expressions rencontrés ailleurs dans d’autres situations. Le rappel du texte fait aussi partie de l’intégration. Il sensibilise les enfants à la structure des contes et des comptines, habileté sous-jacente à l’apprentissage de la lecture et de l’écriture dès l’entrée à l’école primaire (Isbell, 2002). Conséquemment, le rappel développe l’habileté des enfants à se rappeler un conte ou une comptine de façon structurée. En résumé donc, le rappel améliore l’expression orale des enfants et leur compréhension des textes (Whaley, 2002).

L’intégration comprend les activités de prolongement, lesquelles suivent la lecture du conte ou de la comptine et s’y rapportent. Lors de cette étape, il est important de faire participer les enfants, de les amener à voir le lien entre le conte et la comptine et l’activité de prolongement. Parce que la séquence didactique vise le développement du langage des enfants, il est préférable de prévoir un volet d’expression orale à l’intérieur de ces activités. Par exemple, si l’activité est la réalisation d’un dessin ou d’un collage, les enfants peuvent présenter leur réalisation aux autres et en fournir quelques explications. Par ailleurs, parce qu’elles favorisent l’expression sous différentes formes, les activités de prolongement préparent doucement le terrain pour l’apprentissage de l’écriture dès les premières années scolaires (Duguay, 1999b).

Le transfert des connaissances langagières est la dernière étape de l’intégration. Le transfert se fait lorsque l’enfant a réellement compris le sens d’un mot ou d’une expression et qu’il peut l’utiliser de façon décontextualisée, c’est-à-dire l’utiliser dans un contexte autre que celui qui le lui a d’abord fait connaître.

Ce modèle d’une séquence didactique s’inspire librement de celui proposé pour le début des apprentissages de la lecture-écriture de fiction par Duguay (1999b). Selon ce modèle, il importe que les étapes de la séquence didactique soient présentées aux enfants dans un ordre prédéterminé et dans un laps de temps raisonnable.

3. Formation des éducatrices et préparation pour les mises à l’essai

Les trois éducatrices qui ont participé à la recherche détiennent un certificat de formation en Éducation de la petite enfance du Collège communautaire du Nouveau-Brunswick. Elles ont toutes au-delà de sept ans d’expérience auprès des enfants de trois et quatre ans.

Les mises à l’essai ont nécessité, de la part des éducatrices, une préparation à long terme et à court terme. Comme préparation à long terme, elles ont suivi le cours universitaire « Développement du langage et prélecture ». Comme préparation à court terme, elles ont assisté à trois rencontres d’une journée et elles ont participé à des conférences téléphoniques. La première rencontre s’est tenue avant les mises à l’essai. Elle avait pour but de former les éducatrices à l’ensemble des étapes prévues à la séquence didactique. Les autres rencontres assuraient le partage d’information et des formations pratiques ponctuelles avec la chercheuse principale, secondée par la coordonnatrice des services à la Petite enfance de la région où s’effectuait la recherche. Cette dernière se chargeait du suivi de la recherche sur le terrain.

4. Mises à l’essai

Chacune des trois mises à l’essai de la séquence didactique a été réalisée du début à la fin, normalement durant une même semaine. Cependant, il est arrivé que d’autres activités de la prématernelle aient entraîné un étalement des activités sur une plus longue période. À ce moment-là, la séquence a été échelonnée sur six à huit jours, selon le cas. Chacune des mises à l’essai comprenait les trois temps de la séquence didactique de même que leurs étapes sous-jacentes.

5. Outils de collecte des données

Trois principaux outils ont servi à la collecte des données : des journaux de bord, les comptes rendus des rencontres et les comptes rendus des conférences téléphoniques.

5.1 Journaux de bord

Dès le début de la recherche, chaque éducatrice a reçu un cahier devant servir de « journal de bord ». Dans son journal, elle notait la date et l’heure des séances langagières ainsi que le nombre d’enfants qui y avaient participé. Elle décrivait aussi les activités présentées dans une même séance langagière, leur ordre de déroulement (la séquence didactique), de même que l’évaluation qu’elle faisait de toutes les activités une fois la séance terminée. Les journaux de bord ont été remis à la chercheuse principale à la fin de la recherche.

