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Introduction

La culture pomicole, au Québec comme ailleurs en Amérique du Nord, utilise beaucoup de pesticides en raison de la présence de plus d’une vingtaine d’espèces d’acariens et insectes ravageurs dans les vergers durant les mois d’avril à septembre (Chouinard et al. 2001; Vincent et Bostanian 1988). Les problèmes liés à l’emploi intensif ou non raisonné de pesticides sont maintenant bien connus (Croft 1990; Whalon et Croft 1984) et le développement d’alternatives à l’emploi de ces produits en vergers de pommiers ouvre la porte à différentes stratégies de lutte intégrée contre les organismes nuisibles dans une perspective d’agriculture durable (Agnello et al. 2003; Smeesters et al. 2001; Suckling et al. 1999).

Le tétranyque rouge du pommier, Panonychus ulmi (Koch) [Acarina : Tetranychidae] est un ravageur devenu prépondérant avec l’emploi de pesticides de synthèse à large spectre d’action (Lord 1956; Paradis 1983). C’est un ravageur majeur dans les vergers de pommiers au Québec et il peut provoquer des dégâts pouvant aller d'une simple moucheture du feuillage jusqu’à la chute prématurée des feuilles et des fruits (Chouinard et al. 2001; Parent et Pilon 1978; Vincent et Bostanian 1988). Le développement de résistance du tétranyque rouge envers certains acaricides (Dennehy et al. 1988; Welty et al. 1987) a incité le développement d’alternatives à la lutte chimique, telles la lutte culturale (Hill et al. 1990), le dépistage et l’emploi d’huile minérale (Chouinard et al. 2001), l’introduction d’acariens prédateurs phytoséiides (Bostanian et Coulombe 1986; Croft et Macrae 1992) et enfin la conservation et la création d’aménagements favorisant les ennemis naturels (Blommers 1994; Smith et al. 1989). Cependant, les producteurs du Québec appliquent encore jusqu’à trois traitements acaricides par saison, représentant ainsi de 5 à 54 % du coût total des pesticides pour l’été (Bellerose et Chouinard 2002).

L’observation en 1991 d’un hémiptère prédateur dans quelques vergers de pommiers commerciaux, la punaise translucide Hyaliodes vitripennis Say [Hemiptera : Miridae], a apporté de nouvelles opportunités de lutte au tétranyque rouge (Brodeur et al. 1999). Hyaliodes vitripennis est un prédateur indigène du nord-est de l’Amérique du Nord (Arnoldi et al. 1992; Braimah et al. 1982; Horsburgh 1969) et est présent de la mi-juin à la fin du mois d’août au Québec (Arnoldi et al. 1992; Braimah et al. 1982). Comme la plupart des prédateurs (Lord 1949), H. vitripennis a cessé d'être observé dans les vergers avec l’utilisation des insecticides de synthèse à large spectre d’action mais il est maintenant présent dans plusieurs vergers du Québec (Brodeur et al. 1999).

Hyaliodes vitripennis est une punaise miride exclusivement prédatrice, particulièrement vorace envers les acariens phytophages (P. ulmi et Tetranychus urticae Koch [Acarina : Tetranychidae]) dans les vergers de pommiers et ayant une préférence pour les tétranyques rouges (Arnoldi et al. 1992; Horsburgh 1969). Elle consomme également des pucerons, des cicadelles, des larves de tordeuses et de mineuses (Arnoldi et al. 1992; Horsburgh 1969). Brodeur et al. (1999) ont démontré l’efficacité de H. vitripennis à exercer une répression significative sur les populations estivales de P. ulmi.

Dans un programme de lutte biologique ou de lutte intégrée, il est essentiel de pouvoir compter sur des études ayant permis de déterminer en conditions naturelles les potentialités d’un ennemi naturel ainsi que sur la meilleure stratégie de lâcher à adopter pour réprimer efficacement les proies visées (Ehler 1990). Dans l’optique de pouvoir réintroduire la punaise translucide dans les vergers dépourvus de ce prédateur et afin qu’il exerce une répression naturelle des populations de P. ulmi, il nous est apparu important de vérifier 1) l’établissement et 2) la capacité de dispersion de H. vitripennis dans une pommeraie suite à des introductions successives.

