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Les auteurs de cet ouvrage sont psychologues, psychanalystes, membres de la Société canadienne de psychanalyse, de l’Association psychanalytique internationale et respectivement professeurs à l’École de criminologie de l’Université de Montréal et en psychologie à l’Université du Québec à Montréal. Dans cet ouvrage, ils examinent des hypothèses explicatives qui contribuent à améliorer la compréhension du lecteur quant aux éléments qui sous-tendent la délinquance sur le plan psychique. Pour ce faire, ils adoptent une position qu’ils qualifient de transnosographique, en ce sens qu’ils étudient les composantes psychodynamiques de la personnalité, composantes qui permettent de saisir le fonctionnement psychique du délinquant, et ce, indépendamment d’une catégorisation diagnostique. À partir des plus récentes contributions théoriques européennes et nord-américaines, les auteurs font le point sur la question : ils les situent sur le plan historique et proposent des illustrations cliniques qui ajoutent à la compréhension du lecteur. En prélude à l’objet principal du livre, ils prennent soin de définir clairement ce qu’ils entendent par délinquance, de souligner le caractère fondamental du cadre social dans lequel elle se pose et de relever le rôle joué par la construction sociale dans la définition et l’identification.

Le livre est divisé en deux parties. La première, dans laquelle on situe, notamment, la contribution de la psychocriminologie psychanalytique par rapport à la psychologie, regroupe les contributions des théories psychanalytiques et explicatives du fonctionnement psychique du délinquant. Elle présente l’intérêt de bien situer le cadre conceptuel de l’ouvrage et fournit un éclairage précis sur différents concepts fondamentaux et notions propres à la psychanalyse, ce qui s’avère fort aidant pour le lecteur moins au fait de cette méthode. Ces différentes contributions sont contenues dans des chapitres qui distinguent les travaux d’auteurs européens et nord-américains, le tout en ordre chronologique. C’est dans cette partie que les auteurs situent leur propre position sur la psychodynamique.

La seconde partie de ce livre présente des applications cliniques criminologiques très pertinentes et très actuelles qui ont trait aux différents concepts psychanalytiques présentés antérieurement. L’exercice s’avère d’une aide précieuse pour le lecteur, lui permettant ainsi d’intégrer dans un cadre clinique les éléments théoriques qui furent exposés au préalable. Les efforts consacrés à dégager des portraits clairs des situations sélectionnées méritent d’être soulignés.

Comme le rapportent les auteurs, aucun ouvrage en français portant spécifiquement sur la psychocriminologie psychanalytique n’a été publié depuis le livre d’Hesnard, en 1963. Pourtant, plusieurs travaux récents s’inscrivant dans cette perspective ont contribué à l’avancement des connaissances et à la bonification de la compréhension du fonctionnement psychique des personnes qui commettent des crimes. Ainsi, en offrant au lecteur une présentation accessible des différentes contributions théoriques psychanalytiques, ce livre répond à un réel besoin. La structure de présentation choisie, alliée à la qualité, à la profondeur et à la clarté des propos, contribue à faciliter la compréhension du lecteur par rapport au cadre conceptuel psychanalytique.

Parmi les nombreuses contributions des auteurs européens et nord-américains passées en revue (Freud, De Greeff, Debuyst, Kernberg, Balier, Eissler, Kernberg, Le Blanc et Fréchette, Mailloux), notons les travaux des professeurs Redl et Wineman (au milieu des années 1950), qui ont inspiré de nombreux centres de rééducation et demeurent pertinents encore aujourd’hui. D’ailleurs, ainsi que le rapportent Casoni et Brunet, l’approche privilégiée au Québec à l’égard des jeunes délinquants (la rééducation plutôt que de strictes mesures d’incarcération) n’est pas étrangère au travail effectué par Redl et Wineman auprès des enfants délinquants. Mentionnons, entre autres, leurs observations sur la haine qui anime ces jeunes et son effet sur les comportements qu’ils adoptent et sur la question du surmoi groupal. Par ailleurs, leur nomenclature des déficiences du moi et de ses modes de défense présente encore aujourd’hui un intérêt certain pour les travailleurs sociaux engagés auprès d’adolescents.

Enfin, les illustrations cliniques telles qu’elles sont présentées à la fin du livre permettent une fois de plus au lecteur d’améliorer sa compréhension des concepts psychanalytiques. La psychocriminologie inspirée de la psychanalyse permet ici de saisir ce qui se passe à l’intérieur d’un individu qui commet des actes criminels. Somme toute, ce livre pourra s’avérer d’une grande utilité pour les travailleurs sociaux chargés de jeunes ou d’adultes ayant des comportements délinquants.