5.2 Comptes rendus des rencontres

Les éducatrices ont rencontré la chercheuse principale à trois reprises. La première rencontre a servi à préparer la recherche (voir la section « Formation… »), tandis que les deux autres ont servi à la mise en commun des notes et des observations inscrites dans les journaux de bord. Les mises en commun ont facilité la discussion et le partage des expériences qu’avaient vécues les éducatrices avec les enfants. Deux personnes étaient responsables des comptes rendus de ces rencontres : la chercheuse principale et la coordonnatrice régionale des services à la Petite enfance.

5.3 Comptes rendus des conférences téléphoniques

Nous avons eu recours à trois conférences téléphoniques pendant la recherche. Ces conférences étaient intercalées entre les rencontres. En principe, elles avaient le même but que les rencontres. Cependant, elles assuraient un encadrement plus serré en offrant aux éducatrices un soutien entre les rencontres. Les comptes rendus des conférences téléphoniques étaient assurés de la même façon que ceux des rencontres. En résumé, les rencontres et les conférences téléphoniques ont eu lieu pour assurer le partage d’information entre toutes les personnes impliquées et pour adapter, au besoin, le contenu ou le déroulement de la séquence didactique.

C’est à partir des observations contenues dans les journaux de bord, de même que dans les comptes rendus des rencontres et des conférences téléphoniques, que nous avons pu vérifier la pertinence des étapes d’une séquence didactique en développement langagier des enfants âgés de quatre ans et les organiser de façon systématique. Ces observations seront mises en évidence dans l’analyse des résultats.

Analyse des résultats

La séquence didactique que nous avons mise à l’essai comporte trois temps : la planification, la réalisation et l’intégration. L’analyse des résultats sera présentée selon ces trois temps. Les observations qui apparaissent dans la discussion des étapes de chacun des trois temps sont tirées des journaux de bord des éducatrices et des comptes rendus des rencontres et des conférences téléphoniques. Rappelons que le conte ou la comptine constitue toujours le point central de la séquence didactique.

1. Planification

La planification de la séquence didactique comprenait les deux étapes suivantes : les objectifs langagiers et la mise en situation.

1.1 Objectifs langagiers

Dans notre recherche, les éducatrices devaient, avant toute chose, fixer les objectifs langagiers visés par la séquence didactique. Elles le faisaient en lisant, au moins deux fois, la comptine ou le conte choisi. Une première lecture leur servait à en saisir la thématique. Fortes de cette connaissance, elles en faisaient une deuxième lecture pour préciser les objectifs langagiers à atteindre (voir tableau 1).

Tableau 1

Liste partielle des mots ciblés (contes et comptines)

Liste partielle des mots ciblés (contes et comptines)

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Souvent le langage des contes et des comptines était plus riche et plus complexe que celui des groupes d’enfants qui participaient à la recherche. Mais, compte tenu de l’intérêt suscité par les ouvrages utilisés (voir tableau 2), les enfants n’ont pas semblé éprouver de grandes difficultés de compréhension ni de rétention du vocabulaire.

Si les mots et les expressions à expliquer aux enfants sont choisis à l’étape de la planification, rappelons que c’est en contexte qu’il est préférable de les leur présenter. Conséquemment, avant la lecture, les éducatrices ont prévu des moyens pour expliquer le vocabulaire aux enfants, soit par des illustrations ou du matériel concret.

Tableau 2

Titres des contes utilisés dans la recherche

Titres des contes utilisés dans la recherche

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1.2 Mise en situation

La mise en situation comprenait l’étape de l’activation des connaissances antérieures et celle de la formulation d’une intention d’écoute.

1.2.1 Activation des connaissances antérieures

La majorité des enfants ont aimé partager leurs connaissances avec les autres, principalement lorsqu’il s’agissait d’animaux, d’objets familiers et de personnages fantaisistes. Les éducatrices posaient des questions pertinentes afin que les connaissances antérieures des enfants émergent de leur mémoire à long terme et les aide à faire des prédictions au sujet de la thématique du conte ou de la comptine, à mieux saisir les sentiments des personnages et à établir des liens plus étroits entre ces connaissances et le texte qui leur était présenté. Selon les éducatrices, il est important de déterminer les concepts essentiels à la compréhension du texte dès l’étape de la planification, de même que les mots et les expressions qui s’y rattachent, afin de poser des questions aptes à activer les connaissances antérieures pertinentes des enfants.