Matériel et méthodes

Site d’étude et d’introduction

L’étude s’est déroulée en 2000 et 2001 dans un verger commercial de Rougemont en Montérégie, Québec, Canada (45°26’00’’O; 73°03’00’’N). Ce verger n’avait pas reçu de traitements phytosanitaires nocifs pour H. vitripennis (Bostanian et al. 2000, 2001) au moins 4 ans avant son introduction. La présence de H. vitripennis n’avait pas été notée suite à des observations visuelles effectuées chaque semaine en saison au cours des 5 années précédant le lâcher. Les larves de H. vitripennis utilisées pour les introductions provenaient d’un verger source de la même région, situé à 2 km du verger expérimental et n’ayant pas reçu de traitements toxiques pour ce prédateur au cours des 30 j précédant leur capture. Les individus (immatures de 2e ou 3e stade) étaient récoltés manuellement durant la matinée et placés individuellement dans un récipient de 5 mL (SoloCup®) avec une feuille de pommier puis conservés dans une glacière (Brodeur et al. 1999). Les immatures étaient introduits l’après-midi dans le verger expérimental, en brochant chaque feuille portant le prédateur au dos d’une feuille choisie au hasard dans chacun des arbres devant recevoir les introductions (Brodeur et al. 1999).

Le verger sélectionné, situé en terrain plat, était composé de pommiers de taille standard (5 m) de variétés diverses, plantés tous les 4,5 m en rangs espacés de 9 m. Une zone centrale de 0,2 ha, contenant trois rangées de 16 arbres chacune (de hauteurs et formes similaires) a été définie comme zone d’introduction (Fig. 1). Les introductions consistaient à lâcher 200 H. vitripennis par arbre sur quatre arbres choisis au hasard dans la zone d'introduction, pour un total de 800 H. vitripennis par année, en 2000 et 2001. De plus, quatre arbres témoins ont également été choisis au hasard dans la zone d’introduction. Afin d’étendre la surface couverte par les introductions, les arbres choisis pour les introductions de prédateurs étaient différents en 2000 et 2001; les mêmes arbres témoins ont été utilisés au cours des 2 années.

Figure 1

Plan de la parcelle expérimentale de 0,8 ha utilisée. La région délimitée au centre (0,2 ha) représente la zone d’introduction de H. vitripennis

Plan de la parcelle expérimentale de 0,8 ha utilisée. La région délimitée au centre (0,2 ha) représente la zone d’introduction de H. vitripennis

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Une zone de 0,8 ha contenant en son centre la zone d’introduction de 0,2 ha a été définie dans le verger, afin de mesurer la dispersion des prédateurs sur 24 arbres choisis de manière aléatoire en 2000 et de manière systématique en 2001. L’introduction des prédateurs a été réalisée le 20 juillet en 2000 et le 28 juin en 2001. L’écart important entre les dates d’introduction était la conséquence d’une saison plus hâtive en 2001. La période d’apparition des stades ciblés pour l'introduction dans le verger source a donc été plus précoce en 2001 qu’en 2000.

En juillet 2000 et 2001, le verger expérimental a reçu respectivement une application de phosalone (Zolone Flo®) et de tébufénozide (Confirm 240F®) aux doses recommandées afin de réprimer les lépidoptères ravageurs. Étant donné que ces insecticides ne sont pas toxiques envers H. vitripennis et P. ulmi (Bostanian et al. 2000, 2001), nous postulons que ces produits n’ont pas eu d’effets sur l’établissement et la dispersion des prédateurs.

Suivi des populations de H. vitripennis et P. ulmi

Deux méthodes d’échantillonnage ont été utilisées afin de suivre les populations de H. vitripennis et de P. ulmi. Les échantillonnages ont été effectués pendant 4 semaines en 2000 (24 h, 6, 13, 21 et 28 j après l’introduction) et 6 semaines en 2001 (7, 14, 21, 28 et 42 j après l’introduction). Un échantillonnage de départ (t0) a été effectué 4 h avant les introductions en 2000 et 12 h suivant les introductions en 2001, soit le lendemain matin. Basé sur les résultats de l’année précédente, ce délai était toutefois insuffisant pour provoquer un biais dans notre évaluation de départ. Les deux méthodes d’échantillonnage consistaient en :

  1. un échantillonnage visuel utilisé par Brodeur et al. (1999) et Asquith et Colburn (1971) mais légèrement modifié pour notre étude, permettant de fournir un estimé de l’abondance de H. vitripennis sur un arbre en tenant compte de sa présence à l’endos des feuilles. Cette méthode consiste à compter tous les individus de H. vitripennis observés sur la face inférieure des feuilles lors d’un examen de 5 min effectué en scrutant l’ensemble de la canopée à partir du dessous de l’arbre.

  2. un échantillonnage visuel des feuilles selon la méthode de présence/absence (Bostanian et al. 1992). Cette méthode consiste à observer la face inférieure et supérieure de feuilles avec une loupe (10X) pour noter la présence d’au moins une forme mobile de P. ulmi. À chaque date d’échantillonnage, les observations ont toujours été réalisées sur les mêmes huit premières feuilles de 20 bouquets à fruits et de 20 pousses végétatives choisies aléatoirement sur l’arbre. Le nombre de H. vitripennis a également été relevé sur ces feuilles échantillonnées.

L’échantillonnage visuel de 5 min a été effectué sur les pommiers traités et témoins (zone de 0,2 ha) ainsi que sur les 24 arbres de dispersion (zone de 0,8 ha). L’échantillonnage des feuilles à la loupe a été réalisé seulement sur les arbres traités et témoins.

Un échantillonnage des populations de H. vitripennis par la méthode d’observation visuelle de 5 min par arbre a également été réalisé le 19 juillet 2002 sur les mêmes 36 arbres (24 arbres de dispersion, arbres témoins et traités de 2000 et 2001) afin de vérifier l’établissement du prédateur suite aux 2 années d’introduction.

Analyses statistiques

Les quatre arbres traités ont été appariés aux quatre arbres témoins sur la base du nombre de feuilles infestées par P. ulmi avant l’introduction des prédateurs en 2000 et 2001 (Sokal et Rholf 1981). Afin de mettre en évidence l’établissement du prédateur, l’abondance de H. vitripennis estimée par la méthode d’échantillonnage de 5 min a été comparée entre les traitements (arbres traités et témoins) en 2000 et 2001 avec un test de t (Sokal et Rholf 1981). Des moyennes ont été calculées à chaque semaine et les analyses ont donc comparé, pour l’ensemble de chaque saison, l’abondance moyenne du prédateur sur les arbres traités et les arbres témoins. L’abondance de H. vitripennis sur les arbres traités a été comparée entre les années 2000 et 2001 par un test de t. Un test de t apparié a été utilisé dans le cas des arbres témoins, les mêmes arbres ayant été utilisés en 2000 et 2001 (Sokal et Rholf 1981). Enfin, le nombre moyen de H. vitripennis observé sur les pousses végétatives et les bouquets à fruits a également été comparé entre les traitements (arbres traités et témoins) à l’aide d’un test de t apparié pour une même date d’échantillonnage lors de la même année (Sokal et Rholf 1981). Les données respectaient les conditions de normalité (Shapiro-Wilk, P > 0,05) et d’homoscédasticité (Bartlett, P > 0,05) associées à ces tests.

Afin d’évaluer l’effet de l’introduction de H. vitripennis sur les populations de P. ulmi, nous avons comparé l’évolution du nombre moyen de feuilles infestées par P. ulmi provenant des arbres traités et témoins à l’aide d’un test de t apparié, dans une même année, pour une même date d’échantillonnage (Sokal et Rholf 1981). L’évolution du nombre moyen de feuilles infestées a été obtenue en calculant la différence entre le nombre moyen de feuilles infestées observé à un temps n (n correspondant aux différentes dates d’échantillonnage en 2000 et 2001) et au temps 0. Les données respectaient les conditions de normalité (Shapiro-Wilk, P > 0,05) et d’homoscédasticité (Bartlett, P > 0,05) associées à ce test.

Résultats

Établissement

Le dénombrement des larves et adultes de H. vitripennis (périodes de 5 min) pendant toute la saison a montré des différences significatives entre les traitements pour l’année 2000 (t = 3,81; d.l. = 6; P = 0,0089) et entre les témoins pour les années 2000 et 2001 (t = 6,6364; d.l. = 3; P = 0,0035) (Fig. 2). Un nombre total de 138 H. vitripennis a été observé sur les huit arbres traités et témoins de la zone d’introduction durant les 28 j suivant les lâchers en 2000, alors que 249 prédateurs ont été observés sur les huit arbres de la même zone et pendant la même période en 2001. Également, 20 prédateurs au stade larvaire ont été observés en début de saison 2002, sur 9 des 36 arbres échantillonnés.