1.2.2 Formulation d’une intention d’écoute

Pendant les mises à l’essai, les éducatrices ont invité les enfants à se formuler une intention d’écoute, c’est-à-dire une raison qui les amènerait à vouloir écouter le texte qu’elles leur proposaient. Comme nous l’avons mentionné dans notre cadre conceptuel, la formulation d’une intention d’écoute doit répondre à certains principes de base. Entre autres, l’intention doit toujours être formulée avant la lecture et elle ne doit pas être trop limitée. Le conte « Zébulus, le petit zèbre triste » (Michaud, 2001) utilisé dans la présente recherche, peut illustrer ce point. Si l’éducatrice avait posé une question telle que « Quelle sorte d’animal est Zébulus ? », l’intention d’écoute aurait été trop limitée. Les enfants auraient trouvé la réponse dès les premières pages du conte et auraient ainsi risqué de s’en désintéresser rapidement. Les éducatrices ont préféré poser une question plus large, par exemple : « Zébulus n’était pas zébré comme les autres zèbres de son entourage. Quel rôle pouvait-il jouer ? ». Pour répondre, les enfants ont dû saisir le conte dans sa globalité.

2. Réalisation

La réalisation comprenait deux étapes : l’explication des mots et des expressions et la lecture interactive du conte ou de la comptine.

2.1 Explication des mots et des expressions

Selon les éducatrices, s’il est vrai que les explications du vocabulaire préalable peuvent se faire durant la mise en situation, donc avant la lecture interactive, il demeure préférable que le vocabulaire visé par les objectifs langagiers soit expliqué pendant et après la lecture du conte ou de la comptine. Toujours selon elles, le conte et la comptine offrent des références qui aident les enfants à mieux saisir la signification du nouveau vocabulaire et à le retenir.

Lors des mises à l’essai, les éducatrices ont expliqué les mots et les expressions dans l’ordre où ils se sont présentés lors de la lecture interactive des textes, tant le vocabulaire cible que le vocabulaire préalable. Elles agissaient comme médiatrices en établissant des liens concrets entre le nouveau vocabulaire et les expériences antérieures des enfants ou encore entre le vocabulaire et sa représentation graphique. Selon elles, établir des liens et utiliser du matériel concret assurent davantage la compréhension chez les enfants et leur rétention des nouveaux mots et des nouvelles expressions.

2.2 Lecture interactive du conte ou de la comptine

Pendant les mises à l’essai, les interventions des enfants ont été spontanément formulées, tandis que la majorité de celles de l’éducatrice avaient déjà été prévues lors de la planification. Pour ne pas perdre le fil de l’histoire, les éducatrices ont posé des questions à des moments stratégiques pour motiver les enfants à vouloir en connaître davantage et à enrichir leurs connaissances, qui sont souvent plus ou moins complètes par rapport à une thématique en particulier. Le conte ou la comptine est venu ajouter de nouvelles connaissances aux connaissances antérieures des enfants ou encore les a modifiées ou les a rectifiées. Par exemple, les enfants ont appris que ce sont les abeilles qui nous fournissent le miel et qu’un hélicoptère vole dans les airs comme le fait l’avion. Progressivement, les éducatrices ont amené les enfants à parler de leurs nouvelles connaissances et à en être fiers. Selon les éducatrices, une bonne connaissance des champs d’intérêt des enfants et de leur milieu de vie est essentielle à cette étape. Parce que la lecture interactive du conte ou de la comptine invite les enfants à participer et à formuler d’autres hypothèses à des moments stratégiques déterminés à l’avance, elle suscite et maintient l’intérêt des jeunes enfants.

Selon les journaux de bord, pendant la lecture interactive, le dialogue didactique entre les éducatrices et les enfants s’est surtout inspiré des objectifs langagiers déterminés lors de la planification. Ce genre de dialogue avait pour but de favoriser la compréhension et la rétention des mots et des expressions. Ceci n’exclut pas que les éducatrices aient pu également profiter de la lecture interactive pour introduire d’autres apprentissages. Par exemple, en sciences naturelles, les enfants ont été émerveillés d’apprendre que « les merles construisent leur nid avec leur bec ».

À l’étape de la lecture interactive, les préoccupations majeures des éducatrices se sont résumées à vouloir susciter et maintenir l’intérêt des enfants et en même temps, à assurer leur compréhension du conte ou de la comptine, des mots et des expressions. Quant au dialogue didactique, une gestion fondée sur les étapes d’une séquence didactique systématisée assurait des échanges dynamiques et réciproques entre les enfants et les éducatrices relativement au contenu des contes et des comptines et au vocabulaire qui s’y rattachait. Ce dialogue a surtout servi à développer progressivement des savoirs et des savoir-faire langagiers chez les jeunes enfants.

3. Intégration

Les cinq étapes à prévoir durant l’intégration étaient les suivantes : le retour sur les intentions d’écoute, le retour sur les objectifs langagiers, le rappel du conte ou de la comptine, les activités de prolongement et le transfert des connaissances langagières.

3.1 Retour sur les intentions d’écoute

Lors des mises à l’essai, les éducatrices ont invité les enfants à formuler des intentions d’écoute (hypothèses) avant la lecture du conte ou de la comptine. Aussitôt la lecture terminée, elles sont revenues sur ces hypothèses tout en aidant les enfants à approfondir leurs connaissances thématiques et à utiliser leurs nouvelles connaissances langagières pour s’exprimer par rapport aux intentions d’écoute qu’ils avaient formulées. Elles l’ont fait surtout par des questions ou des commentaires qui amenaient les enfants à comparer leurs hypothèses avec les événements du conte ou de la comptine. Par exemple, les questions d’une éducatrice ont aidé les enfants à établir des liens entre le petit garçon qui grandissait lorsqu’on se mettait en colère contre lui et qui rapetissait lorsqu’on lui témoignait de l’affection (Munsch et Martchenko, 1984). Les questions pouvaient aussi être de nature esthétique pour amener les enfants à réagir au texte. Par exemple, de tous les jouets énumérés dans la comptine « Un hélicoptère », les enfants ont préféré le voilier (« Mon oncle en a un ») et les vaisseaux spatiaux (« J’en ai un pareil comme ça à la maison »). Finalement, l’éducatrice demandait aux enfants de réfléchir sur ce que le conte (ou la comptine) avait pu leur apporter comme nouvelles connaissances (« Les girafes vivent dans des jungles; Il n’y a pas de vrais girafes ici. Seulement des jouets »).

3.2 Retour sur les objectifs langagiers

Les éducatrices ont essayé de profiter de toutes les occasions pour exploiter et faire répéter le nouveau vocabulaire dans des contextes appropriés et variés. Par exemple, les enfants ont habillé le bonhomme de neige d’une comptine à leur façon. Ce faisant, ils discutaient des vêtements appropriés à l’hiver et de ceux qui ne l’étaient pas. Selon les éducatrices, au moment du retour sur les objectifs langagiers l’emploi de documentaires s’est révélé une ressource précieuse. Par exemple, à la suite de la première mise à l’essai, les journaux de bord ont témoigné de l’intérêt des enfants pour les documentaires sur les girafes, les serpents et les moyens de transport.

3.3 Rappel du conte ou de la comptine

Au début de la recherche, le rappel du conte ou de la comptine s’est fait collectivement, avec tout le groupe d’enfants. Ces derniers pouvaient alors s’entraider lorsque leur mémoire faisait défaut. Petit à petit, les éducatrices ont demandé à des enfants en particulier de faire le rappel du texte. On se souviendra que le rappel peut aussi revêtir une forme ludique. Conséquemment, les enfants pouvaient mimer des passages ou agir comme « mini-prof » en même temps qu’ils rappelaient le texte au profit des autres enfants.

3.4 Les activités de prolongement

Selon les éducatrices, les enfants ont beaucoup aimé faire les activités de prolongement. Bien qu’au début, ils aient eu besoin de beaucoup d’étayage pour présenter leurs productions au groupe, ce besoin diminuait au fur et à mesure qu’ils prenaient de l’expérience. N’empêche que les éducatrices ont considéré cette étape la plus propice à la recherche dans des documentaires et à l’utilisation décontextualisée du nouveau vocabulaire que les enfants avaient acquis à partir des contes et des comptines.

3.5 Transfert des connaissances langagières

Dans un premier temps, les éducatrices ont servi de modèle pour aider les enfants à développer des stratégies plus aptes à effectuer des transferts langagiers. Elles attiraient l’attention des enfants sur des illustrations trouvées ailleurs dans des documentaires, et qui rappelaient les mots et les expressions à l’étude (le costume noir et jaune de l’abeille, un froid de canard). De cette façon, l’éducatrice « mimait » pour les enfants une stratégie de transfert des connaissances langagières qu’ils pouvaient utiliser à leur tour (voir tableau 3).