Figure 2

Nombre moyen (± écart-type) de H. vitripennis observés durant 5 min / arbre sur les arbres traités et témoins durant 4 semaines d’échantillonnage en 2000 et 2001

Nombre moyen (± écart-type) de H. vitripennis observés durant 5 min / arbre sur les arbres traités et témoins durant 4 semaines d’échantillonnage en 2000 et 2001

Les barres surmontées d’astérisques indiquent une différence significative entre les paires selon un test de t * (P < 0,05) et un test de t apparié ** (P < 0,05).

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Les introductions de H. vitripennis ont permis en 2000 un accroissement significatif de leur population observée sur les bouquets à fruits et pousses végétatives un j après l’introduction (t = 5,9; d.l. = 3; P = 0,0048). De même, des différences significatives ont été observées 6, 13 et 28 j après l’introduction des prédateurs (6 j : t = 5,0; d.l. = 3; P = 0,0077; 13 j : t = 3,09; d.l. = 3; P = 0,027 et 28 j : t = 2,61; d.l. = 3; P = 0,039) (Fig. 3A). En 2001, aucune différence n’a été observée dans le nombre moyen de H. vitripennis dénombré à chaque date d’échantillonnage (P > 0,05) (Fig. 3B).

Figure 3

Nombre moyen (± écart-type) de H. vitripennis observés sur les pousses végétatives (n = 20 ) et bouquets à fruits (n = 20) en 2000 (A) et en 2001 (B)

Nombre moyen (± écart-type) de H. vitripennis observés sur les pousses végétatives (n = 20 ) et bouquets à fruits (n = 20) en 2000 (A) et en 2001 (B)

Les barres surmontées d’un astérisque indiquent une différence significative entre les paires selon un test de t apparié (P < 0,05).

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Suivi des populations de P. ulmi

En 2000, les populations de P. ulmi dans les arbres traités étaient inférieures à celles dans les arbres témoins à partir du 6e j après l’introduction des prédateurs (tests de t appariés, P < 0,05) (Fig. 4A). En 2001, les populations de P. ulmi suivaient les mêmes patrons de fluctuation sur les arbres traités et les arbres témoins sans différences significatives pour une même date d’échantillonnage (tests de t appariés, P < 0,05) (Fig. 4B).

Figure 4

Nombre moyen (± écart-type) de feuilles infestées (n = 320) par P. ulmi en 2000 (A) et en 2001 (B)

Nombre moyen (± écart-type) de feuilles infestées (n = 320) par P. ulmi en 2000 (A) et en 2001 (B)

Les barres surmontées d’un astérisque indiquent une différence significative entre les paires selon un test de t apparié (P < 0,05). Les pointillés représentent le seuil économique au-dessus duquel un traitement phytosanitaire contre T. urticae est requis (Bostanian et al. 1992).

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Dispersion

En 2000, la première évidence de dispersion de H. vitripennis a été observée le 13e j après l’introduction, coïncidant avec la première apparition des adultes dans le verger. À cette date, des individus ont été retrouvés jusqu’à 45 m des arbres où les prédateurs avaient été introduits. La dispersion s’est alors réalisée selon une direction nord-ouest à l’intérieur du verger (Fig. 5). Les 2 semaines suivantes, la direction de la dispersion des adultes était plus aléatoire (Fig. 5) mais ils étaient présents au 28e j dans une large portion du verger encadrant la zone d’introduction de 0,2 ha. Des individus ont été retrouvés jusqu’à 29 et 49,5 m des arbres d’introduction les 21e et 28e j respectivement. En 2001, les prédateurs étaient répandus dans le verger et aucune dispersion n’a pu être mise en évidence. Le nombre total de prédateurs ayant été observés sur les arbres de dispersion durant les 3 semaines d’échantillonnage en 2000 était de 23 comparativement à 197 en 2001.