Finalement, rappelons que les enfants de notre population cible étant encore jeunes, les éducatrices ont exercé une certaine souplesse pour tenir compte de leur spontanéité. Elles ont toutefois gardé à l’esprit le principe selon lequel une séquence didactique sert aussi à répondre au besoin des enfants d’établir de l’ordre dans leurs nouvelles acquisitions, qu’elles soient langagières ou autres. Conséquemment, il fallait éviter d’interrompre les activités à des moments stratégiques, par exemple, lorsque les enfants tentaient d’établir des liens entre le vocabulaire d’un conte et celui d’une activité de prolongement.

Tableau 3

Liste partielle des mots repris par les enfants de façon décontextualisée

Liste partielle des mots repris par les enfants de façon décontextualisée

-> Voir la liste des tableaux

Conclusion

La présente recherche offre un éclairage sur les étapes susceptibles de constituer une séquence didactique pour le développement langagier des enfants en prématernelle, lorsque celle-ci sert à exploiter les contes et les comptines. Elle précise les moments les plus propices pour réaliser les différentes activités langagières, que ce soit pendant la planification, la réalisation ou l’intégration.

Sur le plan de la planification, les objectifs langagiers visés par la séquence didactique concernaient la compréhension, la rétention et la réutilisation des mots nouveaux. La mise en situation, qui fait aussi partie de la planification, comprenait l’activation des connaissances antérieures des enfants et la formulation, par les enfants, d’une intention d’écoute. Le temps de la réalisation a surtout servi à l’explication des mots et des expressions en contexte et à la lecture interactive du conte ou de la comptine. Enfin, l’intégration comprenait cinq étapes : le retour sur les intentions d’écoute, le retour sur les objectifs langagiers, le rappel du conte ou de la comptine, les activités de prolongement et le transfert des connaissances langagières.

À l’intérieur de ces trois temps, les interventions des éducatrices assuraient la gestion appropriée des différentes activités prévues par la séquence didactique dans le but d’amener les enfants à s’expliquer ou à s’exprimer oralement de façon claire et à utiliser un vocabulaire riche, précis et imagé pour se faire bien comprendre des autres. L’attitude des éducatrices en ce qui a trait aux mots nouveaux et aux expressions nouvelles influençait grandement celle des jeunes enfants. Si l’éducatrice montre de l’enthousiasme par rapport à l’apprentissage de la langue, de l’intérêt pour les contes et les comptines, et accorde de l’importance aux propos des enfants, à leur tour ceux-ci deviennent motivés à apprendre des mots nouveaux et des expressions nouvelles et à les utiliser dans leurs échanges quotidiens.

Les éducatrices devaient rester à l’écoute des enfants pour juger de la progression et de la durée des différentes étapes prévues par les trois temps de la séquence didactique. Ce faisant, elles veillaient à accorder une place à la créativité des enfants, c’est-à-dire à la divergence et à la convergence de leurs réponses et de leurs productions langagières.

Des données factuelles nous ont permis de vérifier la pertinence de la progression systématique des étapes d’une séquence didactique pour les jeunes enfants en situation de groupe. De plus, nous dégageons quatre principes propres aux interventions des éducatrices en prématernelle :

  1. Il faut choisir judicieusement les contes et les comptines en fonction des intérêts des enfants, du degré de lisibilité des textes et de la qualité du vocabulaire (richesse et précision);

  2. Il faut que l’éducatrice sache communiquer aux enfants son enthousiasme à l’égard de la langue et des textes;

  3. Il faut que l’éducatrice sache rester à l’écoute des enfants en tout temps;

  4. Il faut que l’éducatrice accorde une place à la créativité des enfants.

En outre, la présente recherche propose des pistes de recherche intéressantes. Par exemple, il serait profitable de mesurer les effets réels de la séquence didactique sur le développement langagier des jeunes enfants. Il serait aussi avantageux de savoir si la séquence didactique peut s’appliquer lorsque les éducatrices utilisent d’autres formes de littérature enfantine, par exemple, des histoires modernes ou des documentaires.