Figure 5

Dispersion de H. vitripennis 13, 21 et 28 jours après l’introduction en 2000

Dispersion de H. vitripennis 13, 21 et 28 jours après l’introduction en 2000

Figure 5 (suite)

Dispersion de H. vitripennis 13, 21 et 28 jours après l’introduction en 2000

Figure 5 (suite)

Dispersion de H. vitripennis 13, 21 et 28 jours après l’introduction en 2000

La ligne pointillée relie les arbres dans lesquels H. vitripennis a été observé.

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Discussion

Les résultats démontrent que H. vitripennis s’est établi dans le verger expérimental après la première année d’introduction et qu’il s’est maintenu suite à la deuxième année d’introduction. L’augmentation de l’abondance de H. vitripennis sur les arbres témoins de 2000 à 2001 (Fig. 2) ainsi que le fait qu’en 2002 des individus ont été retrouvés sur des arbres en début de saison sans qu’il n’y ait eu d’autres lâchers de prédateurs sont des preuves de son établissement. Les individus introduits en 2000 ont pu se développer en adultes et compléter par la suite leur cycle : ponte à l'automne 2000, hibernation des oeufs, éclosion à l'été 2001 (Horsburgh 1969) et de même pour les individus introduits en 2001. L’absence de traitements insecticides nocifs aux larves en 2000 et 2001 est un élément important ayant favorisé la survie de H. vitripennis.

L’introduction de H. vitripennis a permis d’observer une baisse des populations de P. ulmi en 2000 sur les arbres traités. Ce résultat supporte ceux de Brodeur et al. (1999) qui ont également observé une baisse significative des populations de P. ulmi en présence du même prédateur dans des expériences en conditions naturelles et semi-naturelles. Comme H. vitripennis s’est établi dans le verger dès 2000 et que les densités du prédateur n’étaient pas différentes entre les arbres traités et témoins même une seule journée après l’introduction, les lâchers de 2001 n’ont pas eu d’effets visibles sur les populations de P. ulmi. L’ajout de 800 individus en 2001 n’a donc pas permis d’observer une baisse supplémentaire des populations d’acariens dans les arbres traités par rapport aux témoins comportant déjà des prédateurs. L’efficacité de prédation pourrait avoir atteint un plateau en raison de la migration des prédateurs dans la strate supérieure de l’arbre suite à une compétition intraspécifique induite par une densité trop élevée d’individus.

La dispersion de H. vitripennis s’est réalisée au stade adulte et des individus ont été retrouvés à environ 45 m du point d’introduction des larves la deuxième semaine après l’introduction en 2000. La distance parcourue indique que cette dispersion s'est principalement réalisée grâce au vol. Elle a toutefois pu être facilitée par des vents dominants soufflant dans la direction de la dispersion des prédateurs, cependant cette hypothèse ne peut être vérifiée faute de données météorologiques relatives aux vents dans ce verger.

Si la punaise translucide est capable de s’établir et de se disperser après des introductions successives en verger de pommiers, il est cependant nécessaire de la préserver après ces introductions. Des études récentes ont démontré qu’afin de conserver les H. vitripennis présents dans les vergers ainsi que d’autres prédateurs utiles, il est important d’éviter l’emploi d’insecticides toxiques pour H. vitripennis (Bostanian et al. 2000, 2001) ou ceux modifiant son comportement et qui ont pour conséquence d’augmenter sa prédation intra-guilde sur Amblyseius fallacis Garman [Acarina : Phytoseiidae] (Provost et al. 2003).

La punaise translucide est un ennemi naturel possédant des caractéristiques recherchées pour une utilisation dans des programmes de lutte intégrée et pouvant être réintroduite dans les vergers de pommiers qui en sont dépourvus. Une étude de Vanoosthuyse et al. (2002) permet d’envisager une amélioration de la technique actuelle d’introduction des H. vitripennis qui pourraient être introduits en groupes à au moins 60 cm des proies potentielles (P.ulmi). Néanmoins, cette méthode serait encore lourde du point de vue des manipulations et la mise au point d’un dispositif d’introduction adaptée au prédateur et à un coût abordable est toujours souhaitable.

De plus, le prédateur peut être maintenu en laboratoire à partir d’une diète artificielle mais une diapause hivernale des oeufs empêche l’élevage en continu (Firlej, non publié). La détermination de l’influence des températures d’élevage sur la levée de la diapause des oeufs est nécessaire pour permettre éventuellement l’élevage en masse de ce prédateur en vue de son utilisation comme agent de lutte intégrée contre les acariens phytophages.